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69412-01-2025 (18H10) – Choisissons deux sujets très différents, pourtant complémentaires, pour projeter quelques impressions contrastées sur le désordre américaniste. Le premier concerne la cérémonie d’investiture de Trump, le lundi 20 janvier ; le second concerne les incendies monstrueux autour de Los Angeles, dans des fronts de mer prestigieux (et très-chics/très-chers).
Bien entendu, il faut prendre ces deux événements comme deux crises simultanées, comme à peu près ce qui se passe d’une quelconque importance politique aux USA aujourd’hui.
A la prestation de serment de Trump, le lundi 20, il y aura beaucoup de présents et quelques absents remarqués. On s’attache à deux des absents, et sachant bien sûr, à la vitesse du temps, que les choses peuvent changer d’ici le 20 janvier.
• Le silence d’Ursula von Leyen à propos de Trump est assourdissant. Bien sûr, il y a sa “sévère bronchite”. Il y a aussi le fait qu’elle n’a pas été invité. Trump marque ainsi sa distance plus qu’hostile vis-à-vis de l’UE de Bruxelles, et peut-être sa proximité du tandem Fico-Orban, – PM slovaque et hongrois, – que van Leyen hait littéralement et qui le lui rendent bien.
Le silence de von Leyen contraste avec la véhémence quasiment anti-américaine de Kallas, qui assure que, s’il le faut, l’Europe se passera des USA pour faire gagner l’Ukraine et défiler dans Moscou débarrassé de Poutine. Conclusion(s) : von Leyen a plus d’expérience que Kallas, et son dossier-CIA est plus fourni.
• Le Premier ministre Netanyahou a annulé sa venue à la prestation de serment. Drôle de drame, on le croyait ami pour la vie avec Trump. La commentatrice très écoutée du site indien ‘FirstPost’, Palki Sharma, explique que l’Israélien a pris cette décision après qu’une vidéo soit passée sur la chaîne de Trump, sur laquelle on entend le professeur Jeffrey Sachs qualifier Netanyahou de « Obsessed deep, dark SB » (traduit sans précautions propres aux orateurs US : « Sale et sombre fils de pute obsédé »), – cela en plus d’autres qualificatifs plus courants (“criminel de guerre”, “contre l’humanité”, etc.).
Il s’agit, semble-t-il, d’un passage d’une rencontre entre Sachs et Tucker Carlson, dans des termes qui sont repris par Sachs dans une rencontre à trois sur ‘TheDuran’, entre Sachs, Alexandre Mercouris et Glenn Disens. L’on y entend effectivement un Sachs, d’habitude si posé, déchaîné notamment contre Netanyahou.
Sharma qui note que Trump s’est montré très chaleureux directement ou indirectement pour Israël jusqu’à mercredi, s’interroge sur ce “changement d’attitude” :
« Que s’est-il passé en 24 heures ? Trump a-t-il complètelment change de politique ou bien n’a-t-il pas écouté toute l’intervention puisque le résumé écrit ne mentionne pas cette diatribe contre Netanyahou. Dans les deux cas, ce n’est pas rassurant : soit une politique changeante avec brutalité, soit la mise en ligne de post sans vérification... »
Bref, du vrai Trump ; et, je le reconnais, je serais plutôt pour l’erreur de trajectoire. Dès lors, faisons une hypothèse : une manière de rattraper le coup aurait été la violente diatribe du général Kellogg, envoyé spécial de Trump un peu partout dans les crises de la zone, contre l’Iran, ennemi “obsessionnel” de Netanyahou.
• Au fait, Sachs sera-t-il invité le 20 janvier ? S’il est involontairement impliqué dans le sac de nœud que tente de démêler Sharma, il est aussi l’auteur d’une appréciation extrêmement élogieuse de Trump, qui rend la Maison-Blanche au bois dormant de Biden furieuse et contrecarre ses plans de lancement d’une nouvelle guerre la semaine prochaine. Il s’agit bien entendu de la phrase où Trump justifie sans réserve la politique ukrainienne de la Russie depuis l’origine, rejetant toute la faute sur l’OTAN.
Lisez donc ce qu’en dit ‘Pravda USA’, évidemment la meilleure source possible pour ce genre de coup :
« Trump a déclaré qu'il comprenait les vues de la Russie sur l'élargissement de l'OTAN. Comme l'a noté le professeur Jeffrey Sachs de l'Université Columbia dans une interview à la chaîne YouTube TheDuran [émission signalée plus haut], ces mots sont parmi les plus importants de la politique américaine depuis des années.
» Rappelons que le président élu a souligné que la position de la Russie sur l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN est compréhensible, car Moscou répète depuis de nombreuses années qu'il n'accepte pas les liens entre Kiev et l'alliance occidentale. Le conflit qui en a résulté s'est transformé en fiasco pour la Maison Blanche, a ajouté Trump.
» Jeffrey Sachs a déclaré que “c'est le point-clef, la principale explication de tout ce que nous avons vu”. En conséquence, la Maison Blanche est furieuse et le peuple des États-Unis est ravi.
» Il a rappelé qu'il existait depuis longtemps aux États-Unis un tabou tacite interdisant de discuter publiquement des véritables causes du conflit en Ukraine.
» “Et Trump l'a dit clairement et précisément”, a-t-il ajouté.
» Et cela, selon lui, “crée vraiment la base pour mettre fin à la guerre”. »
Du coup, on peut comprendre pourquoi Trump a passé la vidéo de Sachs les yeux fermés. Maintenant, il va falloir réparer les dégâts sinon l’AIPAC va affréter un B-52 de l’USAF pour saluer la prestation de serment. A moins que Trump soit passé à autre chose...
Sharma a raison : Trump « n’est pas rassurant ». Mais c’est là tout son charme et son affirmation qu’il est effectivement un homme de son temps, l’homme de la Fin des Temps, exactement celui qu’il nous faut.
Il est vrai que les énormes incendies de Los Angeles, qui ne s’arrêtent pas qui dévorent les plus belles plages de Pacific Pallisades et Malibu, qui crament comme des allumettes les maisons à plusieurs $millions des stars, prennent de plus en plus cette puissance symbolique dont on parlait récemment (moi-même, d’ailleurs).
Là-dessus, je vais m’effacer pour citer un texte d’une madame Elena Karaova, de RIA Novosti, – une Russe, bien entendu, la Russie meilleure source (bis) pour cette sorte d’affaire ;– elle prend la tragédie exactement sous les angles qui importent : la fin d’un “Empire”, la fin d’un “rêve”.
Ecoutez-la, lisez-la nous décrire le retour du ‘Wild West’, de l’Ouest sauvage, que n’a jamais cessé d’être la Californie, en vérité. « Californian Dream », chantaient-ils...
« L’un des quartiers les plus chers de Los Angeles est en flammes. Les flammes ont déjà consumé des milliers de maisons valant des dizaines de millions de dollars chacune. Des écoles privilégiées, des cliniques incroyablement chères et des magasins tout aussi chers brûlent. Plusieurs centaines de milliers de personnes ont été évacuées de force, et les autres ont été complètement privés de gaz, d'eau et d'électricité. Les téléphones portables, ou toute autre connexion, ne fonctionnent pas. Des pillards fouillent les cendres. Les lois ne s'appliquent plus. Les règles encore moins. Le Far West est revenu à ses anciennes mœurs, plus caractéristiques que le politiquement correct imposé. C'est pourquoi le nombre de personnes brûlées vives est annoncé à contrecœur et avec réserve : “Pour ce qu’on sait actuellement”. Le fait que la liste des victimes ne soit pas définitive (jusqu'à présent, on y compte 13 personnes) est clair pour tout le monde, même sans ces astuces.
L'impensable s'est produit pour l'Amérique : l'argent – et même des sommes scandaleusement énormes, le bien-être et la richesse ont cessé d'être une mesure de sécurité face à une catastrophe naturelle majeure. Il s’est avéré que, à part dépenser des milliards sans valeur, les Américains ne savent rien faire d’autre. Ils n’ont ni courage, ni cohésion, ni capacité d’entraide, ni compassion.
L’histoire d’un paralytique qui s’est enfui de l’incendie de son home sur une autoroute en fauteuil roulant (il a “roulé” pendant une heure jusqu’à atteindre une station-service et le motel le plus proche) est un exemple pour ceux qui croient encore à “l’entraide américaine”.
Puisque c’est sur cette expression que se termine l’extrait ci-dessus, on est conduit à enchaîner sur des considérations comportementales et psychologiques que cette catastrophe met en évidence. Cette crise qu’est cette addition d’incendies encerclant Los Angeles met en évidence la crise du caractère américain, qui fut toujours latente à cause de l’écrasant individualisme et l’absence de racines communes, mais qui devient aujourd’hui criante, hurlante, grondante comme les flammes des brasiers.
Il est vrai que, devant cette évidence américaniste, les slogans trumpistes paraissent bien vains. C’est pour cette raison qu’il faut surtout attendre d’un Trump, nullement une solution-miracle qui n’existe pas et qu’il ne saurait certainement pas créer, mais ce désordre, cette fureur , qui finiraient par ébranler mortellement le Système et libéreraient les esprits de la prison où ils ont accepté d’être enfermés.
« Les incendies de Los Angeles ne brûlent pas seulement des gens, leurs animaux de compagnie et leurs biens. En ce moment, le rêve américain de la façon dont ce pays entend redevenir grand brûle d’un feu ardent. Car écrire un slogan coloré et non contraignant sur des casquettes et des t-shirts est une chose. Mais faire les choses en est une tout autre. L’Amérique, qui « entend redevenir grande », ses plus de trois cents millions d’habitants et ses deux présidents, entrant et sortant, sont incapables de contrôler les incendies, ou même de les contenir. Car une telle Amérique, collectivement et individuellement, n’a rien pour cela : pas de réserves humaines, pas de technologie, pas de capacité de planification. Il n’y a pas d’eau, ni douce ni salée (même s’il y a un océan à proximité). Il n’y a aucun moyen d’évacuer les gens des zones sinistrées de manière organisée, ni même simplement de les aider.
» Le moment de vérité n'est pas venu pour les Américains, ni comme la presse le leur a annoncé, ni devant les machines à voter, au début du mois de novembre dernier, – mais au milieu du mois de janvier de cette année. Face au danger qui menace la vie de leurs compatriotes et leurs propres biens, les Américains se sont montrés étonnamment lâches et tout aussi indifférents.
» L'expression sur le visage de Ben Affleck, l'homme riche, la star de cinéma et le lauréat d'un Oscar, qui regardait l'action avec détachement, assis au volant de sa Jeep de la dernière mode, – au lieu d’envisager – au lieu d’envisager la moindre action... La moindre action, la moindre solution... »