Quelques mots de Lamy

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Quelques mots de Lamy


21 mai 2002 — On sait que les relations commerciales entre les USA et le reste du monde ne cessent de se tendre. La décision américaine d'affecter un crédit de près de $200 milliards à l'agriculture américaine a encore accru la tension. Cette situation a été particulièrement visible à la dernière réunion de l'OCDE, à la fin de la semaine dernière, lorsque cette Organisation a mis les USA en accusation pour leurs pratiques protectionnistes. L'événement a été accompagné de diverses discussions, auxquelles participaient les principales personnalités chargées des négociations internationales sur le commerce. Parmi elles, on trouvait le Commissaire européen Pascal Lamy et les négociateurs américains, le négociateur en chef pour le Commerce Zoellick et son adjoint Allgeier. Voici un extrait de l'article du Guardian signalé plus haut par un lien :

« But while welcoming the assurances from Mr Zoellick, fellow OECD members expressed scepticism over how the US could square its rhetoric with the reality of the concessions Mr Bush has made to powerful protectionist lobbies in order to gain fast-track authority to approve future trade treaties.

» Pascal Lamy, Europe's leading trade negotiator, said he believed Mr Zoellick and Mr Allgeier were in favour of trade reforms, but added: ''What remains to be seen is whether they can speak in the name of the United States.'' »

Cette déclaration de Pascal Lamy est particulièrement intéressante, en-dehors du cadre strict des négociations commerciales et de la question de l'attitude protectionniste des Américains. Il faut signaler également qu'il s'agit d'une appréciation publique d'un fait que Lamy pense depuis un certain temps à propos de l'administration GW Bush. La chose n'est pas dite à la légère, et si elle est dite publiquement c'est qu'elle ne déplaît pas trop à Zoellick notamment. (Il y a des liens réels d'estime entre Lamy et Zoellick, le premier a du prendre certaines précautions avant de faire une déclaration qui aurait risqué d'embarrasser le second ; s'il l'a faite, on peut faire l'hypothèse que c'est après avoir vérifié qu'effectivement elle n'embarrasse pas Zoellick.)

Voici ce qu'est l'administrration GW

Ce que nous dit Lamy, c'est la confirmation d'un fait qui apparaît de plus en plus évident : l'administration GW est totalement une expression des différents groupes de pression et d'intérêt qui peuvent faire entendre leur voix ou/et faire sentir leur pression vers et sur le gouvernement. Les mesures protectionnistes prises récemment, et qui bouleversent le commerce mondial, l'acier et l'agriculture, sont totalement la conséquence de l'action de ces groupes de pression et/ou de perspectives électorales (ce qui revient au même). De même, différents secteurs de la politique générale américaine, y compris au niveau des grandes initiatives de sécurité nationale, répondent à l'influence de groupes tels que les sociétés pétrolières, l'industrie d'armement, le lobby pro-israélien, le lobby anti-castriste (Cubains de Floride), etc. La situation est telle que certains lobbies ont installé des structures directement à l'intérieur de l'administration, notamment les lobbies anti-castristes. (Dans une dépêche Reuters du 12 mai, on trouve des précision intéressante sur ce groupe : « Cuban American Republicans hold some key second-level jobs in the Bush administration. The group includes Assistant Secretary of State Otto Reich and his deputy, Lino Gutierrez, Ambassador to the Organization of American States Roger Noriega, Rogelio Pardo-Maurer at the Pentagon and Col. Emilio Gonzalez at the National Security Council in the White House. »)

Tout cela revient à dire qu'il est illusoire de parler d'une politique américaine d'un point de vue politique élaboré, et pas plus d'un point de vue coordonné. L'administration GW relaie diverses pressions et exigences, qui se font entendre à cause de leur puissance intrinsèque ou/et de leur puissance financière. Elle semble constituer ainsi le premier exemple de l'achèvement d'un système politique fondé sur la disparition complète de la politique comme expression du bien public, ou bien commun.