Une agonie en petits morceaux

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Une agonie en petits morceaux

• RapSit-USA2024. • Dans le tourbillon de confusion qui caractérise Washington D.C. depuis plusieurs années, la phase commencée dimanche avec la décision (?) de Biden d’abandonner la réélection est particulièrement révélatrice. • Essentiellement, elle montre la division qui règne au sein de la direction du parti démocrate, notamment la “guerre des clans” (les Clinton versus Obama ?) qui y sème le chaos. • Pour certains, la personnalité qui est la plus active “dans l’ombre” est Barack Obama, lequel n’a pas (encore ?) apporté son soutien à Harris.

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Avant de parler des élections de novembre 2024 dans un pays nommé affectueusement Amérique, avant de parler des complots qui ont abouti au retrait de Joe Biden de la course à la présidence dont il n’est peut-être même pas lui-même avisé, posons la question non résolue encore hier soir (soyons prudent et laissons l’expectative pour le temps écoulé depuis) : Où est Joe Biden ? Et, question subsidiaire déjà effleurée : sait-il qu’il n’est plus candidat

Une information a couru à ce propos, par ailleurs alimentée par le fait que la décision de Joe Biden de se retirer de la course à la présidence n’est actuellement signalée que par un tweetX sans la moindre valeur juridique, qui aurait pu être posté par n’importe qui.

• Par exemple, on peut entendre Tucker Carlson se lancer dans des explications très complexes à propos d’une situation très suspecte où il apparaît qu’on pourrait prendre très au sérieux l’hypothèse de la mort de Joe Biden... Mais pour quelle raison ? Covid ou autre chose ? :

«  C’est une information de Charlie Kirk, le voyage de Joe Biden à Las Vegas après l’annonce qu’il avait le Covid a dû être interrompu les Secret Service ont informé les services de polices de Las Vegas d’une situation d’urgence, de la nécessité de bloquer des rues pour faciliter l’accès d’urgence à l’hôpital... »

• On peut aussi regarder cette longue séquence de 9 minutes de ‘SkyNews(Australie), sur le sujet, avec de multiples interventions et l’accent mis sur la complète illégalité de son tweetX, et la question posée de savoir si le président est au courant de sa propre décision...

«  Où est Joe Biden ? On ne l’a plus vu depuis cinq jours, depuis qu’on a annoncé qu’il avait le Covid... »

... Puis, hier en fin d’après-midi, on annonçait qu’on verrait Joe Biden à la Maison-Blanche, aujourd’hui dans l’après-midi (cette nuit pour nous, à cause du décalage horaire). Vrai ? Faux ? On verra bien, le simulacre construit et entretenu depuis des années (notamment autour de Joe Biden) et les désagréable surprises de la réalité qui se découvrent à mesure du temps qui passe très vite, progressent heure par heure dans la grande Amérique américaniste. Par conséquent, l’on peut dire avec certitude que rien n’est assuré, surtout du point de vue de la communication et de l’information qu’elle charrie dans l’ère de la postvérité.

Obama et l’ombre de ‘Macavity

On s’arrêtera là sur le sort de Joe Biden, parce que cette affaire mystérieuse semble également un embrun de la communication parmi d’autres sur la surface d’un océan déchaîné qu’est devenue la situation à Washington D.C. Rendre compte précisément de la situation, se risquer à décrire ce qu’il se passera demain et après-demain, sont des tâches absolument impossibles et il faut avoir l’honnêteté et l’humilité de le dire. La capitale américaniste est devenue le chaudron bouillonnant et le centre d’une situation générale elle-même bouillonnante. Il n’est plus possible de décrire cet ensemble de choses si instables.

Vous pouvez suivre le duo tourbillonnant Christoforou-Mercouris, qui s’attache surtout dans leur causerie d’hier à décrire l’affrontement des clans au sein du parti démocrate, le clan Clinton contre le clan Obama, les uns et les autres jouant avec les candidats comme on use de pion manipulables à merci. Mercouris, surtout, est dans une forme éblouissante contre sa cible préféré, l’homme de l’ombre qu’est Obama, qu’il affuble du surnom de “présidentavity” en s’inspirant du nom du chat maléfique d’un poème de T.S. Elliot, ‘Macavity’, sorte de créature diabolique déclenchant toutes les “mauvaises choses” et prenant garde à n’être pas présente lorsqu’elles se déclenchent, – typiquement Obama, selon lui...

Christoforou : « Ils ont dit qu'Obama joue le rôle de l’homme d'État chevronné mais il ne veut pas trop se montrer... »

Mercouris : « Oh absolument il est le manipulateur rusé et intrigant qu'il a toujours été. Il est toujours là derrière le rideau !

» Je l'ai une fois appelé “présidentavity”... Souvenez-vous, il y a ce poème de TS Elliot sur le chat maléfique, le cerveau criminel Macavity qui commet tous les crimes et la chose caractéristique à propos de Macavity et qu’il n'est jamais là et c'est exactement ce qu'est Obama... Je veux dire c'est exactement comme cela qu’il fonctionne, donc il y a une guerre en Syrie un coup d'État en Ukraine et toutes sortes de choses qui tournent mal dans le monde mais Obama s’arrange toujours pour ne jamais paraître vraiment impliqué... »

Cette conversation situe le climat : intrigues, ambitions personnelles, “complots” à l’intérieur du parti qui se trouve dans la situation la plus difficile, et savoir, ou deviner, qui, pour l’instant, détient l’essentiel des pouvoirs. Avec le semblant de rassemblement autour de Kamala Harris, – avec beaucoup de  bruits, d’emphase et d’observations dithyrambiques sur la vice-présidente jusqu’alors totalement ignorée sinon moquée et méprisée, – on a paradoxalement une mesure de la fragilité de sa position (celle de Harris) à l’intérieur du parti, avec beaucoup de bruit pour cacher l’absence d’une réelle implantation. Alors que la presseSystème commence son travail de simulacre sur la popularité de Harris dont on va très vite affirmer qu’elle est en pleine ascension avec les sondages qui vont bien avec, le constat devrait plutôt porter sur sa position au sein du parti démocrate, avec un Obama très semblable à ce qu’en dit Mercouris, qui jusqu’ici s’est abstenu de prendre position pour Harris (au contraire des Clinton) et qui continue son travail dans l’ombre. Somme toute, nous dirions que cette réputation n’est pas imméritée comme on le lit le 28 janvier 2021...

« • On ressort, dans la référence citée à partir de l’article de ‘WhatDoesItMean’, un entretien vieux de plus d’un mois, d’Obama reçu par Stephen Colbert dans ‘The Late Show’. Obama confirme qu’il ne voudrait pas revenir au pouvoir pour un troisième mandat, comme certains lui demandent ou le lui ont suggéré, mais qu’il aimerait avoir (dans le pouvoir qui se mettait en place lorsqu’il parlait) des relais d’influence très directs, – tout cela étant dit sous une forme ironique, très cool, à-la-Obama dans le rôle du comploteur complètement à l’aise :

» “Si je pouvais arriver à un arrangement où j’aurais un relais dans la place, un homme ou une femme de tête, avec une oreillette par où recevoir mes suggestions de proposition ou d’action, et moi dans ma cave, à  consulter fiévreusement ma documentation, et que je pourrais en quelque sorte exercer mon influence [comme si j’étais président] tandis que quelqu’un d’autre se chargerait de la conversation et du cérémonial, ce serait parfait pour moi parce que je trouve ce travail à faire absolument fascinant”. »

De même et à l’inverse des tribulations électorales, il faut prêter grande attention aux positions extérieures vis-à-vis de la direction américanistes, notamment des pays du ‘Sud Global’ qui observent avec un grand malaise cette décomposition du système politique américaniste marqué par la pratique quotidienne et intense du mensonge et du simulacre. D’où cet avis d’un politologue marocain :

« “Je comprends bien les déclarations de la porte-parole de la diplomatie russe [Maria Zakharova] quand elle préconise l'ouverture d'une enquête sur l'état de santé mental du Président Joe Biden”, a déclaré Abdelhak Najib. 

» “Est-ce qu'on a caché quelque chose au peuple américain? Je pense que des enquêtes sont en cours et qu'on saura tôt ou tard si véritablement il y avait une maladie cachée”, a ajouté l'expert. 

» La “guerre de succession” va être “acharnée” et affaiblira davantage le parti démocrate, estime Najib. »

La guerre des clans

Il est intéressant de lire ces observations sur les convulsions du parti démocrate US sous la plume d’un expert marocain parce que c’est le signe que l’événement touche largement le reste du monde, qui le prend à son compte comme un facteur de plus d’instabilité et de malveillance ; et qui, d’une certaine façon, pourrait en arriver, selon l’évolution des puissances, à exiger des USA qu’ils exercent leur propre pouvoir d’une manière beaucoup plus stable et responsable, – ou qu’ils se morcellent et cessent d’être les USA enfin ! En effet, ce que nous voyons dans cette déconstructuration  du pouvoir américaniste, c’est qu’il affecte désormais l’intérieur des partis eux-mêmes.

On savait qu’il y avait des forces cachées et regroupées (DeepState, Complexe Militaro-Industriel, etc.), des centres d’intérêts privées (grandes fortunes, conglomérats), des forces bureaucratiques autonomes (services de renseignement, bureaucraties financières et du Trésor) ; on peut y ajouter désormais, à côté de la grande fracture bien connue et parfaitement gérée depuis des décennies des républicains avec leur aile populiste, une parcellisation du parti démocrates avec des affrontements de clans, de “familles“ (comme dans la Mafia), alors qu’il s’agit du parti idéologiquement dominant pour les temps actuels, et qu’on croyait regroupé à cause de cela.

Tout se fractionne de plus en plus, et cela se fait au grand jour, abaissant d’autant l’influence des USA et la considération des pays extérieurs (sauf des stupides Européens, certes) pour la puissance de l’Amérique et pour le prestige qui émanait d’elle. C’est le pouvoir de l’américanisme lui-même qui en pâtit, perdant à la fois sa puissance intrinsèque, son efficacité, surtout sa légitimité.

On voit ainsi la crise du système de l’américanisme évoluer avec une parfaite “coordination” : tous les domaines se trouvent parallèlement fractionnés et affaiblis, pour ne pas dire déconstructurés. On ne trouve pas, comme dans les crises menant à des régimes autoritaires, un transfert des domaines établis, sinon démocratiques, vers un centre de plus en plus puissant, mais bien ce mouvement d’ensemble qui suggère l’idée d’une crise qui touche tout, qui affecte l’ensemble du système, qui tend non pas vers la transformation y compris malveillante, mais vers la destruction et la déconstructuration coordonnée par un but commun d’anéantissement.

 

Mis en ligne le 23 juillet 2024 à 17H00