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4239Non content de courtiser les multinationales qui font la pluie et le beau temps à Davos, le premier-ministre du Québec, François Legault, a décidé de confier l’exploitation, l’entretien et la mise à jour du parc de serveurs informatiques du gouvernement à des sous-traitants étrangers. Tout cela sous prétexte d’économiser un maigre 100 millions de dollars par année sur un total de près de 5 milliards consacrés aux technologies de l’information par l’état québécois.
En clair, cette mesure suicidaire fera en sorte que le gouvernement québécois ne soit plus que le locataire de plus de 80 % des données qu’il conservait, auparavant, sur les serveurs de plusieurs centaines de centres de traitement informatique disséminés à travers la province. Un autre réflexe purement comptable qui se fiche bien de la protection des renseignements privés de la population.
Ce projet qui défie le gros bon sens a été mis en branle par Éric Caire, le ministre délégué à la Transformation numérique gouvernementale. Véritable fuite en avant, ce changement d’orientation fera en sorte qu’Amazon, Google, Microsoft, IBM et d’autres géants de la Silicon Valley pourront emmagasiner les informations confidentielles des contribuables québécois à partir de leurs propres centres de stockage opérationnels en sol québécois.
Comble de l’aberration, le Journal de Montréal vient tout juste de nous apprendre qu’Élections Québec s’apprête à confier les données de son site internet à un sous-traitant qui héberge le tout sur des serveurs qui sont la propriété du géant Amazon détenu par le multimilliardaire Jeff Bezos.
Un ex-enquêteur de la Sûreté du Québec, Paul Laurier, n’a pas hésité à confier aux journalistes du Journal de Montréal qu’« au lieu de choisir notre tuyauterie au Québec, on va aux États-Unis pour les enrichir ». Pour les enrichir et pour confier à leurs services secrets des données hautement confidentielles qui concernent les choix politiques, mais aussi la vie privée de millions de nos compatriotes.
Il serait peut-être utile de rappeler à nos lecteurs que le Congrès américain votait, le 23 mars dernier, le Cloud Act. Cette disposition juridique oblige les sociétés américaines à transmettre les informations qu’elles détiennent sur leurs serveurs – et pas que dans le cloud (ou nuage informatique) – aux agences de renseignements américains dès qu’elles en feront la demande. Et, cela, peu importe si les données en question sont hébergées par des serveurs à l’étranger.
Du moment que les serveurs en question sont la propriété d’une société américaine, tout le reste est à l’avenant. L’experte française, Nathalie Devilliers, confiait au magazine Marianne que le Cloud Act « […] bafoue surtout les règles et les accords de coopération internationale ! », laissant entendre que cette nouvelle disposition juridique va bien plus loin que les habituels accords internationaux en matière d’assistance juridique.
Désormais, les agences telles que la NSA n’auront même plus besoin de l’accord d’un juge pour passer une requête afin de siphonner vos données personnelles. Les Québécois auraient intérêt à s’informer un peu plus sur la question.