USA, la sécession saucissonnée

Brèves de crise

   Forum

Un commentaire est associé à cet article. Vous pouvez le consulter et réagir à votre tour.

   Imprimer

 4327

USA, la sécession saucissonnée

Parmi les mouvements qui tendent à déconstruire les USA d’un pays fédéral homogène en une entité beaucoup plus diversifiée sinon déstructurée, se trouvent des initiatives au niveau de comtés dont la majorité est en désaccord radical avec l’orientation politique que suit l’État auquel ils appartiennent.

C’est le cas dans l’Oregon, État nettement progressiste-sociétal, où un mouvement nommé Greater Idaho tente de réunir sur ses pétitions un nombre de voix suffisant pour inscrire parmi les questions posées aux électeurs de novembre prochain celle du rattachement de certains comtés du Sud-Est à l’Idaho voisin, nettement plus conservateur. 

Il s’agit d’un mouvement de déconstruction suivant les oppositions politiques radicales, plus que d’une sécession, une sorte de “nettoyage idéologique” (comme l’on dit “nettoyage ethnique”) volontaire pour regrouper les conservateurs entre eux et les progressistes-sociétaux entre eux. Un mouvement de même esprit mais d’une technique différente existe en Californie, avec des comtés comme le Orange County, dont l’orientation politico-idéologique diffère radicalement de la majorité californienne, et qui veulent faire sécession de la Californie. Enfin, il y a des déplacements de population marquants en ce moment en fonction des orientations politiques, comme on l’a  déjà signalé  à diverses reprises :

« Il y a même, signale Woodard, une sorte de processus d’auto-nettoyage ethnique (si l’on tient l’identité culturelle comme fondement des regroupements dits-ethniques, ce qui nous semble plus approfondi et pertinent que les raisonnements purement ethniques). A propos des déplacements de population dans un pays où la mobilité des citoyens est légendaire, Woodard remarque que “les gens choisissent de déménager dans des endroits où ils s’identifient aux valeurs qui y sont privilégiées. Les minorités rouges [républicaines] vont au Sud et les minorités bleues [démocrates] vont au Nord pour devenir majoritaires. C’est pourquoi les États bleus deviennent plus bleus et les États rouges deviennent plus rouges, et que les États neutres se réduisent de plus en plus. »

On comprend bien entendu l’importance capitale de tous ces mouvements dans un pays où une centralisation fédérale représente la défense des intérêts des oligarchies et du complexe militaro-industriel et financier, alors que la crise intérieure du pouvoir radicalise les oppositions et s’opérationnalise dans l’évolution déconstructrice de la situation géographico-idéologique/démographique qui constitue un défi de plus en plus radical à la structure centralisée du pouvoir. La déconstruction géographique de l’unité des Etats-Unis, même si elle se fait à partir d’impulsions venues des affrontements au sein du “centre”, constitue évidemment le plus grand danger possible pour la puissance du “centre”. 

La nouvelle concernant l’Oregon et le Greater Idaho est publié le 19 février 2020 dans USA Today.

« Frustrés par les politiques libérales, certains habitants de l'Oregon ont demandé à quitter l'État - en déplaçant la frontière avec l'Idaho vers l'ouest.

» Le mouvement a obtenu l'approbation initiale de deux comtés et vise à obtenir suffisamment de signatures pour mettre la proposition aux voix en novembre, selon le groupe appelé Greater Idaho. »

Si le groupe réussit, les électeurs du sud-est de l'Oregon pourraient avoir à répondre à la question de savoir si leur comté devrait faire partie de l'Idaho selon un redécoupage de la frontière de cet État.

« “Les comtés ruraux sont de plus en plus scandalisés par les lois émanant de l'assemblée législative de l'Oregon qui menacent nos moyens de subsistance, nos industries, notre portefeuille, nos droits aux armes à feu et nos valeurs”, a déclaré Mike McCarter, l’un des principaux pétitionnaires, dans un communiqué de presse. “Nous avons essayé de voter le retrait de ces législateurs, mais l’Oregon rural est en infériorité numérique et nos voix sont maintenant ignorées. C'est notre dernier recours”. »

 

Mis en ligne le 20 février 2020 à 17H15