Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
6282On peut estimer logiquement et sans trop de risques que ce n’est par hasard que Tulsi Gabbard quitte le parti démocrate à un petit mois des élections midterms. Elle part nullement parce qu’elle abandonne la politique mais parce qu’elle s’estime trahie par le parti démocrate, et lançant un appel : “Que ceux qui pensent comme moi prennent la même décision et se regroupent avec moi”.
Lors d’un des nombreux talk-show consacrés à l’événement sur le thème (« Quand Tulsi Gabbard quitte le parti démocrate, c’est un signe puissant [de la crise qui secoue] ce parti. »), on a notamment entendu le journaliste et producteur Raymond Arroyo, dans un panel majoritairement féminin de FoxNews, émettre ce jugement qui résume l’état d’esprit de tous les participants :
« J'ai pensé à Ronald Reagan, à Elon Musk, – pour autrefois et aujourd'hui, – disant qu'ils n'ont pas quitté le parti mais que le parti les a quittés. Il a changé, il s'est déformé. Il est devenu quelque chose qu'ils ne reconnaissaient plus. Et dans le cas de Tulsi Gabbard, je dois vous dire que cela me brise le cœur que nous n'ayons pas un parti démocrate pleinement fonctionnel aujourd'hui. Dans mon État, la Louisiane, c'est peut-être le dernier bastion du parti démocrate, où l'on peut encore avoir un gouverneur pro-vie et pro-armes qui se trouve avoir un D après son nom.
» C'était un parti qui fonctionnait bien,, qui accueillait d’autres points de vue, qui permettait à la normalité et aux classes moyennes de s’y sentir chez elles. Ce parti actuellement, au niveau national, n'accueille plus cela. Et le fait qu'ils n'aient pas pu faire de la place à une vétérante, une femme de conscience affirmée qui a lancé de nombreux appels de mise en garde, c'est une femme qui a soutenu, soit dit en passant, Bernie Sanders. Elle n'est donc pas une extrémiste de droite qui a été intégrée au parti démocrate. Lorsque Tulsi Gabbard s’en va, c'est un signe terrible pour le parti démocrate. Nous verrons s'ils en tiendront compte. »
Gabbard a lancé hier son ‘Tulsi Gabbard Show’, ‘Chapter 1’, qui comptait 170 000 vues et près de 3 000 commentaires ce matin, après une demi-journée de diffusion. Elle a expliqué sa décision de quitter le parti démocrate et décrit les conditions existantes au sein de ce parti. Son intervention était techniquement et politiquement excellente, montrant la qualité extrême de la préparation de sa communication, à la fois pour son départ et pour une présence nouvelle d’une actualité prolongée. On l’a vue également sur l’émission quotidienne de Tucker Carlson, en deux segments, – le premier sous forme de documentaire présentant sa carrière, le second avec Carlson dialoguant (vieille habitude) avec Gabbard. La complicité bien connue entre les deux est extrême et implique une résonnance énorme pour un public (celui de Carlson) qui tourne autour des quatre millions chaque soirée. On retrouve Gabbard sur la plupart des réseaux, comme par exemple sur ‘SkyNews’, et en général dans la presse, y compris dans la fraction de la presseSystème qui lui est opposée (voir l’ironie venimeuse de ‘Huffington Post’).
L’avenir ? On verra.. Mais ceci, tout de même :
« Qui a peur de Tulsi Gabbard ? Tout le monde... »
Écrit Tom Luongo, ce 12 octobre. Puis, après avoir consciencieusement démoli la narrative qui en fait un “sous-marin de Klaus Schwab :
« Alors, que signifie cette annonce pour l’avenir ?
» Cela signifie que mon espoir spontané d'un ticket d'unité gouverneur de Floride Ron DeSantis/Tulsi Gabbard 2024, dont j'ai parlé avec Garland Nixon sur mon podcast en mai dernier, prend forme... et juste à temps. »
On résumera ce très rapide tour d’horizon pas plusieurs remarques, sans pour l’instant spéculer sur les structures qui pourraient l’accueillir ou qu’elle pourrait mettre en place, sur le rôle qu’elle pourrait jouer, sur les ambitions qu’elle pourrait développer...
La première remarque est que le départ du parti démocrate de Tulsi Gabbard est tout ce qu’on veut sauf un départ de la vie politique. On pourrait même le définir comme une entrée dans une nouvelle phase de sa vie politique, beaucoup plus active et ambitieuse que la première, – pour elle, une véritable “entrée en politique”. On jugera absolument remarquables l’audience et l’écho considérable de sa “double-décision” (départ et “nouveau départ”) alors qu’elle n’a plus de position institutionnelle nationale depuis 2020 et sa décision de ne pas se représenter à la Chambre, dans une réélection qu’elle avait portant toutes les chances de remporter.
Le résultat est effectivement absolument remarquable. Privée d’une position de porte-voix officielle, ostracisée et diffamée au sein de son propre parti, sa popularité paraît selon une appréciation subjective et intuitive, – qui vaudra certainement plus que certains sondages orientés comme il faut, – plus forte qu’elle n’a jamais été. Gabbard s’installe ainsi parmi les grands ténors de la politique à Washington, à un moment-clef, à trois semaines des élections midterms (où elle n’est candidate à rien).
Cette formidable position dans la bataille de la communication constitue un coup terrible pour le parti démocrate. Venue de l’intérieur du parti, elle est désormais libre de parler des conditions d’autoritarisme, de contrainte, de sottise haineuse, voire de “folie sociétale” (wokenisme) et de “folie guerrière” (soutien à la guerre de Zelenski) qui y règnent. Il est difficile de penser qu’une telle intervention ne sera pas entendue par un large public, et donc avec une influence certaine vis-à-vis des votes pour les élections du 8 novembre.
Cette influence n’est pas partisane, même si elle constitue évidemment une aide objective pour les républicains, – essentiellement les candidats ‘America First’ (les trumpistes certes, mais plus généralement les populistes à la fois anti-wokenistes et antiguerre). On peut même spéculer sur une influence de l’événement sur ceux des électeurs de gauche qui sont mal à l’aise avec l’une ou l’autre, ou les deux orientations démocrates ainsi dénoncées. Gabbard ne se pose pas comme républicaine quoi qu’il en soit de l’avenir, mais d’abord comme “contre” : contre le wokenisme sociétal, contre la guerre que répand partout la politiqueSystème, et principalement en Ukraine bien sûr.
Tulsi Gabbard représente sans aucun doute un symbole complet de la crise du système de l’américanisme. Le fait qu’elle quitte les démocrates sans rejoindre les républicains en est un signe évident ; non pas qu’elle ne les rejoindra pas, éventuellement, mais si elle le fait ce sera parce que les républicains auront évolué décisivement, et/ou parce que son entrée contribuera à rendre décisive cette évolution. A cet égard de la politique courante et pour l’instant peu reluisante, on en saura plus au lendemain du 8 novembre.
D’un point de vue plus élevé, on observera que le cas-Gabbard illustre, pour les USA, une situation générale, d’une façon ou l’autre, dans toutes les “démocraties”, et d’une façon globale, dans notre civilisation en l’état. Elle symbolise peut-être d’une façon la plus brillante et exceptionnelle (USA obligent) la rupture entre les élitesSystème et la population, entre les “valeurs” de piètre fortune des premières et les principes du pouvoir régalien que réclame la seconde. Elle est dépourvue d’autorité de fonction et de légitimité de position, et pourtant infiniment plus chargée d’autorité et de légitimité que toutes celles (restons entre dames) qu’elle a croisées et en général affrontées : Nancy Pelosi, Hillary Clinton, Kamala Harris, Victoria Nuland, les “filles” du SQUAD (ou ce qu’il en reste), etc.
De ce point de vue, qui rejoint la métahistoire, on dira que Gabbard est un “coup d’État” en attente, en latence et peut-être en devenir. Il est évidemment significatif qu’une telle personnalité, chargée de toutes les qualités qui font le miel de la détestation du Système, diabolisée selon la coutume, parvienne à émerger avec ce capital de popularité et cette habileté pour manipuler la communication à son avantage. Il s’agit plus d’une sorte de déterminisme de l’antiSystème dans cette GrandeCrise de l’Effondrement du Système, que de toute autre péripétie de la sorte du monde politique de “D.C.-la-folle” ; Tulsi Gabbard, même si elle agit avec efficacité et superbe, est “agie” par un courant, une dynamique antiSystème de plus en plus irrésistible.
Il nous apparaît donc, quels que soient les jugements de circonstance ou de fortune qu’on porte sur elle (et il y en a beaucoup, et la diffamation y a sa place), que la décision de Gabbard fait d’elle non pas une “personne providentielle”, mais une voix puissante et bien faite mise au service d’un événement qui la dépasse et l’emporte, comme il nous dépasse et nous emporte. Il s’agit de l’événement de la Résistance opposée à la folie de la déconstructuration de tout ce qui est conçu dans la pensée et dans les actes, de conforme à l’ordre, à l’harmonie et à l’équilibre. Comme à l’habitude et plus que jamais, nous mettons les êtres au service des événements qui les choisissent parce qu’ils méritent d’être soutenus ; on lui reconnaitra à cet égard, à elle, un brio qu’il est peu coutumier de rencontrer dans cette saison des déserts sans fin de la pensée collective et officielle.
Parmi les nombreux (62) textes que nous avons écrits directement ou indirectement sur Tulsi Gabbard depuis que notre intérêt s’est attaché à elle (le premier, le 2 mars 2016), nous reprenons un extrait de celui du 15 janvier 2022. Le titre de cette page du ‘Journal-dde.crisis’ de PhG est « Le “Aux Armes” de Tulsi ». Il est finalement bien plus dans la logique que dans la surprise de l’événement et doit se lire, comme beaucoup d’autres, mais ici avec l’idée de “résistance” qui nous paraît essentielle, comme une préparation à la décision d’hier de Gabbard, et comme ce qu’elle va tenter de faire de sa liberté retrouvée.
« Ainsi enrichissons-nous notre carnet de bord dans cette longue croisière à laquelle nous convoquent les forces qui nous dominent. En d’autres mots, il vaut mieux savoir de qui il s’agit quand nous parlons de ce personnel-Système, et ainsi les paroles de Tulsi Gabbard ont-elles bien plus de poids.
» Cette jeune femme est démocrate, et elle l’est tout à fait d’un point de vue social, donc “de gauche” comme l’on dit, ou encore mieux progressiste ; et colonel (colonelle ?) de surcroît et à ses moments perdus, un ‘must’ pour les féministes. Pourtant, voilà que son intervention, telle que retranscrite plus haut, sonne à la façon d’un discours que les perroquets de la basse-cour devraient décrire, en craquant et en croaillant à bec que veux-tu, comme déplorables épluchures d’immondice nauséabond d’extrême-droite et ainsi de suite. Bon signe.
» Mais il faut bien s’entendre, sachant ce que ces gens dont nous parlons se révèlent être, nullement “le roi est nu” mais “le roi est froidement fou”, et le roi “défenseur du bien public” devenu rien de moins que “l’ami du Mal”. Les signes s’amoncellent, qui nous disent dans quelle transition catastrophique nous nous trouvons, avec de plus en plus rassemblés, des dirigeants dont la conviction est celle de la déconstruction, de la destruction, de l’entropisation, et tout cela en vérité comme des psychopathes transgenrés en zombies et en robots, sourires multiples aux lèvres. L’intervention de Gabbard (“Cela est inacceptable dans notre démocratie et l’on ne doit en aucun cas laisser cette chose se développer”) sonne bel et bien comme un “Appel aux armes”, une exhortation à la résistance décidée et décisive. L’appel vient d’une progressiste et il sonne comme un avertissement. »
Mis en ligne le 12 octobre 2022 à 13H30