Un tsunami nommé Vance

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Un tsunami nommé Vance

15 février 2025 (18H50) – La honte accusatrice pour le donneur de leçon et la fureur haineuse à son encontre, telles sont les réactions d’apparence et d’apparentement au simulacre en cours des élites-Zombie de l’Europe après les différentes interventions du vice-président des États-Unis JD Vance, dont son  discours de Munich. Au-dessus de la honte et de la fureur, ou en dessous si vous voulez, plane une incommensurable pétoche menée sur un rythme de panique que l’on dissimule en-dessous du tapis...

Ces gens-zombies ne comprennent pas ! Ils croyaient avoir tout bon, ils s’attendaient à recevoir de plus en plus d’affectueuses caresses du ‘boss’ d’Outre-Atlantique, le ‘capo di tutti capî’. On avait bien traité Trump de fasciste, mais c’était pour la forme et l’on s’apprêtait à baisser culotte avec l’élégance d’une dame de bonne réputation dans la grande bourgeoisie du XVIème arrondissement. Au lieu de cela, ce JD Vance déclenche l’éclatement d’un orage qui couvait depuis l’élection de Trump, et aux signes duquel ils faisaient la sourde oreille.

Parce que, hein, lire dans le Wall Street ‘Journal’ ces paroles du JD (pour ceux qui s’interrogeraient : JD sont initiales de “James David”, – et pensez en plus qu’il est successeur tout désigné de Trump en 2029 !), – en plus de ses discours dans nos grandes concentrations urbaines emplies de somptueuses occurrences de la vieille histoire de la civilisation la plus haute ; – hein, entendre cette comparaison des zombies avec les Brejnev, les Andropov, les Tchernenko ! Supportera-t-on longtemps ces insultes de cowboys mal dégrossis ou lèverons-nous enfin l’étendard de la Sainte Croisade à laquelle rêve le Saint-Siège du Berlaimont, dans la Sainte Relique autonome de l’Union Européenne à Bruxelles-la-Sainte ? La question est posée et elle relève d’une sorte de sacralisation de la vertu européiste.

« Le vice-président américain J.D. Vance a fustigé les politiciens traditionnels de l’UE pour avoir adopté un “vocabulaire de style soviétique” pour réprimer la dissidence. Dans une interview au Wall Street Journal publiée jeudi, Vance a critiqué les élites de l’UE pour leur incapacité à reconnaître l’écart grandissant entre leurs opinions et celles des citoyens ordinaires sur des questions telles que l’immigration.

» Plutôt que de relever ces défis, a-t-il affirmé, ils préfèrent censurer les voix opposées, en présentant cela comme une lutte contre “la désinformation ou la mésinformation”. »

Qui pourrait s’étonner, – mais plus rien ne nous étonne, à la fin ! – d’entendre l’énorme monstre orange féliciter à 8 000 kilomètres de là son vice-président pour ses remarques insensées :

« J’ai pensé que son discours avait été très bien reçu, en fait. J’ai entendu de très bonnes remarques. Je suis content qu’il l’ait prononcé – un très bon discours, en fait, un discours très brillant. Et l’Europe doit faire attention.

» J’ai entendu son discours et il a parlé de la liberté d’expression et je pense que c’est vrai. En Europe, ils perdent leur merveilleux droit à la liberté d’expression. »

Effarées, les zombies-élites ne comprennent pas. Alors, elles gémissent comme des victimes injustement traités, qui firent tout leur labeur d’esclaves avec tant de conscience.

Promenade au cœur d’un discours

On peut citer quelques passages du discours pour en donner toute la saveur et mesurer précisément ce que le vice-président des États-Unis a débité et déballé devant le parterre des excellences, dignitaires, généraux, premiers ministres et présidents, tous plus ahuris les uns les autres.

Nous piquons un peu au hasard, ce passage qu’un utilisateur de tweeterX, ce réseaux qui répand la terreur et menace toutes les démocraties du monde, a mis sur son compte :

« Je regarde vers Bruxelles, où les commissaires de l'UE ont averti les citoyens de leur intention de fermer les réseaux sociaux en période de troubles civils dès qu'ils repèrent ce qu'ils jugent être un ‘contenu haineux’.

» Ou dans ce même pays, où la police a mené des descentes contre des citoyens soupçonnés d'avoir publié des commentaires antiféministes en ligne dans le cadre de la ‘lutte contre la misogynie sur Internet : une journée d'action’.

» Je pense à la Suède, où il y a deux semaines, le gouvernement a condamné un militant chrétien pour avoir participé à l'autodafé de Corans qui a conduit au meurtre de son ami. Comme l'a fait remarquer de manière effrayante le juge dans son cas, les lois suédoises censées protéger la liberté d'expression ‘ne donnent pas, en réalité, carte blanche pour faire ou dire quoi que ce soit sans risquer d'offenser le groupe qui professe cette croyance’.

» Et peut-être plus inquiétant encore, je regarde du côté de nos très chers amis, le Royaume-Uni, où le recul des droits de conscience a placé les libertés fondamentales des Britanniques religieux, en particulier, dans la ligne de mire.

» Il y a quelques mois à peine, le gouvernement écossais a commencé à distribuer des lettres aux citoyens dont les maisons se trouvent dans des “zones d'accès sûres”, les avertissant que même la prière privée à l'intérieur de leur domicile peut constituer une infraction à la loi.

» Naturellement, le gouvernement a exhorté les lecteurs à signaler tout concitoyen soupçonné d'avoir commis un délit d'opinion. En Grande-Bretagne et dans toute l'Europe, je crains que la liberté d'expression ne soit en recul. »

Le cas exemplaire de la Roumanie

On retient surtout ce passage qui concerne la Roumanie, parce que ce qui s’y est produit en décembre 2024 constitue, d’une façon voyante et grossière, un coup d’État juridique et bureaucratique, dans un complet irrespect de la souveraineté, comme il n’y a jamais eu auparavant de cette sorte en Europe. Ce fut si patent, si grossier, si arrogant et méprisant pour les droits les plus élémentaires, que l’équipe Trump, et JD Vance par conséquent, en ont été si profondément marqués.

Il est par conséquent excellent que Vance s’y attarde avec tant d’insistance, dans une occurrence où les diverses valetailles de la basse-cour ne peuvent pas élever leur habituel barrage de censure. Par conséquent, tout le monde est obligé d’écouter, et c’est un immense plaisir de le savoir et de les voir :

« Le vice-président américain J.D. Vance a critiqué les dirigeants européens pour avoir peur de leurs propres électeurs et pour ne pas avoir défendu les valeurs démocratiques, citant l’annulation récente de l’élection présidentielle en Roumanie, affirmant qu’elles avaient été annulées “sur la base de soupçons fragiles d’une agence de renseignement et d’une énorme pression de ses voisins continentaux”.

» Il a exhorté les dirigeants de l’Union européenne à “accepter ce que votre peuple vous dit”, même lorsque cela est “surprenant” et qu’ils ne sont pas d’accord. Les déclarations “cavalières” des responsables de Bruxelles “semblant ravis” de l’annulation des élections présidentielles en Roumanie ou des pouvoirs étendus de modération du contenu ou d’autres restrictions de la liberté d’expression aux Royaume Uni, en Allemagne et en Suède ont été “choquantes pour les oreilles américaines”.

« “Si vous vous présentez par peur de vos propres électeurs, l’Amérique ne peut rien faire pour vous, et d’ailleurs, vous ne pouvez rien faire pour le peuple américain qui m’a élu et qui a élu le président Trump”, a déclaré Vance. »

Ainsi va la vie, c’est-à-dire la GrandeCrise. Nous nous retrouvons tous, dissidents, anti-système mal avisés et antiSystème bien au point, populistes de tous les horizons, Russes et poutiniens par conséquent, Hongrois et Slovaques, etc., derrière la puissance américaniste, poussant au même combat qu’elle nous mène avec fureur sans pour autant entrer dans ses rangs. D’habitude, nous la combattons, – mais là ! Quel étrange assemblage dira-t-on en première remarque et en pleine confusion ; mais l’instant est vite passé car tout passe si vite puisque les enjeux ne cessent de varier, les intérêts de se déplacer, les perceptions de se modifier, tandis que subsiste, de plus en plus marqué par la panique et la monstruosité de ses défenseurs, le Système à l’agonie au milieu de la GrandeCrise.

On imaginera donc avec une certaine jubilation les prochaines élections présidentielles roumaines remises au goût du jour de la façon qu’on a vue et pourtant confrontées à une réelle réédition du premier coup. Les élections allemandes, pour dans quelques jours, seront également intéressantes à suivre. ‘Stay tuned’, comme disait l’autre.

Souvenir du 10 septembre 2001

Finalement, que faut-il retenir de ce discours, de ce qu’il y a de révolutionnaire dans ce discours ? Il faut retenir que JD nous a dévoilés, – sauf pour ceux qui le savaient déjà, y compris nombre de citoyens américains pour leur propre pays, – ce qu’il est temps de savoir, ce qui est l’évidence même. Mais l’évidence est telle, avec une telle intensité de lumière, qu’elles aveuglent tant de ces petits hommes, les zombies qui nous dirigent, chacun étant à merveille « le dernier homme » de Nietzsche...

L’évidence, bien entendu est bien que la “menace” n’est rien d’autre que l’effondrement qui se produit en nous, dans le cœur de notre civilisation. Oubliez la stratégie, la géopolitique, le “rapport de forces”, ‘The Grand Chessboard’ de Brzezinski et la guerre en Ukraine. Ce qui compte est notre effondrement intérieur.

JD nous dit tout cela pour l’Europe, comme lui-même et Trump et toute leur cohorte le répètent pour l’Amérique elle-même, cela qui fait que la révolution intérieure de  Trump est bien plus importante que sa politique extérieure. Vance  l’a dit à Munich, cénacle des “experts” qui se rengorgent de systèmes stratégiques et d’armements à produire de la plus extrême urgence, avant d’aller régler son compte à Poutine... Billevesées que tout cela, pur exercice de ‘Fantasy’.

« L’Europe est confrontée à sa plus grande menace intérieure plutôt que de la part de puissances étrangères, a déclaré le vice-président américain J.D. Vance, exprimant son inquiétude face à ce qu'il a appelé l'abandon par le continent de ses valeurs fondamentales.

» “La menace qui m'inquiète le plus vis-à-vis de l'Europe n'est pas la Russie, ni la Chine, ni aucun autre acteur extérieur”, a-t-il déclaré, ajoutant “ce qui m'inquiète, c'est la menace intérieure”.

» Vance a mentionné qu’un ancien haut fonctionnaire de l'Union européenne [notre distingué Thierry dit-Breton] est passé à la télévision pour applaudir la décision de la Cour constitutionnelle roumaine d'annuler le premier tour de l'élection présidentielle de décembre 2024 en raison d'une prétendue ingérence étrangère. Vance a suggéré que la décision était motivée politiquement et prise parce que les choses ne se sont pas “déroulées comme prévu” selon les conceptions de l'UE. »

Quand je parle de l’évidence, je parle d’une évidence qui a au moins un quart de siècle d’affirmation d’une façon aveuglante, et qui vaut bien entendu pour les États-Unis autant que pour l’Europe, – sauf que les Etats-Unis se doutent de quelque chose depuis longtemps tandis que nous baignons dans notre arrogance et notre hystérie narcissique. Rappelez-vous ce que l’on ne manque pas de rappeler ici, et moi avec, à chaque occasion qui se présente, qui est ce fameux, ce fabuleux discours du secrétaire à la défense Rumsfeld le 10 septembre 2001, veille du 11, et qui passa to-ta-le-ment inaperçu dans le tohu-bohu des tours fracassées :

« Notre sujet aujourd’hui est un adversaire qui constitue une menace, une sérieuse menace, contre la sécurité des États-Unis d’Amérique. Cet adversaire est un des derniers bastions de la planification centralisée. Il gouverne en édictant des plans quinquennaux. D’une seule capitale où il se trouve, il tente d’imposer ses exigences au travers des fuseaux horaires, des continents, des océans et au-delà. Avec une brutale constance, il bâillonne la pensée libre et détruit les idées nouvelles. Il désorganise la défense des États-Unis et met en danger les vies des hommes et des femmes en uniforme.

» Peut-être cet adversaire paraît ressembler à ce que fut l’Union Soviétique, mais cet ennemi s’en est allé : nos ennemis sont aujourd’hui plus subtils et plus implacables. Vous devez penser que je suis en train de décrire un de ces dictateurs décrépits qui survivent encore. Mais leur temps est passé, à eux aussi, et ils ne font pas le poids à côté de cet adversaire que je décris.

» Cet adversaire est beaucoup plus proche de nous. C’est la bureaucratie du Pentagone. Non pas les gens mais les processus. Non pas les hommes et les femmes en uniforme mais l’uniformité de la pensée et de l’action que nous leur imposons bien trop souvent... »

Je me rappelle que nous avions présenté ce discours le 11 septembre, encore inconscient de l’attaque contre les tours puisque je tondais mon gazon après avoir écrit l’article avant (décalage horaire) que ne se déclenche l’attaque. Interrogez-vous pour observer que ce commentaire vaut aujourd’hui, aussi bien pour un Musk que pour un Trump, un Heghest, et un JD bien entendu :

« C’est assez rare pour être souligné : voilà un discours officiel qui mérite d'être lu et relu tant il a de significations profondes. Il s'agit du discours de Donald Rumsfeld, le 10 septembre 2001 au Pentagone. Un tel discours pourrait avoir été prononcé par Mao à la veille de la révolution culturelle, ou par Gorbatchev sur le point de lancer sa glasnost. Les références à la guerre froide ne manquent d'ailleurs pas dans le discours de Rumsfeld : la bureaucratie monstrueuse du Pentagone est une sorte de dinosaure rescapé de la guerre froide, et une structure aussi archaïque et paralysante que la bureaucratie de l'Union Soviétique à la veille de la chute de l'empire soviétique. »

Certains diront : “eh bien, on en a mis du temps”. Nous dirons plutôt, avec mon approbation empressée, qu’il a fallu mener un combat déterminé contre une attaque de sauvegarde qui n’est pas autrement inspirée que par l’esprit démoniaque, et donc d’une puissance étourdissante. Simplement, le diable, qui « ne peut s’empêcher de laisser échapper toujours quelque [bêtise], qui est comme sa signature... » (Guénon), a activé toute sa surpuissance pour freiner la dissidence et la pulvériser, entraînant ainsi en l’ignorant l’inévitable chemin vers son autodestruction qui accompagne cette surpuissance.