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882Voici un texte tout d’une traite et, comme l’on dit, brut de fonderie. Il provient du site du Miami Herald, de Floride, d’un des journalistes du quotidien nommé Carlos Alberto Montaner (le 25 septembre 2013). Montaner a rencontré un ancien ambassadeur US de ses amis. Son interlocuteur a été très disert, mais à la condition de ne pas être identifié. (Montaner le désigne comme “un de ses vieux amis” et intervient de cette façon : «“May I identify you by name?” I asked. “No,” he answered. “It would create a huge problem for me. But you may transcribe our conversation.”»)
La question posée par Montaner est de savoir, à la lumière des relations désormais très tendues des USA avec le Brésil, pourquoi la NSA a agi comme elle l’a fait par rapport au Brésil, et à sa présidente Rousseff. (On sait désormais que l’activité de la NSA a fait du continent du Sud un bloc plus que jamais soudé dans sa résistance antiSystème, contre l’activisme américaniste et de la NSA [voir le 21 septembre 2013], et du très puissant Brésil jusqu’alors assez modéré vis-à-vis des USA, un pays brusquement passé à la tête de cette résistance, dans des termes extrêmement appuyés et d’une fermeté remarquable, y compris à la tribune de l’ONU, dans le chef de Dilma Rousseff [voir le 23 septembre 2013 et le 25 septembre 2013.])
La réponse est longue et détaillée. Elle est sans surprise selon notre point de vue dans le sens qu’elle exprime, mais elle est prodigieusement intéressante parce qu’elle affirme ce sens avec une détermination, une véhémence sans aucune retenue. Il y a l’imprégnation d’un esprit d’un sentiment d’antagonisme sans retour, contre le Brésil et, en général, contre le continent latino-américain en général. On peut soupçonner que cet ambassadeur US vient ou bien est d’un milieu proche des milieux cubains anticastristes qui tiennent le haut du pavé politique en Floride, où ils constituent un très fort groupe de pression de la droite républicaine ultra-dure et interventionniste, totalement engagé contre la tendance antiaméricaniste actuelle de l’Amérique latine. Ces milieux anticastristes ont largement pénétré la bureaucratie américaniste, comme il est de coutume pour tous les groupes de pression, et il ne faudrait pas être plus étonné que cela d’apprendre, simple hypothèse de notre part, que l’ambassadeur anonyme est d’origine hispanique et cubaine (comme sont certains diplomates de haut rang du département d’État, surtout orientés vers les affaires latino-américaines, dans l’état d’esprit qu’on imagine). (Au reste, et également sans surprise, le journaliste Carlos Alberto Montaner qui rapporte cet entretien est, comme on le constate, lui-même d’origine hispanique et, peut-être, d’origine cubaine et anticastriste de sentiment, – autre hypothèse pour meubler le dossier.)
On a donc nos précisions... L’action de la NSA au Brésil n’est pas prête de cesser ; le Brésil est d’ailleurs apprécié comme un pays “ennemi”, et donc traité comme tel, et ainsi de suite ; tous les autres pays du continent du Sud seront traités comme tels. Tous les poncifs de la propagande anti-latino-américaine y passe, presque comme une inversion parfaite : comme si toutes les tares du Système, et notamment du système washingtonien, étaient retournées et mises au débit de tous ces pays, de la Bolivie de Morales a Brésil de Rousseff, tous notoirement corrompus, subversifs, manipulateurs de la drogue évidemment antiaméricaniste, et de plus “manipulateurs manipulés” par les tentacules innombrables des agents de Castro & Castro infiltrés partout, fausses démocraties et véritables dictatures camouflées, et ainsi de suite. On comprend ainsi que l’activité automatisée, l’activité-Système de la NSA, complètement hors de contrôle, trouve partout des relais-sapiens pour la substantiver et lui donner une justification opérationnelle, et la faire durer, et même croître et multiplier. Il y a un côté “persiste et signe...”, complété éventuellement par un “et je vous emmerde” qui en dit long et laisse à penser sur l’attitude du Système dans cette affaire de la NSA. Il nous paraît assuré que l’on trouvera des tendances similaires, pour d’autres axes d’agression, dans le chef d’autres groupes de pression, radicalisant ainsi le soutien pour une NSA plus activiste que jamais, ce qui conduira à la multiplication des incidents, du fait de cette NSA extraordinairement inefficace et maladroite, et du fait de la division à l’intérieur du Système ... Alors qu’une partie de ce Système (les parlementaires de la Chambre, notamment) est devenue antiSystème dans ce cas, la fraction maximaliste (majoritaire) de la bureaucratie avec ses divers satellites dans les groupes de pression impliqués reste plus que jamais sur ses positions et même les maximalise. Ce n’est pas demain la veille que le Brésil obtiendra, comme le demande l’ancien président Lula, des excuses du président Obama au reste du monde (ROW) pour l’activité de la NSA. Au contraire, on continue, et sans la moindre restriction, et plus que jamais, – car il doit être bien entendu que c’est de l’avenir de la civilisation que nous parlons.
Place aux paroles significatives de notre ex-ambassadeur.
«“From Washington’s perspective, the Brazilian government is not exactly friendly. By definition and history, Brazil is a friendly country that sided with us during World War II and Korea, but its present government is not.” [...] “All you have to do is read the records of the São Paulo Forum and observe the conduct of the Brazilian government,” he said. “The friends of Luis Inácio Lula da Silva, of Dilma Rousseff and the Workers Party are the enemies of the United States: Chavist Venezuela, first with (Hugo) Chávez and now with (Nicolás) Maduro; Raúl Castro’s Cuba; Iran; Evo Morales’ Bolivia; Libya at the time of Gadhafi; Bashar Assad’s Syria.
»“In almost all conflicts, the Brazilian government agrees with the political lines of Russia and China, as opposed to the perspective of the U.S. State Department and the White House. Its more akin ideological family is that of the BRICS, with whom it tries to conciliate its foreign policy. [...] “The huge South American nation neither has nor manifests the slightest desire to defend the democratic principles that are systematically violated in Cuba. On the contrary, former president Lula da Silva often takes investors to the island to fortify the Castros’ dictatorship. The money invested by the Brazilians in the development of the super-port of Mariel, near Havana, is estimated to be $1 billion.”
»“Cuban influence in Brazil is covert but very intense. José Dirceu, Lula da Silva’s former chief of staff and his most influential minister, had been an agent of the Cuban intelligence services. In exile in Cuba, he had his face surgically changed. He returned to Brazil with a new identity (Carlos Henrique Gouveia de Mello, a Jewish merchant) and functioned in that capacity until democracy was restored. Hand in hand with Lula, he placed Brazil among the major collaborators with the Cuban dictatorship. He fell into disgrace because he was corrupt but never retreated one inch from his ideological preferences and his complicity with Havana.
»“Something similar is happening with Profesor Marco Aurelio Garcia, Dilma Rousseff’s current foreign policy adviser. He is a contumacious anti-Yankee, worse than Dirceu even, because he’s more intelligent and had better training. He will do everything he can to foil the United States.” “To Itamaraty — a foreign ministry renowned by the quality of its diplomats, generally multilingual and well educated — the Democratic Charter signed in Lima in 2001 is just a piece of paper without any importance. The government simply ignores the election swindles perpetrated in Venezuela or Nicaragua and is totally indifferent to any abuses against freedom of the press.
»“But that’s not all. There are two other issues about which the United States wants to be informed about everything that happens in Brazil, because, in one way or another, they affect the security of the United States: corruption and drugs.” “Brazil is a notoriously corrupt country and those ugly practices affect the laws of the United States in two ways: when Brazilians utilize the American financial system and when they compete unfairly with U.S. companies by resorting to bribery or illegal commissions.” “The issue of drugs is different. The production of Bolivian coca has multiplied fivefold since Evo Morales became president, and the outlet for that substance is Brazil. Almost all of it ends up in Europe, and our allies have asked us for information. That information sometimes is in the hands of Brazilian politicians.”
»My two final questions are inevitable. Will Washington support Brazil’s bid for permanent membership in the U.N. Security Council? “If you ask me, no,” he says. “We already have two permanent adversaries: Russia and China. We don’t need a third one.” Finally, will the United States continue to spy on Brazil?” “Of course,” he tells me. “It’s our responsibility to U.S. society.”»
Le journaliste Carlos Alberto Montaner termine par cette remarque finement observée, et à la gloire de l’empire plus que jamais assuré de sa puissance fantomatique et des contre-productions systématiques des attributs de cette puissance : «I think that Doña Dilma should change her e-mail addresses frequently.»
Mis en ligne le 27 septembre 2013 à 06H33