Rumsfeld ouvre un second front

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Rumsfeld ouvre un second front


22 avril 2003 — Il faut reconnaître à Donald Rumsfeld une ardente alacrité. La guerre à peine terminée en Irak, il ouvre un deuxième front, et sérieux celui-là, — au Pentagone, pour imposer de force sa réforme, baptisée transformation. Une initiative inattendue et particulièrement ambitieuse, qui a pris la bureaucratie du Pentagone complètement par surprise (c’était le but), comme la Garde Républicaine irakienne. Le secrétaire à la défense capitalise sur sa position de force, établie avec la guerre, dans le cabinet et au sein du Pentagone.

L’hebdomadaire Defense News présente et développe cette information en expliquant que le secrétaire à la défense a choisi d’utiliser l’opportunité de la nécessité de reconstituer les stocks des forces armées après la guerre, pour imposer cette réforme (« Restock And Rethink - Next-Generation Arms Could Replace Those Fired in Iraq »). La rapidité de la décision de Rumsfeld est également remarquable.


« As combat in Iraq winds down, the Pentagon’s attempts to learn from the brief campaign are quickly spooling up. U.S. Defense Secretary Donald Rumsfeld, who has ordered a sweeping review of U.S. military programs and force structure, wants the results soon — in fact, soon enough to influence the proposed 2004 defense budget now before Congress. The idea, as laid out by several senior U.S. acquisition officers, is to use the upcoming rebuilding period as a chance to accelerate the transformation of the military.

» “We can either reconstitute the force that was or we can think about risk and think about opportunity and get a little bit of an edge on the future,” said Lt. Gen. Robert Magnus, deputy commandant for Marine Corps programs and resources.

» At Rumsfeld’s direction, the Office of the Secretary of Defense (OSD) and the Joint Staff launched in mid-April the “Post War Defense Assessment,” one of a growing number of reviews looking into ways to prepare the newly victorious force for the next potential fights. The assessment’s objectives are now being defined with help from the services, but the scope will be broad: it will look at how the military’s force structure and weapons-buying needs will change in war’s wake.

» It will also be fast, getting under way as the services work to build their 2005 budget proposals this spring and finishing up by the time they submit them to the defense secretary this summer, a senior Navy official involved in the process said. The swift work will allow Rumsfeld and the Joint Chiefs to tailor the Pentagon’s 2005 budget request, and possibly its 2004 one, to emerging needs. “We intend to have an impact on those budgets based on what we learned,” Gen. Richard Myers, chairman of the Joint Chiefs of Staff, told Defense News in a brief April 16 interview. »


Le processus devrait être rapidement mené à son terme, sous le contrôle d’hommes proches de Rumsfeld, avec les premiers résultats dans 60 à 90 jours. Le processus devrait aboutir à l’examen et à la mise en cause de tous les grands programmes actuellement développés. La question budgétaire (les capacités budgétaires restreintes du Pentagone ces prochaines années, par rapport aux besoins exprimés par les forces) sera également prise en compte.

L’initiative de Rumsfeld, remarquable en tous points, implique les remarques suivantes.

• Le secrétaire à la défense dispose à nouveau d’une possibilité de parvenir à lancer sa réforme, au niveau des programmes, alors qu’on estimait cette possibilité interdite avec le bouclage du budget FY2004. Effectivement, le budget FY2004 lui-même pourrait être affecté. Rumsfeld argue du caractère exceptionnel de l’événement de la guerre, de sa rapidité, des nécessités de reconstitution des stocks, pour justifier sa proposition. Les bureaucraties ne peuvent répondre (et bloquer son projet) de façon satisfaisante.

• Plus aucune programmation n’est sûre désormais, tout va être remis sur la table. Ce sera le cas notamment des trois grands programmes de l’aviation tactique (TACAIR), — le F/A-18E de la Navy, le F/A-22 de l’USAF, le JSF/F-35 interarmes. L’un de ces programmes pourrait être abandonné. La place des engins sans pilote (UAV.UCAV) pourrait être pour la première fois déterminée, avec des perspectives importantes (un tiers de la flotte de l’aviation tactique composé d’UAV/UCAV en 2010 ?) qui réduiront d’autant la part des avions pilotés.

• Politiquement, cette initiative signifie que Rumsfeld aura son attention largement réorientée vers Washington, et d’autant moins vers l’Irak et la “guerre contre le terrorisme”. C’est important dans la mesure où Rumsfeld est la force principale, dans le cabinet, derrière cette “guerre contre le terrorisme”. On retrouve, posée sous une forme différente, la question de l’intérêt fondamental de Rumsfeld pour les engagements extérieurs.