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12 septembre 2005 — L’anniversaire du 11 septembre 2001 s’est déroulé d’une façon discrète aux USA, par rapport à l’habitude. Même avec la mine de circonstance et l’appel aux morts du 11 septembre, le temps n’est plus celui de l’exaltation patriotique. L’humeur est affreusement sombre, l’amertume palpable. Tout retombe aujourd’hui sur les frêles épaules de GW, mais sans espoir que cela suffise à conjurer le sort. (D’ailleurs, GW s’aperçoit-il des choses? Aux innocents les mains pleines, et GW l’est d’une certaine façon, par comparaison avec ceux qui l’ont porté là où il se trouve.)
Les signes de ce climat épouvantable de désarroi défilent jour après jour.
• Katrina et ses suites sont là pour durer. L’événement va constituer désormais un formidable abcès de fixation du mécontentement général. Peu importent les plaidoiries et arguments des spécialistes et autres coupeurs de cheveux en quatre: la chose (Katrina) est désormais installée comme emblème de la catastrophique politique de GW et de l’état incroyablement catastrophique, au-delà de ce qu’imaginaient ses critiques les plus exaltés, du système aux Etats-Unis. L’Amérique nous étonnera toujours.
• La popularité du président poursuit sa chute et atteint des niveaux jamais vus auparavant, des niveaux de “présidence en crise”, — mais une crise endémique, inéluctable, irrattrapable, dont on ne voit pourtant ni la fin ni l’issue. Newsweek, qui diffusait samedi son dernier sondage, titrait : « Eye of the Political Storm, — A new Newsweek poll suggests President Bush could become Katrina’s next casualty. » Aujourd’hui, le pourcentage d’approbation du travail du président américain est tombé à 38%.
« In Katrina’s wake, the president’s popularity and job-approval ratings have dropped across the board. Only 38 percent of Americans approve of the way Bush is doing his job overall, a record-low for this president in the Newsweek poll. (Fifty-five percent of Americans disapprove of his overall job performance.) And only 28 percent of Americans say they are “satisfied with the way things are going” in the country, down from 36 percent in August and 46 percent in December, after the president’s re-election. This is another record low and two points below the satisfaction level recorded immediately after the Abu Ghraib prison abuse scandal came to light. Fully two-thirds of Americans are not satisfied with the direction of the country.
(...)
» More critical to President Bush—and the GOP’s future as the nation’s majority party: most Americans, 52 percent, say they do not trust the president “to make the right decisions during a domestic crisis” (45 percent do). The numbers are exactly the same when the subject is trust of the president to make the right decisions during an international crisis. »
• La crise irakienne se poursuit et, en même temps, réduit comme peau de chagrin ce qui reste de confiance de l’élite washingtonienne dans la capacité de cette administration à conduire cette crise (comme les autres). Les annonces sont désormais nombreuses, de groupes ou d’enquêtes qui conduisent à une condamnation unanime de la politique du président. On la trouve aussi bien dans la grande conférence de Washington des 6-7 septembre (organisée par la New America Foundation : « Terrorism, Security & America's Purpose »), dont Jon Basil Utley fait un rapport aujourd’hui sur Antiwar.com ; que dans une enquête de FoxNews publiée ce jour, et intitulée : « Bush Supporters Question Iraq War Tactics. » Qu’importent le fond et le sens, voire la validité plus ou moins grande de ces critiques, une seule chose ressort: une condamnation de la politique de l’administration Bush, cette fois développée par des hommes et des femmes qu’on voit d’habitude dans le camp du soutien de cette politique. (Quelle ironie de lire une enquête de FoxNews diffusant entre autres les critiques du neocon en chef William Kristoll. Tous ces organismes et tous ces gens furent les apologistes hystériques du président/commandant en chef de 9/11. Pffuitt! Aujourd’hui, on pilonne gratis.)
Rien de tout cela n’indique aucune démarche définitive, ni encore moins constructive. C’est une mesure de la solitude où se trouve l’administration GW Bush, au milieu d’une population et d’un establishment qui avaient pris l’habitude, tant bien que mal, par conformisme autant que par conviction, de soutenir ses ambitions extrémistes. Mais disons cela autrement, et de façon bien plus significative: c’est, finalement, bien plus encore, une mesure du désarroi du système. GW Bush n’est ni un monstre ni un imposteur, ni rien de semblable: c’est une créature falote, enfantée par le système pour le diriger sans trop lui faire d’ombre.
Il n’est pas du tout certain, par conséquent, que s’annonce là une offensive déterminée contre GW Bush dans un but précis, par exemple vers une procédure d’impeachment (que réclament nombre de dissidents et qui pourrait aisément trouver des arguments). En fait, personne ne saurait qui et quoi mettre à la place d’un GW Bush, — et surtout pas un Cheney, qui deviendrait président si GW était destitué! Il n’y a aucune alternative chez les démocrates, dont la conduite ces dernières années est un modèle de lâcheté et d’irresponsabilité politiques, parce que personne ne sait quelle politique proposer à la place de celle qui est conduite. La plupart des critiques actuels de GW l’ont approuvée, parfois avec enthousiasme, et ils seraient bien en peine de trouver une alternative; ils ne font que tenter de se démarquer du principal responsable visible et de l’impopularité considérable de GW; ils ne font que porter une critique radicale là où il est impossible, aujourd’hui, de ne pas porter une critique radicale. Pour le reste, ils ne savent rien et sont aussi impuissants que celui qu’ils ont soutenu pendant quatre ans.
Ce n’est pas une présidence qui est en crise, — ce serait si facile et si rassurant, de pouvoir regagner un peu de temps et un peu de vertu en se débarrassant d’un président devenu très encombrant. Nous n’allons certainement pas vers un Watergate-bis, même si GW subissait par extraordinaire le sort d’un Nixon (cela est vraiment complètement improbable). Comme en Irak, comme face à Katrina, le système n’a pas de “Plan B”. Le système va devoir boire le calice jusqu’à la lie. Il va la trouver saumâtre. Peut-être bien qu’il en attrapera une affection considérable, qui ferait craindre le pire.