USA “out of control

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Où est le pouvoir aujourd’hui? (Le pouvoir US, s'entend.) Dans la nuit de jeudi, avant de clore la session présente, le Sénat a passé une motion imposant des sanctions contre l’Iran hors de tout contrôle de l’administration Obama, et contre les voeux de celle-ci. Ali Gharib, de Antiwar.com, publie un article sur cet événement, le 30 janvier 2010.

«In a surprisingly swift move on Thursday night that could have wide-ranging implications, the U.S. Senate passed a bill containing broad unilateral sanctions to punish foreign companies that export gasoline to Iran or help expand its domestic refinery capabilities.

»The voice vote came at the eleventh hour before the chamber recessed so legislators could go home to campaign. The bill cannot come before the president to be signed into law until a conference procedure combines it with a similar House bill, the Iran Refined Petroleum Sanctions Act (IRPSA), passed in October.

»The Senate move reveals an administration losing control of even its own party in foreign policy dealings, as U.S. President Barack Obama has tried to maintain engagement with Iran aimed at curbing its nuclear program, which the Islamic Republic insists is for peaceful purposes.

»Along with scores of Democrats, who favored the bill over the administration’s objections, the effort was supported by Iran hawks including Republican co-sponsor John Kyl and neoconservative independent Joe Lieberman, and was characterized by Senate Minority Leader Mitch McConnell as a shot at Obama. “If the Obama administration will not take action against this regime, then Congress must,” McConnell said.

»The administration had raised its issues with the bill in a December letter from Deputy Secretary of State Jim Steinberg to Sen. John Kerry, chairman of the Senate Foreign Relations Committee, complaining that the bill limited the president’s flexibility.»

Notre commentaire

@PAYANT Importe moins ici le fait lui-même d’une loi votée à l’encontre de l’Iran, comme une sanction bien entendu, que le constat de l’absence de contrôle de l’administration sur le Congrès dans ce cas, y compris sur les démocrates, concernant une matière essentielle de la politique extérieure. On notera particulièrement le dernier paragraphe de la citation, indiquant que l’administration avait demandé à sa majorité démocrate de ne pas voter cette loi, qui interférait sur sa politique, et le résultat piteux de cette intervention.

“Hors de contrôle” (“out of control”), voilà bien l’expression qui est dans tous les esprits. C’est la même remarque qui vient aux observateurs et officiels européens concernant, par exemple, la politique russe de l’administration Obama, dans le contexte que nous avons rapporté dans un récent Bloc-Notes (le 27 janvier 2010). De quelques façon que ce soit, et quelles que soient les forces qui interfèrent (ici le Congrès, là les Russes), on retrouve cette situation où l’administration Obama se trouve privée du contrôle de sa politique extérieure dans une mesure, pour ce cas, rarement vue jusqu’ici dans le fonctionnement de la politique extérieure. (On n’en voit l’équivalent que dans la période 1974-1975, lorsque l’exécutif se trouvait dans les affres du scandale Watergate, avec la présidence – que ce soit Nixon sur le point de démissionner, que ce soit Ford lui succédant dans des conditions dramatiques – et où le Congrès interférait directement, dans des matières essentielles de la politique extérieure, comme par exemple en interdisant toute aide US au Sud-Vietnam envahi par le Nord. Encore, pendant cette période, certains des pays étrangers concernés par cette politique, l’URSS notamment, ne profitaient nullement de cette affaiblissement, trouvant leurs intérêts dans la recherche d’une stabilisation de leurs rapports avec les USA. Une autre période équivalente est celle d’entre novembre 1994 et l’automne 1995, où l’administration Clinton fut complètement assommée par la victoire républicaine de novembre 1994 et plongea elle-même sa diplomatie dans la plus complète paralysie.)

Cette situation est le produit conjoncturel direct de l’attitude et de la politique de l’administration Obama. La recherche du compromis, la recherche d’un soutien bipartisan, les hésitations dans des initiatives nouvelles éventuellement porteuses de perspectives intéressants, l’acquiescement en sens contraire à certaines politiques de force et d’expansionnisme, celles qui relèvent de la “politique de l’idéologie et de l’instinct”, ont conduit à une confusion, à un affaiblissement dramatiques de cette politique extérieure. Toutes les forces d’interférence sont alors conduites à se précipiter dans les occasions qui leur sont ainsi offertes.

Bien entendu, le cas conjoncturel rejoint le cas structurel plus général de l’administration Obama prisonnière d’une politique générale sans véritable direction, “prisonnière” d’un système que plus personne ne contrôle (de “perte de contrôle” en “perte de contrôle”), comme on le voit dans notre F&C de ce 30 janvier 2010, et dont tous les centres de pouvoir profitent à leur tour. Evidemment, la chose est accompagnée de la plus complète irresponsabilité. Le Sénat qui décide pompeusement de mesures de rétorsion contre l’Iran ne montre pas la moindre responsabilité pour les conséquences de cette action, qu’il ne mesure d’ailleurs pas et dont il n’a cure. C’est le spectacle de la déliquescence générale du système, dans la pompe et les ors du Congrès qui continue à se prendre pour l’héritier spirituel du Sénat romain.

Pour le cas iranien, on imagine les conséquences. La brave Hillary Clinton, qui parle d’“isoler” la Chine à cause des graves questions des droits de l’homme, ferait bien de surmonter sa fatigue et d’observer sa propre politique extérieure. De tels actes vont conduire à un “isolement” assuré, celui des USA, dont la politique extérieure a de moins en moins de signification et de crédit pour ses partenaires et ses adversaires.


Mis en ligne le 30 janvier 2010 à 12H23