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4869La marche à la folie en-cours aux USA a pris un tour remarquable avec le discours du président Joe Biden du 1er septembre. Il s’agit d’un discours de guerre civile, marqué d’éléments remarquables de futilité, d’enflure, d’agitations exacerbés, d’exorcisme idéologique extraordinairement excessifs, – toutes choses assez normales puisqu’il s’agit jusqu’ici, essentiellement, d’une “guerre civile communicationnelle”. Du coup, Biden a semblé plus éveillé qu’à l’habitude, ce qui implique une mise en condition exceptionnelle ; il est vrai que l’aventure de l’attaque du “MAGA-fascisme” que lui proposent ses ‘speechwriters’ est tout à fait exemplaire.
En un mot, Biden a mis en cause Trump et son slogan MAGA (‘Make America Great Again’), – les “forces MAGA”, dit-il, ou “MAGA-fascisme”, représentant selon lui une sorte de “fascisme” (ou de “semi-fascisme” dit-il encore, on ne sait pourquoi)... Pour comprendre la signification de l’accusation : si on prend les événements tels qu’ils se sont passés, c’est-à-dire les élections présidentielles de 2020 qui se sont faites du côté de Trump au son du slogan ‘MAGA’, si l’on prend les résultats obtenus par Trump, cela signifie que 74 millions d’Américains sont mis en cause comme “semi-fascistes” au moins. Bref, tout cela est à la fois extraordinairement excessif et relevant plutôt de la tragédie-bouffe si l’on tient compte du contenu du discours, du personnage qu’est Biden, de la situation aux USA, de l’atmosphère justement de “guerre civile de communication”, c’est-à-dire de l’espèce de démence qui touche les USA et les plonge depuis 2015-2016 dans une sorte d’affrontement où la démence évolue à son aise comme poutre-maîtresse de la démocratie.
L’écho du discours du 1er septembre à Philadelphie, l’un des berceaux de l’Amérique et actuellement l’une des cités-record pour les assassinats, a été considérable. L’on consultera une de nos références quantitatives habituelles, qui est l’un des archi-ennemis de Biden (plutôt qu’archi-partisan de Trump, d’ailleurs), et l’on devine aussitôt que le segment principal de Tucker Carlson hier soir était consacré à ce discours. En plus des habituels millions de téléspectateurs de FoxNews qui le suivent, l’intervention de Carlson, reprise sur YouTube, a atteint un million de vues en 14 heures.
D’abord, quelques mots pour présenter d’une façon objective et non-polémique l’intervention de Biden
« Le président américain Joe Biden a de nouveau condamné la grande partie de la population américaine qui soutient son prédécesseur, Donald Trump, affirmant que les “forces MAGA” constituent une menace existentielle pour la démocratie et doivent être vaincues.
» “Les forces MAGA sont déterminées à faire reculer ce pays, à le ramener dans une Amérique où il n'y a pas de droit de choisir, pas de droit à la vie privée, pas de droit à la contraception, pas de droit de se marier avec la personne que l'on aime”, a déclaré M. Biden jeudi dans un discours prononcé à une heure de grande écoute, en référence au slogan de M. Trump ‘Make America Great Again’.
» S’exprimant dans l'historique Independence Hall de Philadelphie, où la Déclaration d'indépendance a été signée en 1776, Biden a suggéré que les partisans de Trump visent à détruire la démocratie américaine. “Pendant longtemps, nous nous sommes rassurés en pensant que la démocratie américaine était garantie. Mais elle ne l’est pas. Nous devons la défendre, la protéger, la défendre, – chacun d’entre nous”. »
Ce qu’on observe immédiatement, c’est une sorte de choc, dont évidemment Carlson lui-même témoigne. La véhémence du discours ; son aspect extraordinairement partisan, et la rhétorique d’une violence verbale qui constituerait presque une sorte de justification, voire un encouragement à une violence tout-court, sont des aspects remarquables de cette intervention. Il est, évidemment, également remarquable de rappeler qu’il y a un an, lors des premiers mois de son mandat, Biden ne manquait pas de se présenter comme un président rassembleur, un “unificateur”.
Voici un exemple d’une réaction à vif, du principal commentateur du site pro-républicain plus que pro-Trump ‘RedState.com’, qui prend le pseudonyme de ‘Bonchie’. Il fait le lien avec une autre intervention célèbre, qui avait servir de marqueur symbolique de l’ampleur et de la profondeur à la fois de l’antagonisme aux USA. Il s’agit de la fameuse apostrophe d’Hillary Clinton à l’adresse des partisans de Trump, à leur côté traditionnaliste et populiste, et surtout antiglobaliste
« J’ai vu et entendu beaucoup de discours nationaux de présidents américains au fil des ans, comme beaucoup d'entre vous, j'en suis sûr. Je n'ai jamais vu un discours comme celui-ci, prononcé dans de telles circonstances. Les présidents prononcent des discours de campagne, mais ils ne prononcent pas de discours nationaux sous couvert de leur fonction pour le faire, et les attaques de Biden contre des dizaines de millions d'Américains sont sans précédent. Il faut remonter à la boutade d'Hillary Clinton sur le “panier de déplorables” pour trouver quelque chose de semblable en politique, mais c'était pittoresque comparé aux remarques du président. »
D’une façon générale, les républicains, les conservateurs, ont réagi avec une grande force, considérant effectivement que ce discours marque une inflexion, un point de rupture qu’on pourrait considérer comme le point de départ d’une campagne électorale qui sera nécessairement très tendue, quasi de guerre civile, – d’ici le 8 novembre. C’est évidemment dans cette optique également que ces commentateurs républicains envisagent le discours, qu’ils considèrent en général :
1) comme le signe de la crainte des démocrates d’un résultat défavorable qui bloquerait l’administration Biden (ce qui reste assez probable si l’on s’en tient aux enquêtes et aux sondages, bien qu’il y ait une évolution moins favorable aux républicains ces dernières semaines) ;
2) comme une mauvaise opération pour les démocrates, à cause de l’outrance des propos qui grandirait selon les jugements de ces commentateurs le discrédit important qu’a suscité cette administration autant que les outrances de la gauche démocrate.
Ici, l’analyse d’un de ces commentateurs, avec l’accent mis sur un des aspects du discours, sur sa forme et sa mise en scène, effectivement remarquable et qui peut faire songer à une orientation symboliquement diabolique ou infernale, de cette forme qu’on retrouve aujourd’hui assez souvent dans des manifestations artistique ou approchante, dans la communication surtout, dans le maniement des symboles par les élitesSystème...
« Comme nous l'avons noté précédemment, Joe Biden a prononcé un discours national grotesque qui doit être l'un des discours les plus antagonistes jamais prononcés par un dirigeant américain. Et pourtant, il l’a fait en prétendant qu’il était pour l’unité, – tout en attaquant et en diabolisant des millions d'Américains, pour le crime de vouloir “rendre l’Amérique grande à nouveau”. Dans le monde de Biden, c'est un crime et une “menace”, – du moins, une menace pour la position politique des démocrates à la fin de 2022. Biden doit donc faire tout ce qu'il peut pour créer cette menace afin de détourner l'attention de l'échec que lui et les démocrates ont été depuis qu'ils sont aux commandes.
» C’était un truc effrayant, pas seulement avec son incitation contre des millions d'Américains, mais dans le symbolisme et la façon dont il s'y est pris. Nous avons noté une partie de ce que Tucker Carlson a dit avant le discours, mais son commentaire qui l’a suivi l’a également dénoncé. Tucker a noté que ce n'était pas un discours normal, avec un fond rouge sang et des Marines derrière lui, dans un tableau qui rappelait beaucoup les discours nazis. “Joe Biden est passé dans un univers dangereux”, a déclaré Tucker.
» Vous êtes une menace parce que vous n’êtes pas d’accord avec Joe Biden. Il est difficile d’imaginer une évocation plus inquiétante et de la faire avec les Marines derrière soi. C’est les inclure dans un perspective politique inacceptable. [...]
» Il est également inquiétant de voir que beaucoup de gens à gauche sur les médias sociaux embrassent cette démonstration méprisable, pensant que c'est une bonne chose. C’est en partie à eux qu'il essaie de faire appel ici. Il veut leur vendre l’impression qu’il a de l’énergie, qu’il fait quelque chose. Mais ce qu’il fait est méprisable, s’en prendre aux Américains.
» Qui sont les fascistes ici ? Un conseil à Joe Biden : [...] quand vous essayez de faire taire l'opposition, regardez dans le miroir : le fasciste qui vous regarde en face, c’est vous.
» Mais au milieu de tout ce gâchis, je voudrais noter une chose qui doit nous rassurer. Le fait qu’il soit si désespéré, le fait qu’il aille si loin pour diaboliser la moitié du pays signifie qu’il sait qu’ils [les démocrates] sont en difficulté. Il sait qu’ils risquent de perdre et il sort le grand jeu, avec ce genre de tactique. Donc, bien que ce soit très inquiétant, nous devrions aussi nous réjouir du fait qu'ils savent qu'ils sont en grande difficulté. »
Une autre intervention qui va dans un tout autre sens, et qui nous conduit jusqu’à l’extrême de l’extrême de l’autre côté, c’est celle du site trotskiste WSWS.org. Ce site est évidemment d’ultragauche ; il s’oppose avec force au capitalisme de Washington D.C. et de ses acolytes du bloc-BAO, à l’impérialisme que sécrète ce capitalisme, poussant parfois la logique jusqu’à se retrouver proche de Poutine (pourtant qualifié lui-même de “bourgeois autoritariste et impérialiste”). L’intrusion de Trump a quelque peu posé au trotskiste des presque-dilemmes embarrassants, dans la mesure où Trump se déclare contre le DeepState et, dans une certaine mesure, contre les aventures extérieures et évidemment impérialistes.
WSWS.org s’est temporairement débarrassé de ce dilemme avec les événements entre l’élection de novembre 2020 et l’entrée en fonction de Biden. Le fameux 6 janvier 2021, jour qui restera dans l’histoire comme “le jour de l’infamie-bouffe” où les fascistes tentèrent un coup d’État en trottinette, permit aux trotskistes de se déchaîner contre Trump-fasciste, et ensuite de taper sur Biden et sur les démocrates parce qu’ils n’étaient pas assez durs. Cette logique du type-fantasy se poursuit en quatrième vitesse avec un article sur le discours d’hier, dont l’argument est simplement : “Vous dénoncez justement Trump et ses 74 millions d’électeurs comme fascistes, mais vous êtes leur complice puisque vous ne nous en débarrassez pas !”. Cette logique type-Goulag est présente dans ce passage :
« Si Trump est “un danger clair et présent” pour la démocratie, pourquoi Biden lui a-t-il permis de rester libre ? Si “nous ne nous rendons pas service” en niant la menace, pourquoi Biden a-t-il déclaré dans son discours sur l'état de l'Union en mars 2022 que “l’état de l’Union est fort”, que “nous sommes plus forts aujourd'hui que nous ne l'étions il y a un an” et que “nous serons plus forts dans un an que nous ne le sommes aujourd'hui” ?
» En outre, si le parti républicain est “une menace pour le pays”, pourquoi Biden et tous les autres politiciens démocrates les ont-ils qualifiés d’“amis” et de “collègues” au cours de l'année et demie écoulée, alors qu'ils s'efforçaient de forger une unité bipartisane pour mener une guerre à l'étranger et une attaque contre la classe ouvrière dans leur pays ?
» Les Américains doivent-ils croire la promesse de Biden selon laquelle il “ne restera pas là à regarder des élections volées” alors que c'est exactement ce que lui et les démocrates ont fait pendant que les événements du 6 janvier se déroulaient ? Non seulement Biden n'a pas bougé, mais il a même demandé à Trump d'apparaître à la télévision nationale et de s'adresser à un public national au beau milieu de son coup d'État !
» Si la première moitié du discours de Biden a exposé dans les termes les plus crus qui soient le danger de la dictature (de manière significative, il n'a pas utilisé le mot “fasciste” dans ce discours, comme il l'a fait dans un discours la semaine dernière), la seconde moitié a montré pourquoi le parti démocrate est incapable de l'arrêter. »
Un aspect très intéressant du discours se trouve dans son inspiration et son origine. On les trouve dans une rencontre qui a eu lieu courant août, d’un groupe d’historiens invités à la Maison-Blanche. On les désigne comme des “historiens présidentiels”, et il est assez difficile, ou délicat c’est selon, de décider si ce titre est flatteur ou au contraire encombrant. Dans tous les cas, ces gens ont parlé à Biden comme s’il était un vrai président, pour ne pas dire tout de même “un grand président”, – et, manifestement, ils ont trouvé le chemin de son âme (d’où le surnom de “discours sur l’âme de la nation”), nous démontrant ainsi que Biden n’est pas si fou que l’on croit, ou bien peut-être et plus sincèrement le contraire, – que Biden est bien le président qu’il leur faut puisqu’ils sont aussi fous que lui...
Ici, on trouve quelques mots de Michael Beschloss, un membre de ce groupe d’historiens, parlant de cette rencontre avec Biden. Il s’agit d’une intervention au cours de l’émission ‘All In’, le show de Chris Hayes, ce 1er septembre sur MSNBC. Ce réseau TV est le plus à gauche sur l’“échiquier médiatique” US, lui-même déjà orienté bien plus vers la gauche que vers la droite. Une partie de l’intervention de Beschloss est retranscrite par Breitbart.News. Comme on le voit, l’émission, comme la chaîne MSNBC elle-même, est nettement favorable à Biden, et dans ce cas à son intervention, dans une situation où les comparaisons évoquées sont notamment 1860 (à la veille de la Guerre de sécession) et 1940 (à la veille de l’entrée des USA dans la Deuxième Guerre mondiale).
Chris Hayes : « Le président Joe Biden vient de prononcer un discours en faveur de la démocratie américaine. Ce discours est une réponse à la menace aiguë que Donald Trump et ce qu'il appelle les républicains MAGA continuent de présenter pour l'avenir de l'expérience américaine après sa tentative de coup d'État et alors qu'ils en préparent ouvertement un autre.
» Biden aurait été inspiré en partie par une réunion à huis clos avec un groupe d'historiens qui l'ont averti du moment dangereux pour l'avenir de la démocratie. Selon le Washington Post, ce groupe a qualifié ce moment comme étant l'un des plus périlleux de l'histoire moderne de la gouvernance démocratique. » [...]
Michael Beschloss : « Vous avez mentionné cette réunion d'historiens avec le président Biden il y a quelques semaines, à laquelle j'ai assisté avec cinq autres personnes extérieures [à la Maison-Blanche]. Et d'ailleurs, pour que cela ne semble pas trop secret, ces séminaires sont ceux que les présidents ont eu au moins depuis George H. W. Bush, Bush-père. J’ai participé à la plupart d'entre eux.
» J’ai dit, et les autres l’ont dit avec moi, et je suis heureux d'être transparent à ce sujet, j’ai dit au président Biden dans la Map Room que la situation est semblable à celle de 1860 et à celle de 1940. Je lui ai dit “Vous devez parler de la grande question qui se pose se pose au pays”. Tout comme Lincoln a prononcé le “discours de la Chambre Divisée”, tout comme Roosevelt a prononcé un discours sur l'état de l'Union sur les Quatre libertés, comme vous le savez bien, en 1941, on dira “voici le moment que le président Biden a choisi”. Au fait, nous ne l'avons pas aidé à écrire ce discours. Je n'ai pas donné de conseils politiques, ni aucun autre d'entre nous. C'est une bonne chose. Ce serait plutôt triste de faire cela, car nous n’avons pas la documentation nécessaire. Mais le fait est qu'il a réalisé que c'était un moment historique. Ce que vous avez entendu, je pense, découle de cela. »
En regard de ces révélations d’un historien “conseiller du prince” dont on voit de quel côté penche son cœur et même son âme, – ce qui nous en dit beaucoup sur l’“éducation” des présidents successifs depuis 1989 puisque Beschloss en fait partie depuis Bush-père, – nous proposons les appréciations très polémiques d’un auteur de la droite pure et dure, la droite libertarienne, Rajan Laad, dans ‘The American Thinker. Laad attaque frontalement la notion qu’il juge d’une hypocrisie absolue de “discours de l’âme”, comme l’on tend d’ores et déjà à appeler ce discours où Biden se penche sur l’âme de l’Amérique qu’il veut sauvegarder du danger atroce du “MAGA-fascisme”.
...Peut-être s’agit-il d’ailleurs du “discours sur l’âme du fou” partant à la recherche de “l’âme de la nation” pour en faire un mariage de passion ; c’est un peu comme cela que Laad voit les choses...
« C'est tout à fait typique de la gauche.
» Au lieu de faire preuve d'humilité et de reconnaître leurs erreurs, ils attaquent les électeurs qui pensent voter contre eux tout en passant sous silence les innombrables catastrophes qu'ils ont présidées.
» Ils reprochent souvent à leurs adversaires ce dont ils sont coupables, à savoir le sectarisme et la violence, puis terminent par le plaidoyer de l’“âme”.
» Biden a prononcé son discours sur l'âme à l'Independence Hall de Philadelphie, le lieu de naissance de la Déclaration d'indépendance et de la Constitution.
» La manière dont il s'est exprimé était celle d’un déséquilibré ; il a souvent brandi ses poings de manière agressive. Sa voix était rauque, peut-être en raison de récents accès de Covid-19, donnant au discours un ton méprisant.
» Biden s'est exprimé entouré de Marines en uniforme, tandis que la toile de fond était baignée de teintes rouge sang, donnant l'impression d'un sinistre paysage infernal.
» Son discours était la suite de ses récents discours où il affirmait qu'il ne respectait pas les républicains MAGA et que la philosophie MAGA était comme un “semi-fascisme”. »
Ce qui ressort des confidences de Beschloss comme des jugements de Laad ne nous intéresse pas pour ce qui concerne les appréciations historiques et polémiques, mais beaucoup plus pour ce que tout cela nous dit des convictions de chacun, et par là de l’état des psychologies. Les gens du “MAGA-fascisme” de Trump croient vraiment qu’ils se trouvent persécutés par l’extrême-gauche qui s’est emparée du pouvoir ; les gens du wokenisme-progressisme, des intellectuels de MSNBC aux hallebardiers de BLM croient vraiment au danger du fascisme trumpiste. Cette conviction partagée sur des dangers exactement contraires n’a pas à être jugée en tant que telle, – même si l’on peut aisément faire des hypothèses sur ce que pourrait être notre conviction à cet égard, – mais en tant que symptômes, en tant que manifestation d’une énorme dystopie qui coupe un peuple et une pseudo-nation en deux, d’un coup sec, comme seule le peut faire la lame d’une guillotine.
Les deux Amériques qui se font face sont sur deux planètes différentes, elles se haïssent et se dénoncent l’une l’autre comme des dangers menaçant l’humanité et d’abord “l’âme de l’Amérique”. Leurs perceptions sont directement antagonistes et il ne nous semble nullement que l’un ou l’autre côté se force à prendre pour vrai un simulacre qu’il aurait monté, mais que plutôt chacun tient ce qu’il perçoit pour vrai et qu’il n’est nullement question de simulacre. Nous nous abstenons de juger qui a raison et qui a tort, et si quelqu’un a raison ou tort, car ce qui importe c’est cette conviction ingénue et inébranlable de la réalité de deux perceptions totalement opposées. L’on voit mal dans ce cas ce qui pourrait un jour les réconcilier.
Nous ne sommes vraiment pas, ni en 1860-61, ni en 1940-41 ! Mais en un sens qui est certainement le plus solide et le plus fécond en conséquences inéluctables, ne serions-nous pas dans un moment beaucoup plus grave ? Il faut désormais guetter le sort des quasi-Ides de novembre des élections du midterm, car la crise du système de l’américanisme va installer au côté de notre crise Ukrisis un incendie grondant qui a bien des chances de la dépasser en puissance déconstructionniste.
Une hypothèse de travail est que ce décor infernal et démoniaque où l’on mit en scène ce président dément est pour le moins un signe du Ciel.
Mis en ligne le 2 septembre 2022 à 18H40