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9992 février 2015 – il est caractéristique de la confusion, ou du désordre quand il menace de devenir hyper-désordre, que deux textes aussi bien intentionnés l’un que l’autre puissent faire appel au même symbole historique tirée de l’épopée homérique, dans un sens absolument inversé : «New Greek government: Russia's Trojan horse inside the EU?», le 28 janvier 2015 sur le site BNE.eu et «Is the New Greek Government a Trojan?», de Nebojsa Malic, le 30 janvier 2015 sur Antiwar.com. BNE.eu exprime bien ce qu’il veut dire (“cheval de Troie des Russes dans l’UE”) ; quant à Malic, il s’en explique dans sa conclusion en parlant de la Grèce de Tsipras comme “d’un autre cheval de Troie de l’Empire”, c’est-à-dire des USA, c’est-à-dire du Système, à l’intérieur de l’UE.
Il ne s’agit que de symboles. Il n’est pas nécessaire de l’un ou l’autre cheval de Troie à l’intérieur de L’UE pour y installer, soit la division selon les positions vis-à-vis de la Russie, soit l’alignement sur les USA. L’UE est elle-même, dans l’état actuel des choses, à la fois profondément divisée, notamment sur la Russie, jusqu’aux limites de certaines possibilités de rupture, à la fois complètement alignée sur le Système (et non sur les USA). Elle se trouve dans cette situation de complète contradiction à cause de tensions internes suscitées par une idéologisation féroce et intangible (sans nécessité d’influence extérieure) d’une part, par une sourde contestation volontaire ou involontaire de nombre de ses membres pressés par des situations de quasi-révolte interne d’autre part. La Grèce, le pays le plus cruellement touché par cette idéologisation, est la première à avoir suivi le processus spectaculaire de la révolte ouverte accouchant directement, par les urnes, d’un gouvernement perçu nécessairement, par le fait, comme dissident, – et cela, qu’il se confirme ou non comme dissident, puisque nous parlons essentiellement de perception... (D’autres pays nettement contestataires, comme la Hongrie, n’ont pas la même position dans la perception de la communication qui privilégie l’aspect sensationnel des événements pour en fixer l’importance. Leurs gouvernements contestataires le sont devenus par des processus plus indirects, par conséquent leur position ne suscite par cette même perception de révolte ouverte qui constitue l’essentiel de l’événement grec et donne toute sa force d’influence au gouvernement Tsipras.)
Alors et changeant complètement d’orientation, nous dirions plutôt, s’il s’agit d’un cheval de Troie, que la Grèce a la possibilité très sérieuse d’être le cheval de Troie entrant dans l’actuel désordre européen (et du bloc BAO par extension) soigneusement dissimulé pour le transformer sans chercher précisément cet objectif, par simple logique de sa dynamique politique, dans cet “hyper-désordre” très visible auquel nous donnons aujourd’hui une capacité opérationnelle globale d’une très grande puissance. («[...O]n ne peut écarter cette possibilité absolument paradoxale qu’un désordre supplémentaire [ajouté au désordre créé par la surpuissance du Système] marquerait peut-être un certain retour à l’ordre [par son caractère antiSystème]... [...] L’hyper-désordre [...] en train de détruire cette tentative [du Système] d’“ordre” postmoderne qui est en vérité un pur désordre, est donc paradoxalement une poussée dont le sens antiSystème pourrait être jugé effectivement à finalité de “remise en ordre”.»)
Voyons quelques signes de cet “hyper-désordre” que la Grèce semble devoir introduire dans le concert extraordinairement cacophonique de l’UE... Cette cacophonie ne l’est nullement par l’interprétation qui est effectuée sous une contrainte terroriste d’une entité (l’UE) devenue dictature pure, sans dictateur, sans visage, comme simple transcription opérationnelle du Système, mais par la partition imposée qui dicte une non-musique traduite par une complète cacophonie, une sorte de “désordre musical” complet arrangé sous la forme paradoxalement ordonnée d’une partition précisément écrite. Le désordre européen, qui est complet puisque personne n’ose secouer le joug de la dictature de l’UE, qui est irréfragable puisque bâti sur l’illégimité et sur le déni complet de l’ordre principiel de cette pseudo-institution, se doit d’être aussi très discret et camouflé sous les apparences bureaucratiques et institutionnelles d’un faux-ordre conçu par des moyens mécaniques, par une apparence quantitative, par une communication absolument immuable pour décliner les vertus du Système. La cacophonie est donc écoutée, voire entendue, dans tous les cas applaudie comme s’il s’agissait de la Neuvième de Beethoven, – l’“hymne européen”, évidemment...
• Il y a d’abord le “contrepied” qu’on a décrit, avec Tsipras qu’on attendait sur la question de la dette comme la première priorité de son action dans les heures suivant son investiture, et qui choisit dans une orientation complètement différente de s’attaquer à la politique de l’UE d’antagonisme de la Russie. A côté des péripéties qu’on a décrites, ou plutôt au-delà de ces péripéties, on citera cette interview de Tsipras à Rossiïskaïa Gazeta, donnée peu avant l’élection et annonçant déjà la tactique utilisée, tactique confirmée par le fait que la première audience qu’a accordée Tsipras devenue Premier ministre le fut pour l’ambassadeur de Russie à Athènes. (Texte de Spoutnik.News [France] du 30 janvier 2015, reprenant l’interview en français. Nous citons les deux premières des trois questions posées, la troisième concernant la dette.)
Rossiïskaïa Gazeta : «L'Otan a complètement gelé la coopération avec la Russie à cause de la situation en Ukraine, et l'UE menace de décréter de nouvelles sanctions contre Moscou. Cette politique est-elle justifiée, selon vous?
Alexis Tsipras : «Non, je ne suis pas d'accord avec une telle approche. Ces sanctions nuiraient à l'Europe. J'estime que l'UE ne doit pas adopter de sanctions contre la Russie, mais mener un dialogue et chercher ensemble avec Moscou une issue pacifique de la situation actuelle. J'ai expliqué à plusieurs reprises cette position officielle de notre partie aussi bien en Grèce qu'au niveau de l'UE.»
Rossiïskaïa Gazeta : «Quelle sera la politique d'Athènes vis-à-vis de la Russie si votre parti arrivait au pouvoir?»
Alexis Tsipras : «Nous travaillons sérieusement sur une réorientation des relations entre nos pays pour les faire passer à un niveau stratégique. Nous avons une approche plus énergique de la politique étrangère de la Grèce, qui doit suivre plusieurs axes. En effet, notre pays est membre de l'UE et de l'Otan, mais nous pensons à la fois qu'il doit avoir sa propre politique indépendante vis-à-vis d'autres pays, au lieu d'obéir à des directives étrangères. Nous voulons que l'Europe unie travaille avec Moscou. C'est nécessaire pour créer un système de sécurité de l'Atlantique à l'Oural, impossible sur notre continent sans la Russie.»
• On doit ensuite noter la teneur des premiers contacts européens pris par Tsipras au niveau européen, marqué essentiellement par l’absence de rencontre avec Merkel, alors que des rencontres sont prévues avec le Premier ministre italien et le président français. L’annonce faite par son cabinet ne peut être interprétée dans la perception qu’on en a que comme l’indice d’une tension extrêmement sérieuse, proche de l’antagonisme, entre la Grèce et le principal pays européen qui a conduit l’organisation de la prise en main de la Grèce par la troïka supranationale. Le cabinet de Tsipras indique qu’une rencontre avec Merkel aura lieu en “temps voulu”, mais qu’actuellement l’emploi du temps du Premier ministre ne le permet pas, notamment à cause des rencontres avec les dirigeants italiens et français : «“Tsipras has a very busy schedule at the moment with the upcoming meetings with head of the Italian government Matteo Renzi, the President of France, Francois Hollande and the Greek parliament,” the Minister of State for Greece, Nikos Pappas, told the television channel Mega.»
Les commentaires à partir d’interview d’experts et économistes européens que donne Russia Today le 31 janvier 2015 laissent percer cette tension entre les deux pays. Ils montrent également la perception d’un durcissement implicite de l’Allemagne, qui devrait avoir certainement beaucoup de mal, avec fort peu de patience comme le montre de plus en plus ce pays en Europe, à supporter les manœuvres grecques, aussi bien que les choix de ses premiers interlocuteurs européens (l’Italie et la France) :
«Markus Gerber, an economics professor, told RT that it is essential that Greece is not able to blackmail the Eurozone and get its demands met, as this could open the way to other countries to follow suit. “The proposals are neither legal or legitimate. They are not legal because Greece as a member of the European Union is bound to respect contracts and treaties. Greece has only survived due to a great gesture of generosity and solidarity by all members of the Eurozone. It is not legitimate because Greece has not made any effort to reform the country,” Gerber said. [...]
»Felix Moreno de la Cova, an economist, told RT that he agrees with Syriza that something has to be done and there needs to be some restructuring. However, he added that the Greek government can only do this if they are willing to balance the books. “I think Syriza has the will and the political capital to break with the European Union and to leave the Euro. I hope this does not happen as this will be bad for Europe and for Greece, but they are willing to take it that far. The positions in Brussels have changed and in Germany, they are actually willing to let that happen,” the economist said.»
• Or, ce que montre également ce schéma des rencontres concernant la dette grecque (rencontre de l’Italien et du Français, rencontre non encore programmée de Merkel), c’est que ce choix rencontre aussi bien les tendances économiques (France et Italie de plus en plus critiques de l’austérité, au contraire de l’Allemagne), mais surtout pour notre propos recoupe des tendances vis-à-vis de la Russie qui ont un sens du point de vue de la Grèce. L’Italie et la France ont montré ces derniers temps qu’ils étaient plutôt favorables à la révision de la ligne ultra-dure de l’UE sur les sanctions, tandis que Merkel est apparue ces deux derniers mois comme complètement alignée sur les positions américanistes. Ces diverses positions se complètent et s’influencent les uns les autres ; surtout, elles pérennisent l’élargissement du débat effectué par les premiers actes du gouvernement Tsipras qu’on a signalé le 29 janvier 2015, en faisant entrer la questions des sanctions contre la Russie (crise extérieure) dans la problématique de la question de la dette élargie à la question de l’austérité (crise intérieure). C’est ce que ZeroHedge.com, relayé par Russia Insider le 30 janvier 2015 nomme le “veto power” de la Grèce.
«But the most important message that Tsipras is sending to Europe is that (after meeting the Russian ambassador first upon his election) Greece is now effectively a veto power when it comes to future Russian sanctions! [...] The good news for Greece, of course, is that it now has all the optionality: it can use its veto power as a bargaining chip to unblock US foreign policy in Ukraine (because at the end of the day, Europe is merely losing as a result of the Russian sanctions) and demand a debt haircut in exchange for siding with John Kerry on further Russian “punishment.” Or he may simply hold the line and hold off for a competing, better offer from Russia and the BRICs, whose leverage may be nominal now that crude is plummeting, but if and when the last shale junk bond investor blows up and the US shale renaissance is over sending crude soaring right back to $100, then watch as the oil exporters are back with a bang, and dictating geopolitical terms.»
Certes, ces commentaires peuvent paraître audacieux sinon téméraires, mais ils mesurent ce qu’il nous importe de montrer : que la Grèce de Tsipras n’est pas importante en elle-même, même si elle l’est pour les Grecs, mais qu’elle est importante d’abord pour la perception qu’elle impose, non seulement d’elle-même (la Grèce) mais surtout et essentiellement de l’Europe avec elle-même (la Grèce) comme élément perturbateur. Peu importe que ceci ou cela dans les divers scénarios et hypothèses que nous avons vus se réalise ou ne se réalise pas, si “ceci ou cela” est considéré comme une hypothèse valable pour un temps donné. La perception s’en arrange comme s’il s’agissait du comptant, et le système de la communication s’en fait le relais obligé. Car, bien entendu, nous revenons nécessairement au constat désormais inévitable (depuis à peine une semaine, – que le temps se contracte vite !) : dans “ceci et cela”, comme dans tout le débat abordé ci-dessus, nous avons continuellement mêlés les deux aspects, – intérieur et extérieur, – de la crise européenne.
Il est vrai que l’enjeu est tout simplement colossal. Jusqu’à maintenant à partir de sa formation et de sa constitution en entité autonome devenant de plus en plus dictatoriale, l’Europe a réussi à maintenir la perception d’elle-même, la narrative de sa vertu fondamentale, la gloire de sa prétention à constituer le modèle postmoderne pour une “gouvernance” mondiale sans rivale, dans une sorte de bulle, une espèce d’aquarium-laboratoire qu’aucune critique sérieuse ne semblait jamais devoir percer ni pénétrer. La “crise intérieure” de 2010 dont la première héroïne malheureuse fut la Grèce a pu être contenue dans cet univers fermé, où la vertu européenne a toujours le dernier mot, ne serait-ce qu’avec l’unanimisme imposé aux délégués des pays-membres à chaque pseudo-sommet, avec d’autant plus d’efficacité ces quelques dernières années que le naufrage français a laissé toute latitude à la baguette teutonne d’exercer ses talents d’organisatrice par la discipline et la marche au pas.
Dans tout cela, la crise ukrainienne est apparue comme incongrue et comme détachée. Certes, la responsabilité de l’UE est entière dans le déclenchement de la crise, mais la narrative très vite développée vous fait aisément admettre que cette responsabilité n’a rien à voir avec la culpabilité (“responsable mais pas coupable”) puisqu’elle ne fait qu’entériner la cause profonde que fut l’incapacité d’un Ianoukovitch borné et corrompu, avec un Poutine diabolique tireur de ficelles, à comprendre l’évidence de la vertu qui lui était ainsi offerte. Tout le reste s’enchaîne, avec l’histoire au jour le jour devenant une Histoire-invertie en temps réel construite sur les châteaux de sable de l'interprétation pavlovienne, et la culpabilité totale à la charge de l’extérieur, – savoir, dans l’ordre chronologique, l’Ukraine elle-même jusqu’à la destitution démocratique de Ianoukovitch par les pétoires de Pravy Sektor et la vista de l’antenne de la CIA, puis l’Ukraine orientale dans le chef des “terroristes”-séparatistes de la Novarussia, enfin l’éternelle barbarie russe n’attendant que l’occasion suivante pour étendre son empire.
Là-dedans, où voyez-vous l’Europe ? Nulle part, sinon dans ses votes droitsdel’hommesques si prompts à condamner que procès, preuves à charge et jugement n’ont aucune utilité, et dans ses sanctions qui sont dans la nature même de sa vertu, comme la poule qui pond des œufs, et suivant en cela l’héroïque politique étrangère du cousin si doué d’outre-Atlantique. Ainsi la crise ukrainienne n’a-t-elle jamais percé l’épaisse carapace de la bulle-aquarium européenne, le public étant simplement convié à condamner régulièrement la monstruosité de la barbarie russe comme un phénomène totalement extérieur (dont certes il faudra bien s’occuper un jour, – ne craignez rien, on s’en occupe déjà, – voyez Soros, Nuland & Cie), – tandis que les votes automatisés des sanctions suivaient leur pavlovien bonhomme de chemin.
L’incursion grecque a brusquement brouillé gravement ce schéma arrangeant pour les illusions des intellectuels-Système du bloc BAO, elle a en quelque sorte crevé la bulle et la glace de l’aquarium. En mettant au moins sur le même plan d’urgence et d’importance européennes la problématique de la dette/de l’austérité et celle de l’Ukraine/des relations avec la Russie, la Grèce a brusquement mis en pleine lumière le désordre européen. La mise en lumière de ce désordre tient effectivement au fait de cette mise en équivalence des crises intérieure et extérieure de l’UE, notamment avec le mélange des questions de la dette et des relations avec la Russie telles que les opérationnalise la Grèce (par exemple, avec l’hypothèse que tout le monde a à l’esprit, particulièrement dans la bureaucratie européenne, où la position grecque sur les sanctions contre la Russie devient un moyen de pression pour obtenir de meilleures conditions pour le remboursement de la dette) . Il devient désormais impossible de ne pas penser la crise ukrainienne comme une “crise européenne”, qui met en évidence de graves antagonismes entre les États-membres alors que l’unanimisme des réunions pouvaient faire croire le contraire, – et ainsi l’ordre apparent par rapport à une crise extérieure qui ne concernerait guère l’UE jusqu’à lui être étrangère, devient un désordre évident par rapport à cette crise extérieure devenue ainsi, de facto, crise intérieure.
Ainsi la Grèce de Tsipras n’est-elle même pas à blâmer ou à féliciter c’est selon, dans l’évolution actuelle, — ou, dans tous les cas, pas encore. Il suffit qu’elle soit et qu’elle soit perçue comme activant extrêmement l’un des fondements de sa politique, qui est sa proximité avec les thèses russes, pour qu’aussitôt toute la tension de la crise de la dette s’étende à la crise des relations avec la Russie, pour que la “crise extérieure” à l’Europe, comme on dirait d’une “crise étrangère”, devienne une crise intérieure. C’est ainsi, en mettant en évidence d’une façon active et opérationnelle ces oppositions, ces nuances, ces tendances antagonistes, qu’on perce la bulle et qu’on casse le verre transparent de l’aquarium de la vertu UE. C’est ainsi, en devenant visible, palpable, évident, que le désordre vertueusement cachée de l’UE, devenu visible, devient en même temps hyper-désordre en acquérant d’évidentes vertus antiSystème. (Chacun ses vertus, après tout.)
Maintenant, il reste bien des choses à méditer ... Par exemple, cette circonstance étonnante, par son pouvoir d’aggravation instantanée des conditions qui ont permis à la situation qu’on décrit de s’installer, d’un Tusk posant son premier acte d’apprenti-dictateur européen en pondant lui-même son communiqué grossièrement antirusse sur l’attaque de Marioupol. Tusk a exacerbé la position grecque en permettant à Tsipras d’exprimer une position qui suggère implicitement qu’on peut le considérer comme cet homme décrit plus haut, comme disposant d’un “veto power” (tous l’ont, mais lui seul laissant croire ou entendre qu’il pourrait l’utiliser). Plus encore, l’affaire, par son écho public, a mis en lumière le conflit désormais inévitable entre lui-même (Tusk) et Mogherini, et peut-être lui-même (Tusk) et un certain nombre d’États-membres, – et voilà un peu plus de désordre-UE découvert,– cette fois de l’inédit, – pour renforcer la création d’hyper-désordre dont nous parlons. (Et cet hyper-désordre rendu possible parce que l’UE enfermée dans la nécessité de l’unanimisme de l’apparence de sa vertu, ne peut pas débattre de la question russe d’une façon ouverte et raisonnable, qui écarterait nombre d’attaques contre elle et restaurerait une certaine part de sa légitimité.) Chaque acte, chaque dérapage dans ce sens, accentue la perception du désordre, donc de la fragilité de l’UE, rappelant également aux esprits un peu attentifs que cette fragilité est due évidemment à son illégitimité. (Qui pourra nous expliquer la légitimité de l’acte d’un Tusk, tel qu’il a été posé, dans le chef du communiqué de lundi dernier ?)
Ces circonstances font penser à une machinerie dont l’objectif serait évidemment une aggravation de la situation interne de l’UE, une accélération de l’exposition de son désordre et la transmutation par conséquent de ce désordre en hyper-désordre. Dans de telles conditions de tension, il nous paraît bien difficile que Tsipras puisse manœuvrer pour écarter son état de trublion en échange d’avantages quelconques. (On sait que c’est une hypothèse courante à son encontre, celle de Malic “‘d’un autre cheval de Troie de l’Empire’, c’est-à-dire des USA, c’est-à-dire du Système, à l’intérieur de l’UE”.) Tsipras a déclenché le processus exposant le désordre de l’UE en le transmutant en hyper-désordre à capacités antiSystème. Peut-être l’a-t-il voulu, peut-être voulait-il l’éviter, peu importe ; le fait est que la chose est là et la Grèce joue désormais le rôle de ce trublion du désordre européen, accompagné du pesant soupçon de tous les intégristes du bloc BAO, à commencer bien entendu par ceux de l’OTAN.
Le cheval de Troie est désormais dans le bloc BAO. Même s’il est vide, tout le monde s’imagine revivre déjà l’épopée de l’immortel Homère, – et en cela au moins, ce n’est que justice quasi-divine que ce soit la Grèce à qui les dieux ont attribué ce rôle.
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