Soros “complote”-t-il contre BHO ?

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Il est beaucoup question du milliardaire américano-hongrois Georges Soros, devenu, fortune faite dans la spéculation boursière, grand agitateur politique dans le sens des “libéraux” (au sens US de progressiste), éventuellement interventionniste (disons, du type libéral hawk). Soros a largement financé les “révolutions de couleur” anti-russes en Europe de l’Est et il est très actif aux USA. Sa collusion avec les neocons (“révolutions de couleur”) ne s’est pas poursuivie aux USA, où il s’est rangé dans le camp démocrate, et où il a férocement soutenu Obama en 2008.

Soros est la cheville ouvrière de la collecte du Big Money, avec lui-même comme donateur de dimension, pour le parti démocrate et Obama. Une très récente intervention de lui, mardi, devant la Democratic Alliance, qui réunit les donateurs du parti démocrate, a attiré l’attention. Deux sites importants, notamment, ont eu des échos de cette réunion normalement confidentielle, Huffington.post le 17 novembre 2010 et Politico.com le même 17 novembre 2010. Les deux textes se recoupent et donnent une version potentiellement explosive de cette intervention, très vite délayée par des précisions complémentaires destinées à atténuer cet effet.

Huffington.post… «At a private meeting on Tuesday afternoon, George Soros, a longtime supporter of progressive causes, voiced blunt criticism of the Obama administration, going so far as to suggest that Democratic donors direct their support somewhere other than the president. […]

»According to multiple sources with knowledge of his remarks, Soros told those in attendance that he is “used to fighting loosing battles but doesn't like to lose without fighting.” “We have just lost this election, we need to draw a line,” he said, according to several Democratic sources. “And if this president can't do what we need, it is time to start looking somewhere else.”

»Michael Vachon, an adviser to Soros, did not dispute the comment, though he stressed that there was no transcript of a private gathering to check. Vachon also clarified that the longtime progressive giver was not referring to a primary challenge to the president. “Mr. Soros fully supports the president as the leader of the Democratic Party,” said Vachon. “He was not suggesting that we seek another candidate for 2012. His comments were made in a private, informal conversation that was about the need for progressives to be more forceful in promoting their agenda. He was stressing the importance of being heard by elected officials.”»

Politicopo.com donne une version plus soft, avec des précisions et une forme destinées à atténuer encore plus l’effet du texte de Huffington.post, qui est cité en tant que tel…

«Meeting with major Democratic donors in Washington this week, George Soros urged them to pressure the Obama administration to focus on liberal policy priorities including climate change and immigration reform, which are considered non-starters with Republicans set to assume control of the House. […]

»The Huffington Post on Wednesday reported that several sources quoted Soros as saying in Wednesday’s private session that “if this president can't do what we need, it is time to start looking somewhere else.”

»Soros was not suggesting that progressives mount a 2012 primary challenge to President Barack Obama from the left, but rather that “liberals need to be more forceful and should create pressure from the left” to keep their issues on the legislative radar, Michael Vachon, a Soros adviser, told POLITICO.»

Notre commentaire

@PAYANT Georges Soros est-il un “comploteur” ? Oui, bien sûr, mille fois oui… Il s’agit d’un financier spéculateur, qui s’est pris d’amour pour une sorte de néo-humanisme de tyope postmoderniste ou même néo-postmoderniste, qui croit pouvoir par l’action semi-clandestine déclencher des mouvements ou des processus politiques vers des structures qu’il juge plus justes et plus “progressistes”, – c’est cela, surtout, plus “progressistes”. Il s’agit chez cet homme d’une formule et des ingrédients typiques de la modernité, lorsque l’apport quantitatif (la fortune) vous fait croire, lorsque vous avez l’esprit de la chose, que vous pourriez atteindre au domaine haut du qualitatif (l’amélioration de la condition des hommes, dans un sens qualitatif). En général, le résultat est catastrophique parce qu’on ne peut créer de la hauteur à partir de ce qui est bas (l’argent pris comme référence de valeur) et tend de plus en plus vers la bassesse… Jusqu’ici, le bilan de Georges Soros est plutôt du genre mitigé, car, malgré ses “bonnes intentions”, Soros reste un homme du système, inextricablement lié à l’aspect évidemment maléfique du système ; pas mauvais en soi, certes, mais avec cette psychologie faible des capitaines postmodernistes qui tombent sans coup férir dans les rets du système, dans le champ du “déchaînement de la matière”.

Bref, il “complote”, et son champ d’action, en même temps que l’extension de sa nationalité hongroise vers l’américaine, est passé de l’Europe de l’Est aux USA. Soros, un temps “allié objectif” des extrémistes interventionnistes neocons du clan républicain, est devenu la bête noir de ce clan. On le voit, notamment sur Fox.News où le présentateur-idéologue Glenn Beck (assez proche de Tea Party) a même été jusqu’à reprendre à son compte certains des arguments anti-Soros du groupe LaRouche. La principale accusation des pourfendeurs républicains de Soros est la suivante : BHO est une puppet entre les mains de Soros, qui le finance jusqu’à plus soif. Pour un peu, du côté républicain, on crierait à la corruption, comme l'hôpital en faillite qui se fout de la charité en déroute.

Que Soros ait financé BHO, aucun doute… Comme on l’a vu, il n’est pas le seul, sauf qu’il est le “patron”, ou disons l’inspirateur, des milliardaires démocrates qui soutiennent BHO. L’intérêt des nouvelles qu’on lit, c’est que Soros commence bel et bien à virer de bord, – pas encore tout à fait, mais déjà à la manœuvre et, à notre sens, parti pour aller jusqu’au bout de cette manœuvre malgré les mises au point de son porte-parole. Notre perception de cette affaire, compte tenu de la psychologie de Soros qui manie le goût de la manipulation à celui d’une véritable idéologie progressiste musclée (liberal hawks, où la démocratie et le bonheur social installés à la force de l’argent et éventuellement du knout), c’est celui d’un véritable désenchantement chez ce même Soros devant l’inaction, la paralysie, la pusillanimité d’Obama. Ce n’est certainement pas que Soros veuille un “American Gorbatchev”, – Soros n’a rien des vertus qui peuvent le conduire à souhaiter une véritable attaque du système, – mais il veut un président vraiment de centre gauche, presque de gauche, dans tous les cas progressiste, qui rentre dans le lard des républicains, mais en restant dans les normes convenables du système, cela va de soi. Obama ne correspond pas au modèle, malgré les promesses de la campagne électorale, et Soros commence à en avoir assez.

Notre sentiment (suite), c’est que le démenti du porte-parole de Soros selon lequel Soros ne cherche pas à susciter une candidature de gauche autre qu’Obama, sur la gauche d’Obama, pour 2012, n’est pas faux, mais qu’il n’est que provisoire. Si la situation continue à évoluer comme elle le fait depuis 2009, si Obama continue à être égal à lui-même, – et pourquoi changerait-il ? – eh bien Soros deviendra de plus en plus incisif et basculera nettement dans une opposition de gauche, contre Obama, et cherchera à susciter une autre candidature. (A noter qu’il n’est pas le seul dans cette sorte de projet et, après tout, l’appel que le gros Thomas Friedman lançait en octobre, dans les pages du New York Times, pour un troisième candidat, ressemble à s’y méprendre à d’éventuels projets anti-Obama de George Soros.) De ce point de vue, George Soros le “comploteur” progressiste au sein du système général de l’américanisme, et en faveur de ce système croit-il, devrait activement contribuer à la déstructuration de ce système général de l’américanisme en devenant de plus en plus hostile à l’administration en place. Il devrait ainsi contribuer à élargir de plus en plus le champ de la confusion et du désordre, en exprimant à sa façon, au sein du camp démocrate et progressiste, la même sorte de crise qui affecte le cœur du parti républicain.

La question n’est pas ici de chercher d’inutiles, vaines et dérisoires explications idéologiques, mais de constater l’irrésistible poussée vers le morcellement du système, vers la déstructuration d’un système déstructurant, la voie accélérée menant à l’effondrement du dit système. Il est normal que le camp démocrate connaisse les mêmes tourments de la division, de la surenchère, de la montée aux extrêmes, que ceux que connaît le parti républicain. Tout cela est dans l'ordre des choses et ne peut que susciter une intense satisfaction.


Mis ebn ligne le 18 novembre 2010 à 12H05