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5413Dans la situation américaniste actuelle, c’est une drôle de visite et de circonstance : le gouverneur de Californie Gavin Newsom passe quelques jours en Chine et rencontre le président Xi. Newsom est le troisième gouverneur de Californie à se rendre en Chine après Schwarzenegger et Jerry Brown. La visite de Jerry Brown avait soulevée des vagues, intervenant en juin 2017 après les terribles remous de l’élection de Trump à la présidence ; la Californie est un État super-antiTrump et des bruits de sécession couraient à cette époque, ou plutôt dès cette époque.
Voici quelques paragraphes de l’article de ‘The Hill’ consacré à la visite.
« Le gouverneur démocrate de Californie Gavin Newsom (D) a rencontré mercredi 25 octobre le président chinois Xi Jinping à Pékin – après avoir été chaleureusement accueilli par d’autres hauts dirigeants.
» Newsom effectue une tournée d’une semaine en Chine, où il fera pression en faveur d’une coopération climatique. Sa visite, autrefois habituelle, attire l'attention après des années de tensions accrues entre les États-Unis et la Chine, a rapporté l'Associated Press.
» “Je suis ici dans l’espoir, comme vous le suggérez, de tourner la page, de renouveler notre amitié et de nous réengager [sur] des questions fondamentales et fondamentales qui détermineront notre foi collective dans l’avenir”, a déclaré Newsom mercredi. »
“Hasard” amusant, voire passionnant, dont personne ne doit douter qu’il ait été favorisé par le choix des dates : dans quelques semaines Biden sera au sommet de la Coopération économique Asie-Pacifique à San Francisco, et peut-être Xi également, et peut-être y aura-t-il une rencontre, et peut-être n’y en aura-t-il pas.
Dans tous les cas, tout le monde remarque cette activité soudaine du gouverneur Newsom et, hier, dans leur segment commun, Mercouris et Christoforou ont fait un commentaire court mais hilare sur ce voyage de Newsom et sur la satisfaction que Xi semblait montrer de rencontrer un dirigeant américaniste qui ne soit ni fermé, ni brutal, ni complètement stupide et sénile.
Le voyage de Newson durant une semaine, il y a eu de multiples activités. On retiendra cette très courte mention d’une conférence à l’Université de Hong Kong où Newsom « s’est engagé à coopérer sur le changement climatique », dans quelque occurrence que ce soit, – et l’on vous recommande de lire avec une attention particulière le dernier membre de phrase :
« Dans un discours prononcé lundi à l'Université de Hong Kong, Newsom s'est engagé à coopérer sur le changement climatique quel que soit le résultat de la prochaine élection présidentielle américaine. »
Tous les commentaires se sont précipités sur la perspective d’un Newsom préparant une candidature-surprise contre le vieux débris de la Maison-Blanche. Il est assuré que Newsom a plus d’allure, de vivacité, de sûreté de langage et de jugement que l’autre ; il bénéficie aussi d’une réelle notoriété et d’une position de puissance à mesure de la puissance de la Californie. C’est donc une hypothèse plausible, d’autant plus plausible qu’on se demande comment il a fallu attendre si longtemps pour évoquer la possibilité d’une candidature sérieuse aux primaires contre Biden, – vue la catastrophe, l’impopularité, etc., de Biden.
Pour autant, tous les augures ne sont pas favorables à Newsom, en nous tenant au seul débat chez les démocrates. Nous voyons deux obstacles principalement.
• Il n’est nullement assuré que le parti démocrate, totalement pénétré par le DeepState soit séduit par Newsom. Aussi incroyable que cela puisse paraître, Biden garde ses partisans, essentiellement à cause de sa propension à adopter tous les projets de guerre qu’on lui présente. L’irresponsabilités de l’actuel président, bien encadré par une “garde prétorienne” de neocon qui ont toute sa tendresse. Dans ce domaine, le voyage de Newsom à Pékin, son entretien avec Xi sont considérés avec une intense méfiance, pour ne pas dire une franche hostilité, d’autant (voir plus loin) que c’est là une habitude suspecte des gouverneurs de Californie d’entretenir des liens spécifiques avec la Chine qui est un puissant partenaire commercial avec le grand État de la côte Ouest, en vis-à-vis par-delà le Pacifique.
On a noté également un voyage discret de Newsom en Israel, après le 7 octobre. Il s’agit peut-être, dans cette optique, d’un effort pour s’attirer les faveurs de l’électorat juif ; “peut-être” seulement, car une autre interprétation est possible comme on le voit plus loin.
• Il ne faut pas oublier que Newsom, qui fait des siennes avec une puissance que les interventionnistes veulent attaquer, – et les républicains autant sinon plus que les démocrates, – est sur les matières sociétales du wokenisme et tout ce qui les accompagne classé à la gauche de l’ultragauche. (C’est d’ailleurs un aimable paradoxe dans ses relations avec la Chine, qui déteste ces pseudo-idéologies considérées comme décadentes et dégénérées.) C’est un énorme handicap vis-à-vis d’une partie importante de la population US, y compris et de plus en plus dans les minorités. On dira que Biden en fait presque autant, mais avec la discrétion du vieillard atteint de démence.
En tout état de cause, si Newsom arrivait à une candidature, sinon à la présidence, il serait vite perçu comme un extrémiste promis à plus encore diviser l’Amérique.
Il y a très longtemps, dans la séquence actuelle, pratiquement depuis son début (2015-2016 et l’élection de Trump) que la Californie figure comme un État continuellement tenté par l’une ou l’autre sorte d’autonomie, voire de sécession (voir notre texte, assez complet, du 18 décembre 2016). Newsom a Pris la suite de Jerry Brown, parfaitement dans la même ligne, qui comprend justement des liens spécifiques de l’État avec la Chine sans se soucier de la politique nationale et en clamant l’alibi de la recherche d’une politique climatique commune.
Dans cette logique, on peut revenir sur sa visite en Israël et constater qu’il s’est agi d’un déplacement de courtoisie sans prendre position trop nette sur l’opération contre Gaza, dont Newsom sait qu’elle est très impopulaire chez les juifs américanistes, très libéraux et progressistes. Par contre, Newsom a besoin du soutien des juifs, notamment des milliardaires juifs qui foisonnent dans la région d’Hollywood, pour son soutien financier.
Par conséquent notre appréciation du déplacement de Newsom en Chine, de sa rencontre avec Xi, reste très mitigé. Depuis 2015-2016, la sécession de la Californie reste une option vivace dans l’esprit des gouverneurs, surtout si l’on considère :
• Le chaos complet de la politique fédérale, tant intérieure qu’extérieure ;
• L’aisance potentielle de l’attrait d’une sécession, dans cet énorme État de près de 40 millions d’habitants, où la minorité majoritaire est désormais Latino, et qui est loin d’avoir la fibre patriotique et unificatrice des USA des origines ;
• L’évidence qu’offrirait une solution de sécession si les USA sombrait dans des évènements très graves et des blocages institutionnels lors des présidentielles de 2024 ;
• L’appui éventuel quoique très discret de la Chine si une telle mécanique se déclenchait dans cette période.
C’est ici que l’on peut revenir, pour en terminer, sur l’assurance de Newsom de poursuivre une politique de coopération étroite avec la Chine, « quel que soit le résultat de la prochaine élection présidentielle américaine ». Newsom gouverneur poursuivra, après 2024, une politique qui signera le rapprochement de la Californie en tant qu’État (et même, nominalement, de “république indépendante”, avec la Chine).
Mis en ligne le 29 octobre 2023 à 17H20