William Pfaff et la question de la signification de l’Histoire

Bloc-Notes

   Forum

Il y a 3 commentaires associés à cet article. Vous pouvez les consulter et réagir à votre tour.

   Imprimer

 1505

William Pfaff et la question de la signification de l’Histoire

William Pfaff est l’un des vraiment très rares chroniqueurs internationaux dont on peut dire qu’il est aussi (mais nous dirions: “d’abord”) un historien, et qu’il a de l’Histoire une vision proche du transcendantalisme. Régulièrement, il publie une chronique, très courte comme toutes ses chroniques, où il fixe rapidement mais d’une façon très substantielle, les données et l’état d’un problème fondamental. Lisez donc sa chronique du 20 juillet, sur son site personnel (WilliamPfaff.com), à propos de la “signification de l’Histoire” («  Whose ‘Meaning of History’? » : nous employons le terme de “signification” pour éviter celui de “sens” qui pourrait convenir dans une de ses définitions, mais qui a acquis une réelle ambiguïté à cause de l’usage).

Pfaff est croyant. Il pense que l’Histoire a une signification et un sens par conséquent, qui lui sont donnés par Dieu. Il observe que la grande bataille de la modernité, — depuis la nouvelle que “Dieu est mort” — est celle d’une imposture : comment prendre la place de Dieu pour prétendre conduire l’Histoire et lui donner un sens ? Sans doute est-ce l’accomplissement ultime de la vanité humaine.

L’intérêt de sa chronique est de situer l’histoire des deux derniers siècles à la lumière de cette interrogation, avec les divers protagonistes, ou candidats à la reprise du rôle de Dieu, — la Raison, le Progrès, le marxisme, le fascisme… Cette brève chronique a la vertu de droitement remettre à sa place l’aventure bushiste (et, à notre sens qui n’est pas nécessairement celui de Pfaff, peut-être bien l’aventure américaniste elle-même ?), — c’est-à-dire une imposture de plus de Dieu par l’homme, et nullement, comme elle prétend être, une politique inspirée et guidée par Dieu.

Après avoir rapidement rappelé la longue cohorte de calamités historiques qui peuplent notre histoire depuis l’avènement de la Raison (et de l’Homme à la place de Dieu par conséquent), Pfaff poursuit :

« This is the recent record of human progress through reason; although some would object that it is no worse than much that preceded it. But the age of reason was supposed to be better. Reason and science were supposed to move steadily towards solution of the great problems of history.

» Instead, post-Enlightenment Europe had recourse to secular philosophies of history, or “stories” of why man exists, to substitute for religion.

» The latest of these to gain international significance was, of course, the Bush “freedom doctrine,” saying that everyone everywhere wants American-style democracy, and that when they have it, history will have reached its goal (or the world will come to an end, the religious interpretation of Bush’s foreign policy made by some of his — and Israel’s — Evangelical Protestant supporters).

» The Bush doctrine is a naïve version of the most important of the post-Enlightenment stories about history. Marxism was a secular religion in the guise of a scientific interpretation of history, finding in history a “story” of class struggles that would eventually produce the perfection of human society, a secular heaven on earth. It took nearly a century for this belief to collapse of its own untruth, and because of the cruelty and inhumanity of the methods used to impose it. »

Pfaff place donc justement l’aventure bushiste dans la logique séculière à l’oeuvre depuis les Lumières. (Ce pourquoi bien des intellectuels européens ont tant de difficultés à se situer vis-à-vis d’une politique belliciste qu’ils devraient pourtant condamner sans une seule hésitation.) Il conclut :

« These undoubtedly will not be the last secular religions that will appear in the guise of political ideologies or world-historical schemes. Such are needed to mobilize people for struggle — and as we are plausibly told by Washington, the world is only at the start of the “long war” against Evil (itself a theological reinterpretation of a political effort to control the Middle East).

» As for my own view, I do not think that God is dead, and I think that only he knows the meaning of history. The problems arise when men and women try to substitute their own for the divine intelligence — an endeavor which can be relied upon to continue, to the general misfortune. »


Mis en ligne le 26 juillet 2006 à 08H52