Un commentaire est associé à cet article. Vous pouvez le consulter et réagir à votre tour.
815Les constats à propos du comportement et des agissements du jeune président français dans le cadre du G8 laissent apparaître l’agitation habituelle, une certaine satisfaction de cette sorte de rencontres où l’on discute du sort du monde, un certain plaisir à rechercher un rôle de faiseur de compromis dans les domaines où la diplomatie reste ouverte, à tenir avec fermeté là où les conditions naturelles y engagent.
D’une façon générale, les échos recueillis disent que les contacts de Sarko avec Poutine furent excellents, au point d’être arrosés de quelques verres de vodka. Avec Bush, les choses allèrent moins de soi. C’est une indication qui va dans le sens des évidences et qui, naturellement, va faire bondir les gardiens vigilants de la vertu républicaine. Bondissez, bondissez, c’est bon pour le moral.
Ci-dessous, ce que Sarko a dit de Poutine lors de sa conférence de presse du 7 juin. On y sent beaucoup d’attention, de chaleur, de volonté de compréhension du Russe. Par contraste, le point de presse après la rencontre avec Bush fut assez terne, fait de réponses rapides et sans élaboration particulière, des protestations d’amitié éternelle type minimum syndical, et aussi le rappel des différences. Cet extrait du jour suivant suit celui qui concerne Poutine, il est d’un point de presse du 8 juin.
• Extraits de la conférence de Presse de Sarkozy au sommet du G8 de Heiligendamm, le 7 juin.
QUESTION – Comment s'est déroulé votre entretien avec Vladimir Poutine?
LE PRESIDENT – C'était franc, puisque nous avons évoqué tous les sujets : la Tchétchénie, la journaliste, les droits de l'homme, les droits des homosexuels. Nous l'avons fait calmement, sereinement. Je l'ai fait sans aucune agressivité et nous avons échangé. J'ai trouvé un homme ouvert au dialogue, acceptant la discussion sur ces problèmes complexes. Moi-même, j'ai essayé de comprendre la problématique des Russes qui ont depuis vingt ans, c'est incontestable, eu à affronter bien des crises et bien des difficultés. J'ai dit au Président Poutine que l'Europe ne voulait pas isoler la Russie. D'ailleurs, comment isoler un pays grand comme un continent ? Je lui ai dit aussi que la France voulait avoir un véritable partenariat de confiance et d'amitié avec la Russie, que la France rassemblait les énergies et, en aucun cas, ne cherchait à diviser. Je crois pouvoir dire que cela s'est bien passé puisque cela a duré beaucoup plus longtemps que prévu. J'ai trouvé un homme très au fait de ses dossiers, très calme, très intelligent et c'était très intéressant d'évoquer tout ceci. Il m'a expliqué en détails la proposition qu'il avait faite au Président Bush quelques dizaines de minutes auparavant s'agissant de l'affaire du radar et des missiles. Je lui ai proposé que des experts militaires français et russes se réunissent pour voir ce qu'il en était. Je dois vous dire que j'ai eu beaucoup de plaisir et d'intérêt à parler avec le Président Poutine.
QUESTION – Vous avez parlé avec le Président Poutine des sujets qui fâchent. Vous avez parlé des assassinats de journalistes, est-ce que vous pouvez rentrer dans le détail et nous expliquer ce qui s'est dit ?
LE PRESIDENT – Ecoutez, j'ai évoqué ces questions sans la volonté de donner des leçons, et ce n'est pas à moi de faire ou de dire les réponses du Président Poutine, ni d'expliquer les difficultés qui étaient les siennes, ni ce qu'il m'a dit sur le sujet. J'ai dit au Président Poutine que le monde avait besoin de la Russie pour assurer sa stabilité et que c'est très important. Vous savez que l'influence de la Russie sur un dossier aussi complexe par exemple que celui de l'Iran, est quelque chose qui compte. Nous avons parlé longtemps du Kosovo et j'ai fait une proposition que je peux vous détailler. J'ai également indiqué que, nous aussi, les démocraties plus anciennes, nous pouvions avoir aussi des leçons à recevoir sur la question des droits de l'homme, que j'acceptais parfaitement d'en parler moi-même et que mon idée n'était pas de blesser le sentiment national russe. Mon idée était de comprendre et d'attirer l'attention. Et c'est d'une façon très apaisée que nous l'avons fait. Sur le Kosovo, j'ai fait la proposition suivante : d'abord, je crois que cela serait une situation très difficile que de présenter une motion, une délibération au conseil de sécurité et de s'opposer au veto russe. En effet, à partir de ce moment-là, j'attire votre attention sur le fait que nous nous retrouverons dans la situation d'avoir des centaines d'hommes sur le terrain sans savoir quel serait leur statut juridique. C'est-à-dire avec certains pays qui reconnaîtraient l'indépendance du Kosovo et d'autres qui la contesteraient. Je pense qu'il faut éviter d'aller au conflit tout de suite. Et la proposition que j'ai faite, c'est que le Président Poutine reconnaisse — les mots ont un sens — la perspective inéluctable de l'indépendance du Kovoso. Pendant six mois, on assurerait la pérennisation des effets juridiques de la résolution 1244 pour donner un mandat aux soldats qui sont sur le terrain ; on pousserait Belgrade et Pristina à discuter et à dialoguer ensemble. Et, au bout de six mois, soit Belgrade et Pristina ont trouvé un meilleur statut, et, dans ce cas-là, c'est celui-là qui s'applique, soit ils ne l'ont pas trouvé et, dans ce cas-là, c'est la solution Ahtisaari qui s'appliquerait. Ceci aurait l'avantage de permettre à Monsieur Poutine d'avoir un peu de temps et d'obliger les Serbes et les Kosovars à discuter. Sans statut juridique, les violences risquent de reprendre et je ne vois pas bien ce que l'on aurait à y gagner. Alors, il y a eu une discussion avec le Président Bush, Tony Blair, le Président Poutine. Si c'était simple, cela se saurait. Il n'est pas absurde qu'on discute, qu'on réfléchisse, et que cela pose des problèmes à chacun. Mais il me semble que ceci pourrait être une voie médiane dont je ne dis pas qu'elle est parfaite pour, en tout cas, éviter le drame que serait une division. J'ajoute que je ne verrai que des avantages à permettre à Monsieur Poutine qui craint, par-dessus tout, l'élargissement à d'autres situations, de lui donner un peu de temps. Je crois que ce serait bon pour l'équilibre de la région.
• Point de presse de Sarkozy à l'issue de son entretien avec GW Bush, au Sommet du G8 de Heiligendamm, le 8 juin.
QUESTION – Que vous a-t-il répondu ?
LE PRESIDENT – Qu'il pouvait comprendre que je fasse la même chose que ce que font les Américains…
(…)
QUESTION – Sur un plan personnel, comment s'est passé votre entretien ?
LE PRESIDENT – Très bien, j'ai été très sensible au fait que, malgré cette légère indisposition, le Président Bush ait tenu à maintenir cette rencontre. Une longue rencontre de travail n'est jamais agréable lorsqu'on est un peu indisposé.
Mis en ligne le 12 juin 2007 à 13H58
Forum — Charger les commentaires