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6010On sait qu’au centre du grand mouvement actuel aux USA et en-dehors, – le “mouvement du 25 mai”, ou Grande-Emeute2020, – on trouve l’organisation BLM (Black Lives Matter). Bien entendu, on en parle beaucoup du point de vue de la crise aux USA, du point de vue du racisme-antiracisme, etc., et fort peu du point de vue “business et $dollars”. Or, BLM, fondé en 2013, est devenue en 2015-2016 une formidable organisation structurée comme une Corporateet qui charrie des dizaines de $millions venus d’une pluie de donations. BLM est divisé en diverses sections locales et nationales (hors-USA), et “chapeauté” depuis 2014 par une “fondations” de dimension globale, la ‘Black Lives Matter Global Network Foundation’ (BLM-GNF pour faire court).
Dès 2016, BLM a enregistré un soutien massif de divers domaines du Corporate Power, de Hollywood, de Silicon Valley, des entreprises liées à l’industrie de la mode et de la beauté, avec même des regroupements de donateurs. Si Soros est du coup, comme il l’est de tous, il n’est manifestement pas le seul.Depuis la mort de George Floyd, un formidable effort de soutien financier du Corporate Power a été enregistré. WSWS.org le présentait récemment à sa façon, faisant une analyse politique où l’on retrouve les habituelles lignes de force des analyses trotskistes, ainsi que les habituels jugements qui ne sont pas pour autant déplacés sur les « déclarations hypocrites » des dirigeants des grandes entreprises très diverses et très multiculturelles de tempérament.
« “La douleur du mois dernier nous rappelle combien notre pays doit aller loin pour donner à chaque personne la liberté de vivre dans la dignité et la paix”, a déclaré Mark Zuckerberg, PDG de Facebook, qui s'est engagé à donner 10 millions de dollars à des “groupes travaillant sur la justice raciale”.
» Le patron d’Amazon Jeff Bezos a déclaré sur son compte Instagram que “la douleur et le traumatisme émotionnel causés par le racisme et la violence dont nous sommes témoins envers la communauté noire laissent une trace durable”.
» Des remarques similaires ont été faites par les dirigeants des géants technologiques Intel, Microsoft, Apple, Cisco et Google, les directeurs généraux de Goldman Sachs, Citigroup et d'autres banques de Wall Street, les PDG de General Motors, Ford et d'autres sociétés industrielles.
» Bien conscients du soutien populaire massif aux manifestations antiracistes aux États-Unis et dans le monde entier, les milliardaires de la technologie et d'autres dirigeants d'entreprises ont publié ces déclarations de relations publiques pour protéger leurs intérêts commerciaux et de marketing. Mais ces déclarations expriment également la préoccupation des cercles dirigeants quant au fait que les protestations, qui n'ont pas été arrêtées par la répression de l'État, deviennent un point de convergence pour des griefs sociaux et des sentiments anticapitalistes beaucoup plus larges... »
Bien entendu, la précision est apportée pour rappeler que l’on trouve dans ce groupe clairement partie prenante aux 0,1% (ou 0,001%) des PDG de la communauté africaine-américaine qui adoptent la même démarche et sont effectivement jugés par WSWS.org selon les mêmes références et critères sans le moindre appel. Parfaitement intégrés dans le Système, cette partie africaine-américaine des 0,1% exposent la même douleur jugée “hypocrite” et apportent le même soutien financier à BLM.
« Dans un article de son blog intitulé “Je ne peux pas respirer”[“I can’t breathe”], Mark Mason, directeur financier de Citigroup Inc., a écrit : « Même si je suis le directeur financier d'une banque mondiale, les meurtres de George Floyd dans le Minnesota, d'Ahmaud Arbery en Géorgie et de Breonna Taylor dans le Kentucky nous rappellent les dangers auxquels les Noirs américains comme moi sont confrontés dans leur vie quotidienne”.
» Mason, dont le salaire annuel s'élève à 7,7 millions de dollars et dont la fortune nette est estimée à près d’un milliard de dollars, fait partie de la couche d'Afro-Américains amenés aux plus hauts échelons des entreprises américaines et de l’establishment politique au cours du dernier demi-siècle. Ce que Mason et ses camarades bourgeois noirs craignent vraiment, c’est un mouvement uni de travailleurs et de jeunes de toutes les races qui menacerait leur richesse et leur pouvoir. »
Mais ce qu’il est aussi très important d’apprécier, c’est le développement-businessde BLM, et par conséquent son intégration de facto dans le circuit financier du business américaniste, avec des sommes qui deviennent très vite colossales à partir de la pluie de donationsdu domaine, et des structures aussi bien que des avatars qui montrent que les habituels caractères du fonctionnement du système de l’américanisme tournent à plein rendement également pour cette organisation à la fois humanitariste et révolutionnariste. Il s’agit aussi bien du contrôle des sommes considérables ainsi levées, que des divers soupçons, manœuvres financières, voire des arnaques comme celle d’un groupe qui a emprunté le nom, ou disons plutôt le sigle, – ou disons encore bien mieux, “la marque”-Black Lives Matter, pour attirer des donations qui semblent n’être pas négligeables. FoxBusiness.com développe une analyse sur ce sujet...
« Au cours de ses presque six années d'existence, la Black Lives Matter Global Network Foundation [BLM-GNF] a reçu des contributions de donateurs de premier plan, notamment des artistes de première catégorie tels que Jay-Z, Beyoncé et Prince, ce dernier ayant effectué des donations jusqu’à quelques semaines seulement avant sa mort en 2016. Mais les questions de transparence et d’accès à ces dons sont restées sans réponse, ce qui a frustré certains organisateurs des sections locales affiliées BLM-GNF.
» En janvier 2018, une section de New York City a décidé de quitter BLM-GNF, invoquant le besoin d’autonomie pour mieux servir sa communauté. [...] Ces dernières semaines, le BLM-GNF a dû démentir les informations qualifiées d’‘erronées’ de militants conservateurs qui prétendaient que les dons du groupe étaient redirigés vers le Parti démocrate.
» BLM-GNF s’est également retrouvé en conflit avec une organisation basée en Californie, la “Black Lives Matter Foundation”, qui a levé des dons qui n’ont pas été versés au mouvement. Cette organisation aurait collecté des millions de dollars ces dernières semaines grâce à de petits dons individuels et à des employés de grandes entreprises, comme Apple et Microsoft, qui pensaient soutenir la Black Lives Matter Global Network Foundation. »
En 2016, on explorait avec un flair plus ou moins suspicieux les liens cachés (?) et bien entendu financiers entre Soros et les BLM, comme s’il s’agissait d’un complot. Désormais, nous jouons le complot à ciel ouvert ce qui déprécie considérablement la définition de la chose, – comme si BLM était un groupe important, côté à Wall Street, peut-être bien au NASDAQ, des gens sérieux enfin, – c’est-à-dire vertueux, c’est cela. Plus personne ne se dissimule qu’il importe de financer BLM parce qu’ainsi c’est financer la vertu-même, c’est-à-dire le capitalisme.
Il est vrai qu’à cette aune, les remarques de WSWS.org sont pertinentes. Il y a un réel objectif pour le Corporate Power dans le fait de tenter d’intégrer BLM-GNF dans le “circuit” du Big Money et du Big Business. C’est prendre une assurance sur la vie contre la possibilité évoquée par WSWS.org (« un mouvement uni de travailleurs et de jeunes de toutes les races »). D’autre part, le risque existe d’un “dérapage” de cette manœuvre classique, car la prospérité, le poids, l’influence, l’argent (donations) de BLM-GNF dépendent de sa capacité à maintenir les uns et les autres en état de mobilisation, c’est-à-dire à entretenir les troubles sans en perdre le contrôle, et justement pour en garder le contrôle. Ainsi, les “dirigeants” (qui ? Bref, son Conseil d’Administration) de BLM-GNF ont-ils annoncé leur intention de poursuivre les manifestations durant tout l’été, – pas de trêve estivale, pas de vacances, et en avant jusqu’à la défaite de Trump en vérité...
C’est là une question extrêmement importante, telle notamment que la formule Alastair Crooke dans son texte du 19 juin, en évoquant le précédent des salafistes jusqu’à Daesh bien entendu :
« On distingue mal si la génération des 20 ans et plus, en alliance avec les BLM, a réussi à soumettre l’ancienne génération libérale de dirigeants démocrates, de PDG et d’officiers supérieurs de la police et de l’armée qui se sont agenouillés devant l’autel du programme des BLM, – ou si les BLM sont simplement utilisés par la vieille garde comme un outil contre Donald Trump. Si c’est le cas, ce ne serait pas la première fois que le courant dominant coopte un mouvement radical pour l’utiliser à ses propres fins, pour découvrir ensuite que ce sont eux-mêmes, – ceux du courant dominant, – qui ont été grugés et doublés par ce mouvement radical. (L’histoire du salafisme et de ses djihadistes vient à l'esprit, dans ce contexte). »
Certes, l’analogie salafiste est à l’esprit, et elle est valable disons pour la technique et pour la psychologie ; mais avec une grande différence : BML et la grande-Emeute2020 ne concernent pas un groupe ou une mouvance extérieure, donc qui ne menace pas vraiment la structure et la stabilité des USA, mais bien une dynamique qui se manifeste au cœur même de la Grande République et qui conduit nécessairement à la question ontologique de l’existence de la Grande République.
Ainsi peut-on voir une illustration de ce dilemme à Seattle, dans les soubresauts de la CHAZ devenue la CHOP.
... En effet, la situation de la “Zone Autonome” (CHAZ) devenue territoire d’“Occupation de Protestation” (CHOP), selon l’humeur, les pancartes et les interlocuteurs, est également devenue dangereuse. Deux nuits de suite, il y a eu des affrontements avec coups de feu, un mort et un ou deux blessés dans la nuit de samedi, un blessé dans la nuit de dimanche. Les policiers autant que les équipes médicales ont eu une attitude dubitative pour pénétrer ou non sur les “scènes de crime”, notamment pour relever les blessés ; finalement, au moins un blessé de la nuit de samedi a été amené dans une voiture particulière à l’hôpital. Désordre chaotique donc, aggravation de la situation dans le “territoire annexé”, et flottement général du côté des autorités dont on se demande si elles méritent encore ce nom.
Ce flottement se mesure aussi bien dans des attitudes parfois très divergentes. Ce sont les affirmations violentes d’une conseillère municipale radicale de forte inflence, Khama Sawant, qui a participé à toutes les manifestations dans la ville depuis la mort de Floyd, et qui a soutenu, y compris de sa présence par intermittences, l’établissement de CHAZ-CHOP ; Sawant a accusé dans la nuit de samedi des éléments “extrémistes de droite” d’être la cause des violences, et elle a encouragé les “Zonards” de CHAZ-CHOP de poursuivre leur aventure. Ce sont en sens pseudo-contraire les paroles conciliantes de la maire, dans la nuit de dimanche, annonçant qu’on allait entreprendre la liquidation de CHAZ-SCOP dans la concorde et la bonne humeur, policiers et “Zonards” bras-dessus bras-dessous... Cela n’empêche pas certains commentateurs (Tom Luongo) de voir dans CHAZ-CHOP une réplique du Maïdan de Kiev, pour avoir la peau de Trump selon la recette d’une bonne vieille “révolution de couleur”, – à ce propos, d’ailleurs et puisque nous sommes dans la doxa racisme-antiracisme,certains autres commentateurs de valeur protestent contre cette expression qu’ils jugent déplacées par rapport à ceux qui sont les principaux acteurs de la chose...
Un autre phénomène de désordre se trouve bien entendu dans la recrudescence des crimes, dans une situation où les autorités communales et locales sont flottantes et indécises, sinon en révolte ouverte, où les polices sont sur la réserve, sinon dans la situation d’une abstention complète d’interventions, sur ordre des municipalités ou plus simplement par initiative (non-initiative), de crainte d’inculpations pour violences policières, dans le climat actuel. Quelques situations significatives...
• A Washington, des déprédations ont eu lieu lors de manifestations vendredi soir, selon le désormais habituel rites de la destruction des statues. Dans les deux cas, au National Park et dans l’autre occurrence, la police était soit absente, soit présente mais sans aucune réaction devant l’action des manifestants. Cela correspond aux engagements de la maire de Washington, très marquée à la gauche du parti démocrate, et soutien sans faille des manifestations.
• A New York : selon les estimations en évolution il y a eu 358% à plus de 400% d’augmentation des crimes durant la semaine dernière, par rapport à la semaine équivalente de 2019. Un autre facteur important dans cette grande ville est le mouvement de restriction des capacités policières contestées par le mouvement de protestation : une unité spéciale d’intervention du NYPD a été dissoute.
• Chicago est, pour les USA, la référence morbide de la situation du crime et des agression. Chaque week-end, en ce moment, Chicago bat son “record” du week-end d’avant. Ainsi du week-end dernier, où l’on a relevé sans doute le pire bilan de meurtres de l’histoire de cette grande ville célèbre pour le développement du crime organisé, de Capone aux cartels de la drogue, avec 104 morts par balles dont cinq enfants.
Au milieu de cette invraisemblable tourbillon de contestations et de désordres publics ponctués par les innombrables fracturations des pouvoirs, le président Trump, qui ne préside plus guère à grand’chose de cohérent, se bat avec son arme favorite, – le tweet, certes. L’un des plus intéressants de ces dernières semaines a été lancé hier. C’est un tweet trumpien “tout en capitales”, ce qui indique dans l’arsenal du président que le message a une singulière importance. Le voici présenté par RT.com :
« La prochaine élection présidentielle sera le scandale du siècle, a prédit Donald Trump, déclarant que l'utilisation des bulletins de vote par correspondance ouvre la porte à une fraude électorale généralisée ainsi qu'à une ingérence étrangère.
» Dans l'un de ses tweets ‘tout en capitales’, le président américain a exprimé ses inquiétudes concernant la course de novembre contre le démocrate Joe Biden : “L’ÉLECTION DE 2020 EST TRUQUÉE : DES MILLIONS DE BULLETINS DE VOTE PAR CORRESPONDANCE SERONT IMPRIMÉS PAR DES PAYS ÉTRANGERS, ET D'AUTRES ENCORE. CE SERA LE SCANDALE DE NOTRE EPOQUE !” »
Quelle extraordinaire perception d’un fouillis, d’un désordre qui s’est installé à une vitesse absolument stupéfiante, installant une toute nouvelle vérité-de-situation américaniste où il ne s’agit pas d’un pouvoir “tombé” qu’il suffit de ramasser, mais d’un pouvoir découpé et dispersé en une multitude de fonctions, de tendances, de lieux et d’influences, dans une logique qui semble de plus en plus ne pouvoir aboutir qu’à d’autodestruction, parfois d’ailleurs avec de brillants résultats du travail de l’esprit. Daniel Lazare, qui est d’ailleurs partisan des protestataires et des BLM, démontre impeccablement quoique sans doute involontairement que si l’on veut pousser la logique sous-tendant la destruction des statues, avec tout le passé esclavagiste des USA, il faut aller à la mesure ultime et essentielle, celle sans laquelle rien n’est fait, qui est l’abrogation complète et totale de la Constitution des États-Unis, faite par et pour les tendances esclavagistes, – mesure (l’abrogation) dont il semble bien qu’il (Lazare) soit partisan, au contraire des dirigeants démocrates (Pelosi, Biden & Co) qui exaltent à parts égales cette lutte-tardive anti-esclavagiste type-BLM et la Sainte-Constitution des États-Unis.
Quoi qu’il en soit, le tweet de Trump a rappelé les limites de l’exercice si aucun coup de force ou “coup de com’” ne réussit d’ici là à détruire l’un ou l’autre candidat. Il s’agit de l’élection elle-même, du 3 novembre prochain, avec les myriades de contestations dont on pourrait dire qu’elles sont valables, recevables et affirmées avant même que la chose ait été faite, et où la crise Covid19, qui redémarre aux USA, jouera un rpôle important en servant d'argumlent pour demander des votes par correspondance électronique..
Mis en ligne le 23 juin 2020 à 15H30
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