Une question historique devenue si actuelle

Faits et commentaires

   Forum

Il n'y a pas de commentaires associés a cet article. Vous pouvez réagir.

   Imprimer

 570

Une question historique devenue si actuelle


4 juillet 2003 — Nous signalons un texte d’un grand intérêt, paraissant dans The Nation du 21 juillet 2003, de Patrick Seale, qui explore le thème de l’alliance américano-israélienne jusqu’à aujourd’hui, comme cause principale de la guerre contre l’Irak. (Pour plus de facilité, ce texte figure dans notre rubrique “Nos choix commentés”.)

L’approche de Seale concerne une approche à la fois géopolitique et stratégique de cette question, avec une forte implication psychologique qu’on retrouve aujourd’hui, qui est cette obsession de la sécurité tant en Israël qu’aux États-Unis (pour des raisons et dans des dimensions différentes). Le poids et l’importance de l’activisme des lobbies, avec l’influence des néo-conservateurs aujourd’hui sont évidemment mis en question. Mais ce dernier point a souvent été développé et c’est la perspective historique qui a ici un certain intérêt, avec sa réelle nouveauté.

L’intérêt de ce texte est bien entendu d’apporter une forte documentation à la question ancienne, posée aujourd’hui dans des termes nouveaux alors que la stratégie dont les puissantes prémisses historiques y sont décrites arrive à son terme avec la destruction du régime de Saddam Hussein en Irak. La situation actuelle est, dans un sens, à la lumière de cette stratégie, une sorte de mise à nu pour la configuration stratégique de la région ; mais elle ne peut être évidemment considérée comme une fin, ne serait-ce que parce que l’Irak est dans l’état où il est, et qu’il s’agit là d’un nouveau foyer de déstabilisation d’une force considérable pour la région, — c’est-à-dire la transformation du problème initial de la sécurité qui semblerait résolu, en un nouveau problème avec des données nouvelles et particulièrement incontrôlables.

C’est la question que pose ce texte dans un de ses derniers paragraphes : à quoi mène de conduire la résolution du problème de la sécurité par des moyens de force et de guerre ? La perspective historique rappelée ici en quelques lignes, nous rappelant également qu’il y eut toujours une alternative pour une “autre politique” (l’arrangement au lieu de la force) qui fut systématiquement écartée, nous donne l’ampleur qu’il faut.


« The nagging question remains as to what the special friendship has achieved. Have the wars, security intrigues and political showdowns of the past decades really served Israel's interest? A student of the region cannot but ponder these questions: What if the dovish Moshe Sharett had prevailed over the hawkish Ben-Gurion in the 1950s? Sharett sought coexistence with the Arabs, whereas Ben-Gurion's policy was to dominate them by naked military force, with the aid of a great-power patron--ideas that have shaped Israeli thinking ever since. What if the occupied territories had truly been traded for peace after 1967 (as Ben-Gurion himself advised, with rare prescience), or after 1973, or after the Madrid conference of 1991, or even after the Oslo Accords of 1993? Would it not have spared Israelis and Palestinians the pain of the intifada, with its miserable legacy of hatred and broken lives? Has the triumphalist dream of a “Greater Israel” (which James Baker, for one, warned Israel against) proved anything other than a hideous nightmare, infecting Israeli society with a poisonous dose of fascism? The US-Israel alliance is officially and routinely celebrated in both countries, but its legacy is troubling. Without it, Israel might not have succumbed to the madness of invading Lebanon and staying there twenty-two years; or to the senseless brutality of its treatment of the Palestinians; or to the shortsighted folly of settling 400,000 Jews in Jerusalem and the West Bank, who are now able to hold successive Israeli governments to ransom. »


L’on voit également combien cette question régionale débouche sur la question générale de notre époque, posée de façon dramatique par l’administration GW Bush et sa politique. Elle concerne la forme à donner aux relations internationales ; elle concerne le fameux débat, résumé par l’idée de l’“unipolarité” contre la “multipolarité”.

Ce débat est rendu très vif aujourd’hui, voire vital, parce que l’“unipolarité” est considérée de facto, d’abord au travers d’une politique privilégiant la sécurité absolue, c’est-à-dire par tous les moyens et particulièrement (bientôt systématiquement) les moyens militaires, de préférence à la recherche de l’arrangement, du compromis et de la bonne entente. Il apparaît évident que ce fut le cas dans l’évolution politique au Moyen-Orient, par le biais des relations USA-Israël à partir de 1960.