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4491Poursuivons pour ce qui concerne les retombées diverses et intéressantes des déclarations du gouverneur du Texas Rick Perry sur l’éventuelle nécessité de la sécession de l'Etat qu'il dirige.
Plusieurs nouvelles alimentent ce qui pourrait devenir une sorte de chronique. On verra aussi bien les intentions législatives des parlementaires de l’Etat du Texas, que les rires considérables, peut-être jaunes pour certains, du Congrès washingtonien à l’évocation de l'idée de la sécession, que l’évocation beaucoup plus haute de la “sécession spirituelle” de Leonard Pitts, Jr. Le groupe McClatchy Newspapers a réuni un dossier de ces nouvelles sur cette affaire, à commencer par des commentaires du 17 avril 2009, repris du Fort Worth Telegram, qui présentent le gouverneur comme un inculte en matière d’histoire et de “droit” à la sécession des Etats de l’Union («Gov. Perry needs history lesson on secession»).
• Il n’empêche qu’un groupe important d’élus de l’Etat du Texas entend faire voter une législation affirmant la souveraineté de l’Etat du Texas, selon le 10ème amendement de la Constitution (des USA) qui reconnaît effectivement cette situation à l’intérieur de l’Union. D’autres Etats que le Texas agissent dans ce sens, pour pouvoir s’affirmer éventuellement contre des décisions fédérales. Cette affirmation d’une “souveraineté à l’intérieur d’une souveraineté” nous rappelle irrésistiblement la formule d’Edgar Faure concernant la Tunisie en 1955 (“l’indépendance dans l’interdépendance”); cela marche quand il n’y a pas de problème, cela devient plus délicat dans des circonstances tendues, un peu comme deux époux qui se jurent de se dire toujours la vérité, – rien de plus facile quand toutes les vérités sont accessoires et bonnes à entendre, plus difficile jusqu'à l'impossible quand les vérités deviennent essentielles, c’est-à-dire si déchirantes et horribles à dire. Voici quelques précisions de McClatchy, reprenant le Star Telegram d’Austin, le 21 avril 2009.
«Note to Washington, D.C.: Texas is a sovereign state.
»After Gov. Rick Perry's recent comments about some Texans talking secession from the union made national news, legislators are considering issuing a “cease and desist” order to the federal government. “This state prefers, to the greatest extent possible, to control our own destiny,” said Rep. Vicki Truitt, R-Keller, one of several members co-sponsoring the measure. “We prefer that federal government limit the amount of federal mandates it forces upon the people of Texas.”
»House Concurrent Resolution 50, which claims sovereignty for Texas under the U.S. Constitution's 10th Amendment, was one of several proposals to go before the House State Affairs Committee late Tuesday. Rep. Brandon Creighton, R-Conroe, filed the bill, saying that more than a dozen states have proposed similar efforts amid concern that the federal government may be overstepping its boundaries. “From restrictions on gun and ammunition sales, to freedom-of-choice issues, to the Real ID Act, the federal government is passing laws that limit a state's ability to govern itself,” Creighton has said. “Texas simply wants to send the message that we want to govern ourselves and decide for ourselves how our money is to be spent.”»
• Au Congrès, à Washington D.C., par contre, on rigole bien fort, jaune ou pas on verra, notamment du côté des élus fédéraux de l’Etat du Texas. Maria Recio, de McClatchy, rapporte la chose le 24 avril 2009, jour de retour du Congrès des vacances de Pâques: «There's been an almost universal reaction in the halls of Congress to Gov. Rick Perry's suggestion that Texas maybe, oughta, secede from the union. Laughter.» D’une façon générale et presque unanime, donc, on en rit fort bien, ridiculisant autant l’intervention de Perry que la possibilité sérieuse d’un tel événement. Pour des gens qui nous annonçaient en mars 2003 que les USA ne feraient qu'une bouchée vite digérée de l’Irak, cela laisse à penser. Puis quelques avis circonstanciés, – qui nous apprennent au passage qu’un commentateur libéral a demandé qu’on inculpe le gouverneur Perry pour trahison, – bonne façon effectivement d'apaiser les esprits…
«Rep. Lloyd Doggett, D-Texas, guffawed when he heard that liberal commentator Bill Press had said that Attorney General Eric Holder should prosecute Perry for treason. “Governor Perry has the right to express his opinion,” said Doggett, laughing, as he headed into a meeting in the Capitol.
» “I think the governor got carried away,” said Rep. Charlie Gonzalez, D-Texas. “You see posturing in preparation for the Republican primary. It serves no useful purpose.” Texas U.S. Sen. Kay Bailey Hutchison is all but certain to challenge Perry in the 2010 gubernatorial primary, and political analysts say that the governor is playing to the party's conservative base with his anti-government stance. Perry is one of a handful of Republican governors who've refused part of the federal stimulus money; specifically $555 million for Texas in additional unemployment funds.»
• …Et puis, il y a une petite poignée, ceux-là qui prennent au sérieux la perspective et qui la pèsent et la soupèsent, qui, notamment, considèrent avec intérêt la possibilité légale de la sécession. Surpris d’apprendre que Ron Paul ne serait pas contre une forme de sécession, qu'il semblerait juger devoir être considérée comme parfaitement légale? Pas vraiment… Comme on peut considérer avec un certain scepticisme ceux qui affirment que la loi a fermé le dossier, que c’est non, que, d’ailleurs, la Guerre de Sécession, – pardon, the Civil War, – a tranché l’affaire, et dans le vif, que la sécession n’est pas légalement possible, – point final. (Mais qu’est-ce que c’est que la légalité si l’histoire décide qu’elle passe outre? Mais les Américains ne connaissent rien à l’histoire, et ceci explique cela.)
«However, Rep. Ron Paul, R-Texas, who's known for his libertarian views, said, “I'm receptive to the principle of secession. You should have the right to leave.”
»Rep. John Carter, R-Texas, a former district judge, disagreed. “It is a Texas myth that we obtained the right to secede” when the Republic of Texas was incorporated into the union, he said. Texas was independent from 1836 to 1845, when it became the 28th state. “It wasn't in the treaty,” he said, and the Civil War resolved any lingering idea of secession.»
• Mais non, c’est certainement Leonard Pitts Jr., du Miami Herald, Prix Pulitzer de journalisme, qui nous donne le meilleur texte sur la question, dans un commentaire du 23 avril 2009, que reprend McClatchy. Après avoir débattu du gouverneur en question, de ses plates et mornes ambitions, de la sécession et des idées folles autour de cela, de la guerre qui a déjà eu lieu et qui a réglé le problème, après avoir observé et présenté les arguments de la raison, arrivant enfin au niveau de l’intuition, de la perception des réalités au-delà de l’apparence perceptible... La sécession? s’interroge Pitts; mais on serait tenté de dire, devant l’état de ce qui n’est même plus une nation, tout juste une fédération d’Etats divers, où les tensions, les égoïsmes, les haines s’exacerbent, où les gens sont jetés à la rue par les banques, où les élites alimentent en argent public les voleurs et les coquins, où la politique étrangère est devenue une politique de saccage, on serait tenté de dire, comme Pitts, citant une formule de Michael Gerson, – “En un sens, tout se passe comme si la sécession était déjà intervenue, sauf qu’elle n’est pas géographiquement actée mais, plutôt, comme le dit le commentateur Michael Gerson, sous la forme d’une ‘sécession spirituelle’”. Drôle de langage, de la part d’un Africain-Américain lui-même (ce qui est le cas de Pitts), cent jours après l’accession à la fonction suprême d’un Africain-Américain, événement salué comme libérateur et fondateur à la fois. Il y a de fortes chances pour que le gouverneur Perry ne soit pas autre chose qu’un politicien selon les normes américanistes et républicaines, ce qui en dit long, mais il y a toujours et sans doute plus que jamais l'intuition “maistrienne” à cet égard, – et peut-être est-il alors l’un de ces “scélérats” dont parle Joseph de Maistre, qui accélèrent inconsciemment le cours supérieur que leur impose l’Histoire.
«For all that, though, I am not here to debate the feasibility of secession, which is not, after all, a clear and pressing danger. No, I just find myself wondering what it says about us that secession even enters the discussion.
»I suppose Perry is just the conservative analog to all those dispirited Democrats who threatened to relocate to Canada four years ago when George W. was reelected. But isn't it telling that leaving the Union or sundering it has now been floated as a possibility by the losers in two consecutive elections? In a sense, it feels as if secession has already occurred, except that it's not geographical but, rather, what columnist Michael Gerson has dubbed, a “spiritual secession,” a nation of extremes pulling away from the center, rejecting the very idea of common cause.
»Perry's words have made him a hero out on the angry fringes of conservatism. Those of us who do not live on that fringe can only mourn this new reality in which ideology supersedes country. Country, after all, is supposed to be that which pulls us back together after everything else – politics, race, religion – has conspired to pull us apart.
»But there are too many days lately when it does not. And too many days when you find yourself wondering if anything still can.»
Mis en ligne le 25 avril 2009 à 12H20