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835On a vu par ailleurs quelques mots sur la conférence the Guardian/RUSI tenue à Londres le 8 janvier, sur les questions nucléaires post-9/11. L'un des intervenants était le professeur Sir Joseph Rotblat, un physicien nucléaire, Prix Nobel de la paix 1995, Britannique d'origine polonaise. Outre ses appréciations sur la situation nucléaire actuelle, Rotblat a tenu çà mettre la question nucléaire dans son contexte originel et a donné quelques précisions sur la naissance de l'arme atomique/nucléaire. Rotblat est orfèvre d'expérience en la matière puisqu'il fut partie de l'équipe internationale du Manhattan Project qui, aux USA, fabriqua la première BA.
Ci-dessous, on trouve les extraits de son intervention qui concerne cette situation historique originelle de l'arme atomique nucléaire, avec cette précision capitale, que nous ne connaissions pas bien qu'elle ait été déjà rendue publique par Rotblat,; — mais, nous semble-t-il, fort peu diffusée : le 4 mars 1944, « ... General Leslie Groves, the overall boss of the Manhattan Project, said in a private conversation: “You realise, of course, that the main purpose of the project is to subdue the Russians.” » Rotblat rapporte encore qu'il fit une première fois cette révélation, dans les années 1980, dans un séminaire où George Bush-père, alors vice-président, parlait ; Rotblat fut violemment contredit par un conférencier qui n'était autre, le monde est petit, que Richard Perle ; Rotblat put aisément prouver ce qu'il avançait.
Cette précision est absolument capitale, quand on a à l'esprit la date où l'incident se déroule (4 mars 1944). Comme le remarque Rotblat, — « long before the bomb was made, and a time when the main burden of fighting the Germans was borne by our then allies, the Russian army. » L'interprétation de Rotblat est complètement justifié : ce n'est pas avant le 6 juin 1944 que les Américains jouèrent un rôle significatif dans la guerre contre l'Allemagne et leur attitude ne peut alors aucunement se justifier par quelque appréciation que ce soit d'une responsabilité stratégique fondamentale. A ce moment, la stratégie de la guerre contre l'Allemagne est principalement de la responsabilité des Soviétiques et des Britanniques.
On comprend les protestations de Perle : la révélation de Rotblat est gênante. Elle implique que les Américains, ou disons certains dans la bureaucratrie US, avaient d'ores et déjà comme but stratégique la “soumission” de l'URSS bien avant que les avatars des relations est-ouest aient mis en évidence l'état de confrontation et, du point de vue occidental, les “visées agressives” de l'URSS, — c'est-à-dire, bien avant que les événements disons “objectifs” justifiassent complètement l'hostilité des Américains à l'encontre des Soviétiques. Cela signifie encore que l'interprétation défensive conformiste américaine sur les origines de la guerre froide (réaction de défense du monde libre) a beaucoup de mal à être entérinée au regard de telles précisions.
Nous proposons quelques remarques et précisions :
• La précision de Rotblat renforce l'un des arguments “révisionnistes” de l'explication de la décision d'emploi de la bombe (utiliser la bombe pour impressionner les Russes et les engager à accepter un leadership US contraignant). Mais, bien entendu, elle n'annule pas les autres causes avancées pour l'utilisation de la Bombe, cette utilisant pouvant et devant être le produit de plusieurs causes.
• Cette même précision, par contre, selon la chronologie que nous indique Rotblat, montre qu'il existait des forces importantes aux États-Unis qui avaient décidé d'aller dans le sens de l'établissement d'une supériorité stratégique américaine sur le reste du monde, le principal obstacle étant alors (en mars 1944) l'URSS, l'Allemagne et le Japon étant d'ores et déjà sur la voie de la défaite. Groves était un personnage important et il représentait sans aucun doute des milieux militaires et industriels, soutenus par certaines forces politiques, notamment républicaines. (L'administration Roosevelt, elle, se trouvait à cette époque engagée dans une politique internationaliste et accordait toute sa confiance à l'URSS, évidemment de façon exagérée et imprudente. On voit par conséquent que Roosevelt était loin de contrôler toutes les forces nationales, y compris au sein de son administration.)
• Une précision qui n'est pas indifférente, donnée il y a quelques années, dans un documentaire télévisée, par un ancien officier de marine qui avait été l'aide de camp de Truman. Selon ce témoin, Truman avait pris la décision d'emploi de la Bombe également parce qu'il tenait comme inévitable dans le cas contraire une procédure d'impeachment du Congrès. S'il n'avait pas employé la Bombe, le Congrès aurait pu le mettre en accusation pour avoir gaspillé l'argent du trésor public ($1 milliard d'alors) à fabriquer une arme qui n'aurait finalement pas été utilisée. Cette thèse est également convaincante : l'énormité prise à Washington par les questions politiciennes internes explique qu'une telle décision, concernant le sort même de l'espèce, soit effectivement prise, en partie, pour éviter une procédure du Congrès.
(...)
I was involved in the earliest — one might say prehistoric — stage, and I have been able to see it developing. Some of you may have heard my tale before, but I see young people in the audience — and, for this story, young is anybody under 60 — and for their sake I will recall it briefly.
For the scientists in the UK who started the work on the atom bomb, the rationale was to deter Hitler from using his bomb against us, and thus winning the war.
I developed the concept of nuclear deterrence even before the start of the second world war, and I was probably the first to carry out research on the feasibility of the bomb, with James Chadwick in Liverpool in November 1939, two months after the start of the war.
It was not until much later that I realised the fallacy of the nuclear deterrence concept, but at that time I thought that only by possessing the bomb could we prevent a Nazi victory.
I did not contemplate, and never condoned, the actual use of the bomb. This was the basis for my work in the UK and later on the Manhattan Project in the US.
With this background, you can imagine my shock when General Leslie Groves, the overall boss of the Manhattan Project, said in a private conversation: ''You realise, of course, that the main purpose of the project is to subdue the Russians.''
The date is important — March 4 1944, long before the bomb was made, and a time when the main burden of fighting the Germans was borne by our then allies, the Russian army.
Years later, when I told this story at a conference in Geneva, at which George Bush senior - then a candidate for the presidency - was one of the speakers, Richard Perle, sitting on the platform, angrily denied it. Fortunately, I was able to prove its veracity.
In 1954, during the Oppenheimer hearings, General Groves made the following statement, and this is published: ''There was never, from about two weeks from the time I took charge of this project, any illusion on my part but that Russia was our enemy and that the project was conducted on that basis.''
Several versions are circulated in the literature of President Truman's decision to bomb Hiroshima and Nagasaki. They are probably all true, to a lesser or greater decree.
The saving of American lives was undoubtedly a strong consideration. But so was the need to demonstrate to the Russians the newly-acquired and overwhelming military might of the US.
James Byrnes, the then secretary of state, said: ''Our possessing and demonstrating the bomb would make Russia more manageable.
''From the start, it was the intention of the hawks that the United States should maintain the monopoly, or at least predominance, in nuclear weapons and, in line with this, prevent unfriendly nations from acquiring them.''
The aforementioned General Groves outlined this policy in October 1945, saying: ''If we were truly realistic instead of idealistic, as we appear to be, we would not permit any foreign power with which we are not firmly allied, and in which we do not have absolute confidence, to make or possess nuclear weapons.
''If such a country started to make atomic weapons, we would destroy its capacity to make them before it has progressed far enough to threaten us.''
It took nearly 60 years for these ravings of a bellicose general to become official US policy. In between, the combined endeavours of hawks and the military-industrial complex kept the US as the frontrunner in the nuclear arms race.
(...)
[Notre recommandation est que ce texte doit être lu avec la mention classique à l'esprit, — “Disclaimer: In accordance with 17 U.S.C. 107, this material is distributed without profit or payment to those who have expressed a prior interest in receiving this information for non-profit research and educational purposes only.”.]