Une secrétaire d’Etat maternelle (et amoureuse?) pour protéger le Président des réalités du monde

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Quel est le rôle de Condi Rice auprès du président américain ? Il faut d’abord le considérer d’un point de vue personnel, estime Sidney Blumenthal, dans son article de ce jour dans le Guardian, qu’il consacre aux relations entre le président et sa secrétaire d’Etat.

« Bush's relationship with Rice is perhaps the strangest of his many strange relationships. The mysterious attachment involves complex transactions of noblesse oblige and deference, ignorance and adulation, vulnerability and sweet talk. Like his other female enablers — Karen Hughes, his political image-maker and undersecretary of state for public diplomacy, and Harriet Miers, his legal counsel — Rice is ferociously protective. She shields him from worst-case scenarios, telling him to ignore criticism, and showers him with flattery that he is a world-historical colossus. »

Le commentateur américain trace un portrait d’un président pas loin de vivre sous la coupe amoureuse et maternelle de ses sentiments pour Rice. Quoi qu’il en soit de l’exploration du cas psychanalytique, les effets sur la politique sont considérables. Rice est sans doute, selon le portrait qu’en fait Blumenthal, une des principales architectes, — volontaire ou pas et dans quelle mesure, qu’importe ? — du virtualisme du président.

Voici ce qu’en dit Blumenthal :

« This May, as the situation in Iraq drastically worsened, Rice told senior staff that she wants no more reporting from the embassies. She announced in a meeting that people write memos only for each other, and that no one else reads them. She said she wouldn't read them. Instead of writing reports, the diplomats should “sell America”, she insisted. “We are salesmen for America!”

» On Tuesday, kicking off the mid-term elections campaign, Bush delivered a speech that cited Bin Laden's screeds, Lenin's What Is To Be Done? and Hitler's Mein Kampf, and promised “complete victory”. Rice contributed her own comparison of the “war on terror” to the American civil war. “I'm sure there are people who thought it was a mistake to fight the civil war to its end and to insist that the emancipation of slaves would hold,” she said.

» But the more delirious the rhetoric, the more hollow the policy. “There is no plan for Iraq,” a senior national security official with the highest intelligence clearance and access to the relevant memos told me. “There is no plan.” »

D’une façon très caractéristique de la nature psychanalytique des rapports, l’importance de Rice pour “protéger” le président n’implique nullement qu’elle l’influence pour sa politique. Récemment (sur le Liban), les avis modérateurs de Rice ont été écartés. D’une façon plus générale, c’est Rice qui part d’une position modérée et se rallie à l’extrémisme d’un GW Bush toujours influencé par cette tendance. Là aussi, du côté de GW Bush, l’extrémisme est d’abord le fait du caractère plus que du jugement ; l’influence (notamment des néo-conservateurs) est d’autant plus aisée. Même si elle n’est pas nécessairement d’accord, Rice “protège” le Président des conséquences de ses excès, notamment en lui dissimulant ou en transformant pour lui les effets de sa politique. Il s’agit effectivement d’un rapport psychologique, — sorte de mère amoureuse de substitution, — et nullement conceptuel.


Mis en ligne le 7 septembre 2006 à 05H24