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4534Un sondage id’un intérêt opportun vient d’être réalisé, s’adressant essentiellement à des citoyens américains ayant voté pour Trump dans des États (27 sur 51) aux mains des républicains. La question posée nous intéresse particulièrement puisqu’elle concerne un problème que nous ne cessons d’étudier, en arguant qu’il s’agit la voie que les USA, dans l’état d’extraordinaire antagonisme où ils se trouvent, vont être conduits à suivre. Cette question concerne la sécession et il est particulièrement important qu’elle soit posée à des électeurs de Trump, on va voir pourquoi.
Auparavant nous signalons que nous disons ce jour sur nos ‘Notes d’analyse’ quelques mots d’une interview du président de l’association Trump-France dont on voit qu’elle concerne ce sujet, concluant un passage sur l’état des forces armées US, et particulièrement de la Garde Nationale des États dans leur situation par rapport au Pentagone (qui veut un vaccin covidien pour tous ses soldats, sous peine d’expulsion), et par rapport aux gouverneurs des États concernés dont certains (notamment l’Oklahoma, le Texas et la Floride) ont une politique opposée à cet égard.
Voici le passage :
« Il est intéressant d’entendre l’avis du président de l’association Trump-France Georges Clément. Selon lui, la complexité des situations aux USA, autant que la polarisation des antagonismes politiques, conduisent à la possibilité de la sécession. Cette situation de la Garde Nationale au regard des initiatives fédérales guerrières, et Ukrisis dans ce cas, est un des faits politiques qui poussent dans ce sens et sont concrétisés notamment par le référendum sur la sécession qui a de grandes chances d’être organisé au Texas en 2023. »
Plus précisément, Clément dit, en fin d’émission, ce sont ses dernières paroles :
« ... Pour moi, les États-Unis vont exploser, alors soit sous forme de sécession, c’est le plus simple mais il faut que l’État soit homogène politiquement... soit sous forme de guerre civile... »
Déjà, la tonalité de la présentation de Clément nous étonnait. Même si Clément n’est à première vue pas censé être une voix importante du trumpisme, il reste qu’il exprime ses positions courantes. Sa présentation est marquée par deux tendances que nous reprendrons et développerons plus loin à la lumière du sondage qui justifie l’essentiel de cette analyse.
• D’une part, l’affirmation que la sécession est une option claire et opérationnelle de la politique US aujourd’hui (citation du référendum du Texas en 2023). La sécession est vue comme un des moyens, 1) de sortir de l’imbroglio juridico-judicaire où les USA sont embourbés au niveau fédéral, avec notamment et très récemment des attaques contre la juridiction suprême de la Cour Suprême (SCOTUS) ; 2) de regrouper territorialement, surtout du côté de la droite et des populistes, les camps de la fracture idéologique radicale et irréparable entre les deux pôles de la population.
• D’autre part, une appréciation d’un trumpisme assez peu véhémente pour ce qui concerne le rôle de Trump, comme si les partisans de Trump, et sans doute Trump lui-même, semblaient prêts à laisser aller un courant très fort qu’ils approuvent, sans prétendre y jouer un rôle prépondérant. Le fait que la sécession y est considérée comme elle l’est constitue un point de cette réserve, Trump n’étant pas jusqu’alors considéré comme un sécessionniste.
Vient alors le sondage. Il s’agit d’une enquête statistique de Yahoo/YouGov poll rendue publique hier et portant donc sur les électeurs de Trump, c’est-à-dire des populistes trumpistes mais aussi des républicains pas nécessairement trumpistes mais ayant voté pour le candidat républicain qu’il était en 2020. Cette enquête est ainsi présentée par RT.com, où l’on voit qu’à côté des opinions tranchées dans des sens opposées se trouvent un “marais” de 38% non décidés mais qui n’accordent aucune préférence de principe (constitutionnelle) au maintien de l’actuelle structure fédérale, devenant donc potentiellement, si les événements évoluent dans ce sens, un groupe d’acceptation tacite de la sécession. Ce dernier point est essentiel dans la mesure où les tensions énormes actuelles aux USA poussent à des issues de cette sorte.
« Environ 33% des électeurs de Trump dans les États dits rouges [républicains] disent qu'ils se porteraient mieux si leur État “devenait un pays indépendant”. En comparaison, 29% d'entre eux pensent que leur situation serait “pire” après la sécession. Les 38% restants sont soit incertains, soit considèrent que leur situation serait “à peu près la même” dans un nouvel État indépendant.
» La marge était similaire lorsqu'on a demandé aux Américains comment leur État dans son ensemble se porterait après la sécession, 35% des électeurs de Trump estimant qu'il s’en sortirait mieux, contre 30 % disant qu'il s'en sortirait moins bien. »
Dans un développement commenté de la situation politique à la lumière de ce sondage, l’article met en évidence, à la lumière d’autres enquêtes, un fait extrêmement important qui est que la très forte majorité des citoyens (des deux partis) font plus confiance aux autorités de leur État qu’au gouvernement central de Washington (ainsi, 80% des démocrates électeurs de Biden font plus confiance aux gouverneurs de leurs États qu’à Biden !).
« ... Ce sondage est la dernière illustration en date de la polarisation politique et de la division culturelle croissantes de la vie américaine. La moitié des Américains pensent qu'il y aura une autre guerre civile aux États-Unis au cours de leur vie et que le pays cessera d'être une démocratie à un moment donné, comme l'a montré un précédent sondage Yahoo/YouGov en juin.
» Le fossé s'est encore creusé avec la décision de la Cour suprême des États-Unis, le mois dernier, selon laquelle l'avortement n'est pas un droit constitutionnel protégé, laissant aux législateurs des États le soin de trancher cette question très controversée. Environ la moitié des États ont déjà interdit l'avortement ou devraient imposer de nouvelles restrictions à cette procédure au cours des prochaines semaines.
» Selon le dernier sondage, environ 92 % des électeurs des États [républicains] qui ont voté pour Trump font davantage confiance au gouvernement de leur État qu'au gouvernement fédéral pour faire “ce qui est le mieux”. Huit résidents sur dix des États [démocrates] qui ont voté pour le président Joe Biden en 2020 font davantage confiance au gouvernement de leur État qu'à celui de Washington. »
Le reste du sondage constitue l’enveloppe catastrophique à l’intérieur de laquelle il faut placer les résultats sur la sécession, et ceci justifiant sinon expliquant largement cela. Le (re)surgissement de la question de la sécession est la conséquence évidente de l’effondrement de la confiance dans le gouvernement central et des États-Unis dans leur structure actuelle.
« Seuls 15% de l'ensemble des personnes interrogées pensent que les États-Unis vont “généralement dans la bonne direction”, contre 72% qui disent qu'ils sont “sur la mauvaise voie”, selon le sondage. Seuls 27% pensent que Biden est “à la hauteur des défis auxquels les États-Unis sont confrontés”, contre 56% disant le contraire.
» Les Américains ont également une vision sombre de l'avenir, 46% d'entre eux estimant que la prochaine génération sera “moins bien lotie” et seulement 25% qu'elle sera “mieux lotie”. De même, 37% des électeurs pensent que les meilleurs jours de l'Amérique sont “derrière nous”, contre 31% qui disent que ces jours sont “encore à venir”. »
Le dernier paragraphe repris ci-après est aussi à mettre en évidence, pour nous donner une idée de la position de Trump, qui n’a rien à voir avec ce qu’on en pense généralement (nous-mêmes à certains égards, mais de moins en moins), – c’est-à-dire le sentiment plutôt automatique qu’une réélection de Trump “dans un fauteuil”, du fait de la catastrophe Biden, est assurée. Il n’en est rien.
« Ni Trump ni Biden ne sont considérés comme la solution. Seulement 28% des personnes interrogées disent que Trump devrait se représenter à la présidence en 2024, tandis que 18% disent que Biden devrait se représenter. »
A partir de ces diverses informations et données, on peut avancer une analyse de la position de Trump dans la vie politique US et par rapport à 2024, alors que le sentiment général jusqu’alors était qu’il devait être considéré comme le candidat assuré des républicains pour cette élection. Nous allons avancer plusieurs observations concernant aussi bien sa politique que ses capacités d’évolution vers le pouvoir ou plutôt vis-à-vis du pouvoir.
• Il y a d’abord une espèce de surprise, déjà réalisée en entendant Georges Clément (plus haut). Il s’agit de l’impression qu’on a que le discours trumpiste envisage la sécession d’une manière assez neutre, sinon éventuellement favorable. Pourtant, Trump ne nous a jamais paru sécessionniste, mais plutôt protectionniste/isolationniste d’une Amérique unie “à nouveau forte” (« Make America Great again » [MAGA]). Mais, comme le dit justement Bolton :
« ...[C’est] la façon dont [Trump] fonctionne. Lui, il ne fait que sauter d’une idée à l’autre. »
C’est-à-dire que Trump aurait admis que l’Amérique en l’état n’est plus très longtemps viable, et qu’il sauterait aisément à l’idée de la possibilité de la sécession dans un pays fracturé où les frères ennemis devenus maudits jusqu’à la mort ne peuvent plus vivre ensemble... Alors, lancer l ‘idée d’une nouvelle présidence dans un tel climat, cela vaut-il la peine ?
• ... D’autant que Trump se rend compte que s’il reste très populaire sur des “coups” (des meetings) ou lors d’interventions pour soutenir des candidats (et encore, pas toujours), sa popularité décline à l’avantage d’autres personnalités, – car le parti républicain, dans son aile un peu ou beaucoup trumpiste (populiste) n’en manque pas, – le gouverneur de Floride DeSantis, par exemple, qui est le favori des sondages républicain. Un gouverneur d’un très-grand État potentiellement sécessionniste figurerait beaucoup mieux dans une course à la présidence dont le rôle implicite pourrait être de liquider l’actuel système fédéraliste en place.
• Et puis, Trump à son âge (78 ans en 2024). Peut-être ne voudrait-il pas risquer de finir comme un Biden. Peut-être sa vanité s’arrangerait-elle de devenir une sorte d’inspirateur symbolique d’une riposte populiste au mouvement wokeniste, si nécessaire au prix d’un éclatement de la Grande République... Un titre de ‘Founding Terminator’, – un ‘Père fondateur de la Fin’, – lui irait comme un gant, non ?
• Il lui faudrait passer l’obstacle de l’enquête actuelle pour l’empêcher de se représenter, enquête grotesque bien entendu et faite pour satisfaire les fantasmes des élites-Système totalement intoxiquées, parvenir à la démentir, à écarter cette menace, être autorisé à se représenter, – et à ce moment-là n’en rien faire et passer la main à un DeSantis par exemple en s’installant sur l’Olympe des Grands Retraités.
• Mais d’ici 2024, il y a bien du temps à passer, et dans cette époque de compression accélérée de l’Histoire en métahistoire, qui peut prétendre nous dessiner l’avenir ? Certainement pas nous, – et il s’agit ici, dans ce texte, moins d’une prévision que de l’identification d’un climat à travers divers faits et tendances...
Mis en ligne le 16 juillet 2022 à 17H10