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5107• Dans une preuve de plus de son extrême “prudence” vis-à-vis de la Russie, le Pentagone explique le retrait de ses destroyers de la Mer Noire dès janvier, – Pourquoi janvier ? • Il faut insister sur l’importance considérable du soutien massif de la Russie dans la plupart des pays d’Afrique. • Dimanche de vote dans des pays sensibles (‘regime change’ ?) et une première : le Premier pakistanais félicitant l’Indien Modi pour son refus de céder au chantage des USA. • ...Car, sous nos yeux, se fait un formidable ébranlement décrit par Alastair Crooke.
Lors de son audition au Congrès, mercredi 30 mars, le SACEUR (commandant en chef des forces armées en Europe/OTAN) et chef du EURCOM (commandement des forces armées US en Europe), le général Tod Wolters, avait déclaré notamment que deux destroyers de l’US Navy qui se trouvaient en Mer Noire avaient été retirés
« ... en raison de la détérioration de la situation en Ukraine.
» Les États-Unis n’ont actuellement aucun navire en Mer Noire, mais une présence navale devrait y être rétablie “dès que possible”. Actuellement, l’armée américaine dispose d’avions [de reconnaissance et de surveillance électronique] avec équipage, qui volent dans le sud et de drones au-dessus de la partie nord de la mer. »
Il est important de noter l’insistance mise par Wolters sur le fait que des avions “avec équipage” n’évoluent que dans le Sud de la zone, donc loin des côtes russes et ukrainiennes, le “sale boulot”, au Nord, étant laissé à des drones qui sont par nature sans présence humaine à bord. C’est plus que de la “prudence”, comme dit le porte-parole du Pentagone, c’est au moins de l’“hyper-prudence”...
L’amiral John Kirby, porte-parole du Pentagone, a repris et commenté la déclaration du général Wolfe en fin d’après-midi du 30 août, montrant par là l’intention du ministère autant de mettre en évidence cette décision que de mettre l’accent sur la “prudence” qui en est l’explication.
« Washington a pris une “décision prudente” en retirant deux destroyers de la marine américaine de la mer Noire en janvier, et leur retour éventuel sera décidé en fonction de considérations de sécurité nationale, a déclaré le Pentagone mercredi.
» La marine américaine déplace “régulièrement” des navires vers ou hors de la mer Noire, mais a décidé de retirer les deux destroyers à missiles guidés de classe ‘Arleigh Burke’ en janvier, a déclaré le porte-parole du ministère de la défense, John Kirby, aux journalistes lors du briefing quotidien du Pentagone.
» Le retrait était la chose “prudente” à faire à ce moment-là, a déclaré Kirby aux journalistes, “pour faire comprendre à tout le monde que les États-Unis n'étaient pas intéressés à imposer un conflit par une décision de posture que nous aurions adoptée”.
» Kirby n'avait aucune information quant à savoir si et quand les navires pourraient repartir, mais a déclaré qu'une telle décision serait prise “dans le meilleur intérêt de notre sécurité nationale et de celle de nos alliés et partenaires”. »
Il y a plusieurs éléments de commentaires à faire ressortir de cette communication parfaitement coordonnée entre le SACEUR/EURCOM et le porte-parole du ministère. On en voit au moins trois.
• D’abord, la confirmation de la position du Pentagone, très en retrait sinon antagoniste de la politique agressive du département d’État et des milieux belliciste du type-neocon. Cette position, comme on le voit, ne date pas du conflit en Ukraine puisque la décision remonte à janvier.
• La “prudence” du Pentagone est d’abord, dans ce cas, la “prudence” de l’U.S. Navy, qui ne tient pas à mettre ses navires en situation de justifier une frappe russe contre eux. Les marins sont parmi les premiers à craindre une telle frappe, vue l’efficacité supposée des capacités russes dans ce domaine, y compris avec des missiles hypersoniques contre lesquels aucune défense n’est possible. (Les mêmes remarques valent évidemment pour les aéronefs avec des équipages à bord, cibles non seulement susceptibles d’être détruites, mais de déclencher un incident majeur à cause de la perte de vies humaines, ou la capture d’hommes d’équipage, contrairement aux drones.)
• Une précision de Kirby ouvre la porte à des spéculations : pourquoi un retrait dès janvier, alors que l’opération russe n’a commencé que le 24 février ? On dira qu’il y avait une alerte pour un possible conflit, mais cela existait déjà depuis novembre 2021, et de la même façon au printemps 2021 et en d’autres occasions, sans jamais susciter une telle “prudence”. On en vient alors à une autre hypothèse, qui corroborerait les affirmations russes selon lesquelles les Ukrainiens s’apprêtaient à attaquer le Donbass en mars, ce qui précipita la décision russe d’attaquer préventivement. Ce serait l’idée que ces intentions d’attaque étaient réelles, que les USA étaient au courant et que la marine a pris en conséquence ses précautions, n’écoutant que sa “prudence”.
Nous considérons que, selon une vieille habitude du bloc américaniste-occidentaliste (bloc-BAO) qui n’est interrompue que pour les épisodiques pleurnicheries humanitaires et pour les Africains immigrés parfaitement intégrés dans le système occidental, les positions des pays africains sont considérés avec une complète condescendance sinon de l’indifférence pure et simple. Cela vaut pour les (“nos” ?) élites progressistes qui mènent l’éternel croisade contre le racisme pourvu qu’il s’agisse de Saint-Germain-des-Prés et d’une totale adhésion à nos “valeurs”, – ce dernier point constituant la véritable définition de l’antiracisme. Cette fois, où les mêmes condescendance et indifférence non seulement persistent mais prolifèrent puisque nous avons nos migrants “aux cheveux blonds et aux yeux bleus”, il s’agit d’une erreur considérable ; c’est la même que nous faisons, avec la même suffisance, avec les Russes, qui sont pourtant, eux, de l’espèce “cheveux blonds et yeux bleus” ou approchant...
Il suffit d’écouter quelques séquences de ‘afriquemedia.TV’, la chaîne TV panafricaine, par exemple le 14 mars 2022 (« Guerre en Ukraine : Comprendre le soutien des Africains à l’endroit de la Russie »), ou bien le 21 mars 2022 (« Nous sommes dans l’empire du mensonge »), avec des affirmations courantes comme celle-ci :
« Le monde suffoque sous le diktat d’une [unipolarité] avec à sa tête les États-Unis et tout l’Occident qui, avec un système implacable, appliquent une certaine orientation ayant pour conséquence que ... moins de 5% de la population mondiale a l’équivalent de plus de la moitié de la richesse mondiale... »
Jamais autant que sur ces ondes africaines on n’entendit ni n’entend une critique aussi profonde, aussi radicale, aussi furieuse de l’ordre totalitaire imposé par les USA et le bloc-BAO ; et jamais, par conséquent, autant de compréhension et de louange pour la position russe et la politique russe. Les intervenants, experts et commentateurs africains dans les affaires internationales, géopolitiques et financières, en appellent même aux mannes et à l’aide d’il y a un demi-siècle de l’Union Soviétiques, — « La Russie d’hier », dit l’un d’eux, – pour constater que seule la Russie, dans ce grand courant Est-Ouest qui ignore superbement le Sud dont l’Afrique est le creuset, défend une politique de solidarité et de conscience internationales qui n’ignore pas l’Afrique. Même s’ils parlent en des termes moins vifs, les dirigeants africains disent la même chose lors de rencontres internationales comme à ce ‘World Government Summit’ de Dubai, ou en telle ou telle autre occasion :
« Le président sud-africain Cyril Ramaphosa, médiateur potentiel dans le conflit russo-ukrainien, a reproché à l’OTAN d’avoir déclenché la guerre dans l’ancienne république soviétique en s'étendant vers l'est, aux portes de Moscou.
» “La guerre aurait pu être évitée si l’OTAN avait tenu compte des avertissements lancés par ses propres dirigeants et responsables au fil des ans, selon lesquels son expansion vers l’est entraînerait une plus grande instabilité, et non une moindre, dans la région”, a déclaré M. Ramaphosa aux législateurs sud-africains jeudi. »
Le point essentiel que nous voulons mettre en évidence dans cette dynamique se retrouve dans les conversations enfiévrées des “experts et commentateurs” signalées plus haut. On y retrouve en effet les griefs historiques habituels que nous connaissons dans les mouvements des minorités et des immigrations occidentales (wokenisme et BLM aux USA, indigénistes et décolonialistes en France) : le colonialisme, la traite négrière, le racisme, etc.
Le paradoxe de très grande importance est que ces mêmes jugements historiques disposent de références contemporaines si différentes qu’elles conduisent à l’opposé et à un antagonisme tout à fait remarquable. Nos “antiracistes”-wokenistes sont parfaitement intégrés dans le Système, subventionnés par le nouveau Grand Capital progressiste et globaliste (les GAFAM & Cie), obtenant des postes de prestige dans les très-grandes et prestigieuses universités du bloc-BAO, émargeant dans les colonnes des grands titres de la presseSystème, – New York ‘Times’, Washington ‘Post’, ‘Guardian’, ‘Libération’, etc., – ou bien illustrant ses premières pages , comme la cheffe des BLM qui sait gérer ses $millions et notre-Traoré nationale et très avisée pour les affaires.
C’est dire combien, tous ces “nantis de la terre” sont conduits, même s’ils ne sont pas en première ligne sur ce cas et par prudence puisqu’ils sentent qu’il s’agit là d’un terrain mouvant, à dénoncer la Russie par réflexe conditionné, logique financière et pression systémique pour ne pas faire un pli. Ainsi les retrouve-t-on en opposition frontale avec leurs “frères” africains, et cela constitue un très grand problème de cohérence, de logique, voire d’“idéologie des ‘valeurs’”, quelque chose de l’ordre d’une bombe nucléaire intellectuelle à retardement pour la cohésion du grand mouvement progressiste de déconstructuration.
De même, les wokenistes sont-ils déconstructeurs de toutes les traditions tandis que les Africains, et en cela également dans une logique pro-russe et au côté de la Russie, défendent leurs traditions contre la machine infernale américaniste-occidentaliste, – contre le Système, pardi !... Ainsi tout ceci explique-t-il tout cela et le Système n’en peut plus de se faire des trous dans la coque, façon-‘Titanic’, de ses contradictions internes et mortelles.
D’une façon générale, on observe l’accélération d’un rythme de tentative de destruction et de déstructuration du fait de la ‘politiqueSystème” US au travers de pressions, de menaces, d’activation des relais d’influence corrompus par les diverses agences de subversion US, avec prédictions de “coups” divers. (“Révolution de couleur”, ‘regime change’ au standard-Maidan [Kiev-2014], au menu selon différents plats du jour au goût semblable.) Si l’on voulait avoir une idée assez nette de la situation générale, et un jugement à mesure, ce serait bien qu’avec un gouvernement central US mené par cet homme âgé au bord de l’irresponsabilité du fait de ses troubles cognitifs et cédant dans ses discours à ses emportements les plus incontrôlés et les plus émotifs au cœur d’une crise d’une telle intensité que l’Ukrisis, une telle agitation donne une indication convaincante de l’état de panique où se trouve le Système dont les USA sont la matrice, devant des dynamiques radicales de mise en cause de son hégémonie. Il est manifeste que l’Ukrisis a complètement échappé à ses composants de base pour devenir une crise mondiale et globale.
Ce dimanche 3 avril sera chargé dans ce sens, hors d’Ukraine mais à l’ombre de la terrible Ukrisis qui secoue le monde, par des élections et des votes politiques dans des pays sensibles : en Hongrie, en Serbie et au Pakistan notamment.
• En Hongrie, il y a eu quelques tentatives d’influence pour orienter le vote contre Orban, qui a déclaré sa neutralité dans la guerre en Ukraine et a annoncé qu’il continuerait à acheter du gaz russe aux conditions financières (roubles ou euros) demandées par Moscou. Malgré tout cela, – ou “à cause”, après tout, – il semble que Orban remportera une victoire confortable (voir cette interview de Ferenc Almassy, auteur de ‘Victor Orban, douze ans de pouvoir’).
• En Serbie, pays slave qui constitue un ilot pro-russe dans l’ensemble européen de l’UE ou sous influence-UE, les élections de ce dimanche se tiennent dans une ambiance tendue, où le gouvernement et l’opposition échangent des accusations de subversion. Que les USA tentent d’organiser “quelque chose”, si possible de couleur, si le gouvernement actuel reste en place, n’aurait évidemment rien pour étonner. C’est dans tous les cas l’argument du gouvernement, dans une situation où le président serbe a refusé d’instituer des sanctions antirusses et de condamner la Russie.
« “Immédiatement après les élections, je m’attends à ce que les partis politiques pro-occidentaux, déjà encouragés financièrement et politiquement, prévoient de contester les résultats des élections, ce qui se terminera par une tentative de renverser le gouvernement”, a déclaré le ministre serbe de l’Intérieur, Aleksandar Vulin dans une interview accordée à la radio Sputnik en début de semaine. “Les analystes politiques occidentaux disent que la Serbie a besoin d’un nouveau Maïdan”.
» Vulin a affirmé que des troubles dans les rues en Serbie sont préparés pour immédiatement après les élections : non pas à cause des élections elles-mêmes, mais parce que le président Aleksandar Vucic a refusé d’imposer des sanctions à la Russie décidé de maintenir la neutralité de la Serbie dans la guerre en Ukraine.
» “Notre indépendance vaut bien une bataille pour la remettre en cause, – car oui, elle sera remise en cause. Oui, ils essaieront de nous préparer un nouveau Maïdan”, a-t-il déclaré... »
• Au Pakistan, le Premier ministre affronte ce dimanche un vote parlementaire difficile sur une motion de censure déposée par l’opposition, et après diverses défections dans son parti. La querelle a très vite pris un caractère international en référence à l’Ukrisis, après un discours du Premier ministre accusant les USA d’« ingérence » pour envisager d’organiser son renversement en raison de son attitude vis-à-vis d’Ukrisis (on devine dans quel sens). Et alors, il y eut ceci d’extraordinaire, d’un Premier ministre pakistanais félicitant l’Inde (de ne pas céder aux pressions washingtoniennes, on imagine dans quel sens) :
« S’exprimant vendredi après avoir accusé Washington d’“ingérence” dans les affaires intérieures du Pakistan, Khan a ensuite fait l’éloge du refus de New Delhi d'accompagner un barrage de sanctions et de restrictions économiques contre Moscou.
» "Ils protègent leur politique étrangère indépendante qui est centrée sur leur peuple”, a-t-il déclaré, cité par les médias locaux. »
Imran Khan a été aussitôt pris à partie par le président de l’Assemblée Nationale et l’un des chefs de l’opposition, Shehbaz Sharif, qui a tweeté que les déclarations du Premier ministre constituaient une insulte à la mémoire des « Cachemiris bravant l'Hindutva », en référence à la population à majorité musulmane du Nord de l'Inde et à une forme de nationalisme hindou du parti du Premier ministre Modi. Réplique immédiate...
» Khan a rapidement répliqué, affirmant que ses rivaux pensent que ses “déclarations vont mettre l’Amérique en colère” et que “le Pakistan ne peut pas survivre sans le soutien de l’Amérique”.
» “Ils [les États-Unis] nous donnent des ordres. Ils disent que si la motion de censure n'aboutit pas, il y aura des conséquences pour le Pakistan”, a poursuivi le Premier ministre, affirmant que son administration ne se joindra pas à la “politique des blocs” contre la Russie. »
Ces troubles considérables qui se manifestent au niveau de nombreux pays, voire de continents (l’Afrique, comme on a vu) sont pris dans un maelstrom, un ‘tourbillon crisique’ qui s’enroule désormais en une monstrueuse et sublime mise en cause du fondement financier du Système, ce par quoi les USA exercent (exerçaient ?) leur hégémonie depuis que leur supériorité militaire est mise en question. On veut bien entendu parler de la ‘dédollarisation’ dans un processus que favorise la dynamique russe en faveur de sa propre monnaie pour ses transactions de gaz, et bientôt pour d’autres matières, et cela dans une atmosphère de durcissement constant illustré notamment et de façon symbolique par les prises de position de Medvedev, l’ancien “enfant-chéri” idéal du bloc-BAO pour remplacer Poutine, – Medvedev désormais parfois plus dur encore vis-à-vis des “pays inamicaux” que Poutine !
Dans son plus récent commentaire d’hier, Alastair Crooke annonce son propos par ce titre :
« Une opportunité qui ne se présente qu'une fois par siècle – L'ère de la globalisation libérale est terminée. Sous nos yeux, un nouvel ordre économique mondial est en train de se former. »
En voici le début :
« Wow ! A quelle vitesse tourne la roue de la fortune. Il semble que ce n'était qu’hier qu’un ministre français de l’économie et des finances vantait l’effondrement imminent de l’économie russe, et que le président Biden célébrait le rouble “réduit à néant” [“Rouble being reduced to rubble”], – l’Occident ayant saisi les réserves de change de la Banque centrale de Russie, menacé de saisir tout l'or russe sur lequel il pourrait mettre la main, et imposé des sanctions sans précédent aux particuliers, entreprises et institutions russes. Un cri de guerre totale !
» Eh bien, ça ne s'est pas passé comme ça. Les banquiers centraux du monde entier ont été effrayés à l’idée que leurs réserves pourraient également être saisies s’ils s’écartaient de la “ligne”. Quoi qu’il en soit, la décision hubristique de l'équipe Biden de tenter une nouvelle fois de faire s'effondrer l'économie russe (la première tentative remonte à 2014) pourrait bien être considérée comme un point d'inflexion géopolitique majeur.
» Son importance en termes géopolitiques pourrait même être équivalente à la liquidation de l’étalon-or par Nixon en 1971, même si, cette fois, les événements vont dans le sens inverse.
» Les conséquences de l’abandon de l’étalon-or par Nixon furent nucléaires. Le système commercial basé sur le pétrodollar qui en découla permit aux États-Unis de “frapper” le monde de sanctions premières et de sanctions secondaires, leur conférant ainsi une hégémonie financière unipolaire (après que le militarisme américain, principal pilier de l’or noir mondial, ait été discrédité à la suite de la guerre du Golfe de 2006).
» Aujourd'hui, à peine un mois plus tard, on peut lire dans la presse financière que ce sont le système financier occidental et la monnaie de réserve mondiale qui sont en plein déclin, et non le système économique russe... »
Mis en ligne le 2 avril 2022 à 17H10