Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
3593« Je vous l’avais bien dit ! Cela fait maintenant deux ans que je répète dans mon émission de radio nationale que la meilleure chose qui puisse arriver aux cartels de la drogue mexicains serait une victoire des démocrates à la présidentielle.
» Les caïds de la drogue mexicains ont attendu cette fantaisie toute leur vie. Ils doivent être en train de chanter, de danser et de trinquer leur champagne. Le président Joe Biden est le plus beau cadeau jamais offert aux cartels mexicains. »
Auteur du texte que nous citons ici, Wayne Allyn Root est un chef d’entreprise, chroniqueur dans son émission “Wayne Allyn Root: Raw & Unfiltered” sur USA Radio Network, de 18H00 heures à 21H00 une fois par semaine, auteur d’une sorte de best-sellers dans les milieux intéressés par la méthodologie des affaires (“ Trump Rules”), – donc républicain acharné, conservateur extrême, etc. Il ne se dissimule nullement ses qualités de prédicateur politique, et prédicateur à la fois comptable précis et visionnaire apocalyptique ; si cela ne le rend pas nécessairement sympathique, cela n’est pas nécessairement faux. La frontière Sud des USA, depuis les décisions de Joe Biden, subit un déferlement extraordinaire d’illégaux. Cela constitue une perspective à très court terme de fabuleux bénéfices pour les cartels de la drogue et du trafic d’êtres humains. Les premiers chiffres sont disponibles et aussi catastrophiques qu’on pouvait attendre, selon les prédictions que monsieur Root nous avait annoncées.
« Les experts ont estimé que l’argent gagné par les cartels grâce au trafic de drogue s’élève à environ 500 $milliards.
» Qui cite ce chiffre ? Les sénateurs républicains. Voyez ce que David Purdue, sénateur de Géorgie, a déclaré en 2019 : “Avec un demi-billion de dollars le commerce des cartels et le trafic de drogue, rien qu'au Mexique, qui traverse les États-Unis, est plus important que Walmart, pour mettre les choses en perspective. C’est donc plus important que nos plus grandes entreprises.”
» Ce chiffre n’est pas contesté. La sénatrice démocrate Dianne Feinstein donne des estimations similaires [venues des services de renseignement puisqu’elle préside la commission sénatoriale qui les contrôle] : “Le commerce illicite de la drogue est un business, évalué entre 426 et 652 milliards de dollars.”
» Tout ça, c’était avant les politiques laxistes d’ouverture des frontières de Joe Biden.
» Mais il ne s’agit que de la drogue. Qu’en est-il du trafic d’êtres humains ? Près de 100 000 migrants ont franchi la frontière américaine au cours du mois dernier. Multipliez 100 000 migrants par $10 000 (tarif courant pour ce trafic). Cela représente un milliard de dollars pour la traite des êtres humains en un mois. Ajoutez-y le trafic sexuel d’enfants... »
Root poursuit sa comptabilité. Lui-même homme d’affaires, il estime qu’une commission de 5% à 10% est payée à ceux qui vous apportent des affaires. Il juge que, puisque ce trafic est un “commerce” et que le commerce est un “business”, la même règle lui est applicable. Le crime organisé, en effet, respecte les us & coutumes du business lorsque la chose est, justement, organisée d’une façon aussi stricte et ordonnée, c’est-à-dire selon les normes américanistes dont il est si proche. Nous sommes ici devant un océan himalayesque de fric (ou un Himalaya océanique c’est selon) et il faut bien que la répartition respecte les règles du jeu ; ainsi monsieur Root en déduit-il que la famille Biden, connue pour ses habiletés paternalistes, est aux premières loges.
« Il y a beaucoup d'argent en jeu ici. Combien les politiques frontalières strictes de Trump ont-elles coûté aux cartels de la drogue mexicains ? Des dizaines, des centaines de $milliards ? En comparaison, combien d'argent supplémentaire les politiques d'ouverture des frontières de Joe Biden et du Congrès démocrate vont-elles rapporter aux cartels de la drogue mexicains ? C'est comme un matin de Noël pour le crime organisé.
» Notre pays a clairement été vendu par Joe Biden et le parti démocrate. C’est du pur bon sens. La seule vraie question est : combien le cartel de la drogue mexicain paie-t-il ?
» Croyez-moi, la situation va s’aggraver considérablement. Des millions d’autres vont sûrement arriver. Peut-être des dizaines de millions. Avec les politiques de villes-sanctuaires de Biden, ils pourraient ne jamais être expulsés. Et ils pourraient chacun faire venir des centaines de leurs parents et amis. Ils pourraient tous bénéficier d’une voie rapide vers la citoyenneté, et s’ils deviennent citoyens, ils pourraient bénéficier de l’aide sociale du berceau à la tombe.
» Si on laisse faire ça, l’Amérique est finie. L’économie entière va s’effondrer. L’Amérique deviendra un pays étranger... aux Américains.
» Maintenant je vous demande, – usez de votre bon sens : pourquoi cela arrive-t-il ? Pourquoi un président ou un parti politique sain d’esprit voudrait-il encourager une invasion qui submergerait notre pays et risquerait de provoquer des maladies et des décès, – sans parler des ravages de la Covid ? C’est de la folie.
» De toute évidence, quelqu’un s’enrichit grassement grâce à cette escroquerie visant à détruire l’Amérique. Nous savons que les cartels de la drogue mexicains vont gagner des centaines de $milliards en plus. C’est le rêve de leur vie. Qui est soudoyé aux USA pour permettre que cela se produise ? Qui paieriez-vous si vous étiez un chef de cartel de drogue mexicain ?
» Je suppose que c’est le même type qui a vendu l’Amérique à la mafia ukrainienne et aux communistes chinois. Et le même groupe qui a vendu Uranium One aux Russes. Et le même groupe qui nous a vendu à l’Iran avec le terrible traité de classe mondiale sur l’Iran.
» C'est Biden, la famille Biden et le parti démocrate. »
Pauvre “Ol’white Joe”, qui signe ses décrets à l’aveuglette, dans l’ordre où les lui fait signer, sans précisément s’intéresser à leur contenu, de quelles vilaines mauvaises actions ne le charge-t-on... Manifestement, monsieur Root a l’esprit enfiévré et le jugement exacerbé. On peut le laisser s’agiter dans ses supputations, non sans noter qu’il surfe sur des eaux favorables ; que le secrétaire à la sécurité intérieure (HSD) Alejandro Mayorkas déclare au Congrès que le taux d’immigration est le plus haut atteint dans cette décennie. Les Border Patrol rapportent qu’en deux mois, il est passé plus de migrants illégaux que dans toute l’année 2018 et qu’on va rapidement atteindre un chiffre supérieur à l’addition de ceux de 2018-2019-2020.
Mayorkas précise que ce chaos est bien entendu la conséquence de l’inorganisation du système mis en place par Trump, ce qui est une explication après tout plaisante. Trump avait verrouillé les frontières, et fortement haï et lynché pour cela, et voilà qu’on découvre que ce même système permet le passage en débandade d’illégaux par dizaine de milliers...
“Bizarre... Vous avez dit ‘bizarre’, mon cousin ? Comme c’est bizarre... ”
Le président mexicain Obrador, quant à lui, ne décolère pas, jurant que Biden est “le Président des migrants” et que sa politique installe le chaos aux frontières. Sur ce point précis, au moins, il est d’accord avec Mayorkas, et avec Root lui-même, qui ne porte pourtant pas les Latinos dans son cœur, se réfère au président mexicain : « Même le Mexique pense que Biden est trop laxiste en matière d’asile. Le président mexicain craint le ‘Président des migrants’ Biden ne déclenche un déferlement d’activité des cartels... »
Il semble en réalité qu’Obrador est absolument atterré par la politique des démocrates, et la légèreté avec laquelle cette politique est lancée. Il l’a dit à Biden, en termes à peine diplomatiques, lors de leur entretien virtuel du 1er mars, sans beaucoup de résultats. Il a confié à ses conseillers qu’il avait l’impression « de parler au tronc vide d’un arbre mort ». Le problème devient alors, pour les Mexicains : à qui doit-on s’adresser du côté US, et d’ailleurs pour quoi faire ? Il est probable, dans de telles conditions, que des contacts vont être établis, ou sont déjà établis, entre les autorités mexicaines et les gouverneurs des États-frontières, dont bien entendu le Texas. (Le gouverneur Abbott a déjà déployé un millier de Gardes Nationaux texans, hors du contrôle du Pentagone et de Washington.)
Il n’est pas encore probable mais très largement possible que, dans certaines situations, si le flot migratoire actuel grandit encore, l’un ou l’autre État ferme complètement ses frontières avec le soutien du Mexique, outrepassant l’autorité de Washington. Cela créerait une situation extraordinaire d’un État de l’Union s’opposant à Washington avec l’appui d’un pays étranger qui le jouxte. A ce moment, les autorités de Washington (on ne parle pas de Biden, de plus en plus inopérant) pourraient juger que leur autorité est en péril, et qu’il s’agit de “faire un exemple” pour éviter la contagion d’une situation sécessionniste. On se trouverait alors avec un face-à-face entre des Gardes Nationaux et des forces fédérales.
(D’une façon antérieurement prophétique, mais signifiant que cette sorte de conflit est latent et peut devenir explosif selon la situation, on retrouve le scénario de “The Second Civil War”, un film fameux de Joe Dante, de 1997, où le gouverneur de l’Idaho refuse d’accueillir des réfugiés assignés à cet État par Washington, la querelles allant jusqu’à un affrontement armé. Le film est plein de situations satiriques [le gouverneur agit pour séduire une journaliste de Washington qu’il veut impressionner par des scoops sensationnels, le président calcule le timing de l’intervention des troupes fédérales en fonction de l’heure d’écoute d’une série télévisée à très grande audience, etc.], mais le fond du propos révèle une tension permanente des pouvoirs.)
Il est dans tous les cas manifeste que personne, du côté de Washington et de la direction démocrate, et malgré les avertissements pressants du gouvernement mexicain, n’a envisagé une telle marée humaine sur les frontières Sud. Cela n’a d’ailleurs rien pour surprendre, les démocrates n’ayant poursuivi qu’un seul but et planifié une seule mesure : faire tomber Trump. Les prévisions de Root concernant les migrants (« Des millions d’autres vont sûrement arriver. Peut-être des dizaines de millions ») peuvent sembler abracadabrantesques, mais elles ne sont pas dénuées de l’une ou l’autre possibilité, du fait que la frontière Sud est désormais une passoire informe dont on ne sait plus de quelle autorité elle dépend, sinon celle des cartels et du crime organisé. Il est exact également qu’il existe des “villes-sanctuaires” où les migrants peuvent pénétrer, et d’où il est interdit, du fait de la décision de l’autorité urbaine elle-même, de les en faire partir.
Il ne s’agit ni d’un test, ni de la “première crise” de l’administration Biden : raisonner en ces termes implique que l’on dispose à l’inverse d’une référence de contrôle et d’apaisement. Rien de cela n’est disponible. Le démarrage de l’administration Biden n’a rien amené de nouveau du point de vue de l’intensité crisique (de la structure crisique). Elle a poursuivi la dynamique crisique déjà en cours par une autre voie, aggravant ainsi la tension et la puissance de la dynamique, et nous confirmant que cette administration n’a d’autre politique que cette pente crisique irrésistible. Disons que, dans ce cas, des facteurs explosifs d’une puissance considérable, et aux effets éventuels d’une grande ampleur géopolitique et psychologique, sont en place, prêts à exploser...
Plus que jamais résonne la lamentation du président Porfirio Diaz, qui dirigea le Mexique de 1876 à 1911, ce qui lui donna une vaste expérience : « Pauvre Mexique, si loin de Dieu, si près des Etats-Unis. »
Mis en ligne le 16 mzars 2021 à 16H00