Trimble, le Rafale, le Koweït et Bernadette de Lourdes

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Le journaliste britannique Stephen Trimble, qui tient son blog (DEW Line) sur le site FlightGlobal de Flight International, est un excellent commentateur anglo-saxon (dito, britannique) des questions d’armement, surtout de l’aéronautique. Nous le mettrions dans la catégorie d’un Bill Sweetman, parmi ces journalistes britanniques qui ne sont pas aveuglés par l’éclat de l’ombre américaniste pesant sur le Royaume-Uni. You see what I mean

Le 21 octobre 2009, il consacre un écho, avec une superbe photo de l’avion, à l’affaire Rafale-Koweït. Le titre vaut pour le “sort of...”: «Dassault Rafale sort of scores again» – puis, pour le premier et le dernier paragraphe, que nous enchaînons directement (le souligné par l’auteur)… (Entre eux, Trimble rappelle d’autres cas du Rafale, aux EAU et au Brésil.)

«Never before perhaps has a fighter been “selected” by so many countries without actually, you know, signing an order. […] The Dubai Air Show is next month. Will it finally be Rafale's turn to participate in a contract signing ceremony?»

Ce petit écho est suivi d’un échange entre un lecteur, un type étrange, venu d’on ne sait où – “Charles de Gaulle” (en abrégé CdG), vous connaissez? – et Stephen Trimble.

Charle de Gaulle: «“Signing an order”, you said? Well, we will see. Add also Switzerland, this brave new Libyan world and… who knows?

»As a high ranking official from South Korea recalled us recently: “The Rafale was close to be selected by our Air Force but ...very strong political pressures came from this brave new Bush! Quite a pity because the French jet was smart and it flies”

»Ô! Just one last question: after years of massive successes for the JSF, how many “orders” from foreign countries?»

Stephen Trimble : «CdG makes a good point about the F-35. I think there are four aircraft on order for export. Two for the UK and two for the Netherlands, although the latter may only have one. So three or four, anyway.»

Charle de Gaulle: «Good to listen to attentive friends like Stephen Trimble.

»“Hélas” you are right: two countries ordered four of those strange "test F-35" (operational / prototypes) and at what price! NL parliamentarians were close to have an heart attack… No F-35 more after +/-20 years of research development.

»The NL asked for more time, the UK asks for carriers and cash, the Norwegians asks for a definitive price, the Italians have other subjects to deal with (and are unofficially happy with this artificial “delay”), the Turks have a declaratory policy for “20 more”, Israel went from 100 to 25 to 50 “planned orders”, etc…

»Nothing like “signing an order” for the best world fighter. Check it.

»PS: Only the US pretends that the F-35 is a fifth generation fighter and (all) other fighter from fourth (or fourth and a half for the friends). The French quietly say that the Rafale could be from the sixth generation, just for fun.»

Joyeux échange, sans aucun doute, où il faut apprécier le fair play et la loyauté de Trimble en même temps que la bonne tenue de l’information outre-tombe dont dispose le sacré CdG. Il n’empêche, il y a son commentaire de départ (de Trimble), qui relève d’un tropisme anglo-saxon qu’il subit, malgré ses qualités évidentes. Ce tropisme est celui de l’inexistence absolue, complète, quasiment ontologique du Rafale dans le monde aéronautique et de la communication anglo-saxonisée depuis vingt ans, suivie de l’ironie d’annonces d’intérêt plus que marqué pour le Rafale (qui viennent tout de même de ministres de la défense des EAU et du Koweït et d’un président brésilien) – ironie, puisque concernant quelque chose qui, jusqu’ici, n’existait pas. Nous avons le souvenir de certaines analyses prospectives de marché d’avions de combat, essentiellement US, d’un Aboulafia par exemple, mais aussi britanniques, où le Rafale n’apparaissait simplement pas. Cette constance pendant deux décennies de la presse anglo-saxonne, maîtresse absolue de l’information du domaine, représente un phénomène auquel un thésard devrait consacrer son énergie, plutôt que lire des commentaires (français ceux-là) tels que «échecs répétés de l'avion-phare de l'industrie aérienne de défense française qui n'a encore jamais été exporté» (Le Monde du 21 octobre).

Dans ce cas, l’apparition du Rafale dans les possibilités d’exportation ressemble effectivement à une sorte de réapparition de la gentille Bernadette à Lourdes (nous avons des explications plus prosaïques). Même le chouette Trimble ne résiste pas à l’ironie, et cela se comprend. Puis, avec le JSF, by Jove, il retombe dans le monde “réel”. Il le reconnaît aussitôt, ce qui est tout à son honneur et donne au Rafale le droit d’exister. Il est vrai, après tout, que le meilleur allié au monde du Rafale, n’en doutons pas, c’est bien le JSF. Les Français n’ont pas encore compris cela alors que les Britanniques commencent à se douter de quelque chose.


Mis en ligne le 23 octobre 2009 à 09H28

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