Ron Paul, le candidat “nucléaire”

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Selon la source que vous consultez, la position du candidat à la désignation républicaine Ron Paul varie d’un extrême à l’autre. Il existe ainsi une disparité de plus en plus intenable entre les deux façons qu’on a de présenter Ron Paul dans cette aventure électorale, – disons entre la façon véridique et la façon véridique revue-establishment. Voici le cas du New Hampshire, où des consultations, des sondages et des tournées des candidats ont eu lieu tout au long de la semaine dernière, selon un agenda habituel de préparation des primaires au sein du parti républicain.

• Par exemple, si vous consultez l’enquête faite l’American Research Group dans le New Hampshire, présentée comme une grande opération pour déterminer les positions des candidats républicains, et leurs popularités respectives, c’est tout juste si vous lisez le nom de Paul (donné à 4%, en 7ème position, derrière des clowns comme Giuliani, Palin et Gingrich), d’ailleurs avec la remarque qu’il a fortement régressé depuis la dernière opération du genre, en avril. (Voir les résultats et commentaires dans UndercoveredPolitics.com, le 15 juillet 2011.)

«Former Massachusetts Gov. Mitt Romney continues to hold a comfortable lead in the first-in-the-nation New Hampshire primary, according to a poll released yesterday by the American Research Group. Romney, who polled 29 percent, maintains a 17-point lead over U.S. Rep. Michele Bachmann of Minnesota, his closest rival.

»Former New York City Mayor Rudy Giuliani, who’s considering a late entry into the crowded Republican field, finished third in the poll with nine percent, followed by former Alaska Gov. Sarah Palin — another undeclared candidate — at eight percent. Former Speaker of the House Newt Gingrich placed fifth in the survey with seven percent followed by former Minnesota Gov. Tim Pawlenty at five percent.

»The survey of 600 likely GOP primary voters, conducted July 9-13, shows Texas congressman Ron Paul and radio talk show host and former Godfather’s Pizza CEO Herman Cain locked at four percent apiece. Paul, who announced earlier this week that he wouldn’t be seeking another term in Congress next year, was polling twice that amount in a similar poll conducted in April…»

La cause de Ron Paul est entendue, pensez-vous. Cela, sauf qu’il y a diverses nouvelles sur les mêmes circonstances (débats divers dans le New Hampshire, pour les candidats républicains à la nomination) qui, toutes, donnent une vue complètement contraire.

• Le 13 juillet 2011, le Washington Times annonçait que Michelle Bachmann, qui s’était imposée comme favorite de Tea Party dans l’Iowa, ne retrouve nullement cette sympathique atmosphère dans le New Hampshire. Là-dessus, on vous précise tout de même que celui qui tient cette position, c’est Ron Paul. Quant aux autres, et particulièrement Romney, nul n’a prêté attention à eux.

«Rep. Michele Bachmann leads the House Tea Party Caucus, but for New Hampshire tea partyers, Rep. Ron Paul appears to be the GOP presidential candidate of choice. The congressman from Texas torched his competition in a straw poll of taxpayer activists.

»Mr. Paul’s strong showing in the straw poll at last weekend’s Coalition of New Hampshire Taxpayers (CNHT) gathering is another reminder of how Mrs. Bachmann’s path to victory here is murkier than in Iowa, where her reputation as a religious conservative and tea party leader is proving to be a natural fit.»

• Un site largement consulté pour ses informations sur la campagne électorale, The State Column, fait le 15 juillet 2011 une analyse sur l’intérêt des internautes US pour les candidats républicains. Sa conclusion : si la nomination du candidat républicain était déterminé par le nombre de consultations par Google, Ron Paul serait largement gagnant.

«Rep. Ron Paul (R-Tex.) has a strong base of online support, but just how strong is it? Paul, who is celebrated for his Libertarian beliefs and his consistent voting record, enjoys more online support than most of his fellow candidates. This is evidenced by the myriad of pro-Paul sites that appear when one searches for the term “Ron Paul.” In fact, these sites often appear before Paul’s official campaign website in Google’s search rankings. Sites such as ronpaul.org, ronpaul.com, dailypaul.com and ronpaulforums.com are havens for Paul’s fans. […]

»If the winner of the Republican presidential nomination were determined by the number of Google searches of that candidate’s name, Paul would be declared the winner. Even frontrunner Romney has fewer searches than Paul. According to Google’s Keyword Tool, the 12-month average number of monthly searches for “Ron Paul” is 368,000 in the United States. The 12-month average number of monthly searches for “Mitt Romney” is 110,000 in the United States. Rep. Michele Bachmann (R-Minn.) pulled in 246,000 monthly searches in a 12-month average.

»There are also plenty of signs that sold support exists offline for Paul, including a number of strong finishes in recent polls. Last week, Paul won a Texas GOP poll of highly active Republican voters with 22 percent of the Republican vote. The poll, conducted by the Azimuth Research Group, found that support among Republican voters is also high for Texas Governor Rick Perry and Herman Cain.»

Un lecteur de ce texte le commente en apportant la précision de son propre décompte, à partir de ses propres instruments de calculs-marketing. Son décompte couvre le mois écoulé et donne des résultats encore plus significatifs (“recherches Google”) en faveur de Paul : 450.000 (Paul), 246.000 (Bachmann), 110.000 (Cain et Romney), etc.

• Le même Ron Paul a reçu le meilleur accueil possible lors de réunions publiques, ou des commentaires de la presse locale au New Hampshire, – et l’on ne trouve certainement pas le même intérêt pour les autres candidats républicains. On cite ici un reportage du site UnionLeader.com, le 17 juillet 2011, d’une réunion de Ron Paul dans la ville de Windham… «The Texas congressman made stops at area businesses and public venues in Derry, Salem and Windham this weekend, in hopes of drumming up local support for his 2012 presidential bid. Appearing before a packed house at Windham's Nesmith Library, Paul brought audience members to their feet several times during his speech on the nation's challenged economy…» Un autre site, de Salem dans le New Hampshire, SalemPatch.com, a fait une interview de Ron Paul le 16 juillet 2011. A la question sur sa candidature pour 2012 par rapport à celle de 2008 (il termina 5ème républicain dans le New Hampshire), Ron Paul répond par divers arguments, où l’on trouve notamment une très claire allusion aux entraves qui sont faites à sa participation normale aux divers processus de préparation des primaires (souligné en gras par nous).

Question: «In 2008 in the New Hampshire presidential primary, you finished in fifth place. Why should voters vote for you in the 2012 primary?

Ron Paul: «The country is entirely different. The credibility of what I've been saying has been growing by leaps and bounds. People are interested in the monetary system and the Federal Reserve. They are interested in the approach to foreign policy, they're sick and tired of all the wars. The conditions have completely changed.

»Before when we had a debate right before the primary they excluded me. In Iowa they did the same thing. That's not going to happen this time. Our numbers as far as supports go and the ease with which we've raised money is so different. Dramatic changes have happened these last four years, and that's why people are looking at our campaign.»

Au début de la semaine dernière, Ron Paul a annoncé qu’il ne se représenterait pas pour le renouvellement de son siège du 14ème district du Texas, à la Chambre des Représentants du Congrès. Il interrompt ainsi une représentation constante dans ce district depuis 1996, après une élection (en 1996) qualifiée d’“une des plus étranges élections législatives des temps modernes” (essentiellement à cause de l’“étrange” et formidable coalition contre Ron Paul des caciques du parti républicain, ceux-ci préférant soutenir son adversaire démocrate, – voir sur cette élection de 1996, dans Wikipedia). Cette décision de Ron Paul signifie que le parlementaire entend terminer sa carrière (il a 76 ans cette année) par sa tentative présidentielle de 2012, sur laquelle il se concentre, techniquement, financièrement et géographiquement, avec une organisation qu’on commence à apprécier comme remarquable. Il s’agit donc d’un “tout ou rien” pour Ron Paul, qui n’a d’ailleurs rien de désespéré mais rend compte au contraire, d’une part de l’appréciation de la gravité de la situation des USA par Ron Paul, d’autre part, du réel espoir qu’il entretient pour l’élection présidentielle.

…Et il semble qu’il n’est pas le seul. L’étrange sondage sur lequel commence nos références a de la peine à apparaître comme normalement constitué et effectué, en fonction du reste. Il concerne la même localisation électorale (le New Hampshire), au même moment de la présence de Paul, alors que tant d’autres signes et résultats montrent que la popularité de Paul dans cet Etat est très grande (cela, en contraste avec ce qu’elle était en 2008), et qu’il a de fortes chances pour occuper, dans tous les cas actuellement, une place de favori républicain dans cet Etat. On en conclura que le sondage a sans doute du être chapitré pour qu’il nous donne des résultats plus conformes aux vœux de l’establishment républicain. (Et, dans cette tactique, il semble bien que l'establishment voudrait donner une place importante à Bachmann derrière Romney, de façon à ce que Bachmann attire à elle le maximum de voix populistes, de celles qui sont évidemment attirées par Ron Paul.) Alors qu’il existe une tendance grandissante chez les électeurs républicains à considérer avec la plus extrême méfiance Romney comme le candidat de l’establishment (“n’importe qui sauf Romney”), il existe de plus en plus, et jusqu’à la panique, une tendance “n’importe qui sauf Ron Paul” dans l’establishment républicain. Les projets de Paul, notamment celui de lancer une action pour éliminer la Federal Reserve s’il était élu président, terrorisent ces braves gens.

Il est d’ailleurs évident que le programme de Ron Paul constitue une formidable révolution par rapport au statut courant de la politique US (et une révolution, d’ailleurs, aussi bien pour l’extérieur). Cela est à un point où l’on imagine mal que, dans le cas jusqu’ici impensable et désormais extraordinaire mais pas impossible où Ron Paul serait élu, son installation comme président puisse se faire normalement ; on songe, sans nécessairement aller à l’extrême d’actes de violence (qui ne pourraient être envisagés qu’avec des risques considérables d’une déstabilisation brutale et profonde de la situation politique aux USA), à l’une ou l’autre réaction radicale, de formes proches de l’inconstitutionnalité ou de formes radicales dans le cadre de la Constitution, avec crise de régime aussitôt enclenchée, tout cela pouvant mener à des situations de rupture de la structure américaniste telle qu’elle est aujourd’hui constituée. Ces hypothèses doivent être sérieusement évoquées parce que, naturellement, le grand phénomène qui est en train de prendre forme est la possibilité bien réelle que Ron Paul figure parmi les favoris pour la désignation républicaine, qu’il soit même désigné, avec la perspective qu’on imagine ensuite. (A notre sens, ce serait à partir de cette désignation républicaine, si elle avait lieu ou si elle “menaçait” d’avoir lieu selon les procédures normales, que des tensions, voire une crise active menaçant de devenir une crise de régime, devraient se manifester.)

Dans ce cadre hypothétique général, alors que la popularité de Ron Paul ne se dément pas, les interférences et les manipulations, probablement et logiquement de plus en plus grossières, dans les commentaires et appréciations techniques de sa candidature dans la presse-Système, risquent déjà de conduire à des tensions. Avec Ron Paul, on se trouve dans le cas idéal d’un affrontement direct, dans le système de la communication avec des conséquences immédiates possibles dans d’autres domaines, de la population et du courant populaire (grassroots) avec l’establishment. C’est, là aussi, la première fois qu’une telle possibilité, dans une forme aussi radicale et alors que le système est aux abois, apparaît aussi clairement dans l’histoire électorale de la fonction suprême US.


Mis en ligne le 18 juillet 2011 à 11H28