Un “Grand Jeu” kazakhe

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Un “Grand Jeu” kazakhe

• Quelques explications et hypothèses sérieuses sur la crise du Kazakhstan, qui semble de plus en plus devoir être interprétée comme une fulgurante victoire de Poutine. • La thèse est que la Russie est en train de verrouiller à son avantage les situations de stabilité de ses voisins, anciennement de l’URSS. • Le côté US n’a pas vu venir grand’chose, même si ses moyens subversifs constamment déployés ont été mis en jeu, et il réagit avec du « babillage de bébé et des absurdités ». • On voit même s’y glisser une manigance de plus  de Hunter Biden, fils de Joe.

Cette fois, il s’agit d’en parler au sérieux, de l’affaire du Kazakhstan. S’il s’agit d’une “révolution de couleur-bouffe” comme l’écrit PhG, il n’en reste pas moins qu’elle se caractérise par de bien sérieux aspects qui mérite toute l’attention possible. On prend volontairement les aspects stratégiques les plus larges qui nous paraissent les plus intéressants selon un courant d’analyse venu des experts russes mais très largement suivi, en laissant de côté les aspects intérieures kazakhs, par ailleurs extrêmement complexes et variées et qui méritent pour leur compte une proposition d’explication.

On résume selon deux pistes, toutes deux du plus grand intérêt et avec des aspects aussi sérieux que bouffe voire exotique (Hunter Biden, le fils de Joe), et peut-être même plus sérieux encore que l’on ne croit d’abord (à la complexité de l’époque s’ajoute la complexité des situations locales : les jugements peuvent et doivent évoluer). Il y a deux visions générales, une du point de vue russe & associés, une autre du point de vue US (& associés)...

• L’affaire apparaît aux sources citées d’une extrême importance pour le schéma général de la sécurité de la région, et de la Russie. Un point factuel largement mis en évidence, c’est la stupéfiante rapidité d’intervention de la Russie, au travers de la décision du groupe OTSC, avec un fort contingent russe et quelques détachements de quelques autres pays de l’organisation.(Extraits d’un premier article du Saker-US, reproduisant lui-même la traduction d’un article russe) :

« Beaucoup de choses se sont passées pendant la nuit.  Le développement le plus remarquable est que l'OTSC envoie des troupes au Kazakhstan.  C'est rapide, très TRÈS rapide.  Et cela prouve que les Russes savaient et étaient préparés.  Je suis d'accord avec Bernardt de MoA qui a écrit que “La rébellion dirigée par les États-Unis au Kazakhstan pourrait bien renforcer la Russie”.

» Je vous laisse avec une traduction automatique d'un article initialement posté ici : https://svpressa.ru/war21/article/321239/.

» “Vous souvenez-vous de quelque chose de semblable [d’aussi rapide] de la part de l'OTSC depuis l'effondrement de l'Union soviétique ? Certainement pas. Mais si cela se produit, cela signifie que nous avions tout préparé à l'avance. En d'autres termes, nos forces aérospatiales savaient à l'avance quels aérodromes et en quelles quantités elles devaient concentrer l'aviation de transport militaire. Les troupes aéroportées ont reçu des instructions claires du ministère de la Défense et de l’état-major général sur les régiments et divisions spécifiques à alerter. Même le fret nécessaire, les munitions, le carburant et la nourriture étaient probablement emballés et stockés bien avant pas hier.

» “Logiquement, en plus de la volonté politique, une telle évolution des événements exigeait une autre condition préalable : la Russie devait dû être au courant à l'avance de tout ce qui se préparait ces dernières semaines et ces derniers mois au Kazakhstan. Et elle l’était, évidemment.” »

• Trois jours plus tard (le 9 janvier aux USA), le Saker-US reprend toute l’affaire dans un très long article très documenté, où nous avons même l’identité des trois unités d’assaut (Spetsnaz, parachutistes) engagées avec cette “stupéfiante rapidité” déjà mentionnée. Non seulement les Russes connaissaient les intentions de certains groupes déstabilisateurs, mais ils ont laissé faire jusqu’au déclenchement d’un ensemble “insurrection + coup d’État”. Si l’on s’en tient au strict point de vue des intérêts russes, leur but dans ce cas, selon Saker, était essentiellement d’amener le président Tokayev brutalement menacé par la déstabilisation, manifestations et émeutes jusqu’à des opérations de “guerre hybride” par des groupes armés, à faire appel à eux en échange d’une politique plus alignée sur les intérêts russes. Il s’agit du  même schéma russe, selon des modalités différentes, qu’avec l’Arménien Pachinian et le Biélorusse Loukachenko durant les récents événements de la guerre Arménie-Azerbaïdjan et la tentative de déstabilisation interne en Biélorussie. Quoi qu’il soit et par-dessus tout, l’intérêt supérieur et catégorique, comme l’a dit Poutine lors d’une deuxième réunion d’urgence de l’OTSC, est pour la Russie (et les autres pays du groupe) d’interdire par tous les moyens tout ce qui ressemblerait à une révolution de couleur.

On remarque donc que, avant les troubles qui les amenèrent à appeler la Russie au secours, les trois dirigeants conduisaient (ou “était obligé de poursuivre” dans le cas de Tokayev) une politique ambiguë impliquant une certaine ouverture vers le bloc-BAO/les USA, destinée à obtenir plus de la Russie par une menace d’un éventuel rapprochement avec les USA. Cette phase est terminée pour les trois à cause  des événements qui ont affecté gravement leur sécurité. Ils sont désormais solidement ancrés à Moscou, et leur sécurité dépend de Moscou. Le Saker-US exulte : trois fois la même manœuvre qui ressemblerait à un montage, a été exécutée, trois fois elle a fonctionné à l’avantage de Moscou et au grand dépit des divers spécialistes § experts associés-“coloristes” (révolution, de couleur) des USA et même du bloc-BAO d’une façon assez générale, – puisque d’autres gredins que les USA sont dans le coup (Turquie certes, mais aussi divers groupes déstabilisateurs, terroristes ou du crime organisé). Il est probable qu’il faille ici ou là nuancer les causes de l’enthousiasme de Saker. Il semble en effet que les premières manifestations au Kazakhstan, d’ailleurs très fournies et violentes, ont été largement spontanées et dues à des conditions économiques très difficiles et des décisions maladroites ; c’est ensuite que des groupes déstabilisateurs ont improvisé et tenté de détourner ces troubles à leur avantage, en les aggravant considérablement et donnant ainsi l’argument pour une intervention Russie/OTSC.

« Ce qui vient de se passer au Kazakhstan était à la fois une insurrection à grande échelle déclenchée par les États-Unis ET une tentative de coup d'État.  Il existe des preuves irréfutables que les Russes étaient conscients de ce qui se préparait et qu’ils ont laissé le chaos s'aggraver au point de ne laisser qu’une seule option possible à Tokayev : faire appel à une intervention de l'OTSC.  L'extrême rapidité de l’opération militaire russe a pris tout le monde par surprise et aucune des parties impliquées dans cette insurrection+coup d’État (les États-Unis, les Takfiris [terroristes islamistes] et les Turcs) n'a eu le temps de réagir pour empêcher le déploiement rapide de forces (extrêmement) aptes au combat, qui ont ensuite permis aux forces militaires et de sécurité kazakhes de se regrouper et de passer à l'offensive.  Le fait que l’Arménien Pachinian ait “ordonné” cette opération de l’OTSC [en tant que président tournant de cette organisation] était une belle cerise sur l’énorme gâteau !

» Dans l'ensemble, ce n'est que le dernier d'une série d'échecs cataclysmiques des dirigeants de l'Empire anglo-sioniste (déjà mort) et des États-Unis (tout aussi morts) à faire réellement quelque chose, de n’importe quoi.  Dans la confrontation entre le simulacre occidental et l'action militaire russe, cette dernière a prévalu, une fois de plus.

» Demain [hier, lundi], les États-Unis tenteront d'effrayer la Russie en parlant de “sanctions d’enfer”.  Bonne chance pour ça ! »

• Il est vrai qu’“en face”, la partie américaniste fait pâle figure, autant dans la communication que dans l’action qui a précédé, où elle avait évidemment sa part car rien d’illégal et de stupide ne se fait nulle part dans ce piètre monde, qu’on y voit aussitôt avec toutes les raisons du monde la marque de fabrique de l’américanisme subversif continuellement opérationnel. C’était donc le cas aussi au Kazakhstan selon la formule du ‘business as usual’, et certainement pas pour déboucher à cette date et dans ces conditions sur un coup de force. Les USA semblent donc n’avoir rien vu venir et avoir été complètement pris pour surprise, tandis que les automatismes de récupération-manipulation se mettaient en action, avec le seul résultat bien malheureux (pour les USA) de donner une occasion en aux Russes, qui eux avaient vu venir, d’intervenir.

Par conséquent, le ministère russe des affaires étrangères, par la langue acérée et moqueuse de sa porte-parole Zakharova, ne se privent pas de ridiculiser les réactions américanistes.

« Les responsables américains ne comprennent pas ce qui se passe au Kazakhstan et recourent donc à des platitudes et à des clichés lorsqu'ils discutent de la crise qui frappe ce pays d’Asie centrale, a déclaré dimanche le ministère russe des Affaires étrangères.

» Les déclarations américaines sur la crise, qui a vu le pays en proie à de violentes manifestations depuis le Nouvel An, témoignent d'un “désespoir et d’un manque complet d’arguments ; ou d’un désespoir dû à un manque d'arguments”, a remarqué la porte-parole Maria Zakharova lors de son intervention sur la chaîne ‘Soloviev Live’ sur YouTube samedi.

» Les responsables de la Maison Blanche sont “déconcertés” lorsqu'ils sont interrogés par les journalistes sur la situation dans le pays d'Asie centrale, a-t-elle ajouté. “Ils ne savent pas quoi répondre. Il suffit d’écouter leur babillage de bébé et ces absurdités qu’ils prononcent”, a souligné Mme Zakharova. »

Bref, il s’agissait bien d’une “mise en bouche” savoureuse pour les Russes, une sorte de prélude avantageux aux intéressantes négociations-affrontement en cours entre USA et Russie, depuis hier à Genève. Même ‘Le Monde’ le reconnaissait, en donnant sa juste signification à l’affaire kazakhe dans une rencontre qui a été déclenchée par la situation sur la frontière Ouest de la Russie, loin du Kazakhstan ; précisons bien entendu que si la signification est juste, la description de la situation générale, ‘Le Monde’ restant ‘Le Monde’, est évidemment faussaire.

« Moscou en position de force face à Washington lors de discussions-clés sur la sécurité en Europe... [...]

» Une semaine [de négociation] que les États-Unis abordent dans une position difficile. Toute la stratégie du président, Joe Biden, depuis un an, consistant à limiter les sujets de crise avec la Russie pour mieux se focaliser sur la Chine, semble éprouvée. D’autant qu’à l’intérieur même de l’OTAN, l’hypothèse d’un compromis avec Moscou, sur le dos de Kiev, émeut les pays baltes et la Pologne. Le rapide déploiement de près de 3 000 soldats russes au Kazakhstan, dans le cadre de l’Organisation du Traité de Sécurité Collective, n’entame pas les capacités d’intervention de la Russie en Ukraine, même s’il complique la donne. Il confirme en revanche l’ambition de Moscou de peser sur le destin de ses voisins, malgré des dynamiques nationales très diverses, déniant ainsi à Kiev le droit de choisir son orientation. »

• Donc, une deuxième piste beaucoup plus croustillante, qui nous ramène complètement dans notre monde-bouffe se découvre dans une séquence où l’on voit apparaître les Biden en personne, hors de toute fonction officielle, et surtout l’inénarrable fils de Joe, l’éternellement-jeune Hunter Biden, qui est de tous les coups et de toutes les innombrables combines dans les différents pays venus de l’ex-URSS. Dans ce cas, c’est le Kazakhstan et l’un des personnages “sulfureux” aux normes des mœurs du Kazakhstan de Nazarbayev qui régnait jusqu’en 2018 avant Tokayev, et personnage qui vient de faire l’objet d’une arrestation pour “trahison” sur ordre de Tokayev. Certes, la politique est là puisque Massimov était premier ministre avant de devenir chef du service de renseignement KNB, position dans laquelle on le trouve lorsqu’il est arrêté pour “trahison”. Il y a une photo de 2012 où l’on voit le vice-président d’alors Joe Biden, son fils Hunter, Massimov ; et ce n’est certes pas une photo officielle mais bien une photo “entre amis” ; et puis, toute une histoire...

« L’une des mesures politiques les plus audacieuses et les plus surprenantes prises par le président kazakh Kassym-Jomart Tokayev ces derniers jours, a été l’arrestation du chef des services de renseignements du Kazakhstan, Karim Massimov, sous l’accusation de haute trahison.

» Massimov était à la tête du Comité de sécurité nationale (KNB) jusqu'à son éviction soudaine et sa détention jeudi. Massimov avait été le premier ministre de Nursultan Nazarbayev, l’homme fort du pays, et longtemps considéré comme son “bras droit”. Peu après, une photo a refait surface, qui a fait et fait l’objet de nombreuses spéculations. Elle montre Joe Biden et Hunter Biden posant avec le chef de la sécurité kazakh Karim Massimov, désormais détenu, ainsi qu'avec l'oligarque bien connu Kenes Rakishev.

» Un courriel et des communications ont fait surface, qui avaient fait l’objet d’un reportage approfondi dans The Daily Mail, qui étaient liés à des commentaires et des questions antérieurs concernant le fameux “ordinateur portable infernal” de Hunter. Ils semblent confirmer que Hunter Biden et Massimov étaient “amis proches”.  Le reportage de l’époque indiquait que “lorsque Biden était vice-président, Hunter a travaillé comme intermédiaire pour Rakishev de 2012 à 2014”. Les courriels provenaient de "militants anti-corruption" au Kazakhstan, montrant que Hunter avait pris contact avec Rakishev. “Selon le rapport, Hunter [avait] réussi à obtenir un investissement de Rakishev d’un montant d’un $million pour un cinéaste ayant des liens politiques”.

» Selon un article de 2020 de The New York Post (lorsque la photo commençait à attirer l'attention), “l’instantané, publié pour la première fois par un site web kazakh anti-corruption en 2019, fait suite aux exposés explosifs du ‘Post’ détaillant les transactions à l'étranger de Hunter Biden et à un rapport affirmant que Rakishev a payé le rejeton Biden comme intermédiaire pour négocier des investissements américains.” Concernant ses relations avec les oligarques et les courtiers du pouvoir kazakhs, l'article du ‘Post’ donnait de nombreuses précisions... [...] 

» Cela soulève un grand nombre de questions, à commencer par celles-ci : Quelle est la nature des liens entre la famille Biden et l'ancien président kleptocrate Nazarbayev du Kazakhstan, avec son cercle d’oligarques et de responsables de la sécurité ? »

Bien, il y autant de chances qu’il y a de vaccinés-Covid en France qu’on songe seulement à laisser aller un tout petit peu plus loin l’enquête que mériterait cette affaire. Pour tout ce qui concerne les affaires de Hunter Biden, la presseSystème, sous la haute surveillance des GAFAM, ont toujours été d’une vertu exemplaire de non-immixtion dans les affaires privées. On se rappelle il y a quinze mois de la “journée folle” de Tweeter, où le média social bloqua tous les transferts de l’énorme article du New York ‘Post’ détaillant diverses implications de Hunter avec l’Ukraine, plus des affaires de drogue et de porno. L’affaire fut totalement étouffée, anéantie, et certains jugent que cela coûta sa réélection à Trump tant les effets sur la position de Biden auraient été colossaux si l’article avait été diffusé. C’est dire si l’on veille au grain.

Ce que nous voyons plutôt avec cette nouvelle incartade de Hunter, c’est la pourriture sans fond de la dynastie, et d’une façon générale de l’establishment américaniste, avec tous les réseaux de corruption et de crime organisé mis en place depuis la fameuse période de dévastation corruptrice et américaniste de tous les pays de l’ex-URSS dans les années 1990. Cela rend nécessairement très prudents tout l’appareil de l’administration Biden lorsqu’il s’agit de traiter une question impliquant le Kazakhstan, d’autant que les troupes américanistes sont beaucoup moins à l’aise dans ce pays (pour contrôler les rumeurs anti-Hunter) qu’en Ukraine où la puissante Amérique est l’incontestable ‘big boss’ au milieu d’une structure incroyablement pourrie jusqu’à l’os.

C’est le problème pour les USA, aujourd’hui où ils perdent dans tous les jeux et sur tous les terrains, où même leurs sanctions leur reviennent dans la figure : le ‘big boss’ qui se fait tailler des croupières n’est plus du tout respecté ni craint, et toutes ces affaires sordides-bouffe menacent à chaque instant de faire mauvais genre, comme « des tâches de gros rouge » selon le mot de Sarko pour caractériser une campagne électorale où plus personne n’est capable de se protéger des effets de ses propres excès. Eh bien, quoi qu’on veuille, lorsqu’on se trouve à une table de négociations (celle de Genève, depuis hier) avec à l’esprit un tel passif, et même si l’on est soi-même d’une apparence proclamée “blanc comme neige”, l’on n’est pas vraiment à son aise ; d’autant que l’on en face de soi des Russes que tous les simulacres-BAO peignent comme des bandits-corrompus, et qui pourtant semblent de ce point de vue légers comme une plume... Effectivement, nous parlons de psychologie, qui est la porte de l’âme et qui donne sa force au caractère : c’est elle qui, dans cette période où le système de la communication règne en maître absolu, détermine l’essentiel des positions politiques et qui crée les véritables “rapports de force”.

 

Mis en ligne le 11 janvier 2022 à 06H00