Venez à l’ambassade US, les Iraniens seront là

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A la première puis à la seconde lecture, il nous semblerait que cet article du New York Times du 2 juin 2009 a une histoire intéressante. Il est daté de San Salvador, ce qui n’est pas précisément un endroit où l’on apprend des nouvelles de l’Iran et des relations entre les USA et l’Iran, avec en arrière-plan pressant la question nucléaire qui concerne la situation au Moyen-Orient et la très difficile problématique des relations USA-Israël.

Son sujet, manifestement, ce sont les relations des USA avec les pays d’Amérique Latine, au moment où Hillary Clinton est en visite dans plusieurs pays de la région. Mais, après l’avoir lu, il faut analyser l’article en le remontant, de la fin vers le début (vieille technique journalistique, qui vous en dit beaucoup sur les intentions de l’auteur, l’importance qu’il accorde aux informations qu’il donne, etc.); on parle successivement des problèmes qu’ont les USA à conserver leur influence dans l’Amérique du Sud, puis des concurrences pour cette influence d’autres pays, notamment la Chine mais surtout l’Iran, pour aboutir à l’entame de l’article qui n’a rien, mais alors rien à voir avec l’Amérique latine, et tout avec l’Iran, avec les relations des USA avec l’Iran, sans aucun doute hors du contexte de l’Amérique latine, etc. Curieuse application de la technique signalée ci-dessus, qui dénote une certaine improvisation mais qui a une signification.

Voici ce passage (début de l’article) qui concerne effectivement les relations des USA avec l’Iran, avec un nouveau “geste” symbolique pour rapprocher l’Iran des USA: inviter les Iraniens dans les diverses ambassades US du monde pour les réceptions du 4 juillet… (Ce n’est qu’an cinquième paragraphe qu’on atteint le véritable thème de l’article, Hillary Clinton en Amérique latine.)

«Having sent the Iranian people a video greeting on their New Year, President Obama is now inviting them to help celebrate a quintessentially American holiday, the Fourth of July.

»Last Friday, the State Department sent a cable to its embassies and consulates around the world notifying them that “they may invite representatives from the government of Iran” to their Independence Day celebrations — annual receptions that typically feature hot dogs, red-white-and-blue bunting and some perfunctory remarks about the founding fathers.

»Administration officials characterized the move as another in a series of American overtures to Iran. The United States has not had relations with Iran since the American Embassy in Tehran was seized by protesters in 1979; the country’s diplomats have not been formally invited to American events since then. “It is another way of saying we are not putting barriers in the way of communicating,” said one administration official. “It is another way of signaling that there is an opportunity that should not be wasted.”

»A second official said the ban no longer made sense, at a time when the United States was actively engaging with Iranian officials elsewhere. In March, the administration’s special representative for Afghanistan and Pakistan, Richard C. Holbrooke, chatted with Iran’s deputy foreign minister, Mohammad Mehdi Akhondzadeh, at a conference in The Hague.

»The authorization to issue the invitations was disclosed by a senior State Department official on the eve of a three-day visit to Latin America by Secretary of State Hillary Rodham Clinton. The officials spoke on condition of anonymity because the new policy was not public.»

La construction très inhabituelle de cet article, entamant le texte sur une nouvelle qui n’a guère de rapport avec le sujet de l’article, semble montrer l’importance que le journaliste a voulu donner à cette nouvelle, qui lui est certainement parvenue au dernier instant, qui lui a été manifestement communiquée d’une façon impromptue et appuyée par des fonctionnaires du département d’Etat. Il y avait donc, de la part du département d’Etat, une volonté arrêtée de faire connaître la nouvelle le plus rapidement possible, une fois arrêtée la décision de la rendre publique. Voilà pour les conditions qui, selon nous accompagnent la publication de la nouvelle; il y a donc une intention de mettre la nouvelle en exergue, qui implique qu'on la juge importante.

Il s’agit d’une initiative qui rappelle celle d’un Obama souhaitant ses bons vœux à l’Iran pour le nouvel an iranien, le 20 mars dernier, qui se place dans cette logique symbolique (une invitation aux représentants de l’Iran dans les différentes capitales du monde à participer à la célébration de la fête nationale des USA) destinée à montrer par les symboles nationaux la volonté d’arrangement de l'administration USA avec l'Iran. D’autre part, l’annonce publique de la chose, qui suit une décision très récente du département d’Etat à ce propos, intervient également pour marquer dans la campagne présidentielle iranienne (élection le 12 juin) cette attitude d’accommodement des USA, et elle suit les déclarations de l’adversaire de l’actuel président iranien selon lesquelles il a l’intention, s’il est élu, d’ouvrir un dialogue ave les USA.

D’une façon plus générale, on peut conclure qu’il s’agit d’un signe de plus de l’administration Obama du sérieux et de l’urgence de sa nouvelle politique iranienne. Le paradoxe est qu’on sera amené à comparer cette attitude arrangeante, ouverte et qu’on peut estimer comme marquée d’une intention de respect de l’Iran en tant qu’entité culturelle et en tant que nation, avec l’attitude vis-à-vis d’Israël que certains Israéliens jugent, – non sans raison de leur point de vue et par rapport à l’attitude courante des USA, – comme une incursion dans les affaires intérieures de ce pays. Ce paradoxe est la conséquence d’années, si pas de décennies de politique complètement distordues en faveur de thèses, non seulement israéliennes, mais, surtout, entièrement basées sur la seule logique de la force militaire.


Mis en ligne le 03 juin 2009 à 11H24