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5428Bien sûr, cela ne se passera probablement pas de cette manière. La projectionfaite par Scott Burns prédit que dans 33 ans les 10 % les plus riches des ménages étasuniens posséderont la totalité de la richesse des USA. Il examine les chiffres donnés par l’enquête de la Fed menée tous les trois ans portant sur la consommation. La part de richesse détenue par les 10% les plus riches est passée de 2013 à 2016 de 75,3% à 77,2%, soit un gain de 1,87%. Il en déduit que les 22,8% encore entre les mains des 90% seront phagocytés par les plus riches en 33 ans environ. Il observe également que les 9% qui se placent juste derrière les 1% du sommet ont vu leur part croître régulièrement mais elle accuse un décrochage en 2013-2016. Ces 9%, actuellement détenteurs de 38,54% de la richesse totale, seront sans doute eux aussi la proie des 1% du dessus du panier.
Or il se produit toujours des ruptures imprévisibles dans les systèmes non clos mais abouchés au reste du Monde et ce type de phénomène n’évolue que rarement de manière continue. L’une des métaphores qui vient à l’esprit pour approcher la transformation abrupte d’un système complexe est la rupture de tolérance en biologie humaine. A un instant T, l’organisme ne tolère plus ce qui lui était indifférent jusque-là en vertu du dépassement des mécanismes qui le lui faisait accepter. Pourquoi cet instant T ? Le processus de l’usure d’une corde est amorcé depuis longtemps quand survient la secousse ou l’effondrement qui signalent la rupture des derniers brins encore intacts qui supportaient toute la tension.
Une glissade de plus du yuan que la Banque Centrale chinoise ne défendra pas par des rachats massifs comme elle l’avait fait en 2018, et l’effet rupture avec chaos boursier menant à l’écrasement du prix des actifs est garanti. Une fermeture momentanée du détroit d’Ormuz et la pyramide reposant sur un socle aussi peu sûr que l’impression des billets verts sans la contrepartie d’une création de richesse tangible par la Fed s’écroule L’essentiel de la monnaie créée, on le sait clairement depuis plus d’une décennie, sert à gonfler la valeur des actions d’entreprises cotées en bourse. Les Usa luttent depuis au moins la bulle des dot.com de la fin des années 90 début 2000 pour maintenir les avantages de Wall Street et des entreprises financières qui se partagent la réalité du pouvoir politique avec le Complexe militaro-industriel aussi bien à la Maison Blanche qu’au Congrès.
Il n’y a guère que quelques marxistes vulgaires myopes quant à la nature du capitalisme toujours en évolution sous l’effet de sa crise permanente qui s’imaginent que la guerre menée en Irak en 2003 était motivée par le pétrole physique. Les « majors » n’en voulaient pas car un déploiement armé était défavorable à l’exploitation de gisements que Saddam Hussein leur aurait concédés volontiers. Elles y étaient d’autant moins intéressées qu’il fallait débourser d’énormes investissements pour en tirer quelques revenus tant les infrastructures avaient souffert de l’embargo et des guerres précédentes or elles n’étaient pas prêtes pour cela et le prix du baril déjà peu élevé et prévu à la baisse n’était pas incitatif. Après l’occupation, les compagnies américaines ne se sont pas précipitées pour s’installer et exiger leur part du butin au point que ce prétexte du pétrole pour l’invasion de 2003 apparaît comme un leurre qui a mystifié tout le monde (ou presque) sur les véritables raisons de cette guerre qui sont en réalité explicités dans la formule proclamée à l’époque. Elle n’a pas de but autre qu’elle-même c’est pourquoi elle est annoncée sans fin c’est-à-dire sans but et de durée illimitée. La spéculation sur les cours pétroliers est bien plus rémunératrice.
C’est peut-être seulement sous cet angle qu’il faut interpréter les rodomontades de l’Homme orange à la mèche blonde à l’encontre de l’Iran. Les « stratèges » de l’entité sioniste qui sert d’État à une armée et à un clergé prônant une religion suprémaciste ont compris ce qu’il en coûterait de tenter une agression militaire directe, quelle qu’en serait la forme, guerre-éclair ou débarquement au sol pour une occupation. Israël serait vitrifié par une attaque coordonnée venant de l’Irak, de la Syrie, du Liban et de l’Iran. Netanyahou, aux prises certes avec des problèmes de politique intérieure, baisse de légitimité en lien en particulier avec l’exposition de sa corruption, se garde bien d’intervenir à ce sujet qu’il a promu depuis au moins trente ans, soit la presque totalité de sa carrière. Il peut sembler étrange que Washington presse en coulisses ses partenaires-alliés-complices-vassaux d’aller convaincre Téhéran de baisser la tension sur le détroit d’Ormuz tout en prononçant des sanction à l’encontre du Ministre iranien des Affaires étrangères lui interdisant l’accès au territoire et au marché étasuniens. Mohammas Javad Zaruf n’a par ailleurs pas de famille ni d’intérêt marchand ni financier aux Usa. Si le premier négociateur de la partie adverse est frappé de bannissement, avec qui compte négocier Washington ? L’incohérence de la diplomatie de la Puissance hégémonique est-elle simulée, envoyant des messages contradictoires comme ballons d’essai ou des illusions pour tromper l’ennemi ? Ou bien s’agit-il plus vraisemblablement de l’expression d’une multiplicité de centres de décision non coordonnés ou pire encore, antagonistes ?
Dans les deux cas, ce n’est pas du meilleur effet et ‘ça ne fait pas très sérieux’.
S’il est insensé de prétendre prédire la stratification sociologique selon la fortune dans trente ans, il est assuré qu’aujourd’hui la concentration des richesses est telle que 400 familles possèdent autant que 150 millions d’adultes les plus pauvres aux Usa. Le travail de l’économiste Gabriel Zucman a montré également que les 0,1% les plus riches possédaient autant que les 80% les plus pauvres. Il a inspiré les propositions de réduction des inégalités d’AOC Alexandra Ocasio-Cortez et des candidats pour 2020, Bernard Sanders et Elizabeth Warren.
Trump a renforcé cette polarisation par sa politique fiscale très profitable aux plus riches mais l’essentiel du dispositif a été mis en place sous Clinton, en particulier l’abrogation emblématique du Glass-Steagal Actqui interdisait aux banques de spéculer en bourse avec les dépôts de leurs clients. Ce creusement de l’inégalité dans la répartition des richesses atteint un niveau proche de celui des années 1920 et peut s’exprimer de diverses manières. Entre 1989 et 2018, les 1% du dessus ont vu leur fortune passer de $8400 milliards à $29 400 milliards tandis que les 50% les moins nantis, de détenteurs de $700 milliards en 1989, ils se trouvent en négatif en 2018, endettés de $200 milliards en 2018. A ces Déplorables qui ont moins que rien, on offre du crédit c’est-à-dire qu’on les entrave avec une dette qui sera une source de profits pour les 1%. A ce stade de désintégration sociale, il devient difficile d’en appeler au ‘patriotisme’ des plus pauvres, à leur fierté de faire partie de la Nation d’exception vertueuse et libre pour continuer de propager à l’extérieur des guerres ruineuses commandées par les lobbyistes du CMI à la tête du Pentagone. Ils avaient clairement rejeté Killary Clinton, hystérique belliciste largement payée par Wall Street comme l’avaient montré les notes fuitées de WikiLeaks. La tâche de l’impérialisme, rejeter à la périphérie les tensions sociales générées en leur centre par les économies capitalistes développées, devient de plus en plus malaisées. L’efficacité de la propagande, d’abord anticommuniste puis anti-islamiste et terroriste n’est pas en cause. Mais le cycle des guerres entamées en 2001 n’a à l’évidence guère amélioré le sort des 90%, bien au contraire. Trump qui avait fait campagne sur ce thème a triomphé en raison de ce sentiment anti-guerre. La lutte des classes reprend ses droits alors même qu’elle est noyée dans cette problématique verticale qui la brouille, l’arrivée des migrants chassés de chez eux par ces guerres ouvertes et déclarées et/ou la prédation plus sournoise des économies de leurs pays par les 1%.
L’une des raisons de la rupture prévisible de ce régime qui transfère de manière incessante l’Avoir vers une frange de plus en plus étroite du 1% et plus vraisemblablement du 0,1% de la population est constituée par le déclassement des 9% qui font tampon avec la masse des possédants en négatif. Ce troupeau où se recrutent les clercs qui produisent la justification idéologique du nécessaire appauvrissement de la majorité, écrivaillons, journalopes, universitaires et enseignants portant sébile, artisans de la publicité, administratifs de la grande distribution et des firmes, tout ce personnel subalterne utilisé comme gladiateurs, amuseurs et machinistes en cale, se rétrécit et s’appauvrit. La mobilité sociale existe toujours, elle s’effectue sous pression vers le bas. (En France, ils fournissent des ‘cadres’ aux Gilets Jaunes.)
Il est inapproprié de comparer l’Empire romain et sa décadence à l’actuelle évolution du système économique et politique globalisant sous la férule d’une fédération d’États disparates d’Amérique du Nord. L’extension depuis la péninsule italienne d’un système politique grâce à une domination militaire avait pour but de prélever un tribut aux provinces conquises. Payer l’impôt, c’est-à-dire donner une part du produit de son travail à une capitale lointaine ou à un Roi plus proche géographiquement était indifférent à la paysannerie qui y contribuait le plus. En échange, la paix était assurée et les champs labourés. La Pax Romana permettait de surcroît l’édification d’infrastructures routières pour le transport des marchandises et des troupes, d’aqueducs et d’autres babioles civilisationnelles comme les bains de vapeur encore en vogue dans les pays arabo-musulmans. Il s’est décomposé, trop étendu et délité politiquement par la prise du pouvoir par l’armée régulière et les mercenaires. Devenu incompétent à contenir l’assaut de peuplades germaniques conquérantes plus efficaces sur le plan militaire, il a succombé laissant en place pour des siècles une langue et des structures administratives dont a hérité la féodalité chrétienne en Occident.
Le capitalisme, d’emblée c’est la guerre, la meilleure illustration en est la conquête avortée de Bonaparte de l’Égypte et du Proche orient puis de l’Europe par Napoléon.
Cette épopée de la Révolution française n’est que cela et surtout cela, elle a abouti à la suprématie sans conteste de l’impérialisme anglais.
Le capitalisme est né dans la compétition, le plus souvent armée entrecoupée d’accalmies trompeuses, – l’entre-deux guerre par exemple, – entre bourgeoisies nationales. Il parvient à sa forme achevée avec le rejeton anglo-saxon en Amérique du Nord qui va dominer en poursuivant sous des formes transférées à la périphérie sa nature belliciste. Il n’y a jamais eu et il n’y aura jamais de Pax Americana pour la simple et (non) évidente raison que le capitalisme c’est la guerre permanente. Il a fallu la fin du bloc soviétique pour que cette vocation apparaisse dans sa nudité la plus crue. Les grands empereurs romains étaient souvent des philosophes et des généraux accomplis, les Usa nous ont donné Bush le deuxième, cocaïnomane (non) repenti incapable d’aligner une phrase correcte et dans sa langue maternelle qui restera célèbre pour deux citations ‘Mission accomplie’ et ‘ Ceux qui ne sont pas avec nous sont contre nous’. Et maintenant Trump nous offre le spectacle d’une variante de clown de cirque inculte.
Une fois épuisées les ressources de la terreur du Dieu Dollar qui perd de façon accélérée de son efficacité que restera-t-il comme trace de cette courte domination ? Le plastique dans les océans, les sites à jamais contaminés par l’uranium appauvri et l’agent orange, le souvenir d’Hiroshima et de Nagasaki ? En lieu et place de l’Énéide de Virgile, la désespérante tautologie d’un Blanc sur Blanc de Rothko ?
Ou bien, non, il nous restera cette observation d’une population de bactéries permise par le perfectionnement de lentilles grossissantes théorisées dans le Moyen Age arabe par le savant Ibn Haïtham (965-1039) dont la traduction tardive de l’ouvrage ‘Les Trésors de l’Optique’ en 1269 en Occident permettra la fabrication de lunettes puis de loupes et autres microscopes.
Les bactéries permettent en raison de leur multiplication rapide l’observation de leur comportement social en rapport avec leur environnement et leur mode métabolique.
Le travail de l’équipe d’Ivana Gudelj de l’Université d’Exeter (UK) publié fin juillet 2019 dans la revue Nature est consacré à la comparaison de trois souches de Saccharomyces cerevisiae qui ont des stratégies métaboliques différentes.
En général, les microbes ‘natifs’ procèdent à une dégradation des nutriments dans le milieu extérieur mettant à disposition le fruit de leur travail métabolique à autrui.
Cette disposition est coûteuse énergétiquement et risquée car elle favorise leur exploitation par des variantes ‘parasites’ qui vont se contenter d’internaliser les ressources métaboliques prélevées dans l’environnement. La fabrication de deux souches synthétiques a éclairé les raisons de cette stratégie apparemment aberrante car altruiste.
Une souche de métaboliseurs privés a été mise au point. Les bactéries procèdent à la dégradation du saccharose de façon purement interne et n’en relarguent rien dans l’environnement. Une autre souche de ‘tricheurs’ va s’économiser tout travail métabolique et puiser dans les nutriments déjà digérés présents à l’extérieur.
Grâce à des modèles mathématiques et des expériences écologiques, ce travail a montré que les métaboliseurs privés voient immanquablement leur population décliner.
Cette pression qui conduit vers l’extinction de la souche ‘ privée’ explique la stratégie apparemment imparfaite de la souche sauvage qui perd une partie de son travail dispersé dans la nature et est parfois mis à profit par des individus ou des souches concurrents sans avoir contribué au travail de transformation métabolique collectif. La sélection darwinienne a bien privilégié la souche collaborative et altruiste aux dépens des souches apparemment les plus compétentes économiquement. Ces modèles unicellulaires archaïques dans l’évolution des espèces illustrent la méprise et le contresens grossier des tenants d’un darwinisme social tel qu’il a été développé par Spencer et ses épigones retrouvés parmi les chantres du néolibéralisme. Outre son éclairage métaphorique saisissant sur le fonctionnement d’agrégats sociaux, il apporte quelques nutriments aux développements apportés par Patrick Tort sur la sélection darwinienne qui a privilégié l’empathie, l’entraide et a favorisé l’abnégation pour que puissent exister les sociétés humaines.
Dans la fiction de Scott Burns, la société des Égoïstes avant les trente trois ans prédits s’éteindra faute de combustibles humains produisant un surcroît de travail (la plus-value) accaparés par les non producteurs mais exploiteurs et profiteurs.
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