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5678« Tucker Carlson : “Nous avons franchi le point de non-retour...” »
« Jonathan Turley sur l'inculpation du président Trump : “C'est plutôt scandaleux. C'est juridiquement pathétique.” »
Ces deux jugements sur l’inculpation, ou mise en accusation de l’ancien président Trump, candidat pour la présidence en 2024, viennent à point pour résumer la vigueur et l’ampleur de l’effet produit par l’annonce du procureur Alvin Bragg, du district de Manhattan, New York. Tucker Carlson, présentateur hyper-vedette de FoxNews, est un populiste et un libertarien, partisan de Trump mais assez modérément ; Jonathan Turley est un démocrate, adversaire de Trump mais surtout le meilleur constitutionnaliste des USA.
Turley écrit aujourd’hui, à propos d’une décision qui est une première dans l’histoire des États-Unis :
« Le procureur de Manhattan, Alvin Bragg, est enfin entré dans l'histoire. Il a inculpé l'ancien président Donald Trump dans le cadre d'une enquête, peut-être pour des paiements occultes. Nous attendons tous de voir le texte de l'acte d'accusation pour confirmer le fondement de cet acte sans précédent. Mais l'histoire dans cette affaire, – et dans ce pays, – n'est pas du côté de Bragg. »
Turley écrit aussi que la meilleure qualité de Trump, c’est de faire apparaître publiquement ce qu’il y a de pire chez les gens. On ne le contredira pas vraiment : avec cette affaire, Trump a de quoi faire jaillir de l’hystérie extraordinaire de ses ennemis démocrates (et même quelques républicains) le pire de la production de cette hystérie ; ce dont Trump fera bien entendu son miel... Tout cela, d’ici 2024, y compris si, par extraordinaire, – vraiment cas extraordinaire du fait de tous les incidents et les procédures qui nous attendent, – Trump était en prison, car une personne emprisonnée a le droit constitutionnel de se présenter à la présidence des États-Unis...
Envahi depuis quelques mois sinon quelques années par un des soubresauts de dégoût pour l’état politique du pays, Turley avait donc envisagé l’avenir de Trump s’il était inculpé comme il vient de l’être (le 27 mars 2023) :
« À Washington, le ministère de la justice s'occupe du désordre créé par le président Biden, qui a publiquement exprimé son dégoût à l'idée même que Trump possède des documents classifiés à Mar-a-Lago : “Comment cela a-t-il pu se produire ? Comment quelqu'un, n'importe qui, pourrait être aussi irresponsable ”? C'était avant que l'on découvre que Joe Biden possédait des documents classifiés remontant à plus de dix ans dans divers endroits, y compris dans son garage du Delaware.
» En fin de compte, c'est le calendrier plutôt que les crimes qui pourrait déterminer l'avenir de Trump.
» Aucune de ces affaires n'est susceptible de faire l'objet de poursuites complètes avant l'élection présidentielle de 2024, à supposer qu'elles survivent aux contestations attendues. Et même si Trump est condamné, cela ne l'empêchera pas de prendre ses fonctions. La Constitution limite les conditions d'accès à la présidence aux personnes âgées d'au moins 35 ans, aux citoyens nés naturellement et aux résidents américains depuis au moins 14 ans.
» Il est peu probable que Trump voie l'intérieur d'une prison avant l'élection. Même après l'élection, les tribunaux autoriseraient probablement l'épuisement des recours avant d'ordonner l'arrestation d'un président en exercice, – et ces recours pourraient prendre des années.
» En ce qui concerne l'accusation fédérale, le conseiller spécial Jack Smith devra terminer son enquête du grand jury et convaincre le procureur général Garland de donner son feu vert à des poursuites pénales. Il pourrait alors être amené à déposer un acte d'accusation avant la fin de l'été 2024, la politique du ministère de la justice décourageant les dépôts de plainte susceptibles d'affecter une élection. Pour l'élection présidentielle, cette période s'étendrait probablement jusqu'en août 2024.
» Si Smith ne peut pas inculper Trump avant cette date, il se heurtera à une autre politique de longue date du ministère de la justice. Ce dernier a longtemps soutenu (à tort selon moi) qu'un président en exercice ne pouvait pas être inculpé.
» Si Smith obtenait une condamnation avant l'élection, Trump pourrait encore rester en lice. En effet, même s'il était emprisonné, il pourrait être élu président. Eugene Debs s'est présenté à l'élection présidentielle de 1920 sous l'étiquette socialiste alors qu'il était en prison pour avoir violé la loi sur l'espionnage. »
Après tout, qui pourrait se plaindre d’une telle avancée du désordre, – non, du bordel à ‘D.C.-la-folle’, qui ne mérite pas mieux ? Il y a huit ans, l’obsession trumpiste a saisi toute une partie de l’Amérique, et le parti démocrate principalement, à partir des diverses cochonneries réalisées par Hillary Clinton et qu’il fallait bien couvrir ; Vladimir Poutine n’avait plus qu’à envahir l’Ukraine en lançant le ‘Russiagate’ pour achever la mise en pièces de la scène. L’enchaînement antiSystème-bouffe de l’aventure trumpiste est vraiment un don du Ciel, malgré le fascisme rampant comme une Gorgone et les divers centres complotistes à l’œuvre (le procureur Bragg a été élu grâce aux fonds Soros, sauvegarde économique du Camp du Bien).
Ainsi Turley termine-t-il sa chronique ironique du destin de Donald Trump, par une séquence non moins ironique du Paul Newman de ‘Luke la main froide’. Pour la plupart des commentateurs, c’est un épouvantable désordre que du rien puisse sortir une “main gagnante” ; pour la GrandeCrise, c’est une opportunité.
« Pour la plupart des gens, cela peut ressembler à un véritable gâchis. Pour Donald Trump, c'est une opportunité. Il a toujours su tirer profit du chaos. C'est pourquoi, si une grande partie du public continue à considérer ces affaires judiciaires comme des poursuites politiques, les démocrates sont peut-être en train de donner à Trump une main gagnante.
» Un éditorialiste du Washington Post a déclaré précédemment que Trump n'avait rien à offrir pour se défendre contre les accusations fédérales. C'est peut-être vrai mais ce “rien” pourrait s'avérer un “quelque chose” d’essentiel en cette année électorale.
» Dans le film ‘Cool Hand Luke’, des prisonniers demandent au personnage de Paul Newman pourquoi il augmente continuellement les enjeux d'une partie de poker alors qu’il n’a rien en main. Sa réponse est la suivante : “Parfois, un rien peut vous donner une main vraiment cool”. »
Mis en ligne le 31 mars 2023 à 16H00