Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.
5784Jeudi dernier, le président Biden a nommé le général Charles Q. Brown (surnommé ‘CQ’) président du Comité des Chefs d’état-major (JCS) à partir d’octobre prochain, date de départ de cette fonction du général Milley. C’est un événement important parce qu’on a pu voir, avec la période Milley (deux fois deux ans) le rôle politique que joue désormais le président du JCS du fait de l’affaiblissement radical du pouvoir politique, de la radicalisation des deux tendances qui s’affrontent, et parallèlement du fractionnement extrême, de la tension et des conditions de crise dans la population. La nomination de ‘CQ’ est d’autant plus importante que c’est un Africain-Américain, bien entendu le premier à occuper cette fonction, et qu’il vient du commandement de l’USAF, où il fut également le premier Africain-Américain à occuper la fonction de commandement d’une des branches des forces armées.
Avec Llyod Austin comme ministre, le Pentagone sera en octobre complètement sous la direction d’Africains-Américains au moment où un mouvement de transformation radicale dans le sens du wokenisme parcourt les forces armées. On peut même dire que les forces armées et le Pentagone ont constitué le principal objectif de la ‘wokenisation’ des pouvoirs publics lancée à marche forcée par l’administration Biden.
« Dans l'armée de Biden, ‘woke’ est si important que les mandats et les changements ont entraîné des pertes de recrutement dans tous les domaines, et pourtant Biden et Milley ont refusé de modifier leur orientation... »
Puis là-dessus et pour nous rassurer, on ajoute cette précision électorale qui montre l’aspect utile des bons sentiments...
« Promouvoir le premier président noir du JCS aura pour objectif politique de regagner une partie des 30 % de Noirs que Biden a perdus depuis l'élection. »
Ces jugements sont de la lieutenant-colonel Karen Kwiatkowski, de l’USAF, qui avait quitté avec pertes et fracas le service actif en avril 2003 après avoir travaillé dans l’équipe du sous-secrétaire à la défense pour la politique Douglas Feith, créateur et chef de l’OSP (‘Office of Special Plans’, organisme de renseignement parallèle autorisé à l’époque par Rumsfeld, que Kwiatkowski dénonça comme complètement illégal). Kwiatkowski s’est d’abord largement investi comme antiSystème dans la presse alternative et dissidente, jusqu’à ces dix dernières années où elle a vécu plus retirée. C’est dire que son jugement, recueilli par ‘SputnikNews’, s’appuie sur une expérience subversive solide mais manque d’une certaine actualisation, non seulement sur l’homme mais sur le climat politique.
Le portrait de ‘CQ’ que fait Kwiatkowski est donc conventionnel sinon suranné même s’il est indépendant dans le sens d’être antiSystème. En effet, ce portrait met l’accent sur des domaines importants mais spécifiques aux seules forces armées et sans beaucoup d’interférences politiques. Même si elle relève l’aspect ‘Woke’ de la nomination, Kwiatkowski ne lui accorde certainement pas l’importance polémique et dynamique qu’elle mérite bien qu’elle ait mentionné cette importance d’une façon théorique ou dans l’historique très-récent.
« Brown est connu pour être un leader terre-à-terre, intelligent, collaboratif et très à l'aise avec la technologie. Il a été pilote instructeur sur F-16. C'est un Texan, diplômé de Texas Tech en génie civil, engagé dans le cadre du ROTC et diplômé de l'Embry-Riddle Aeronautical University. Le contraste est saisissant avec Mike Milley, diplômé de Princeton, originaire du Massachusetts et titulaire d'une maîtrise en relations internationales de Columbia. »
Kwiatkowski relève que Milley s'est avéré être un homme de confiance dans l'administration Biden en ce qui concerne le conflit en Ukraine, le wokenisme dans l'armée et d'autres priorités de Biden pour l'armée. Elle semble ainsi juger que Brown apporterait une attitude des militaires plus indépendante du pouvoir actuel, très progressiste et ô combien ‘Woke’. A cet égard, elle semblerait considérer Brown n’est pas à proprement parler ‘Woke’ mais qu’il est, de façon plus conventionnelle, simplement en faveur de l’intégration raciale.
Kwiatkowski estime que Brown assurera la principal mission des chefs militaires aujourd’hui qui est « de s'assurer que le président n'engage pas les Etats-Unis dans une guerre avec la Russie ou la Chine » puisque, selon elle, ils reconnaissent que les États-Unis ne sont pas actuellement prêts pour un tel conflit d’une part, et que les présidents qui se succèdent depuis Obama sont du type “incontrôlable”. Par contre, Brown devrait accélérer la poursuite du développement de programmes (les engins hypersoniques, notamment) qui permettraient d’envisager un tel conflit, sans qu’on sache pour autant s’il y est favorable.
Il y a enfin la question de l’attitude des chefs militaires vis-à-vis de la situation d’énorme gaspillage et de corruption, d’inefficacité budgétaire, d’encalminement de nombre de technologies, bref de ce qui est la crise endémique du Pentagone. C’est-à-dire, par le biais courant pour le Pentagone, les relations avec le Système (ou le DeepState) comme force centrale. Kwiatkowski ne tranche pas définitivement maos il ne nous semble pas qu’elle entretienne beaucoup d’espoir à cet égard.
« Ses prédécesseurs, comme Milley, ont été les porte-drapeaux et les serviteurs empressés du système actuel, avec son incapacité répétée à fournir des résultats et à innover, tout en se ruinant d'année en année. Si le général Brown s'avère ne pas être un béni-oui-oui pour les néoconservateurs de Washington, en raison de son expérience, de son caractère et de sa race, ils seront politiquement incapables de l'écarter ou de le mettre sur la touche. Nous verrons bien. »
Le texte de Daniel Greenfield, sur le site ‘FrontPage.org’, dirigé par David Horowitz, est d’une toute autre tournure. Horowitz est un soutien radical et déchainé de Trump, largement de la droite radicale, également sioniste mais opposé avec une extrême violence au wokenisme qui a pourtant des liens étroits avec les neocon dont Horowitz devrait être proche vu la tendresse des neocon pour le sionisme ; mais passons... Mais non ! Disons plutôt que tout cela constitue la conséquence constante et sans cesse grandissante de l’incroyable complexité entravé d’innombrable contradictions de la situation politique US.
Le texte de Greenfield sur ‘CQ’ est du vitriol pur, sans retenue, sans concession aucune : « Milley était mauvais, avec Brown ce sera pire. » Une bonne conscience courante et conforme vous dirait, vu l’effet de peau de ‘CQ’, que nous sommes dans l’insupportable “discours de haine” qui nous bouleverse continuellement et nous fait gémir sur l’ontologie de la personne non-conforme aux canons du Système.
« Sous le commandement du général Brown, l'armée de l'air est devenue la branche militaire la plus wokeniste.
» Brown s'est déshonoré et a déshonoré son uniforme pendant les émeutes raciales de Black Lives Matter en publiant une vidéo dans laquelle il “semblait à peine contenir sa rage” tout en fulminant “que les idéaux de la Déclaration d'indépendance et de la Constitution 'que j'ai juré de soutenir et de défendre pendant toute ma vie d'adulte' n'ont pas toujours apporté 'la liberté et l'égalité' à tous”. »
Il est donc évident qu’on doit observer une approche de ‘CQ’ complètement différente de celle de Kwiatkowski. Bien entendu, l’explication se trouve dans l’importance politique que Greenfield et Horowitz donne au mouvement wokeniste ; mais en plus, ils ont de nombreuses références sur les chiffres, de recrutement notamment, et des effets probables sur les structures de la force aérienne qui est une arme où l’expérience technique et technologique du personnel joue un très grand rôle. Encore ne tient-on pas compte du climat psychologique et moral que cette sorte de situation amène dans les rangs, là aussi dans une arme qui demande une très forte coordination et une grande confiance entre les différents acteurs opérationnels.
« L'année dernière, Brown, ainsi que la sous-secrétaire de l'armée de l'air Gina Ortiz Jones, première femme homosexuelle et philippine à occuper ce poste, et d'autres dirigeants, ont signé l'un des documents racistes les plus choquants et les plus destructeurs jamais produits par une armée moderne, – un mémorandum sur les quotas d'officiers fixés en fonction de la race et du sexe.
» Des quotas similaires avaient été établis par des personnes nommées pour des raisons politiques dans une armée politiquement correcte, mais ils s'étaient concentrés sur l'augmentation progressive du nombre d'officiers issus des minorités plutôt que sur une purge des hommes blancs.
» Les quotas de 2014 visaient un corps d'officiers composé à 80% de Blancs, à 10% de Noirs et à 8% d'Asiatiques. Bien que le fait de choisir des officiers en fonction d'une catégorie raciale plutôt que de leur mérite soit raciste, répréhensible et illégal en vertu de la législation sur les droits civils, cela ne correspondait pas à la purge raciste proposée par M. Brown.
» Les quotas proposés par Brown limitent le nombre d'officiers blancs à 67% et réduisent le nombre d'hommes blancs à 43%.
» Le corps des officiers de l'armée de l'air est actuellement composé de 77% d'hommes blancs : le ramener à 67%, soit une réduction de 10%, nécessiterait de gros efforts pour purger les officiers blancs et interdire l'accès à tout nouvel officier. Réduire le nombre d'hommes blancs dans le corps des officiers à une minorité, 43%, paralyserait le service et anéantirait des générations de talents, surtout lorsque 86% des pilotes sont des hommes blancs. »
Greenfield termine ce passage par cette question : « Que faire de ces 86 % de pilotes blancs ? » Vaste question... Il est vrai que ces différentes mesures, que Brown président du JCS devrait imposer à toutes les armes, vont très-probablement accélérer d’extraordinaires désordres au niveau du personnel de service, de l’entretien et de la logistique des système autant que de leur opérationnalité, – plus encore dans ces armées super-sophistiquées où la compétence technique doit nécessairement être renforcée et adaptée à l’opérationnalité par l’expérience et la pratique. Il s’agit d’un énorme problème et l’on se demande comment des officiers de haut rangs, qui ont eux-mêmes servi, – c’est le cas de ‘CD’, qui fut instructeur sur F-16, – peuvent se lancer dans de telles mesures d’une manière aussi brutale et aussi tranchée.
Pis encore, le climat politique ne va pas y aider, lorsqu’on voit une administration Biden envoyer pour le discours annuel à West Point la plus sotte d’entre toute : « Nos armées sont d’autant plus forte qu’elles reflètent complètement le peuple d’Amérique et sa diversité », a dit Kamala Harris aux cadets émerveillés. L’événement fut métahistorique dans cet exercice de la bêtise où excelle la vice-présidente. L’avenir des forces armées des États-Unis nous paraît bien sombre à cet égard.
Note de PhG-Bis : « Lisant ce texte, PhG s’arrête au passage où est décrit l’aggravation constante de la capacité opérationnelle des avions de combat de l’USAF depuis 2020, année où ‘CQ’ en devint le chef d’état-major. Ainsi passe-ton de 76% à 68%, à 54% en 2022. Ces chiffres concernent le F-35, ce qui nous place face à un fâcheux dilemme : est-ce la catastrophe technologique qu’est le JSF où la politique de ‘QC’ limitant nécessairement l’application des références de compétence et de mérite qui sont responsables ? “Les deux, mon général”, répond respectueusement PhG, qui voit dans cette alliance entre le F-35 et le ‘Woke’ un indiscutable signe du ciel et la démonstration symbolique liant le technologisme en phase terminale et la communication devenue affectivisme pur. »
» “Pour le reste, ajoute PhG, on pourrait envisager d’affecter les 86% de ‘pilotes blancs’ au nettoyage et au dépoussiérage des F-35 qui sont interdits de vol pour diverses raisons, notamment et sans doute en raison des quotas raciaux qui ont détecté un fort grand nombre de F-35 qui dissimulent leur ‘blanchitude’ sous un camouflage de circonstance... »
On termine ce pamphlet rageur par cette précision anecdotique qui précise l’ampleur de l’affectivisme qui règne chez les Africains-Américains arrivés aux postes de responsabilité les plus sensibles, ceux où le sang-froid est le plus nécessaire, – ici la direction des forces nucléaires stratégiques, ce qui n’est pas rien... Il existe donc un domaine où la bienpensance de notre civilisation est parvenu à une complète égalité : le sentiment de la victimisation...
« Anthony Cotton, le commandant du commandement stratégique des États-Unis, a déclaré : “lorsque je vois ce qui est arrivé à Ahmaud Arbery, Breonna Taylor, George Floyd, Rayshard Brooks, – et la liste est encore longue... cela pourrait être moi”.
» L'année dernière, Cotton a affirmé que “la diversité et l'inclusion sont des outils de défense nationale” et que la diversité est un “impératif de guerre”. Au début de l'année, six officiers de l'armée de l'air ont été licenciés pour avoir échoué à des inspections nucléaires de sécurité, mais Cotton a été promu. »
La rage est patente chez Greenfield/Horowitz tandis que le point de vue d’une Kwiatkowski semble, lui, venu d’un autre temps, du temps d’avant le wokenisme, – le temps où l’on n’imaginait pas une seconde que cette folie sociétale prendrait les proportions qu’elle a prises effectivement, – et qu’elle ne cesse de développer, en vérité ! Ce n’est pas critiquer Kwiatkowski que dire cela, puisqu’on la sait retirée et loin de tous les bruits de la GrandeCrise... Elle n’a aucunement pris la mesure du phénomène parce que cela paraît si complètement fou et hystétique.
Nous-mêmes n’avons rien vu venir du wokenisme, nous étions un peu comme Elizabeth Lévy se décrivant il y a quelques années face à la montée de la chose :
« Il y aussi une gauche qui n’existait pas, pour moi, lorsque ... lorsque j’ai écrit ‘Les Maîtres-censeurs” [en 2002]... Cette gauche-là n’existait pas... Vous n’auriez pas eu des gens défendant des réunions non-mixtes, ou défendant toutes ces âneries qui nous paraissaient... Moi, ce qui m’a frappé dans l’évolution idéologique... C’étaient des choses qui nous paraissaient des blagues, qui nous faisaient rire, l’écriture inclusive, les délires féministe... Moi, ça me paraissait... Je ne prenais pas ça au sérieux, cela me paraissait... Je dois vous le dire, je trouvais ça rigolo, tellement c’était dingue... Et puis moi, j’aime bien rire, donc... Et puis, ces poissons d’avril sont devenus notre quotidien, dans tous les cas le quotidien de ce qu’on entend à la radio, à la télé, dans les médias... A l’université ! Donc ça, je trouve çà assez frappant comme phénomène... »
Même si ‘Causeur’ n’est pas l’USAF et le Pentagone, nous sommes sur le même territoire, avec d’énormes institutions, à la puissance formidable, qui sont brusquement secouées, menacées d’être réduites en poussière, comme si elles étaient mangées par des termites. Car c’est bien le sort qui se profile pour le Pentagone si un Brown et un Biden continuent à opérer comme on les voit faire.
Comme dit Kwiatkowski, – et là, au moins, il faut lui rendre justice car elle a fichtrement raison (simplement, elle ne tire pas les conséquences, s’arrêtant à la manœuvre électorale) : « Dans l'armée de Biden, ‘woke’ est si important... » Pour l’Amérique de Biden, le ‘Woke’, c’est l’équivalent de l’hypersonique, n’est-ce pas ; c’est un “impératif de guerre”, comme dit le général Cotton qui commande les forces stratégiques et nucléaires et qui pourtant émet ce stupéfiant jugement... A quoi pensent ces gens chargés de si importantes missions ? Bientôt, ils inspecteront les charges nucléaires pour vérifier si elles respectent les quotas, et s’il le faut il les remplaceront par des ogives de couleurs différentes que les S-500 russes auront pour impératif de respecter au risque, s’ils ne le font pas, d’être accusés de racisme.
Si Biden reste et puisqu’à son âge on persiste et signe, tout se passera bien dans le chemin des armées américanistes vers leur tombeau. Si Trump est élu, il y aura du sport entre le Pentagone et la Maison-Blanche, et fort probablement à l’intérieur du Pentagone car l’on se doute que tous ne sont pas précisément heureux de la tournure prise par les événements.
Mis en ligne le 29 mai 2023 à 14H50