Un aveu en passant

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On se rappelle la tempête qui bouleversa l’Europe lorsque, successivement, les peuples français (le 29 mai 2005) et hollandais (le 1er juin 2005) rejetèrent la “Constitution” européenne. Les Britanniques et le gouvernement Tony Blair ne furent pas les derniers à fustiger l’archaïsme et le goût du désordre cocardier des Français, contre la vertu et la grandeur du projet européen intégré (soutenu par la grandeur et la vertu UK). On connaît les habitudes anglo-saxonnes à cet égard et le mois de juin 2005 vit un déluge d’appréciations critiques du comportement français, les Britanniques se présentant pour l’occasion comme des Européens convaincus et résolument modernistes (évidemment), empêchés d’aller de l’avant dans la voie de l’intégration par les épouvantables Frenchies.

Aujourd’hui paraît un article dans le Guardian sur les manigances de Merkel pour faire passer en douce, sans consultation populaire, une version light de la susdite Constitution. Nous en donnons ici un très court extrait, — et un seul mot nous intéresse, qui dit tout sur la réalité du sentiment britannique pendant cette crise européenne de mai-juin 2005. Le mot est souligné en gras dans l’extrait ci-dessous.

«But Berlin still has to persuade the doubters, most notably Britain which was delighted to see the constitution stalled by French and Dutch voters...»

Tout est dit. Les Britanniques accueillirent avec une jubilation considérable dans le secret du fond de leurs âmes, puisque âme il y a, les résultats des référendums, et essentiellement le français puisque le “non” français bloquait tout. Cela rencontrait particulièrement leur but secret, qui est anti-intégrationniste par essence. Les Français (le peuple français contre ses élites) avaient joué pour eux.

Il faut d’ailleurs être juste. Les Français devraient être souvent dans la même position d’avoir à remercier secrètement les Britanniques, qui ont toujours freiné l’intégration européenne, pour leurs actions dans ce sens tant les Britanniques rencontrent le plus souvent l’appréciation secrète des véritables intérêts français lorsqu’ils agissent sur ce point. La différence entre les Britanniques et les Français est que l’hypocrisie secrète des premiers est complètement consciente bien que soigneusement cachée ; la manigance française (on ne peut parler d’hypocrisie puisqu’il n’y a pas de calcul), elle, est complètement inconsciente, les dirigeants français croyant pour la plupart que leur politique officielle vers la complète intégration européenne est réellement de l’intérêt de la France. La réalité est qu’elle ne l’est pas, et qu’elle l’est de moins en moins sans aucun doute (l’Europe à 27…) ; parfois, par inadvertance, l’instinct français le fait dire à l’un ou l’autre sans que l’un ou l’autre ne modifie sa politique consciente.

Il y a un curieux jeu franco-anglais. Les deux pays ont objectivement intérêt à contrecarrer l’intégration européenne, surtout la calamiteuse Europe à 27 devenue une tour de Babel ingouvernable. Ils le font, consciemment ou inconsciemment, tout en disant le contraire, consciemment ou inconsciemment.


Mis en ligne le 9 mars 2007 à 05H52