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5322• Un petit coup d’œil sur 2008, l’année où s’est noué le destin de la crise ukrainienne jusqu’à cette issue ‘Ukrisis’ de la guerre russo-ukrainienne (OTAN). • Il s’agit d’une note de l’ambassadeur des USA à Moscou du 1er février 2008. • L’Ambassadeur Burns est aujourd’hui directeur de la CIA, et ce qu’il a gagné en connaissance des secrets se chiffre en une somme considérable de folies par rapport à la sagesse de 2008 où tout était déjà écrit d’une façon inéluctable. • Un document évidemment obtenu grâce à l’inlassable activité des réseaux de Wikileaks.
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Dans un article du 5 juillet 2023, accompagnant un entretien avec le Juge Napolitano sur sa chaîne Youtube, Larry S. Johnson développe quelques considérations sur une intervention à Ditchield, au Royaume-Uni, du directeur de la CIA, Bill Burns. Lisez l’article de Johnson et comprenez que Burns, la CIA, le Pentagone et la question stratégique des trans, la bande à Biden, les ‘Woke’-sisbrothers, – tout ça, la folie totale qui nous dévore se trouvait donc en gestation !
En marge de ce constat d’aliéniste diplômé, Johnson, ancien officier de la CIA, nous présente les références en même temps que l’abstract d’une note du 1er février 2008 de l’ambassadeur des USA à Moscou, monsieur l’Ambassadeur William S. Burns, à destination du département d’Etat. La note porte sur le projet d’intégrer l’Ukraine et la Géorgie dans l’OTAN, décision de principe qui doit être débattue au prochain sommet de l’OTAN d’avril 2008 à Bucarest, – et qui sera adoptée sous l’intense super-pression des USA, malgré les réticences plus que marquées de pays européens comme la France et l’Allemagne. Voici comment Johnson nous présente ce document qu’il a obtenu grâce à l’inlassable activité-activiste du glorieux Wikileaks.
« Qu'est-il arrivé au Bill Burns de 2008 ? Voici le paragraphe de synthèse du câble qu'il avait envoyé à Washington (publié sur internet grâce à Wikileaks). Il avait tout compris : [...]
» C'était une autre époque. Aujourd'hui, c'est la folie totale. Je vous encourage à lire l'intégralité du câble pour apprécier la volte-face de Burns lors de la conférence Ditchfield. »
La suggestion de Johnson est bienvenue. Nous présentons donc la note de monsieur l’Ambassadeur, en traduction et adaptation françaises. Effectivement, le contenu vaut d’être détaillé, et permet à un lecteur moyen de 2008 de tirer plusieurs conclusions.
• D’abord, nous sommes rassurés : la crise ukrainienne menant directement à la guerre n’a pas commencé le 21 février 2014 avec le coup d’État de la CIA au Maidan, mais les 2-4 avril 2008 au sommet de l’OTAN, malgré, – notamment car il y en eut d’autres, – les avertissements circonstanciés de l’ambassadeur des USA deux mois auparavant. On retrove aussi ceux de Dimitri Trenine qui, lui, est resté insensible à laa folie.
• La note de Burns a été traités comme un papier de chiotte par une administration Bush gangrenée par les neocon partout dans les bureaucraties de la sécurité nationales et les organes parasitaires d’influence, comme le seront ensuite (gangrenées) les administrations Obama, Trump (en partie) et Biden. La folie était déjà là et bien là, dans sa latence bien structurée mais assez habilement dissilmulée. Comme le dit justement Casey :
« ...Et il [RFK] souligne que lorsque son oncle était au pouvoir, les conseillers qui l'entouraient, la Nomenklatura, étaient tous favorables à plus d'interventions à l'étranger, plus de dépenses militaires et plus d'aventures militaires dans le monde. Il en va de même pour les États profonds partout dans le monde.
» Le pire membre d'un gouvernement n'est pas toujours celui qui est au sommet. Les conseillers qui l'entourent tirent généralement les ficelles. En fait, ce sont eux qui volent la plus grande partie de l'argent. »
• Le fait mis en évidence par Burns que l’adhésion à l’OTAN promise dans le principe à l’Ukraine et à la Géorgie est utilisée dans les batailles internes de ces deux pays, est évident pour ces deux pays. On n’a tout de même pas oublié que la guerre entre la Russie et la Géorgie du 7 août 2008 a été déclenchée par une attaque de la Géorgie contre des positions de forces russes de maintien de la paix dans la région Abkhazie et Ossétie du Sud. Saakachvili utilisa effectivement cette perspective à partir d’une pression survoltée de sa bureaucratie alimentée par les neocon de Washington ayant tos à l’esprit le satisfecit de Bucarest. Bien entendu, le cas ukrainien est néanmoins constamment mis en avant par Burns comme beaucoup plus important.
... Par conséquent, tout se trouve dans ce mémo de Burns, du moins si l’on s’en tient à la logique des jugements mesurés. Il y manque l’élément finalement essentiel qui est celui de la folie qui n’a pas encore infecté l’ambassadeur. Qui aurait cru que monsieur l’Ambassadeur Burns en viendrait à dire toutes ces sottises extravagantes dont Larry Johnson se gausse dans l’effarement irrépressible de ce que sont devenus la CIA et son directeur ? Qui aurait cru que l’on aboutirait à ce ‘Clown of the Years’ dans le ‘Clown World’ de Christoforou, – Volodymir Zelenski, comme arbitre de ce jeu de roulette de la Troisième Guerre mondiale ? A côté de lui, même l’ineffable Saakachvili et ses aventures géorgiennes font plus sérieux. C’est dit, on n’arrête pas le progrès.
Non seulement la note de Burns nous fait mesurer le chemin tracé dans l’erreur constamment réaffirmée, mais il nous donne surtout une bonne mesure de la folie qui a envahi le monde... Vue de 2023, l’année 2008 et l’époque d’alors font sérieux ; Dieu sait s’il y avait déjà à redire !
Alors bonne lecture et lecture édifiante, en ayant à l’esprit que “GOR” signifie “Government Of Russia” et “MAE” une adaptation française avec “Ministère des Affaires Étrangères” (russe), et d’autres références entre parenthèses du langage bureaucratique, ultra-codé et ultra-secret, du département d’État.
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1er février 2008
B. MOSCOW 182
Classified By: Ambassador William J. Burns. Reasons 1.4 (b) and (d).
1. (C) Résumé. Après une première réaction mitigée à l'intention de l'Ukraine de demander un plan d'action pour l'adhésion à l'OTAN (MAP) au sommet de Bucarest (réf. A), le ministre des Affaires étrangères Lavrov et d'autres hauts fonctionnaires ont réitéré leur forte opposition, en soulignant que la Russie considérerait toute nouvelle expansion vers l'Est comme une menace militaire potentielle. L'élargissement de l'OTAN, notamment à l'Ukraine, reste une question « émotionnelle et très-sensible » pour la Russie mais des considérations de politique et de stratégie sous-tendent également la forte opposition à l'adhésion à l'OTAN de l'Ukraine et de la Géorgie. Pour l’Ukraine, il s'agit notamment de la crainte que cette question ne divise le pays en deux, entraînant des violence ou même, selon certains, une guerre civile, ceci et cela obligeant la Russie à décider d'intervenir ou non. En outre, le GOR et les experts continuent d'affirmer que l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN aurait un impact majeur sur l'industrie de défense russe, les liens familiaux russo-ukrainiens et les relations bilatérales en général. En Géorgie, le GOR craint la poursuite de l'instabilité et des « actes de provocation » dans les régions séparatistes. Fin du résumé.
2) (U) Lors de son examen annuel de la politique étrangère de la Russie les 22 et 23 janvier (réf. B), le ministre des Affaires étrangères Lavrov a souligné que la Russie doit considérer l'expansion continue de l'OTAN vers l'Est, notamment vers l'Ukraine et la Géorgie, comme une menace militaire potentielle. Si la Russie peut croire les déclarations de l'Occident selon lesquelles l'OTAN n'est pas dirigée contre la Russie, les activités militaires récentes dans les pays de l'OTAN (établissement d'opérations avancées, etc.) doivent néanmoins être évaluées non pas en fonction des intentions déclarées mais de leur potentiel. M. Lavrov a souligné que le maintien de la « sphère d'influence » de la Russie dans le voisinage est anachronique. Les États-Unis et l'Europe ont des « intérêts légitimes » dans la région. Mais, selon lui, si les pays sont libres de prendre leurs propres décisions concernant leur sécurité et les structures politico-militaires, ils doivent garder à l'esprit l'impact sur leurs voisins.
3) (U) M. Lavrov a souligné que la Russie était convaincue que l'élargissement n'était pas fondé sur des raisons de sécurité mais qu'il s'agissait d'un héritage de la guerre froide. Il a contesté les arguments selon lesquels l'OTAN était un mécanisme approprié pour aider à renforcer les gouvernements démocratiques. Il a déclaré que la Russie comprenait que l'OTAN était à la recherche d'une nouvelle mission mais il y a une tendance croissante chez les nouveaux membres à faire et à dire ce qu'ils veulent simplement parce qu'ils sont sous l'égide de l'OTAN (par exemple, les tentatives de certains nouveaux pays membres de “réécrire l’histoire et de glorifier les fascistes”).
4) (U) Lors d'un point de presse le 22 janvier, en réponse à une question sur la demande de MAP de l'Ukraine, le MAE a déclaré qu’ « une nouvelle expansion radicale de l'OTAN pourrait entraîner un sérieux changement politico-militaire qui affectera inévitablement les intérêts de la Russie en matière de sécurité ». Le porte-parole a poursuivi en insistant sur le fait que la Russie était liée à l'Ukraine par des obligations bilatérales énoncées dans le traité d'amitié, de coopération et de partenariat de 1997, dans lequel les deux parties s'engagent à « s'abstenir de participer ou de soutenir toute action susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l'autre partie ». Le porte-parole a noté que « l'intégration probable de l'Ukraine dans l'OTAN compliquerait sérieusement les relations russo-ukrainiennes dans leurs multiples aspects » et que la Russie « devrait prendre les mesures appropriées ». Le porte-parole a ajouté que « l'on a l'impression que les dirigeants ukrainiens actuels considèrent le rapprochement avec l'OTAN en grande partie comme une alternative aux liens de bon voisinage avec la Fédération de Russie ».
5. (C) Les aspirations de l'Ukraine et de la Géorgie à l'OTAN ne touchent pas seulement un nerf à vif en Russie, elles suscitent de vives inquiétudes quant aux conséquences pour la stabilité de la région. Non seulement la Russie perçoit un encerclement et des efforts visant à saper l'influence de la Russie dans la région, mais elle craint également des conséquences imprévisibles et incontrôlées qui pourraient affecter gravement les intérêts de la Russie en matière de sécurité. Les experts nous disent que la Russie est particulièrement préoccupée par les fortes divisions en Ukraine sur l'adhésion à l'OTAN, avec une grande partie de la communauté ethnique russe opposée à l'adhésion à l'OTAN. Cela pourrait conduire à une scission majeure, accompagnée de violences ou, au pire, d'une guerre civile. Dans cette éventualité, la Russie devrait décider d'intervenir ou non, une démarche à laquelle elle ne veut pas être confrontée.
6. (C) Dimitri Trenine, directeur adjoint du Centre Carnegie de Moscou, s'est inquiété de ce que l'Ukraine soit, à long terme, le facteur le plus potentiellement déstabilisant des relations américano-russes, étant donné le niveau d'émotion et de nervosité suscité par sa demande d'adhésion à l'OTAN. La lettre demandant l’examen de la MAP a été une « mauvaise surprise » pour les responsables russes, qui avaient cestimé que les aspirations de l'Ukraine à l'OTAN étaient passées au second plan dans le paysage politique. Avec cette lettre publique, la question a été brusquement “réactivée”. L’adhésion à l'OTAN restant un sujet de discorde dans la politique intérieure ukrainienne, elle a ouvert la porte à des spéculations russes. Trenine s’inquiète du fait que des éléments de l'establishment russes sont encouragés à se mêler de ce qui ne devrait pas les concerner, stimulant ainsi les États-Unis à encourager ouvertement les forces politiques opposées et mettant les États-Unis et la Russie dans une position de confrontation classique. L'ironie de la chose, selon Trenine, c'est que si l’adhésion de l'Ukraine devrait apaiser les tensions au sein de l’OTAN, ni l'opinion publique ni les élites russes ne sont prêtes à accepter cet argument. Le glissement progressif de l'Ukraine vers l'Ouest est une chose, son statut préventif d'allié militaire de jure des États-Unis en est une autre. Trenine a fortement mis en garde contre le fait de laisser une lutte interne ukrainienne pour le pouvoir, où la MAP n'est qu'un levier de la politique intérieure, compliquer davantage les relations américano-russes actuelles.
7) (C) Une autre question qui motive l'opposition de la Russie à l'adhésion de l'Ukraine est l'importante coopération en matière d'industrie de la défense que les deux pays partagent, y compris un certain nombre d’usines où sont fabriquées des armes russes. Alors que des efforts sont en cours pour fermer ou déplacer la plupart de ces usines en Russie, et déplacer la flotte de la mer Noire de Sébastopol à Novorossiysk avant l'échéance de 2017, le GOR a clairement indiqué que l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN obligerait la Russie à apporter des modifications (coûteuses) à sa coopération industrielle dans le domaine de la défense.
8. (C) De même, le GOR et les experts notent que l'adhésion de l'Ukraine à l'OTAN aurait également un impact significatif sur les relations économiques et les relations de travail entre la Russie et l'Ukraine, y compris l'effet sur des milliers d'Ukrainiens vivant et travaillant en Russie et vice versa, en raison de la nécessité d'imposer un nouveau régime de visas. Aleksandr Konovalov, directeur de l’Institut pour les Évaluations Stratégiques, fait valoir que cela deviendrait un brulot de colère et de ressentiment au sein de la population locale.
9. (C) En ce qui concerne la Géorgie, la plupart des experts ont déclaré que, même si elle n'est pas aussi stratégique pour la Russie que l'Ukraine, le GOR la considérait comme trop instable pour supporter les dissensions que l'adhésion à l'OTAN pourrait provoquer. Aleksey Arbatov, directeur adjoint du Centre Carnegie de Moscou, a affirmé que les aspirations de la Géorgie à l'OTAN n'étaient qu'un moyen de résoudre ses problèmes en Abkhazie et en Ossétie du Sud, et a averti que la Russie serait dans une situation difficile si cela devait se produire.
10. (C) Le GOR a clairement fait savoir qu’il devrait « revoir sérieusement » l'ensemble de ses relations avec l'Ukraine et la Géorgie si l'OTAN les invitait à adhérer. Cela pourrait avoir des répercussions majeures sur l'énergie, l'économie et l'engagement politico-militaire, avec d'éventuelles répercussions dans toute la région et en Europe centrale et occidentale. La Russie réexaminerait probablement aussi ses propres relations avec l'Alliance et ses activités au sein du Conseil OTAN-Russie. Elle envisagerait de nouvelles actions dans le domaine de la maîtrise des armements, y compris la possibilité d'un retrait complet des traités FCE et INF et des menaces plus directes à l'encontre des plans de défense antimissile des États-Unis.
11. (C) Isabelle François, directrice du Bureau d'information de l'OTAN à Moscou (protéger), a déclaré qu'elle pensait que la Russie avait accepté l’idée que l'Ukraine et la Géorgie finiraient par adhérer à l'OTAN et qu'elle était engagée dans une planification à long terme pour reconfigurer ses relations avec ces deux pays et avec l'Alliance. Cependant, la Russie n'est pas encore prête à faire face aux conséquences d’un nouvel et rapide élargissement de l'OTAN sur son flanc sud. Elle a ajouté que la Russie appréciait la coopération avec l'OTAN. Elle a ajouté que si la Russie appréciait la coopération avec l'OTAN au sein du Conseil OTAN-Russie [COR], la Russie jugerait nécessaire d'insister sur la refonte des relations OTAN-Russie, sinon de se retirer complètement du COR si l'Ukraine et la Géorgie rejoignaient l'OTAN.
12. (C) L'opposition de la Russie à l'adhésion de l'Ukraine et de la Géorgie à l'OTAN et de la Géorgie est à la fois émotionnelle et fondée sur des considérations stratégiques concernant l'impact sur les intérêts russes dans la région. Il est également politiquement populaire de dépeindre les États-Unis et l'OTAN comme des adversaires de la Russie et d'utiliser l'ouverture de l'OTAN à l'Ukraine et à la Géorgie comme un moyen de susciter le soutien des nationalistes russes. Si l'opposition russe à la première vague d'élargissement de l'OTAN au milieu des années 1990 a été forte, la Russie se sent aujourd'hui capable de répondre avec plus de force à ce qu'elle perçoit comme des actions contraires à ses intérêts nationaux.
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