Vraiment, est-ce le “bon choix”?

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La question de “l’héritage” de l’administration GW Bush pèse de plus en plus lourdement sur l’administration Obama, y compris dans des décisions qui peuvent apparaître à première vue prises pour modifier les situations créées précédemment. Après les remous suscités par le limogeage du général McKiernan, chef des forces US et de l’OTAN en Afghanistan, il y a ceux qui surgissent dans le sillage de la nomination de son successeur, la général McChrystal. Officiellement, cette nomination correspond à la nouvelle orientation qu’Obama et Gates veulent donner aux opérations en Afghanistan. Mais il apparaît de plus en plus clairement que la personnalité, l’expérience et la carrière de McChrystal devraient conduire plutôt à une aggravation des conditions de cette guerre.

Plusieurs articles d’auteurs ou de sources confirmés (rien à voir avec la presse -Pravda et “de référence”, qui se contente des assurances des communiqués du Pentagone) développent des appréciations très voisines sur McChrystal. Sa nomination apparaît désormais de plus en plus étrange, par rapport à l’une des intentions de l’administration Obama qui devrait être, on l’espère, de réduire les pertes civiles et les heurts à cause d’actions illégales US.

• Seymour Hersh (du New Yorker) connaît bien McChrystal. Il relie l'activité et la carrière de cet officier aux unités diverses des forces spéciales US formées sous l'administration Bush, spécialisées dans la liquidation de terroristes, ou présumées-supposées terroristes, tout cela sous la supervision empressée du vice-président Dick Cheney. Le site iranien PressTV.Ir rapporte, le 15 mai 2007, ces déclarations de Hersh, faites dans une interview à Gulf.News.

«Seymour Hersh says that Dick Cheney headed a secret assassination wing and the head of the wing has just been named as the new commander in Afghanistan. In an interview with GulfNews on May 12, 2009 Pulitzer prize-winning American investigative journalist, Seymour Hersh, said that there is a special unit called the Joint Special Operations Command (JSOC) that does high-value targeting of men that are known to be involved in anti-American activities, or are believed to be planning such activities.

»According to Hersh, the Joint Special Operations Command (JSOC) was headed by former US vice president Dick Cheney and the former head of JSOC, Lieutenant General Stanley McChrystal who has just been named the new commander in charge of the war in Afghanistan.»

• Sur Atimes.com, le 14 mai 2009, Gareth Porter trace le portrait d’un McChrystal proche de Rumsfeld, qui appliqua les tactiques expéditives de l’ancien secrétaire à la défense de liquidations et d’attaques clandestines, d’actions spéciales illégales, etc., sans aucune restriction géographique.

«The choice of Lieutenant General Stanley McChrystal to become the new United States commander in Afghanistan has been hailed by Defense Secretary Robert Gates and national news media as ushering in a new unconventional approach to counter-insurgency. But McChrystal's background sends a very different message from the one claimed by Gates and the news media. His long specialization in counter-terrorism operations suggests an officer who is likely to have more interest in targeted killings than in the kind of politically sensitive counter-insurgency program that the Barack Obama administration has said it intends to carry out. […]

»It was under McChrystal's command, in fact, that JSOC shifted away from the very mission of training indigenous military units in counter-insurgency operations that had been a core mission of special operations forces. McChrystal spent an unusual five years as commander of JSOC, because he had become a close friend of then-secretary of defense Donald Rumsfeld. Rumsfeld came to view JSOC as his counter to the covert operations capabilities of the Central Intelligence Agency, which he hated and distrusted, and Rumsfeld used JSOC to capture or kill high-value enemy leaders, including Saddam Hussein and al-Qaeda's top leader in Iraq, Abu Musab al-Zarqawi.

»In 2005, JSOC's parent command, the Special Operations Command (SOCOM), was directed by Rumsfeld to “plan, synchronize and, as directed, conduct global operations against terrorist networks in coordination with other combatant commanders”. That directive has generally been regarded as granting SOCOM the authority to carry out actions unilaterally anywhere on the globe.»

• Sur Online Journal, en date du 15 mai 2009, on trouve d’autres précisions du même ordre sur McChrystal, notamment sur ses interventions en Irak dans le “camp Nama”, un centre de torture encore plus spécialisé et actif que Guantanamo. Des organisations humanitaires sont citées et, d’une façon générale, il semble qu’on puisse ranger McChrystal dans la catégorie très classique des “criminels de guerre” («Suspected war criminal to lead U.S. forces in Afghanistan»).

«On July 22 2006, Human Rights Watch issued a report titled “No blood, no foul” about American torture practices at three facilities in Iraq. One of them was Camp Nama, which was operated by the Joint Special Operations Command (JSOC), under the direction of then Major General Stanley McChrystal. McChrystal was officially based at Fort Bragg in North Carolina, but he was a frequent visitor to Camp Nama and other Special Forces bases in Iraq and Afghanistan where forces under his command were based.

»An interrogator at Camp Nama described locking prisoners in shipping containers for 24 hours at a time in extreme heat; exposing them to extreme cold with periodic soaking in cold water; bombardment with bright lights and loud music; sleep deprivation; and severe beatings. When he and other interrogators went to the colonel in charge and expressed concern that this kind of treatment was not legal, and that they might be investigated by the military’s Criminal Investigation Division or the International Committee of the Red Cross, the colonel told them he had “this directly from General McChrystal and the Pentagon that there’s no way that the Red Cross could get in.”»

Il est difficile, effectivement, de ne pas placer la nomination de McChrystal dans la même logique que la décision à propos de Guantanamo, c’est-à-dire une orientation vers des actions de contre-terrorisme et de répression poursuivant le travail de Cheney-Rumsfeld et plaçant les USA au niveau des pays grands fournisseurs de criminels de guerre (impunis pour l’instant, dans le cas US, n’oublions pas que nous parlons d’une démocratie). L’organe iranien cité présente effectivement cette interprétation: «The decision by Obama's administration to appoint General McChrystal as the new commander in charge of the war in Afghanistan and retaining the military commission for the US war-on-terror detainees held in the Guantanamo Bay prison are the latest examples of the new US administration walking in Bush's foot steps with regards to torture and denial of habeas corpus.»

Selon la logique des successions politiques et des déclarations nombreuses dans ce sens, McChrystal devrait aller en Afghanistan pour inaugurer des conceptions dites du soft power, dont les démocrates font des gorges chaudes. Au contraire, c’est l’homme qui, avec le blanc-seing de Rumsfeld, a transformé l’instrument du soft power de la contre-guérilla (une des activités des forces spéciales, comprenant notamment des activités civiles de reconstruction) en contre-terrorisme à la sauce US, qui implique liquidations, tortures, interventions illégales, etc., – bref, du hard power par excellence. Est-ce la nouvelle méthode US, le “fresh thinking” annoncé par Gates?

D’autres points intéressants concernent les réactions des autres acteurs du conflit en Afghanistan. D’abord, les réactions des pays de l’OTAN, qui vont voir leurs forces placées sous le commandement d’un McChrystal, éventuellement engagées dans des opérations extrêmement délicates pour les bonnes manières et les discours à la gloire des droits de l’homme et de la femme en Afghanistan. Ensuite, les réactions de Karzaï et des forces afghanes en général, qui vont devoir affronter des situations de plus en plus déstabilisantes par rapport à leurs “alliés” occidentaux. Désormais, comme le rapporte indirectement Porther, il semble que la lutte contre-terroriste, contre Al-Qaïda, soit promise à prendre le dessus sur la lutte anti-guérilla, en principe contre les talibans.

«W Patrick Lang, formerly the defense intelligence officer for the Middle East, suggested in his blog on Monday that the McChrystal nomination “sounds like a paradigm shift in which Obama's policy of destroying the leadership of al-Qaeda in Afghanistan and Pakistan takes priority over everything else”. The choice of McChrystal certainly appears to signal the administration's readiness to continue special operations forces' raids and airstrikes that are generating growing opposition by Afghans to the US military presence.»


Mis en ligne le 16 mai 2009 à 18H34