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595Dans un long article “Le parti de la liquette”, Frédéric Lordon rappelle que l'hyper-capitalisme est plus que jamais le maitre du monde. Ceci non seulement aux Etats-Unis mais en Europe, dont les citoyens pensaient jadis pouvoir échapper à l'oppression imposée par les 1% qui dominent l monde, grâce aux protections sociales et aux droits du travail.
Frédéric Lordon montre que, plus que jamais, ces dominants réussissent à s'acheter la soumission de l'écrasante majorité des citoyens par deux grands moyens: les mirages d'une hyper-consommation prétendue à la portée de tous, la voix des médias dédiés à la dépolitisation et à la fuite dans le rêve.
Tous les citoyens ne sont pas dupes cependant. Ce sont qui sont dévastés, pour reprendre les expressions de Lordon, par « l'annonce du licenciement, les vies en miettes, les familles explosées par les tensions matérielles, la chute dans la rue ». Mais l'idée de se rebeller ne vient pas à ces victimes directes, non plus qu'à la grande majorité des autres condamnés à des vies médiocres. L'idée ne leur vient pas qu'une meilleure répartition de l'accès au pouvoir et aux produits de l'économie pourrait faire disparaître une grande partie de ces maux.
A juste titre, Frédéric Lordon montre que les partis dits de gauche ne feront jamais rien pour changer l'ordre des pouvoirs, car ils sont eux-mêmes achetés par les dominants. Il ne voit d'espoir de changement en profondeur que provenant de l'insurrection des dominés, y compris violentes. Le Système, sans cela, se conservera et se renforcera toujours. Il est impossible de prévoir ce qui adviendrait de telles insurrections. L'essentiel cependant serait qu'elles se produisent.
Nous pensons pour notre part, quitte à être accusés de démobiliser ceux qui refusent radicalement le Système, que de telles insurrections ne se produiront jamais. Ou bien, si elles se produisent ici et là par hasard, elles n'aboutiront à rien de durable, sauf à renforcer les pouvoirs dominants. On objectera que dans le passé certaines révoltes ont été suivies de la mise en difficulté sinon du renversement des régimes établis. Mais les historiens savent bien que ces révoltes, telles l'exemple souvent cité de la prise de la Bastille en France, traduisaient seulement l'apparition de nouvelles catégories de dominants, en l'espèce la classe bourgeoise, remplaçant celles qui n'avaient pas su se renouveler.
Un exemple récents de telles insurrections populaires plus ou moins spontanées, fut le mouvement « Occupy Wall Street » à New York, suivi dans divers pays de mouvements analogues, ceux des Indignés de toutes nature. Un article récent publié par le site alternatif Counterpunch montre bien les diverses raisons pour lesquelles ces mouvements ont échoué: notamment l'absence de cohésion entre les organisateurs, l'incapacité à proposer des solutions de remplacement qui ne seraient pas d'une façon ou d'une autre la reconduction de celles contre lesquelles s'était faite la mobilisation -sans mentionner la peur du désordre partout répandue, même chez ceux qui n'ont rien à perdre. Par contre l'article se borne à évoquer, sans insister, la raison pour laquelle ces mouvements ne pourraient pas aboutir, la répression qu'ils provoqueraient.
Or il s'agit pour nous d'une raison majeure. Les Pouvoirs dominants possèdent la force policière, juridictionnelle et militaire. Ils sont seuls à le faire. Ils n'hésitent pas à s'en servir pour éliminer dans l'oeuf toute oppositions susceptibles de devenir dangereuses pour eux. Avec le progrès technique et scientifique, ces moyens ne cesseront de se perfectionner, pouvant aller jusqu'à un véritable contrôle des cerveaux, dans un sens voulu pour le renforcement des inégalités. Les oppositions, si certaines se font encore jour, seront de plus en plus verbales, provenant elles-mêmes d'un nombre de plus en plus réduit de citoyens.
En bonne logique systémique, on fera valoir qu'il n'existe pas dans l'univers d'organisations pérennes, quelles qu'elles soient. Toutes, à un moment ou un autre, finissent pas disparaître et ce de façon inattendue. Soit. Disons seulement alors que pour notre part, nous ne voyons absolument pas comment l'hypercapitalisme et son volet financier le néolibéralisme pourront un jour disparaître, en quelque partie du monde que ce soit. Les très probables évolutions catastrophiques découlant du réchauffement climatique et de la destruction des écosystèmes renforceront encore leur emprise. Les 1% de dominants seront en effet les derniers à en souffrir.
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