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319Quoi qu’il en soit des perspectives ouvertes par les commentateurs appointés et des consignes de censure des grands médias MSM, il reste que l’étrange candidature de Ron Paul soulève de plus en plus d’intérêt. Une marque assurée à cet égard, dans le monde anti-institutionnel mais désormais extrêmement influent des réseaux dissidents de l’Internet, est une analyse extrêmement critique du site WSWS.org à l’encontre de Paul, le 22 janvier. Paul y est dénoncé pour ce qu’il est, un libertartien (classé idéologiquement à l’extrême-droite, mais cette classification est difficilement satisfaisante, ou suffisante, pour la vie politique US). Il s’agit d’un long réquisitoire assorti d’une attaque en règle, également, contre la gauche antiwar (par exemple, du côté de CounterPunch et de la famille Cockburn) qui propose de soutenir ce candidat républicain de la droite libertartienne à cause de ses positions anti-guerre.
Le texte de WSWS.org, fort bien informé et détaillé comme nombre des analyses de ce groupe, mais admettant aussi quelques informations douteuses sur Paul au passage, est une analyse rigoureuse qui renvoie à la pureté d’une conception et à la fermeté d’une doctrine sans faille. Que ces conceptions et cette doctrine aient régulièrement échoué, sans parler des effets indirects qu’elles eurent, ne semblent pas ici avoir la moindre importance.
L’attaque contre Ron Paul est systématique, rageuse, sans la moindre concession. Tout lui est reproché, parfois dans des termes qui pourraient aussi bien décrire l’attitude des Français, souvent de gauche, qui, en 2005, votèrent contre le traité constitutionnel (prenez cette phrase et remplacez l’ONU par la Commission européenne, “new world order” par “nouvel ordre européen” et l’Amérique par les pays européens : «As he did on the eve of the invasion of Iraq on numerous occasions Paul has promoted the idea that the United Nations is a conspiratorial organization planning to implement a “new world order” and that the World Trade Organization is a plot by a “global elite” to strip America of its sovereignty.»)
En fait, l’idée de WSWS.org est fondée sur le refus absolu de ne rien accepter qui n’implique pas uniquement, explicitement et absolument le seul objectif ultime de toute sa démarche idéologique, c’est-à-dire la destruction du capitalisme selon les conceptions marxistes. Tout le reste, même des alliances ou des convergences temporaires ou objectives, n’est que diversion et trahison.
«The struggle against war cannot be successful by appealing to the powers-that-be. This war and the explosion of American militarism in general is not just the product of the circle of neo-conservatives in the White House but is deeply rooted in objective economic and historical conditions, above all the decline in the global position of American capitalism. There is a general consensus in both political parties that military power be used to reassert US hegemony over America’s economic rivals by seizing control of the strategic energy resources of the Middle East and Central Asia.
»The only means of putting an end to war, therefore, is by putting an end to the capitalist system that produces it. Far from opposing the economic and political domination of America’s ruling elite, Ron Paul is one of its most vociferous defenders of the capitalist system, saying, that the “rights of all private property owners” are the key to “maintain a free society.”»
La querelle n’est pas tant ici sur le fond que sur le temps qui passe. Effectivement, ce procès fait à Ron Paul, dont il est loin d’être assuré que toutes les pièces à charge soient blanches comme neige, ressemble à un procès d’un autre temps. Peut-être pas l’inquisition, mais dans tous les cas les grands affrontements sur la virginité doctrinale et sur le sexe des anges, marxistes ou pas.
Le cas Ron Paul est bien plus simple. Cet homme, avec sa candidature échappant aux canaux contrôlés du système, avec un discours dont les arguments principaux vout au plus sensible, au plus essentiel et au plus vulnérable dans le système, voilà bien assez pour l’applaudir. Nous ne sommes pas dans une course aux présidentielles, ni dans l’espoir de révolutions fondamentales qui changeraient le système par le coup de baguette magique de la dialectique idéologique. Nous sommes dans une bataille sans merci où tous les coups sont permis pour déstabiliser le système, une sorte de “Delenda est Cartago“ postmoderne. Parmi d’autres bien différents de lui, Ron Paul fait l’affaire, et comment.
Mis en ligne le 23 janvier 2008 à 17H40
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