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1218Glenn Beck, présentateur-vedette de Fox.News, que les démocrates ont tendance, et intérêt d’ailleurs, à classer parmi les neocons comme toute la tendance de cette chaîne, représente en réalité certaines des options majeures de Tea Party qu’on ne peut confondre avec les neocons. Sa déclaration, lors de son émission sur Fox.News, vendredi, telle que la rapporte RAW Story le 7 août 2010, est du plus grand intérêt.
Répondant à une déclaration d’Obama selon laquelle les républicains n’ont aucune idée nouvelle à apporter, Beck a qualifié la tendance du président de socialisme circa 1848. Puis il a ajouté, et là, manifestement parlant pour Tea Party et nullement pour le parti républicain : «What [the Democrats] think is we’re arguing to go back to 1990 or Ronald Reagan, – we're not. We’re arguing that the states should be empowered because this giant government doesn't work. We cant afford it. So you dismantle the government and bring the control locally there.»
@PAYANT Cela s’appelle jeter le masque discrètement… La situation est confuse chez les conservateurs, et surtout autour de Glenn Beck. Ce commentateur de télévision et animateur de talk-show parle à une station neocon et il est tentant de l’assimiler à ce courant, – et il est intéressant de le faire pour les démocrates, qui charrient des tonnes d’hypocrisie dans ce débat. Les neocons ont amplement prouvé qu’ils étaient partisans d’un gouvernement central très puissant, ne serait-ce que pour conduire leur folle politique extérieure expansionniste et agressive. En février 2010, lors du rassemblement conservateur (la convention du CPAC) qui désigna Ron Paul comme son favori pour une candidature aux présidentielles de 2012, Beck avait fait un discours où il prenait nettement ses distances vis-à-vis de cette politique extérieure. Les conservateurs, y compris des républicains, sont de plus en plus divisés sur cette question (notamment à propos de l’Afghanistan), alors qu’ils étaient beaucoup plus rassemblés durant les années Bush.
Mais la déclaration de Beck va beaucoup plus loin. Elle représente une affirmation anti-fédéraliste, pour un retour du pouvoir aux Etats de l’Union, qu’on trouve aussi désormais d’une façon courante chez un Ron Paul (et dans le courant libertarien dont Ron Paul fait partie). Là, il s’agit d’un langage prétendant nettement engager Tea Party dans son ensemble, mais beaucoup plus clair et affirmatif qu’on ne l’a jamais entendu de la part d’une vedette médiatique proche de Tea Party. Ce très court texte de RAW Story, site progressiste proche des démocrates, a attiré une myriade de commentaires furieux, dénonçant la volonté de Tea Party de soumettre les Américains au corporate power en les privant de la protection du gouvernement central. L’argument est terriblement hypocrite et singulièrement pathétique, lorsqu’on observe la politique de l’administration Obama vis-à-vis de Wall Street, vis-à-vis des grands groupes du corporate power, lorsqu’on mesure le degré de corruption par le corporate power du Congrès, qui est nécessairement partie prenante de ce gouvernement central que Beck attaque.
Il faut constater que Tea Party, quel que soit le désordre qui le caractérise et quelles que soient les vicissitudes qu’il traverse, est de plus en plus conduit, par sa logique anti-Washington, vers le cadre alternatif évident du droit des Etats contre Washington. La logique de la puissante évolution de la situation l’y conduit, semble-t-il, irrésistiblement. On ne peut être aujourd’hui aussi clairement “anti-Washington” que l’est Tea Party sans être conduit, par l’évidence des choses, à abandonner tout espoir de réforme de Washington au profit d’une volonté de rupture avec Washington, qui conduit naturellement à la question du droits des Etats versus Washington, qui est le préambule obligé à la question de la sécession. (Il faut voir que les “néo-sécessionnistes” eux-mêmes estiment que les adhérents de Tea Party vont suivre cette évolution et donc rejoindre leur thèses.) Sur la voie de cette évolution se trouve la question de la mise en cause éventuelle de la politique extérieure et belliciste de Washington, qui a jusque là été fort peu évoquée, – sauf par un Ron Paul, évidemment, qui a pour lui la puissance d’une attitude et de choix politiques complètement logiques avec eux-mêmes. (Il serait très intéressant de voir comment se comporterait Tea Party en cas d’événement brutal de politique extérieure, par exemple une attaque de l’Iran. Il faut voir, précisément, si Tea Party résisterait à un tel événement dans sa structure actuelle ; s’il résistait effectivement, on le verrait nécessairement radicaliser encore plus son attitude anti-Washington.)
Face à cela, les démocrates sont piégés par leur rhétorique idéologique fondée sur l’humanitarisme progressiste (racisme et le reste), articulée autour du soutien à un président qui n’a de “progressiste” que son état d’Africain-Américain. Ils sont conduits à la situation paradoxale de se faire les avocats d’un gouvernement central hyper-puissant qu’ils ont violemment dénoncé du temps de GW Bush, pour ses guerres extérieures autant que pour le traitement qu’il faisait des problèmes intérieurs. (On peut se rappeler ce que disaient les démocrates du gouvernement fédéral lors de la catastrophe de Katrina ou du traitement fait au corporate power par l’équipe GW Bush.) Force est de constater qu’aujourd’hui, le gouvernement central, sous la direction éclairée du leader bien-aimé des démocrates, ressemble, dans ses résultats sociaux et notamment avec le chômage massif en train de devenir structurel grâce à une équipe financière (Summers, Geithner) quasiment aux ordres de Wall Street, bien plus à celui du président républicain et conservateur Hoover qu’à celui du démocrate et réformiste radical Franklin Delano Roosevelt, – pour prendre les références de la Grande Dépression.
Mis en ligne le 9 août 2010 à 06H02