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3699Certains jours, les événements que l’on sait si rapides et sans souci de l’ordre nous permettent de rencontrer des situations d’une parfaite incohérence, d’une incohérence-bouffe. Ainsi en est-il de ce jour où l’on peut mettre en état de confrontation sous forme de parallèle absurde deux nouvelles qui pèsent de leurs poids symboliques.
• D’abord, une décision d’un juge de bloquer la loi (annoncée en février 2021) qui devait entrer en vigueur mercredi dans son État par le gouverneur de Floride DeSantis, autorisant des particuliers à porter plainte contre des entreprises des Big Tech pour ce qu’ils estiment être des faits de censure. DeSantis avait expliqué :
« Ce qui a commencé comme un groupe d'entreprises de la côte ouest s'est transformé en une industrie de plates-formes de communication monopolistiques qui surveillent, influencent et contrôlent le flux d'informations dans notre pays et parmi nos citoyens, et elles le font dans une mesure jusqu'ici inimaginable. »
Le juge apprécie fort négativement que cette législation est « un effort pour freiner des fournisseurs jugés trop puissants et trop progressistes. Équilibrer l’échange d’idées entre les intervenants privés n’est pas une cause légitime d’intervention gouvernementale. » Il faut apprécier en effet que les plaintes ont été déposées par des associations professionnelles, dont les préoccupations pour la liberté des entreprises commerciales (leur taille éventuellement monopolistiques, leurs activités) s’est colorée d’une référence fort vertueuse au Premier Amendement de la Constitution sur la liberté d’expression. Il faut laisser aux Big Tech la liberté de s’exprimer, car, confirme le juge et comme on le voit plus haut, tout effort pour les freiner constitue une tentative de blocage du progressisme, – ce qui est en soi (“bloquer le progressisme”) considéré comme illégal et profondément condamlnable... (DeSantis a fait immédiatement appel.)
« Le juge de district américain Robert Hinkle, nommé par Bill Clinton, a émis une injonction préliminaire dans laquelle il s'est rangé du côté de deux associations commerciales qui ont fait valoir que certaines parties de la loi [DeSantis] peuvent violer le Premier Amendement, selon Fox Business Network. [...]
» Un porte-parole de DeSantis a déclaré à Thomas Catenacci, du Daily Caller, que la Floride allait immédiatement faire appel de la décision.
» “Nous sommes déçus par la décision du juge Hinkle et nous ne sommes pas d'accord avec sa détermination que la Constitution américaine protège la censure de Big Tech de certains individus et contenus par rapport à d'autres”, a déclaré le porte-parole. »
• ... Effectivement, il faut laisser aux Big Tech la liberté de s’exprimer, car voyez ce qu’ils en font vertueusement ! La nouvelle est reprise par RT.com pour nous conforter dans notre résolution, de concert avec le juge Hinkle : les censeurs doivent bénéficier en priorité et pour l’éternité du posthumanisme de la liberté d’expression...
Ainsi Facebook vous invite-t-il à partager aussi vite que possible “votre préoccupation” à l’encontre de votre voisin, car il semblerait bien qu’il soit en train, le voisin, de devenir “extrémiste” – d’ailleurs cela se voit sur son visage, il est de plus en plus blanc, de plus en plus “mâle suprémaciste”, cela ne fait nul doute. Il est manifeste que le Premier Amendement sur la “liberté d’expression” doit être utilisée pour dénoncer ceux qui, inconsciemment et “à l’insu de leur plein gré”, sont en train d’envisager d’user avec eux-mêmes de leur liberté d’expression pour envisager de réfléchir dans un sens qui contrecarreraient leur liberté d’expression puisqu’il s’agirait d’un sens “extrémiste” qui use de la liberté d’expression pour pervertir sa propre liberté d’expression.
Tout cela fait d’excellents modernes, comme le chanterait Maurice Chevalier, qui votent démocrates et chantent à l’unisson de nos lendemains. Les Big Tech n’ont pas fini de nous bluffer en matière de culot et de prétention vertueuse.
« Facebook teste actuellement une nouvelle fonction qui demande aux utilisateurs s'ils connaissent quelqu’un qui flirte avec une idéologie violente et extrémiste, tout en avertissant d’autres qu'ils peuvent avoir été exposés sans le savoir à des contenus “extrémistes”.
» La plateforme a mis en place jeudi cette nouvelle fonction de test pour certains utilisateurs basés aux États-Unis, dans le cadre de son effort plus large de lutte contre l’“extrémisme”, selon Andy Stone, porte-parole de Facebook. Des internautes perplexes ont rapidement partagé des captures d'écran des alertes en ligne, certains faisant allusion aux pièges de l'enrôlement des utilisateurs pour débusquer les soi-disant extrémistes.
» Deux messages différents ont circulé, l'un demandant “Êtes-vous préoccupé par le fait que quelqu'un que vous connaissez est en train de devenir un extrémiste ?” tandis que l’autre avertit les utilisateurs qu'ils “peuvent avoir été exposés à du contenu extrémiste préjudiciable récemment”.
» “Les groupes violents essaient de manipuler votre colère et votre déception”, ajoute cette dernière missive, exhortant les net-citoyens à “agir maintenant pour vous protéger et protéger les autres”.
» Certains critiques ont cité cette initiative comme une raison d'abandonner Facebook pour de bon, l’un d’entre eux affirmant que le site considère que “penser par soi-même” est une forme dangereuse de radicalisme.
» Le porte-parole Andy Stone a déclaré à CNN que cette nouvelle fonctionnalité “s’inscrit dans le cadre de notre travail plus large visant à évaluer les moyens de fournir des ressources et un soutien aux personnes qui, sur Facebook, ont pu s’engager ou être exposées à des contenus extrémistes”, ajoutant que le site s’était associé à des ONG et à des “experts universitaires” sur l’extrémisme pour soutenir cet effort.
» Si les messages de Facebook ne semblent pas donner de définition de l’“extrémisme” et ne précisent pas exactement quels groupes et idéologies sont visés, la décision de s'associer à Life After Hate, une ONG basée à Chicago, pourrait fournir un indice. Le groupe affirme que sa mission première est d’aider les gens à échapper à “l’extrême droite violente”, laissant apparemment les autres formes de radicalisme de gauche et apolitique à d’autres organisations. »
Il est assez difficile de critiquer cette nouvelle avec la retenue habituelle pour cette sorte de démarche, comme nous l’avons nous-mêmes montré plus haut. L’univers de Facebook & Cie est parfaitement orwellien, avec des armées de petits Zuckerberg marchant au pas et vous intimant le ferme conseil d’entrer dans les rangs et de vous taire pour mieux profiter de la liberté d’expression. On en vient alors à conclure qu’il est difficile de leur tenir la dragée haute avec mesure, principalement parce que l’esprit d’économie régnant dans les hôpitaux psychiatriques enseigne de ne pas gâcher ses dragées dans d’inutiles querelles sur le sexe des anges, si nombreux à peupler cette étrange époque.
Un internaute US, le nommé Alex Berenson qu’il est temps de dénoncer, passe aux aveux car c’est lui qui a écrit : « Oui, je suis en train de devenir un extrémiste, un extrémiste anti-Facebook. “Une aide confidentielle est disponible” [pour dénoncer les extrémistes], disent-ils. Pour qui donc se prennent-ils ? »
Le fait est bien qu’ils se prennent : “devenir un extrémiste” selon Facebook consiste à « penser par soi-même » (selon l’internaute “Suburban Black Man”).
Socrate (« Connais toi-même ») était donc un “extrémiste” et, par conséquent, il sera “cancelled” sur les réseaux Facebook.
Mis en ligne le 2 juillet 2021 à 10H20
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