Too Big or not Too Big?

Bloc-Notes

   Forum

Il y a 2 commentaires associés à cet article. Vous pouvez les consulter et réagir à votre tour.

   Imprimer

 423

Il semble que la recette américaniste soit universelle, et elle se nommerait l’“option Moby Dick” en reconnaissance à l’initiateur de la formule, le Pentagone tel que vu par le secrétaire à la défense William Cohen en 1998. Plus vous avez des problèmes autour de vous, plus vous perdez le contrôle de la situation, plus vous avez de difficultés à comprendre ce qui se passe, – plus vous vous faites grossir, plus vous vous faites élargir, plus vous vous faites couvrir de $milliards, plus vous vous bardez de services, d’équipes, de conseillers, de services, d’analystes, de relations publiques… Ainsi Tom Engelhardt décrit-il, dans un texte à la fois remplis d’informations et de descriptions saisissantes, à la fois empreint de finesse pour la compréhension du phénomène, ce qu’il nomme “The Imperial Transition” (aujourd’hui sur TomDispatch.com et sur Antiwar.com).

Quelques mots de présentation d’une “administration de transition” qu’Engelhardt décrit joyeusement comme une sorte de Schwarzenegger en train de consciencieusement faire gonfler ses énormes muscles («Everything in these last weeks, like the preceding two years, has been bulked up, like Schwarzenegger's Conanesque pecs. In other words, since Nov. 5, what we've been experiencing in the midst of one of the true crisis periods in our history has essentially been an unending celebration of super-sized government. Consider it an introduction to what will surely be the next Imperial Presidency»)… Curieux, étrange, fascinant spectacle alors que la crise s’étend comme une trainée de flammes dévorantes.

«Believe me, no one's sparing the adjectives right now. This transition is the earliest, biggest, fastest, best organized, most efficient on record, even as Obama himself has “maintained one of the most public images of any president-elect.” It's cause for congratulations all around, a powerful antidote, we're told, to Bill Clinton's notoriously chaotic transition back in 1992. In fact, we can't, it seems, get enough of a transition that began to gather steam many months before Nov. 4 and has been plowing ahead for more than a post-election month now.

»It's kind of exhausting, really, just thinking about that awesomely humongous transition lineup. Check out the list of transition review teams and advisers at Change.gov and you'll find that it goes over the horizon. According to the Washington Post, 135 transition team members, organized into 10 groups, all wearing yellow badges, backed by countless transition advisers, “have swarmed into dozens of government offices, from the Pentagon to the National Council on Disability” preparing the way for the new administration. This, like so much else, has been “unprecedented.”

»And don't get anyone started on the veritable “army” of volunteer lawyers giving “unprecedented scrutiny” to possible administration appointees in a vetting process that began at the moment of Obama's nomination, not election. As the Washington Post's Philip Rucker described it:

»“Embarrassing e-mails, text messages, diary entries, and Facebook profiles? Gifts worth more than $50? Relatives linked to Fannie Mae, Freddie Mac, AIG, or another company getting a federal bailout? Obama is conducting the vetting much as he managed his campaign: methodically, thoroughly, and on a prodigious scale.”

»That process includes a distinctly unprecedented invasion of privacy via a seven-page, 63-question form that all potential appointees have had to fill out. Imagine, for instance, that after 62 “penetrating” questions on every aspect of your life, you faced this catchall 63rd question: “Please provide any other information, including information about other members of your family, that could suggest a conflict of interest or be a possible source of embarrassment to you, your family, or the president-elect.” (For anyone worried about privacy issues, what this means practically – as Barton Gellman explained in his book Angler on the vice-presidential 200-question vetting process by which Dick Cheney chose himself as candidate and then used private information sent in by the other candidates for his own purposes – is major dossiers on about 800 people.)

»Everything in this “transition” is, in fact, more prodigious and more invasive than in any previous transition, including, of course, the ongoing media fascination with all those positions Obama is filling with “the best and the brightest.” We're not just talking about his vast economic team or his national security team, but the presidential liaison to Capitol Hill, the White House press secretary, the president's speechwriter, his communications director, and his White House staff secretary, not to speak of the First Lady's deputy chief of staff and, of course, that White House social secretary. And then there's always that bout of “fantasy football for foodies,” the speculation over who will be the new White House chef.»

Conclusion d’un Engelhardt dépité et amer: une “super-présidence impériale” se prépare, plus grosse, plus lourde, plus vaste, plus tout ce que vous voulez… «On Jan. 20, Barack Obama will be more prepared than any president in recent history to move in and, as everyone now likes to write, “hit the ground running.” But that ground – the bloated executive and the vast national security apparatus that goes with it (as well as the U.S. military garrisons that dot the planet), all further engorged by George W., Dick, and pals – is anything but fertile when it comes to “change.” Maybe if the imperial presidency and the national security state worked, none of this would matter. But how can they, given the superlatives that apply to them? They're oversized, over-muscled, overweight, overly expensive, overly powerful, and overly intrusive.

»Bottom line: they are problem creators, not problem solvers. To expect one genuine “decider,” moving in at the top, to put them on a diet-and-exercise regimen is asking a lot. After all, at the end of the George Bush era, what we have is the GM of governments, and when things start to go wrong, who's going to bail it out?»

Cette impressionnante “montée en puissance”, comme disent les stratèges de toutes les écoles de guerre du monde lorsqu’ils vous parlent bien loin des montagnes afghanes, ressemble irrésistiblement à la montagne de $milliards, de programmes, d’analystes, d’enquêtes et de rapports qui préside à l’incontestable paralysie galopante et à l’impuissance désormais chronique du Pentagone. C’est, plus généralement, la marque de toutes les situations d’enflure systématique qui caractérise la lutte de la modernité américaniste contre sa propre impuissance et sa propre paralysie, en ayant trouvé l’étrange formule d’en rajouter toujours plus pour cimenter et verrouiller paralysie et impuissance. Il y a fort à parier que l’inauguration du 44ème POTUS, et premier Africain-Américain de la série, vaudra le plus extraordinaire de tous les spectacles célébrant l’“idéal de puissance” (cf. Ferrero) de notre époque monté en soufflet jusqu’à sa propre caricature surréaliste.

Cela dit, c’est effectivement une mesure parfaite de la maladie “Too Big to Fail” (ou “Too Big to Fall”, il nous arrive de confondre), un symptôme indubitable du mal chronique du système de l’américanisme et de la modernité en général. Au plus la crise devient énorme et incontrôlable, au plus le système renforce ce qui répond aux impulsions qui ont enfanté la crise, au plus il s’isole des mauvaises nouvelles de la crise. Mais quoi faire d’autre?, s’interroge le système. Il y a sans aucun doute une corrélation évidente entre la montée de l’angoisse post-bushiste de l’establishment, – on voudrait tant que cela soit une réussite, à l’image de ce jeune President-elect aux qualités et au charisme évidents, – et la montée parallèle de l’enflure des moyens, finalement démarche absolument contre-productive. Le système se demande aujourd’hui si la catastrophe bushiste était un accident ou si c’était une étape de plus dans sa dégringolade. Pour se prémunir des aléas de la réponse à cette question existentielle, voire pour l’influencer, pour se rassurer enfin comme l’on se regarde dans un miroir (Ô miroir, dis-moi si je suis le plus gros gouvernement du monde?), il ne cesse d’outrer la puissance de son apparence,

Quoi qu’il en soit, voilà un gros boulet attaché au pied du sympathique BHO. Son calme, son sang-froid, son sens de l’organisation, s’ils sont trop sollicités pour le développement monstrueux de son administration, vont lui faire perdre son éventuel bon sens (hypothèse compatissante de notre part), c’est-à-dire l’obligation où il devrait se forcer à être de tenter à tous prix de rester en contact avec le monde réel et les habitants qui continuent à encombrer ce monde-là, notamment les chômeurs, les nouveaux SDF qui viennent de perdre leur maison, les retraités qui ne touchent plus de retraite et ainsi de suite. A ce train-là, BHO se retrouvera vite comme enfermé dans une forteresse, à l’abri de toutes les mauvaises nouvelles du monde. Ainsi le système nourrit-il irrésistiblement et avec pétulance sa tendance à se barricader avec une puissance inimaginable et avec tous les moyens du bord, pour se protéger des agressions scandaleuses de la réalité.


Mis en ligne le 9 décembre 2008 à 16H38