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750Nous en venons à un article que nous avions manqué in illo tempore et dont nous avons retrouvé la trace aujourd’hui, mais qui conserve tout son intérêt. Il s’agit de l’article du Daily Telegraph du 20 janvier sur une suite américaine possible du scandale Yamamah. Cette perspective inquiétante pour BAE s’ajoute à celle désormais annoncée pour mars (supplément d’enquête) par l’OCDE, insatisfaite des explications données par les Britanniques de l’arrêt brutal de l’enquête sur le scandale.
Le Telegraph ouvre donc une perspective américaine pour le scandale jusqu’alors officiellement anglo-saoudien. Le quotidien anglais a enquêté et il a découvert que l’on soupçonnait, à Washington, que des paiements importants et illicites avaient été faits par BAE sur le territoire US dans le cadre de Yamamah. Il s’agissait de régaler quelques importants Saoudiens lors de séjours aux USA. La note, pour les six derniers mois de l’année 2001 s’élèverait à un respectable £1.1 million. L’article donne le détail des séjours luxueux et dispendieux. (Il nous donne aussi, par le biais d’une déclaration d’une source proche de BAE qui garde vertueusement l’anonymat, le détail qui nous rassure en même temps qu’il nous réchauffe le cœur, de la passion pour l’éthique qui embrase le cœur du CEO de BAE, Mike Turner : «Mike Turner, the chief executive of BAE Systems, was “passionate in his belief that we should all operate to the highest ethical standards,” the source added.»)
L’affaire intéresse à ce point les Américains qu’il est question de l’intervention de la Chambre des Représentants en plus du département de la justice.
«American prosecutors have already taken an interest in the case. Department of Justice officials discussed the matter with counterparts from the SFO twice last year.
»Experts believe the DoJ could have jurisdiction via America's Foreign and Corrupt Practices Act, under which BAE Systems has been operating since 1999. This week it emerged that the House of Representatives may call senior figures at BAE Systems for hearings on Capitol Hill.
»A senior congressional source told The Daily Telegraph there was “at least a 60 per cent chance” the House of Representatives armed services committee would conduct hearings on the matter.»
Progressons encore dans l’article pour rencontrer un détail encore plus intéressant. C’est la première fois, depuis l’arrêt de l’enquête sur le scandale, que nous voyons un lien publiquement établi entre BAE, le scandale Yamamah et l’engagement britannique dans le JSF. L’engagement de BAE dans le programme JSF (en 2001) s’est accompagné d’un engagement de la société britannique, à l’insistance des Américains, de respecter des règles anti-corruption spécifiques, — et cet engagement explique notamment l’intérêt très grand des USA pour les suites hôtelières et américaines du scandale. (Les Américains vont enquêter pour trouver d’éventuels faits de corruption datant d’après 2001, pour dépasser les cinq années de restriction : «However prosecutors may have to find evidence of further payments going into 2002 to avoid falling foul of a five year “statute of limitations” time limit rule.»)
L’article cite un propriétaire d’une agence de voyages, citant lui-même l’intermédiaire qui assurait le transfert des paiements de BAE vers cette agence :
«Peter Gardiner, who ran Travellers World, said this arrangement, which has been going on for years, began to be wound up seven days later because of BAE's involvement in a US jet programme.
»“[The fixer] informed me that a change was taking place, that this was because of BAE's involvement in the US joint strike fighter (F35) programme and that BAE directors had to sign a declaration confirming that BAE were not involved in any behind-the-scenes payments.”»
Cette intrusion du JSF dans le tableau général des scandales Yamamah nous ramène à notre hypothèse concernant le lien à établir entre l’engagement britannique dans le JSF en décembre 2006, et l’absence de réactions négatives immédiates des Américains lors de la décision de Tony Blair d’interrompre l’enquête du SFO sur les scandales. L’éventuelle intervention des Américains, telle qu’explorée par le Telegraph, ne contredit nullement notre hypothèse qui parle d’une restriction volontaire de ces mêmes Américains au seul cas de la décision de Blair d’abandon de l’enquête. Un accord entre le département d’Etat, le Pentagone et les Britanniques, comme devrait être celui que nous évoquons, n’empêche nullement une action du département de la justice, encore moins de la Chambre, dans une situation où le pouvoir est si complètement morcelé et bouleversé qu’il l’est aujourd’hui à Washington.
Mis en ligne le 30 janvier 2007 à 15H22