Trump, paria en Europe, – et futur président ?

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Trump, paria en Europe, – et futur président ?

The Donald déplaît aux autorités-Système et à la presse-Système, aux élites-Système et aux autorités morales en Europe, par accès extrême d’affectivisme de la part de ces honorables directions. Nous ne parlerons pas des divers caractères, attitudes, vulgarité, pétulance, etc., du personnage dans le Grand Cirque électoral présidentiel (où il est toujours très-solide favori). En Europe, nous sommes sérieux et nous parlons de la pensée et surtout de la dimension morale dont cette pensée est nimbée : Trump est identifié comme populiste, un des mots-clefs de la guillotine postmoderne, tendance de plus en plus sociétale. Ses prises de position tonitruantes sur les musulmans sont en cause, et c’est la tonitruance qui fait toute la différence puisque ce qu’il proclame n’est pas très éloigné des tendances de la politique sécuritaire profonde des USA.

Mais aujourd’hui le ton, l’écho, etc. sont les références fondamentales aux dépens de la substance des choses, de la politique en Europe (et dans le bloc-BAO en généra, certes), cela qui manifeste une fois encore la toute puissance du système de la communication, surtout sur les matières sociétales qui sont le fond de la politique. Moyennant quoi, des grands pays européens s’engagent sur une voie inédite : la possibilité de l’interdiction d’accès (persona non grata) de Trump dans ces pays. En Angleterre, la chose est très avancée avec une pétition favorable à une interdiction d’accès de plus de 500.000 signataires qui a conduit le cas de l’interdiction d’accès devant les Communes (débat prévu pour le 18 janvier), ce qui est unique pour un problème de cette sorte, relevant de la pure polémique politique abreuvée à des déclarations de campagne. (Trump a riposté en annonçant qu’il retirerait ses investissements en Angleterre [plusieurs centaines de $millions], si la mesure était adoptée.)

Le même cas apparaît en Allemagne, après les commentaires de Trump sur les incidents de Cologne et d’autres villes (dont certains vous assurent même, – pour corser le problème et le rendre plus compréhensible par une sorte de simplicité angélique, qu’ils n’ont pas eu lieu, ces incidents, qu’ils ne sont qu’un montage de certains organes de presse au service de la contre-civilisation, comme dedefensa.org soi-même). Dieter Janecek, des Verts allemands, a demandé cette interdiction, pour laquelle une pétition a été lancée, dans une déclaration au Spiegel.

On est pour l’instant assez loin d’une telle mesure, du point de vue officiel, les gouvernements hésitant à cet égard, mais surtout, selon le gouvernement britannique finaud et particulièrement bien élevé, pour “ne pas faire de publicité à ce personnage”. Néanmoins, la tendance est là, et elle peut grossir dans une époque où sont si grandes la volatilité  des événements et la rapidité et la puissance du système de la communication pour les répercuter ; tandis que la résistance officielle n’est pas d’une extrême fermeté puisqu’elle ne porte pas sur le principe de la mesure mais s’avère de pure tactique et elle aussi liée aux évènements de communication. Si l’on peut identifier un constat général, ce sera celui, désormais sempiternel, de la dégradation extraordinaire de la politique, – et cela sans rapport avec ce que vaut Trump et ce que l’on pense de lui mais en rapport complet avec la nature du cas (facteurs sociétaux, communication). Cette tendance à ostraciser un candidat US à la présidence, donc tributaire du système démocratique le plus porteur d’extases transatlantiques et postmodernes-globalisantes pour nos élites-Système, et un candidat  qui a volens nolens et hors du sentiment qu’on a pour lui des chances sérieuses d’être président, représente un risque politique considérable à terme, car un personnage de la trempe de Trump n’oublierait certainement pas. Mais qu’est-ce que c’est que le terme aujourd’hui pour les directions politiques ? D’un jour à une semaine selon l’écho de la communication, ce qui n’est pas ce qui nous sépare de l’élection présidentielle US.

Dans tous les cas, l’évolution de la candidature Trump dans ses multiples éclats et écarts, avec les interprétations à mesure où l’affectivisme due aux caractères sociétaux et à la communication qui va avec dirigeant la politique, présente pour l’Europe, où triomphe plus qu’ailleurs cette sorte de non-politique, un risque qui deviendrait considérable en cas de poursuite de l’aventure électorale du personnage. Encore une fois avec l’hypothèse extrême de son élection, l’Europe se trouverait devant un président fantasque, qui montre désormais sur certains points et à ce stade de la communication une certaines prudence politiques (signe qu’il est désormais très sérieux dans sa course à la présidence où il domine pour l’instant tout le monde), mais qui sur d’autres points qui sont les fonds de commerce de son succès, notamment et surtout l’immigration musulmane, se déchaînerait. L’Europe en serait la première victime. Un deuxième aspect marquant de la dialectique-Trump, c’est la main constamment tendue à Poutine, avec lequel l’Europe est en délicatesse. On imagine ce que serait alors la position de l’Europe entre USA et Russie complices et mal intentionnés à son égard, continuant par ailleurs à recevoir ses vagues d’immigrants et incapable de changer vraiment ses politiques de communication, notamment en Syrie.

(Et alors, autre perspective à long terme, l’on pourrait admettre qu’un futur “président Trump” serait le meilleur agent électoral d’une Marine Le Pen en France, car toutes les orientations anti-européennes et pro-russes de Trump s’alignent parfaitement sur la position du FN. Le paradoxe serait que, dans ce ca, le FN serait tactiquement très proche des USA, quasiment “le candidat des États-Unis” [et de la Russie]....)

Maintenant, voici un détail que nous jugeons important,  qui est une simple phrase de Bill Clinton, recueillie lors d’un  passage rapide devant les journalistes alors qu’il rejoignait le QG de sa femme Hillary, pour la candidature de laquelle il entre officiellement en campagne. Un journaliste lui a demandé ce qu’il (et Hillary) pensaient des dernières attaques de Trump contre sa femme. Sa réponse a été en substance : “Je ne vous dirais rien là-dessus pour l’instant mais nous en parlerons certainement si Trump est désigné comme candidat républicain, dans la phase finale”.

C’est la première fois, en public, dans le feu des questions à l’emporte-pièce posées par des journalistes, dans ces circonstances où les réponses des politiciens doivent être les plus contrôlées et les plus mesurées car aucune possibilité de nuancer immédiatement n’existe, que la possibilité d’une course finale Clinton-Trump est évoquée par un personnage (Bill) aussi proche de la candidature-Hillary. Vu l’importance et la suffisance du clan Clinton d’une part, la réputation et la posture anti-establishment de Trump, la réponse aurait dû être, aurait été il y a un petit mois encore, que “ce que dit ce clown n’a aucun intérêt, aucun sérieux, et il n’y a pas à lui répondre”. Nous dirons que ce petit fait représente une sorte d’intronisation de Donald Trump, d’abord comme personnage dont le parti républicain n’arrive pas à se débarrasser, ensuite comme “candidat très-sérieux”, possible jusqu’à devenir probable, pour la phase finale des présidentielles.

Puisque cette candidature n’arrive décidément pas à être détachée, décollée du cirque-Système de l’establishment, – Trump un peu comme le sparadrap au bout du doigt dont le capitaine Haddock [le parti républicain] n’arrive pas à se débarrasser, – nous dirons encore un mot de l’hypothèse normale (nous en avons une autre, correspondant mieux à notre sens au caractère d’un tel événement, dans une telle époque, etc.) de l’événement extraordinaire sinon extraterrestre que serait une élection de Trump. Il s’agit de la question de la “récupération” par l’establishment de The Donald. Ce personnage fantasque est certainement, parmi toutes les ultimes possibilités à cet égard, le candidat-surprise à vocation anti-establishment le moins à même d’être dompté (et récupéré) par l’establishment s’il est élu. Nous voyons plusieurs raisons pour cela, paradoxalement parce que Trump est exempt de véritable expérience politique, qu’il est incliné par son énorme ego où il semble que toute sa vanité soit déjà satisfaite par ce qu’il est devenu à compter sur ses impulsions, qu’il semble éprouver une certaine jouissance à son rôle anti-establishment, qu’il semble finalement, – au contraire complet d’un Obama, – peu intéressé par l’institutionnalisation type-establishment en cas de succès, etc.

Enfin, nous dirions ceci qui semblerait extraordinaire, mais qui l’est moins dans une situation extraordinaire et extraterrestre, qu’il nous semble que Trump sera moins vulnérable à la récupération en raison du fait qui peut sembler extraordinaire et extraterrestre qu’il n’est pas assuré qu’il prenne au fond de lui-même très au sérieux l’énorme et solennelle puissance de la fonction de la présidence, et justement au moment où cette énormité se réduit rapidement à cause de la décadence accélérée des USA et du pouvoir washingtonien de plus en plus fractionné ; en raison ensuite de le dissolution, sinon l’entropisation de la grande politique, notamment de sécurité national, sous les coups redoublés du système de la communication, de l’émergence étouffante des enjeux sociétaux aux dépens des vraies questions politiques ; en raison, enfin, de la transformation des effets de ce qu’il reste de “politique” en une  production échevelée de désordre correspondant parfaitement à la description psychologique qu’on tente d’esquisser de ce que serait ce phénomène surréel d’un The Donald-président.

 

Mis en ligne le 9 janvier 2016 à 10H37