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197122 février 2017– Imaginez un nommé Dupond (avec un d), qui a établi depuis des années une alliance formidable avec un nommé Dupont (avec un t), qui découvre soudain quelque machination épouvantable de la part de son vis-à-vis et qui s’écrie, et qui clame à grands cris, qui proclame : “C’est fini, Dupont-avec-un-t, c’est vraiment une crapule une menace pour moi, notre association Dupond-Dupont est morte et enterrée”. Et puis, vingt jours plus tard, il s’écrie, et clame à grands cris, proclame : “Ceux qui avaient annoncé la mort de l’association Dupond-Dupont, ceux-là, pauvres imbéciles envieux, ils ont annoncé une chose bien prématurée, tout va bien à bord car l’association Dupont-Dupond est plus forte que jamais”. C’est un peu ce qui est arrivé à notre ami, président de l’UE, sémillant, brillant, aussi gai qu’un jour sans pain et sans fin, j’ai nommé Donald Tusk, dit This-Donald.
Donc, le 1er février, il annonçait, le premier d’entre tous les hauts dignitaires à mettre les points sur les i, que les USA avec The-Donald (Trump) n’étaient plus notre-allié, mais devenus rien de moins qu’une menace pour l’UE. Le site dedefensa.org notait le 2 février, avec des larmes dans la plume et toujours aussi hypocrite :
« Enfin une voix s’éleva, ou plutôt une plume, celle du président non-élu de l’Union Européenne (UE), le Polonais Donald Tusk. (“Non-élu”, par conséquent le plus complètement légitime pour parler en tant que créature du Système, Euro-Zombies, etc.) Tusk envoie une lettre à tous ses compères, dirigeants au plus haut niveau des 27 pays-membres de l’UE, avant leur réunion commune à Malte. Tusk écrit enfin les mots-sacrilèges, ceux qu’il était impensable de voir briller sous une plume européenne de bonne réputation-Système : la mise en évidence que les USA sont quasiment autant une “menace” pour l’UE que la Russie, la Chine et ISIS (Daesh pour les Français, le texte-Tusk n’étant qu’en anglais). »
Cet extrait vient d’un texte qui a comme titre « Sous le sourire de Poutine ». Avant-hier, sur le même site qui suit l’humeur changeante des people, ce 20 février donc, un texte lui répondait : « Poutine ne sourit plus du tout ». Le même jour, le même Tusk faisait une allocution après un entretien en amoureux à l'UE, avec le bien-aimé vice-président des USA Mike Pence dont quelques méchantes langues disent dit qu’il est “devenu“ globaliste, et Tusk avec cette affirmation : « Referring to some statements made in Munich just two days ago, I would like to say clearly that the reports of the death of the West have been greatly exaggerated. » Comme c’est Tusk qui nous avait annoncé la “mort de l’Ouest”, et que Tusk nous explique que ceux qui ont annoncé “la mort de l’Ouest“ ont “grandement exagéré”, c’est-à-dire pas très sérieux sinon abruti complet, c’est donc que Tusk-20 février juge que Tusk-1er février, lui être “pas très sérieux sinon abruti complet”. Mais que voulez-vous, c’est la passion qui parle, pas moins, l’élan de la passion jusqu’au fin-fond des tripes... Lisant ce texte et ce qui suit particulièrement, vous vous demandez si vous n’avez pas affaire à une folle complètement déchaînée, une groupie hors de ses pompes, une Pussy Riot qui en est à son quatrième joint d’affilée avec des mots tels que “incurablement”, “fanatiquement”... « Given that I am an incurably pro-American European who is fanatically devoted to transatlantic cooperation, I could afford to be outspoken even more. »
La lecture de ce texte sans le moindre intérêt de fond est très instructive quant à la forme, à l’espèce d’émotion irrépressible qui l’anime, à l’hyper-affectivité qui exsude littéralement. Bien, Pence ne lui a pas dit des choses extraordinaires ; il lui a dit, comme on le lisait hier, l’habituel catéchisme qu’on ne cesse de répéter, « ... des émissaires US porteurs sans imagination du message de verrouillage, de cette désormais classique non-politique absurde que l’on a connue depuis 2014 et le “coup de Kiev”, construite sur les fantasmes antirusses développées sous l’empire de l’équipe Obama... [...] Après Munich [où se trouvaient Pence et Tusk], les échotiers de la presseSystème nous ont rabâché que les dirigeants européens sont si stupidement soulagés de revoir des interlocuteurs US aussi stupides qu’eux-mêmes. Nul ne se doute que l’on ne fait là que touiller dans la même marmite qui continue à faire bouillir ses paroxysmes de vide et de néant. »
Mais bien entendu, après l’épouvantable trouille que Trump leur a fait en laissant filtrer quelques gâteries sur l’UE et les relations transatlantiques, cet amoncellement extraordinaire de banalités devenues leur pitance ordinaire depuis des années et qu’ils ont retrouvée dans la bouche d’un Pence ou d’un Mattis a déclenché un déferlement d’enthousiasme extatique. En lisant le Tusk dans le texte, – je me demande si ce n’est pas vraiment lui qui l’a écrit tant on y distingue de l’intime, – on a vraiment l’impression d’une midinette qui retombe dans les bras de son mec, c’est-à-dire de son mac, qu’elle croyait perdu pour toujours ; ceci par exemple lorsqu’il écrit, le brave petit Tusk, « En réponse à ces trois interrogations, j’ai entendu aujourd’hui trois fois un “oui” du vice-président Pence ! » (“In reply to these three matters, I heard today from Vice President Pence three times ‘yes’!”), – oui oui oui, c’est ça, il m’a dit trois fois “oui”, vous vous rendez compte comme je compte bien, trois fois, oui-oui-oui, – vous sentez bien la ferveur du sentiment des bas-fonds, la moiteur de l’espérance des fin-fonds, l’espèce d’amour fou et de passion déchaînée type-célinien disant que « l’amour c’est l’éternité à portée des caniches »... J’ai distingué autant que deviné, sinon humé, en lisant ce discours si pauvre et sans réelle existence dans sa substance de fond, un élan impudique dans la forme comme rarement.
Ce n’est pas moi qui m’amuse à quelque perversité en côtoyant le domaine des sentiments d’en-bas, car je repense, en lisant mon Tusk-dans-le-texte, à un autre Polonais qui n’a pas sa langue dans sa poche et qui s’était fait prendre, enregistré et publié, parlant à un compagnon d’infortune dans un resto de Varsovie, des relations des Polonais avec les Ricains qu’ils (les Polonais) servent avec un zèle qui mériterait une fort belle récompense. C’était l’ancien ministre des affaires étrangères polonais Sikorski, pourtant porte-flingue fidèle des intérêts américanistes, comme le commun à Varsovie et à l’UE, qui avait donc été enregistré drôlement à l’insu de son plein gré :
« In a leaked recording of a private conversation, Sikorski said that Warsaw’s alliance with Washington is worthless and even damaging as it “creates a false sense of security in Poland,” as cited by Wprost, which published excerpts from the alleged exchange between Sikorski and Jacek Rostowski, an MP and former finance minister. “We will get a conflict with both Russians and Germans, and we’re going to think that everything is great, because we gave the Americans a blowjob,” Sikorski reportedly said. According to Wprost, he called the Poles “total suckers” for their stance and repeated the phrase “complete bullshit” numerous times during the conversation.
» “The essence of Sikorski’s statements indicates his political realism,” the Russian Foreign Ministry later said in a comment as cited by RIA Novosti. As for the use of strong language, “it’s is probably a kind of a response to the offensive and rude remarks by [Assistant Secretary of State for Europe Victoria] Nuland about the European Union,” the ministry suggested. »
J’ai laissé cela en anglais et je ne traduirais pas parce que c’est carré blanc, mais vous pouvez chercher la signification des mots “blowjob”, “sucker”, “bullshit” et compagnie, et vous comprendrez qu’on peut traiter la matière de manière sexuelle et approchante. Bien entendu, la forme est différente : Sikorski est un pro qui s’exprime avec cynisme et brutalité, off-the-record qu’il se croit : il fait la pute et il aimerait en avoir pour ses services. Tusk aussi c’est sexuel, mais publiquement étalé avec une tendre émotion excitée, une frémissante croyance, une soumission aimante et pleine d’emportements passionnés, je dirais avec précaution “à la Edith Piaf” mais sans le talent, surtout sans le talent et sans être habité en rien par quelque Mystère que ce soit.
Avec Edith, il y avait une petite lumière qui brillait comme elle pouvait, mais dont nul n’avait une seconde l’idée de discuter l’évidence de son origine, et cela faisant de cette petite créature difforme (Edith) une sorte d’ange descendu parmi nos turpitudes pour racheter nos péchés en prenant les siens à son compte, jusqu’à la mort s’il le fallait. Tusk retrouvant les Ricains qu’il croyait avoir perdus vingt jours plus tôt, c’est Edith dans ses chansons d’amante passionnée pour “son homme“ mais où la lumière est remplacée par le vide. Il a beau saliver, le Tusk, il sonne absolument vide. Edith avait une lumière dedans elle, lui ce serait disons un chewing-gum.
... Il me semblerait obscène d’avoir jamais une pensée obscène à l’égard de cette fille des rues transcendée par la grâce ; Tusk dans l’occurrence qui m’occupe c’est l’obscénité même, même s’il est aussi bandant qu’un chicon. “Leurs petites affaires de cul leur font pas le cul bien affolant”, comme disait la fille des rues citée par le même Céline.
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