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599C’est aujourd’hui que les Communes votent sur la proposition du Premier ministre britannique l'engagement des forces britanniques dans le conflit syrien, dans une position qui semble prétendre répondre à une “coalition” (celle des pays-BAO) qui est une chose informe, cahotante et parcourue de mille complots, dont nul ne sait ni l’usage ni le but tant les avis et les comportements sont divers, et que l’on continue à définir comme “anti-Daesh” ou anti-ISIS selon l’idiome local utilisé. Le Premier ministre britannique est obligé à cette procédure (le vote des Communes) par le précédent fâcheux d’août 2013 où il s’était jugé plus assuré d’une intervention de cette sorte (mais cette fois, franco de port contre le régime Assad) par le soutien parlementaire qu’il estimait acquis d’avance, – et qu’il n’obtint pas, torpillant involontairement, dans l’exposition humiliante d’une faute politique majeure, l’entièreté du projet. Cette fois, à nouveau l’on nous annonce qu’il a de fortes chances de l’emporter, notamment à cause du très profond flottement où se trouve le parti travailliste dont la représentation parlementaire, très tendance-Système, ne partage pas la dégoûtation profonde de son nouveau chef, Corbyn, élu par la base du parti. (Lundi, il a été annoncé que les députés travaillistes auraient la liberté de vote.)
Quoi qu’il en soit, ce vote est l’occasion d'observer sans surprise le parcours absolument erratique et incohérent que poursuit le Royaume-Uni depuis quelques années, sous la direction qu’on sait. L’Angleterre à la dérive est parfaitement illustrée par l’extraordinaire insignifiance de son Premier ministre actuel... (Eh bien oui, à cet inimitable non-être qu’est Cameron, on préférera, malgré tout, l’éclat et le bagout des crapuleries extraordinaires et bombastiques de Tony Blair dans sa période post-9/11, du temps où l’Angleterre avait enfin complètement épousé l’Amérique de ses rêves, c’est-à-dire l’Amérique la plus bête du monde et de son histoire ; tout cela, comme on s’en souvient, pour nous embarquer dans l’épisode irakien de mars 2003, dont l’absurdité médiocre et ahurie continue à stupéfier tout observateur de taille intellectuelle moyen et d’une honnêteté intellectuelle à mesure. Le projet nihiliste et autodestructeur du suprémacisme anglo-saxon était en bon état de marche et il confirme sa persistance sur la durée ; simplement, il n’est plus, en puissance, que l’ombre de l’ombre du duo GW-Blair des années 2002-2003.)
Le vote d’aujourd’hui semble acquis depuis que Corbyn, le chef des travaillistes, a donné leur liberté de vote aux parlementaires de son parti. Pouvait-il faire autrement ? Certains jugeront qu’évidemment non, sous peine de se trouver devant une rébellion où il aurait eu plus à perdre qu’à gagner, c’est-à-dire où il se serait trouvé en position d’être décisivement liquidé de la direction du parti. Bien entendu existe l’argument inverse et WSWS.org ne doute pas un instant que Corbyn est une sorte d’agent double dépourvu de la vertu trotskiste, même s’il prétend l’avoir été, dans la mesure où il a capitulé devant l’“aile droite” du parti, déjà à plus d’une reprise. L’obsession de WSWS.org peut parfois être juste, parfois pour les plus mauvaises raisons du monde (nous voulons dire, hors de la pensée trotskiste), mais dans le cas de Corbyn le jury n’a pas encore rendu son verdict et il reste à voir ce que la présence de ce militant de la gauche activiste britannique à la tête du parti travailliste peut amener comme conséquence imprévisibles.
Les conditions dans lesquelles ont été décidée ce qui constitue certainement une capitulation de la “majorité” antiguerre (73% [contre 13%] des militants travaillistes sont contre l’intervention) sont encore loin d’être éclaircies. Le probable vote d’aujourd’hui doit encore rendre ses effets sur la cohésion du parti travailliste d’autant que l’intrigue où s’aventure Cameron n’a aucun sens et ne pourra produire que désappointements et amertumes à partir des ondes de choc qu’il suscitera. Plus qu’affermir quoi que ce soit, le vote d’aujourd’hui fragilise encore plus le parti travailliste, et la direction-Système dans son ensemble, en en faisant l’otage du point de vue de la communication d’un conflit que plus personne dans le bloc BAO n’est capable de contrôler. A moyen terme et confronté aux remous probables qui accompagneront tout ce qui a trait au terrorisme et à la lutte contre lui, avec Daesh comme fanion à cet égard et y compris avec la possibilité d’attentats terroristes au Royaume-Uni, le parti travailliste devrait connaître des remous considérable, d’ailleurs comme les autres partis de l’establishment qui soutiennent l’initiative. On notera tout de même, sans trop insister pour ne pas interférer dans les beaux discours, que le premier et gigantesque ridicule de cette affaire est que les Britanniques, qui partent en guerre derrière des gens qui ne le font pas ou qui la font sans trop la faire chacun de son côté, y vont avec quasiment aucun moyen de la faire ; mais peut-être est-ce le genre d’observation qui paraîtrait déplacée par rapport au courant de nos coutumes... (Voir RT-français le 29 novembre : « “La différence que le Royaume-Uni peut faire en rejoignant la campagne aérienne ciblant Daesh sera négligeable”, a déclaré le président du comité spécial de la Défense Julian Lewis, en ajoutant que la flotte d’avions de combat de type Tornado a été drastiquement réduite en 2010 après la décision d’abandonner ce type d’aéronefs. “Nous ne disposons que deux voire quatre avions de chasse qui puissent rejoindre les huit autres qui luttent contre Daesh depuis la base aérienne britannique d’Akrotiri à Chypre” ».)
Ce qui nous apparaît extraordinaire est qu’il existe encore des “forces dissimulées”, des “forces cachées” ou “forces de l’ombre” parfaitement identifiables, – que ce soit le Corporate Power réuni à Davos, les Soros & Cie, les barons de la gouvernance mondiale, de l’UE au CFR, – assez crédules pour croire encore à cette sorte d’extravagance sans aucune perspective. Le “parti de la guerre” du bloc-BAO avec ses myriades de sponsors est en train de se noyer dans un flot bouillonnant d’incohérences et d’absurdité, en agitant des menaces qui ne sont basées sur aucune puissance contraignante, sur aucune force armée sérieuse, sur aucun outil de puissance, comme c’était tout de même le cas du temps du duo GW-Blair ; et incohérence et absurdité surtout lorsque s’impose, comme c’est le cas désormais, la comparaison avec la Russie en action.
Cela fait que de plus en plus de voix autorisées se font entendre pour protester contre cette sorte d’aventure dont le rusé Cameron serait bien en peine de nous exposer le pourquoi et le comment. Pour ce cas du vote de ce soir aux Communes, on choisit la voix de Peter Ford, ancien ambassadeur du Royaume-Unis à Damas, – rien que cela : l’antiSystème recrute aujourd’hui dans les rangs les plus nobles des structures du Système. Qui plus est, le médium qui nous retransmet les échos de la colère de Peter Ford est l’inévitable RT, soir Russia Today, que certains ont déjà comparé en nuisance maléfique contre la civilisation, à peu près à hauteur de Daesh. L’interview date du 27 novembre et laisse entendre des avis sans la moindre compromission sur la démarche du gouvernement Sa Très Gracieuse Majesté. Le Royaume-Uni, pour encore avoir l’illusion d’exister, a recours à de bien étranges expédients, – c’est-à-dire des expédients tout à fait de notre temps, de ses coutumes et de ses usages.
dedefensa.org
RT: « Will the UK Prime Minister David Cameron manage to convince Parliament that Britain should join the aerial campaign against Islamic State forces in Syria? »
Peter Ford: « His case was very unconvincing. He put forward, I would call, a deceitful sort of strategy – a strategy trompe l'oeil - designed to deceive the eye. This is what that strategy is. For example, he claimed that the Syrian opposition forces could put 70,000 men in the field against IS and he gave the impression the most of these were under the command of the so-called Free Syrian Army. This is straight-forward deceit. I choose my words carefully – the FSA is a laughable front organization for jihadists. It can only itself put about 5,000 men in the field. The idea that this would be the cornerstone of a ‘boots on the ground’ force to drive out IS and accompanying airstrikes is laughable. »
RT: « Will the British public buy it? »
Peter Ford: « Not if Labour are up to the job of pointing out this deceit. The government is also being deceitful and not coming clean about the increased threat to the people of Britain; we’ll have to go onto higher alert. If we go ahead with bombing we can state with 99 percent certainty that there is going to be an outrage on the streets and markets and stadia of Britain as there was in Paris. »
RT: « At times like this when France and Belgium are in so much fear and stress now, and UK is part of Europe, shouldn’t it stand shoulder to the shoulder with its European counterparts? »
Peter Ford: « Not. No one consulted Britain when France decided to start bombing IS in Syria. They didn’t consult us before indulging in this adventurism. We should not be dragged into the Syrian mire. We should not make our security hostage to people like the French, the Americans, the Saudis and the Turks who want to pursue an adventurous policy. Cameron said that we shouldn’t subcontract security. I say we should not make ourselves hostage to the actions of others. »
RT: « Would Britain’s interference make much of a difference to the situation in Syria? »
Peter Ford: « Absolutely not. Even the government is hard put to make out a case that it will make any significant military difference. This is why they are having to resort to subterfuge, claiming that we have to stand by our allies. It will make no appreciable military difference. And it doesn’t stand any chance of doing so without a credible strategy for having ‘boots on the ground’. »
RT: « David Cameron says a campaign would not repeat the fate of the air strikes in Libya back in 2011 which brought the country to ruins. Are you buying that? »
Peter Ford: « No way. Who is he to say? He talks about sending 70,000 opposition forces. By the way, at least 90 percent of those are jihadis - a slightly different persuasion from IS, but they are Islamist fundamentalists radicals supported by Saudi Arabia, Turkey, Qatar. These are the people that he wants to put in place of Assad. These are the so-called moderates. We saw these moderates three nights ago on television when they downed the Russian plane, shot the pilot descending in his parachute and then pulling the corpse like hyenas. These are the moderates in the book of Mr. Cameron. That is no replacement for the responsible Syrian government that we need to see. »
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