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1122Il n'y a pas qu'en France où l'immigration, par le biais de la question de l'insécurité débattue à l'occasion des élections présidentielles, est un dossier central. Une campagne électorale plus discrète que la française, mais peut-être tout aussi importante, se développe en abordant de plus en plus ce thème. C'est l'argument de l'Américain d'origine allemande Paul M. Weyrich, president du Free Congress Foundation, qui signale cette évolution en Allemagne. Plus que jamais, au-delà des questions de sécurité ou d'insécurité et du débat sur le rôle de l'immigration dans ce climat, c'est la question de l'intégration et du malaise identitaire qui l'accompagne qui est posée.
« However, John Gizzi in the conservative weekly Human Events, reports that immigration is emerging as a key issue in the upcoming German elections. And the issue has propelled the Minister President of Bavaria, Edmund Stoiber, ahead of incumbent Chancellor Gerhard Schroeder. If Stoiber is able to upset the heavily favored Schroeder it will impact on politics in this country as well. The reason is that the immigration issue in Germany revolves around those who refuse to integrate into German society. Unemployment there is running at post-World War II highs. It really irritates many German voters that there are immigrants from Turkey and other nations who refuse to speak the German language and who openly scorn the nation that has provided them with jobs at a time when many native Germans are unemployed.
» Underlying at least some of the tension gripping the German electorate is the fact that many of those who refuse to become Germans are Moslems who openly scorn the German government, which is still officially Christian, both Roman Catholic and Lutheran. [...] ... a Stoiber victory will surely be attributed to the immigration issue. If it can enable a Bavarian to become Chancellor of the Federal Republic (no Southern German has been able to do so in the past 53 years), American politicians will begin to take a good, hard look at that issue and exactly how it played.»
Le cas allemand rejoint le cas français en matière d'exemplarité pour l'extérieur, et particulièrement pour les États-Unis. Weyrich intitule son article : « Immigration: the Next Big Issue? » La question ne concerne pas l'Allemagne ni la France, où nous y sommes déjà. Elle concerne sans aucun doute l'Amérique. C'est effectivement une prévision à suivre car les signes s'accumulent : la question de l'immigration est un grand débat à venir aux États-Unis. Pour ce pays bâti sur l'immigration, il est fondamental.
Désormais, Le Monde publie régulièrement des pages du New York Times. L'initiative est faite pour “ouvrir” l'esprit des lecteurs du journal au monde (!) américain. On connaît les arguments en France sur cette question, comme on connaît les arguments contre. Plus intéressant est de voir quel accueil les Américains ont fait à cette initiative française, si c'est le cas (s'il y a eu effectivement un accueil).
Un article de Adam Gopnik, dans The New Yorker du 22 avril, nous donne une de ces réactions américaines, et elle est bien caractéristique. Gopnik nous dit simplement que la réciproque ne lui semble pas concevable, tant il paraît éloigné de l'esprit américain, fût-il libéral comme celui des journalistes du New York Times, de présenter aux lecteurs américains un texte qui ne soit pas en anglais (mis à part les publications sectorielles et les publications de la puissante communauté hispanique). Il ne vient pas à l'esprit américain, fût-il cultivé, l'idée de publier quelque chose d'un langage “du dehors” (ou, disons, du Rest of the World). Gopnik s'en afflige et fait beaucoup de compliments aux Français pour cette initiative, mais son texte revient en réalité à une critique du comportement américain. Voici un extrait de l'article de Gopnik, —
« And—this is the part that is not just shocking but earthshaking, suggesting comets bouncing off the heads of dinosaurs, the Lisbon earthquake, and the storming of the Bastille—the entire supplement, created for the French edition, was published in English. Le Monde was announcing, blandly, that it now expected its readers to spend some time every week reading American news as Americans see it, in American (which is what the paper often calls our language). If one imagined the Times asking its readers to read twelve pages of French every week, one would still not comprehend the scale of this new idea, since the Times (a) wouldn't do it and (b) is not published in a country where a belligerent defensiveness about the national language is a defining characteristic. »
Le 26 avril, le général Tommy Franks, chef du Central Command (c'est lui qui commanderait l'attaque si l'Irak était envahie) est à Londres pour parler avec ses pairs britanniques de cette future opération. Franks est enthousiaste, les Britanniques plus que prudents. La rencontre mesure parfaitement le malaise régnant entre Britanniques et Américains, et plus encore quand l'on en arrive, entre militaires, à discuter de détails militaires pratiques.
Dans ses déclarations publiques, l'Américain met l'accent sur les capacités américaines de faire “deux guerres en même temps”, ce qui signifie lancer l'attaque sur l'Irak alors que la guerre en Afghanistan n'est pas finie. Certes, il s'agit de termes théoriques, et l'on ne peut parler, ni en termes d'intensité opérationnelle, ni en termes d'intensité de déploiement et de présence, d'une véritable “guerre” en Afghanistan. C'est une opération de relations publiques. Pour Franks, il s'agit de répondre aux critiques qui, aux USA, mettent en cause les capacités de l'U.S. Army à effectivement réaliser ces opérations (Afghanistan et Irak) simultanément. L'U/S. Army, lourde, peu entreprenante, prudente, inadaptée, est sortie des premières opérations en Afghanistan fortement diminuée en terme d'image, par contraste avec le Marine Corps (service concurrent puisque lui aussi destiné aux opérations terrestres) qui s'est montré beaucoup plus efficace, actif, entreprenant. A Washington, à l'heure des budgets réduits (contrairement à ce que fait croire aux Européens l'augmentation de $48 milliards pour l'année FY2003), chaque service en est à défendre ses prérogatives. L'U.S. Army est en mauvaise position. Franks, dans sa position de commandant de Central Command, tente de redorer son blason.
Quant aux Britanniques, tout leur discours tend à réduire les hypothèses d'une intervention, et faire de cette consultation un exercice de routine. Les déclarations officieuses des militaires britanniques sont, comme celles de Franks, à consommation interne : pour les généraux britanniques d'abord, inquiets de l'utilisation intensive et peu coordonnée des forces britanniques dans des batailles incertaines
Bref, deux exercices de communication intérieure parallèles, sans coordination ni accord réel, qui ne fait que marquer l'aspect contraint de la coalition anglo-saxonne et le caractère complètement virtualiste de la grande guerre contre le terrorisme. Pendant ce temps, les derniers bruits pour la guerre en Irak repousse celle-ci en 2003 et peut-être au-delà.