Le Journal dde.crisis de Philippe Grasset, qui a commencé le 11 septembre 2015 avec la nouvelle formule de dedefensa.org, l’accompagne et la commente en même temps qu’il tient la fonction d’être effectivement un “Journal” pour l’éditeur et directeur de la rédaction de ce site.
Les plus jeunes d’entre nous connaissent l’exclamation de Berthold Brecht au lendemain des émeutes du peuple de Berlin-Est de juin 1953, lorsque les chars soviétiques avaient dû intervenir avec la tendresse qu’on leur connaît : « Le Parti a décidé la dissolution du peuple. » C’est à peu près ce qui s’est passé dans la Douce France chantée par le Grand Charles, – à part que c’est le contraire : le peuple, appelé aux urnes, s’est fait la malle, il a proclamé lui-même sa propre dissolution... 49% de participation pour un premier tour des législatives en France, c’est un véritable résultat stalinien, – d’accord, “à part que c’est le contraire”...
C’est vrai ça, les Français sont formidables, dis-je sur un ton à la fois badin et presque indifférent, je dirais même “presqu’absent”. Personne ne s’intéressait plus à ce troisième tour, et moi le premier sans nul doute, après s’être un peu excité dessus à l’origine, tant la marée de la communication prévoyait un triomphe macronien. Eh bien non, ils ont quand même réussi à nous surprendre, à attirer notre attention... C’est Dupont-Aignan qui doit regretter de n’avoir pas été élu. Dans son programme, il prévoyait qu’une élection où il y aurait plus de 50% de bulletins blancs serait à refaire, avec élimination des candidats à remplacer par d’autres, façon-“dégagisme”. (Car moi, au milieu de ce tourbillon crisique absolument fou, je prends sur moi de proclamer que les 51% d’abstention d’hier sont dorénavant et désormais considérés comme des bulletins blancs de protestation par non-intérêt offensif.)
Il y a de la perplexité dans ma plume devant ces étranges événements, où des dynamiques collectives inconnues et inattendues peuvent se permettre d’intervenir de la sorte, d’inventer des coups pendables de ce poids-là. On croyait avoir tout vu lors de cette sublime et surnaturelle campagne de France-2017, et qu’ainsi l’on avait mérité un repos bien gagné, et il s’avère que non, qu’il y a ce tour de passe-passe... Qui a eu cette idée folle ? comme dit la chanson, quel grain de sable diabolique s’est donc glissé dans la mécanique de l’enthousiasme du Grand Renouvellement qui nous était promis ? L’époque de la Fin des Temps n’en rate pas une seule.
Je souhaite donc bonne chance et bon vol aux représentants du peuple, parce que, quand on représente un tel poids, on est libre comme l’air et léger comme une plume et vos promesses, finalement, comptent pour du beurre et ne sont en aucun cas du moindre embarras. Voici donc la nouvelle République Française, l’En-Marche, débarrassée de l’encombrant fardeau, ce peuple qui était vraiment à chier ; c’est-à-dire, sans avoir à s’encombrer de ce truc pénible, incontrôlable et qui fait l’important, ce qu’on appelle la légitimité dont elle est ainsi absolument dépouillée. Elle va pouvoir enfin consacrer son simulacre suprême, se construire une Grande Roue comme celle de la Vienne du Troisième homme et proclamer qu’ainsi, tout en haut du simulacre suprême et loin du monde agaçant, le monde lui appartient.
“Les Français sont formidables” disait à l’aide de son sourire béat le brave Jean Nohain, que les plus jeunes d’entre vous connaissent bien ; c’était pour clore, façon “que du bonheur”, chacune de ses émissions dites-“Trente-six chandelles”. Elle est en train d’en voir au moins autant, la démocratie-à-la-française, type-mondialisée, celle qui swingue...
Voilà, vous savez, inutile de vous alarmer. C’était comme on dit aujourd’hui “une brève de comptoir”, avant d’aller au dodo “Bonne nuit les petits”, une réflexion pour faire de beaux rêves.
“L’expression m’est venue à l’esprit” me suis-je dit et, très vite, je me suis corrigé de cette façon : “m’est une fois de plus venue à l’esprit”. Comme toujours, elle vient du titre de ce même film, mais ce que je voulais me dire avec ce “une fois de plus”, c’est que je l’avais déjà employé en titre. Vérification faite, c’est le cas, et telle quelle : une première fois en 2011 (le 17 octobre 2011), une seconde fois il y a un peu plus d’un an délibérément d’un texte à l’autre dont un texte des deux également sous ce titre exactement (le 6 mars 2016) dans ce Journal-dde.crisis, où je rappelais l’analogie du film (adaptation française du Some Came Running de 1958, tiré du roman éponyme de James Jones de 1957). L’expression désignant le même phénomène du déferlement diluvien des crises, cette expression “comme un torrent”, qui revient sous ma plume me fascine par sa puissance et sa magie à la fois symboliques et sans doute incantatoires, et peut-être même divinatoires...
(En 2011, son emploi réminiscent avait pour but de saluer la conjonction du “printemps arabe” et des mouvements type-Occupy aux USA ; en 2016, il s’agissait des élections aux USA bien entendu, qui prenaient toute leur ampleur révolutionnaire. Vous noterez que de tout cela et de toutes ces crises, directement ou indirectement, rien n’est clos et achevé, et qu’au contraire tout a empiré.)
Qu’on y songe ou qu’on comptabilise revient au même, car ici la représentation rencontre une vérité-de-situation d’une force remarquable... De la visite de Trump à Ryad, puis les sommets successifs de l’OTAN et du G7, suivis des déclarations de Merkel, le lendemain de la rencontre Macron-Poutine, puis le retrait des USA de l’Accord de Paris, l’attentat de Londres qui est de la sorte qui provoque toujours les mêmes effets de panique conformiste et de moralisme exacerbé, puis, deux jours plus tard, cette crise soudaine entre l’Arabie avec quelques compères et le Qatar, qui renvoie au sommet du Ryad pour le ridiculiser ou le dramatiser (ou le ridiculiser et le dramatiser en même temps).
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Puisque nous sommes en pleine querelle sur la question du climat avec la décision de retrait des USA de l’accord de Paris et des suites, je m’avise comme cela arrive régulièrement qu’il est rarement question, sur ce site, du fond de la question de ce qu’on nomme “crise climatique”, entre disons “climatistes” et “climatosceptiques”. Je préfère désigner cette crise, et c’est déjà une indication, de l’expression beaucoup plus large et volontairement plus imprécise de “crise environnementale”. La différence est évidente : la “crise environnementale“ ne peut être déniée, quel que soit le responsable, et elle est directement incluse dans ce qu’il m’arrive de désigner comme “la crise du monde”, bien au-delà d’une “crise de régime”, au-delà d’une “crise de civilisation”. L’expression fait entrer l’événement dans la globalité de la Grande Crise Générale, et c’est ce qui m’importe.
(De ce point de vue, mon intérêt pour la “crise de l’environnement” est évident, sinon fondamental, ne serait-ce que par l’importance que j’attache au phénomène de l’anthropocène qui est la borne nouvellement créée pour marquer ce qui constitue pour moi l’une des trois révolutions qui ont déterminé le “déchaînement de la Matière” et celle qui a évidemment présidé à la destruction du monde, alias “crise environnementale”. [Le début de l’ère de l’anthropocène a été fixé à 1784, comme date symbolique de l’“invention” du moteur à vapeur en Angleterre, qui est un des moments de l’“opérationnalisation” de ce que je nomme, d’après le titre du livre d’Alain Gras, le Choix du Feu. Si l’on accepte cette date plutôt que 1825 comme je l’ai fait d’une façon plus littéraire et tout aussi symbolique, – lorsque Stendhal apprend avec horreur que, pour les libéraux, « les Lumières c’est l’industrie », – les trois révolutions du “déchaînement de la Matière” sont 1776, 1784 et 1789.] On trouve partout, sur ce site, des références à cette position par rapport à la question de l’anthropocène, qui est la question de l’action du Système sur l’environnement de notre monde ; le texte du 1er décembre 2013, avec des extraits de La Grâce de l’Histoire, ferait aussi bien l’affaire, me semble-t-il.)
Dans ce contexte, il me semble utile, à l’heure où quelques noms d’oiseau sont échangés au-dessus de l’Atlantique et de chaque côté du grand océan, de salon à salon et de chapelle à chapelle, à propos de cet Accord de Paris sur le climat et de la décision de retrait des USA, de ressortir une nouvelle fois un texte où j’exposais la position générale du site sur cette question polémique de l’aspect proprement climatique de la “crise environnementale”. On doit avoir à l’esprit, en lisant ce texte (écrit à la première personne, soit PhG), qu’il se situe dans une analyse générale (du 10 août 2011) où il est question de l’inconnaissance, qui est une vertu que j’honore de mon zèle dans nombre de cas et qui a fait l’objet d’un sujet du Glossaire.dde., mais aussi des déconstructeurs Deleuze et Derrida, et d’un de leurs critiques qu’on retrouvera sans surprise puisqu’il en a été souvent question dans ce Journal, Jean-François Mattei.
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Dans ces colonnes, on a pris coutume de les désigner, sans originalité excessive je le reconnais, comme des “marionnettes”. Il y en a eu un certain nombre qui ne se dissimulent plus, depuis 9/11, à commencer par l’Afghan Karzaï, qui réserva bien des surprises. Depuis deux ans, on l’a vu, on est passé au régime supérieur, avec les marionnettes entrées dans la plus haute catégorie des membres importants du bloc-BAO qui, comme on le sait, dirige le monde dans une discipline et selon une vertu impressionnantes.
Les deux marionnettes les plus fameuses de ces deux années, on les connaît puisqu’il s’agir de Trump et de Macron, comme il est précisé selon divers arrangements et raisons de notre jugement dans le texte référencé. Le moins que l’on doive reconnaitre, et je le fais pour nous tous à cet égard, c’est qu’elles ne déçoivent pas, mais alors pas du tout. C’est à croire, – et ceci n’est pas une idée en l’air, – que ces temps du Dernier Temps ont, pour donner leur pleine mesure, besoin de marionnettes plus que de ces gens sérieux, lourds de vertus et de connaissances, au faîte du pouvoir pour que le pouvoir serve encore et enfin à quelque chose.
Trump, c’est déjà connu : après quatre mois de pouvoir, plus personne n’est capable de dire s’il tient ou s’il trahit ses promesses de campagnes, s’il est prisonnier ou manipulé par le Deep State, ou s’il emprisonne ou manipule le Deep State, s’il va être destitué, assassiné, “zombitisé”, ou s’il rigole de tout ça en faisant ses petites affaires et en bouleversant l’état des USA. Il est haï, maudit, roulé dans la boue, méprisé au-delà de tout par l’establishment globaliste, et en même temps il parvient à ce point que le Financial Times [FT] lui-même, cette citadelle du mépris de l’establishment globalisé, respecté comme une véritable institution et sur abonnement pas-donné, prenne sa défense (et celle de UK-Brexit) contre Angela Merkel, pourtant favorite de ces messieurs-dames de la globalisation.
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Le garnement s’est-il bien conduit ? La France retenait son souffle, parce que rencontrer Poutine c’est, selon le point de vue qu’on adopte, rencontrer Dieu-le-Père déguisé en Janus, ou bien rencontrer l’Ogre qui va manger les petits enfants qui sont d’un genre indéfini. Poutine, aujourd’hui, c’est la référence absolue des contines de nos contrées dévastées par la postmodernité : référence de la haine absolument déchaînée, référence de l’envie à peine réprimée et dissimulée, référence de ce que nous ne sommes plus par bonheur et de ce que nous n’arrivons plus à être par malheur, etc.
Par conséquent, Macron recevant Poutine à Versailles, là où le Roi-Soleil n’accueillit jamais, de justesse, le tsar Pierre, Pierre Ier Le Grand, c’était un événement considérable. Tout le monde l’attendait au tournant de la Galerie des Glaces et les Grands Ancêtres de la Grande Histoire pesaient de tout leur poids. Cela peut donner une ombre où l’on se perd parce qu’on n’imagine pas ce que c’est que la lumière ou bien une ombre qui vous donne envie de trouver la lumière parce qu’on a deviné de quoi il s’agit.
Je rengaine ici mon sarcasme, y compris celui que j’avais laissé traîner ici et là par anticipation. Malgré mes nombreux préjugés, apriorismes, parti-pris, mauvaises fois et autres, je me devais donc d’admettre qu’il n’a pas fait trop mal, c’est-à-dire par aussi mal qu’on pouvait craindre, le Macron. Rencontre sérieuse, un peu de fermeté par là, l’une ou l’autre ouverture par ici, etc. “Nulle affaire sérieuse dans le monde ne peut être traitée sans consulter la Russie” (autant pour “la Russie, puissance régionale”, de l’inimitable Obama). On se voit, on conclut de se revoir et de poursuivre, on essaiera de faire de mieux en mieux la prochaine fois. Macron paraissait encore assez vide, Poutine un peu circonspect dans le genre “est-ce que c’est du lard ou du cochon”. Le premier se tenait bien droit, style-bon élève ; il n’est pas assuré que le second se soit beaucoup amusé, mais au moins il n’avait pas à subir l’humeur lugubre et la face terriblement blette de l’ex-président-poire, le “président normal”.
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Ce n’est pas si loin et pourtant cela paraît d’une autre époque, tant le temps se contracte et file à quelle vitesse, et l’Histoire avec ses avatars qui nous file entre les doigts comme du sable emporté par une affreuse et horrible tempête. C’est simple, cela date du 2 février 2017 et, alors, cela fut dit mais personne n’y crut vraiment et chacun au fond de soi était persuadé que cela ne serait qu’un emportement de passage.
...Enfin, je dis aussitôt de quoi il s’agit pour faire cesser ce suspens insupportable, qui est une déclaration d’un nommé Donald Tusk, dont j’espère ne rien vous apprendre en vous révélant qu’il est le président du Conseil Européen. Voici une citation du texte référencé où cet improbable personnage pourtant mis à une fonction prestigieuse semblait s’être laissé aller, dans un instant d’exaltation, à une déclaration absolument folle, – affirmer clairement et sans aucune réserve que les USA, au même titre que la Russie ou Daesh, ou la Chine si vous voulez, représente une “menace” pour l’Union européenne...
« Enfin une voix s’éleva, ou plutôt une plume, celle du président non-élu de l’Union Européenne (UE), le Polonais Donald Tusk. (“Non-élu”, par conséquent le plus complètement légitime pour parler en tant que créature du Système, Euro-Zombies, etc.) Tusk envoie une lettre à tous ses compères, dirigeants au plus haut niveau des 27 pays-membres de l’UE, avant leur réunion commune à Malte. Tusk écrit enfin les mots-sacrilèges, ceux qu’il était impensable de voir briller sous une plume européenne de bonne réputation-Système : la mise en évidence que les USA sont quasiment autant une “menace” pour l’UE que la Russie, la Chine et ISIS (Daesh pour les Français, le texte-Tusk n’étant qu’en anglais). »
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J’ai déjà dit, d’une façon ou l’autre, combien j’ai avancé dans ma vie comme un autodidacte, entrant dans des domaines que je n’avais jamais précisément envisagés pour moi-même. Ainsi en est-il principalement des matières proches de la philosophie, de la métaphysique, etc., autour desquelles il m’arrive de plus en plus souvent de m’agiter, qui m’étaient inconnues à l’origine de ma carrière. J’ai fait cela, je l’avoue, sans autorisation de l’Université. J’y suis venu de manière naturelle, empirique, parce qu’en progressant j’ai découvert combien cette progression nécessitait de faire appel à ces domaines.
Ainsi en est-il des mots et des concepts dans ces matières, qui permettent d’appuyer et de structurer une pensée, de la guider, de lui donner à la fois des outils et des références, de la faire progresser, parfois à pas de géant, parfois de la révolutionner. (On trouve de ces mots, ou concepts, bien sûr dans le Glossaire.dde.) Ainsi en est-il du mot “simulacre”, dont on voit qu’il est d’emploi répété ces derniers temps sur le site : voilà le point central justifiant ce texte aujourd’hui, puisqu’effectivement “simulacre” est apparu de nombreuses fois ces derniers jours.
Certes, je ne découvre pas le mot, qui est d’un emploi courant et ancien (le latin simulacrum pour “simulacre” et simulatio pour “feinte”, ”faux-semblant”, et “simulation” évidemment), ni même sa signification, ni même sa place (approximative pour moi, jusqu’alors) dans la philosophie depuis si longtemps, au moins depuis Platon. Ce que je découvre peu à peu, puis brusquement en vérité, c’est son poids considérable pour moi-même et pour le travail que j’effectue, sa puissance phénoménale et la complexité de sa signification depuis que je l’ai adopté pour le considérer d’un point de vue plus personnel, pour lui donner une place dans mon rangement dialectique (ou, disons, mon arsenal dialectique). C’est dire, effectivement, que je me le suis approprié à ma façon, selon mes conceptions, comme chaque esprit doit pouvoir faire en toute loyauté et en toute liberté, c’est-à-dire en signalant, en expliquant et en définissant cet emprunt. On comprend aisément, par ailleurs, en lisant certaines pages récentes de ce Journal-dde.crisis et du site lui-même, combien le livre de Mattei, L’homme dévoyé, m’y a aidé.
(Suite)
Il est vrai que je m’étonne moi-même d’avoir si peu à écrire selon mon sentiment, et encore moins à penser de la situation française, dans ce temps nouveau du macronisme. Le “bruit de fond” autour de cette élection du jeune et brillant président-Macron m’a épuisé en vérité. J’ai montré un peu de passion, et même une grande passion pour la compétition, pendant quelques semaines ; désormais, je me découvre indifférent. Pour l’instant, le seul élément sérieux qui m’intrigue, je l’avoue, est cette rencontre avec Poutine, et à Versailles en plus (?), lundi prochain.
Je n’ai pas été convaincu de reprendre le collier de ma plume pour examiner et diagnostiquer notre-Président petit-prodige lorsque j’ai entendu l’acteur Vincent Lindon, notre paysan-du-Danube de service, nous expliquer, pour une fois cravaté et d’une voix soudain enfantine, il y a 3-4 jours au JT de LCI, qu’« avec lui [Macron], comment dire, les jeunes se sentent plus vieux et les vieux plus jeunes... » J’ai pensé un instant, d’une façon stupidement cruelle, je l’avoue, façon : “Et les jeunes-cons, se sentent-ils plus vieux-cons avec lui ? Et les vieux-cons, se sentiraient plus jeunes-cons, peut-être ? Tout cela me rajeunit...” Passons-outre si vous voulez bien un tel mauvais esprit.
Je ronchonne, je marmonne ... Voilà à peu près comment plutôt que pourquoi la situation française, et non encore le président lui-même, ne m’intéresse guère pour le séant et l’immédiat. J’ai un peu l’impression que ce “bruit de fond” où l’on trouve un Lindon et tant d’autres voix autorisées de la sorte de cette fameuse “société civile”, ressemble un peu à l’atmosphère de certaines émissions pour les tout-petits, à la TV française, du temps de mes jeunes années ; c’était notamment et essentiellement le “Bonne nuit les petits” de l’excellent Nounours, promettant de beaux rêves à nos chères têtes blondes. (568 épisodes entre 1962 et 1973, plus que deux quinquennats...)
Non pas que le nouveau président soit un endormeur, une sorte de producteur d’hypnose, mais parce que prédomine en moi l’impression que les Français aimeraient bien s’endormir, bercés par Petit-Nounours, pour se réveiller dans leurs rêves devenus une réalité avec l’allure d’une sorte de “Royaume enchanté”. Aucun sentiment à ce propos pour le moment courant, intuition absente, conviction sans ressort, plutôt tout en attente... Cette “humeur de crise” est une drôle d’humeur d’où la crise serait justement de ne pas se percevoir en crise, alors que tout de notre sagesse et de notre perception nous crient le contraire. Enfin, le vrai est que jamais on ne perd rien pour attendre...
Raimondo a trouvé le mot juste pour qualifier la première grande tournée de Trump à l’étranger : “écœurante” ( « The-Donald d’Arabie : un spectacle écœurant »). Voir Trump se pavaner au milieu de la richissime pourriture du cloaque saoudien, avec ses deux ravissantes (Melania et Ivanka) célébrant la façon dont les femmes sont traités dans le royaume ; la facture du déplacement ($350 milliards de quincaillerie militaire) immédiatement signée, sinon payée ; puis la visite en Israël, avec le gros Donald devant le Mur des Lamentations ; tout cela, enfin, entrecoupé par un discours incroyablement haineux à l’encontre de l’Iran bien dans l’esprit trumpiste (encore des promesses de tension pour un conflit que l’esprit du temps avec sa tumeur maligne en guise d’esprit attend avec tant d’impatience), ce discours assorti de l’exaltation d’une coalition antiterroristes des pays musulmans notoirement soutiens financiers et logistiques du terrorisme...
(Rien que pour le goût, qui permettra de s’empêcher tout de même de vomir, on reverra avec intérêt et avec les intérêts, la séquence où The-Donald-candidat pulvérisait Hillary pour ses relations avec les Saoudiens et le fric qu’elle y récoltait. La séquence est en tête d’une interview de Ron Paul par John McAdams, où l’on voit l’inimitable Paul souriant d’une sidération presqu’amusée à force de grotesquerie, devant ce spectacle extraordinaire enfanté par ce qui n’est même pas de la démagogie au fond, mais qui est tout juste l’opportunité de dire ce que réclame l’apparence de l’instant présent, sans aucun souvenir de rien, sans aucun avenir de rien du tout, à la fortune du big Now. La téléréalité n’a pas fini de nous divertir jusqu’à en mourir de rire, par dérision, par inutilité d’espoir puisqu’absence d’avenir, par mesure du vide abyssal.)
(Suite)
Hier, j’ai passé quelques instants, un quart d’heure ici, un quart d’heure là, et puis ici puis là encore dans la journée, à regarder de temps en temps CNN. (C’est CNN, ç’aurait pu être un autre réseau US, peu importe, c’est la même boutique et le même délire.) C’était pour l’excitation de l’inconscient et l’édification-fun de la pensée, car il n’y a rien de plus édifiant, et finalement de plus salutaire pour l’esprit, que de suivre et de mesurer le délire des élites américanistes. J’y étais en plein, il faut dire.
Bref, je suis tombé en plein dans cette polémique surréaliste, cette polémique-bouffe à partir d’un article du WaPo (Washington Post), où Trump est accusé d’avoir filé des infos super-classified à Lavrov, au cours de leur rencontre diplomatico-conspirationniste du 11 mai à la Maison-Blanche, dans le bureau ovale soi-même. Même le dur de dur McMaster, général-penseur de l’U.S. Army, directeur du NSC et crâne rasé façon garde-du-corps, officier-traitant officiel du Deep State auprès du président, même McMaster qui assistait à l’entretien a fait un briefing rapide pour démentir complètement la chose dans des termes qui la ridiculisaient rudement.
Je ne vais rien vous raconter à ce propos qui soit très sérieux, sinon vous donner quelques URL d’accès vers l’une ou l’autre source, si possible suspecte aux yeux de nos commentateurs-Système, d’excellente-mauvaise réputation, où l’on vous explique les divers aspects de cette polémique-bouffe : par exemple celui, très complet, d’Alexander Mercouris, et ZeroHedge.com dans plusieurs articles dont certains repris d’autres sites. Tout juste vous rapporterais-je la réaction de la porte-parole du ministère russe des affaires étrangères Maria Zakharova, par tweets interposé, parce que Zakharova est absolument charmante et qu’elle ne mâche pas ses mots, sacré bonne femme en vérité : « Dites, les gars, vous lisez encore les journaux américains ? Ce n’est pas la peine. On peut les utiliser de différentes autres façons et ce n’est vraiment pas la peine de les lire... [...] Comment peut-on vivre dans cette atmosphère globale de volatilité de l’information ? »
(Suite)
Commençant à rédiger le texte saluant l’avènement du “président Macron” en constatant «L’insoutenable légèreté du Français», j’éprouvai une tristesse à la fois assez grande et assez lasse, assez grande pour mon pays et assez lasse pour les habitants de mon pays et concitoyens de moi-même qui portèrent ce jeune homme improbable à cette fonction qui fut haute. C’était offrir une stature de géant à une sorte d’adolescent mal fini qui semble se satisfaire de cet état de lui-même et se complaît de résider dans “l’éternel présent” du Big Now. J’avais donc décidé de clore ce texte par une reprise d’un texte ancien qui décrivait le même état de l’esprit, de l’âme et du cœur, cela que j’avais éprouvé quelques mois après la prise de fonction du précédent, du président-poire, lorsque je m’aperçus, comme vous tous je pense, qu’il était bien plus poire, et blette en plus, que président. La différence est dans la rapidité de la réalisation du désastre, qui montre que le désastre s’offre désormais à nous à l’instant qu’il se fait. C’est un gain de temps précieux.
Au fil de la plume, mon sentiment changea. La tristesse, toujours présente, le céda rapidement en importance de ma perception générale, en une sorte de perception envahie à la fois de dérision et d’une gausserie un peu méprisante, s’adressant toujours à ceux-là de mes concitoyens qui avaient décidé de faire subir ce traitement à leur pays et à mon pays. Le texte prit une toute autre allure que celle que j’avais déterminée. Dans ces conditions, la citation que j’envisageai n’avait plus sa place, et je décidai de l’abandonner, ou bien disons d’y surseoir. C’est la deuxième option que j’ai choisie puisque j’y reviens aujourd’hui, tristesse toujours aussi grande et aussi lasse, tandis que dérision et gausserie sont passées au second plan même si elles ne meurent pas.
Voici donc le texte que je reproduis, qui fait partie de la série dite “Chronique du 19 courant...” à propos de laquelle je recommande à mes lecteurs de lire la note (*) en fin de texte, une indication pratique à propos d’un projet qui démarre et qui, lui, me tient à cœur. Le titre se lit « Une Passion en hiver » et la chronique est du 19 janvier 2013. Je crois qu’on peut reprendre ce texte presque mot pour mot pour définir cette tristesse assez grande qui m’a envahi en contemplant le destin de mon pays, peut-être plus grande encore de voir ce destin se confirmer, tandis que la lassitude perdure sinon se renforce, et pourtant jamais ne parvient ni ne parviendra à me priver de la force de continuer à écrire là-dessus. Voici donc...
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Regardant hier soir quelques secondes, pas plus, cet océan en carton-pâte d’enthousiasme et de drapeaux français, je crois que c’était sur l’esplanade du Louvre, – que Dieu me pardonne mais la seule image qui me vint fut celle de Daladier, le grincheux et taciturne Taureau du Vaucluse, rentrant de Munich-38 et s’attendant à être conspué pour l’affreux accord qu’on sait, et devant cet océan semblable d’enthousiasme, qui marmonna : « Ah les cons ! » Eh oui, ils sont légers et, par conséquent, ils peuvent aisément être ce que Daladier a vu en eux, – sauf que, et là j’insiste en poursuivant l’analogie mais en l’inversant décisivement, comme font les déconstructeurs (Deleuze avec Platon), – sauf que Macron, face à cet océan d’enthousiasme n’a en aucune façon pensé du Daladier façon Munich-38, mais plutôt dans le genre “Ah, les braves mecs !”, comme l’on dit devant une téléréalité réussie. (Décidément, Macron a beaucoup du The-Donald en lui. Leurs rencontres vaudront leur pesant de peanuts et de barbe-à-papa.)
Oui, le Français est léger, et ce fut une de ses vertus, lorsque la légèreté était celle de ses superbes arrangements architecturaux ou celle de la rectitude sublime de se grands Jardins, mais il avait pour faire l’équilibre qui est harmonie, – il avait aussi le sens du tragique, comme il y a dans la franche gaieté de la camaraderie des Mousquetaires de Dumas toujours ce coin sombre prêt à distinguer et à affronter la tragédie du monde. Le Français d’aujourd’hui est léger comme une bulle, et il n’est que cela derrière son charabia postmoderne, et cela me déchire l’âme de penser un instant qu’on ne peut émettre d’autre jugement que ceci qu’il a le président qu’il mérite.
On me dira : voyez les candidats, quel choix leur était offert ! Je n’en disconviens pas, mais il est vrai que l’on a les candidats qu’on mérite, avec lesquels on s’accorde et d’ailleurs ils ont été aussitôt au pire d’entre eux ; mais encore, il est vrai que le Français léger s’il avait eu sa part de tragique, il n’aurait pas eu ce besoin morbide de souligner un tel choix qui est absolument catastrophique, de cet enthousiasme de carton-pâte comme un décor théâtral. Sinon, pourquoi ai-je également pensé hier, en plus de Daladier et Munich-38, à la Fête de l’Être Suprême de la Grande Révolution Française dans ses ablutions initiales ? Fête célébrée et sanctifiée par le ci-devant évêque d’Autun, Talleyrand certes, qui fit son office riant sous cape, avec une légère et énigmatique grimace de mépris et de dérision devant une telle polissonnade...
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L’affaire “MicMac”/“MicMacron”/McMacron ayant été par ailleurs éclaircie, il convient d’observer que l’expression de “MicMac“, qui rejoint un mot d’emploi courant, introduit d’une certaine façon le fond du sujet extrêmement grave que je veux traiter, qui concerne on s’en doute la profonde signification du candidat-promis-à-être-président, ce que sa survenue probable signifie en fait de nécessité pour notre compte. Pris familièrement, Micmac signifie aussi bien « Intrigue, manigance, pratique secrète dont le but est blâmable ou semble tel » que « Confusion inextricable » ; ces deux sens étant illustré par deux citations de la même définition donnée par le Wikipédia :
• « Un micmac à n’y rien comprendre ! reprit-il. (…) Maintenant, ils me tiennent à droite, à gauche, derrière. — (Émile Zola, Au Bonheur des Dames, 1883) »
• « D’où un micmac de paperasses à défier un cochon d’y retrouver ses petits et l’immobilisation définitive d’une affaire devenue insoluble. — (Georges Courteline, Messieurs les ronds-de-cuir, 1893) »
Ces diverses considérations et citations illustrant l’abrégé à propos de l’identité de la chose auquel nous sommes arrivés pour ces textes de fin de campagne, – “MicMac” pour “Micron-Macron”, ou mieux, à l’américanisme, “McMacron”, – sembleraient bien futiles ou fort oiseuses. Tout cela n’est futile ou oiseux qu’en apparence pour un événement qu’on pourrait justement juger l’être, oiseux et futile ; quoi qu’il en soit et dit peut-être plus sérieusement, il s’agit d’une illustration un peu leste du caractère fondamental de la chose : après tout, MicMac avec son capharnaüm de politique “à défier les cochons d’y retrouver leurs ordures à bouffer”, cela vous a de l’allure et va au-delà des apparence, non ? Ah, ce Courteline...
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Observons en préliminaire qu’en employant cette expression apparemment confuse de “MicMac”, abrégé de “MicMacron”, voire de Micron-Macron comme on dit Dupont-Dupond, j’amorce dans cette page du Journal le retour à la normalité grammaticale et postmoderne. Le “a” de mon clavier a finalement capitulé et a engagé le processus de reprendre sa place, c’est-à-dire l’abandon de l’identification de “Micron” pour le retour à l’étrange normalité de ce candidat sous sa réelle identité de “Macron”. (Cela se fera par étapes.) Je n’ai rien à dévoiler là-dessus : s’il gagne dimanche, ce qui est la certitude du sens commun ennemi du sens comme le cultivent tous les déconstructeurs, il faudra bien, et fort loyalement, lui rendre son identité de Macron. (S’il perd, ce qui improbable sinon impensable selon ce sens commun “ennemi du sens”, il rentrera dans la normalité des avatars de la vue politique et perdra cette exceptionnalité du “rien” qui lui valut dans ces colonnes l’hostilité du “a”, et il lui sera restitué également sa véritable identité de Macron. Le lecteur n’aura donc plus à subir très longtemps ce caprice du clavier qui avait marqué les récents textes à son sujet.)
Or, il se trouve, pour revenir aux affaires courantes, que nous devons dire un mot de BHO, qui ne s’est jamais trompé sur l’orthographe du nom ; autrement dit Obama dont on doit se demander s’il est bien “ancien-président” ou s’il n’est pas le véritable président placé au-dessus de l’actuel qui baguenaude en prime time, comme une étoile noire puisque sans lumière nécessaire, pour le simulacre et l’habile dissimulation, restée en tant qu’étoile inspiratrice de la destinée des choses au moins américanistes, et peut-être même de la contre-civilisation et de ses globalistes. En effet, il se trouve qu’Obama a rallié et soutenu de façon officielle et solennelle la candidature MicMac, comme un vulgaire Mayrou, ou comme la doublette des champs dévastés, Fillon et Hamon, si prompts à se soumettre. (Je ne parle pas du reste de la horde, on connaît.) ... Bref, comme si Obama était un vulgaire homme politique français, ce qu’il n’est pas.
Par son aspect formel, officiel, etc., cette démarche est assez remarquable, sinon inédite, pour être notée comme importante et solliciter une interprétation. Obama avait téléphoné au candidat de son cœur un peu avant le premier tour, et il s’agissait d’une démarche informelle qu’on pouvait juger comme d’une signification politique réelle mais pas essentielle. Il ne devait pas faire plus, avait-on laissé entendre ; il a fait plus, beaucoup plus...
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Cela m’arrive rarement, très rarement, et pourrait-on ajouter, encore plus rarement sinon jamais peut-être après un événement de cette importance... Sauf qu’il pourrait peut-être me sembler, si j’avais l’esprit au sarcasme, qu’il n’eut guère d’importance, cet “événement de cette importance”, de même que je me méfie en général des “événements de cette importance” jusqu’à m’interdire d’en écrire là-dessus aussi rapidement qu’on le voudrait... Mais là, c’est tout différent : je me suis retrouvé plume sèche et esprit vide, sans vraiment de reproche à faire à quiconque, – sinon à moi, peut-être et encore vaguement, moi qui ai toujours une phrase à écrire... Tu quoque fili, le vertige de la phrase blanche ?
D’abord, je le confesse : je n’ai pas vu grand’chose de ce débat ; les quinze-vingt premières minutes, puis assez édifié sur le climat, le ton, l’agressivité voire la sauvagerie. J’ai décidé alors de mener à bien mon projet qui était de respecter mes horaires syndicaux malgré l’événement et d’aller me coucher. Le lendemain, aujourd’hui donc, quelques commentaires de-ci de-là, des impressions entendues au vol, enfin rien qui puise modifier la pente suivie par mon jugement, et toujours cette absence d’inspiration, un certain dégoût, ou disons un désintérêt pour faire moins dramatique, d’écrire quoi que ce soit. Notez que cette attitude, comme influencée par le climat que j’ai évoqué, s’est étendue au reste des affaires du monde dans lesquelles je n’ai trouvé aucun intérêt également, rien pour éveiller le goût du commentaire, la flamme de la reconnaissance de quelque chose qui vaille un effort de l’esprit et un éveil de l’intuition superbe. Pourtant, je ne cesse de l’écrire, nous sommes au cœur d’une crise générale, la fameuse Grande Crise Générale d’effondrement du Système... Eh bien, tout se passa durant ces quelques heures, comme si rien ne se passait.
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(Avertissement : finalement, je complète et je l’édite ou mets en ligne, ce texte que j’ai ébauché il y a trois jours et mis sous le coude dans l’attente d’un dénouement clair qui ferait une chute bien dans les bornes de la raison. Je n’attends pas le verdict ou ne leconnais pas parce qu'il m'a échappé, parce que le dossier est assez épais ; donc l’on ne me voudra pas si notre héros finalement se décidait clairement, – d’ailleurs l’essentiel est dit et fait pour moi. Je lui donne mon blanc-seing à ce texte, comme on se donne carte blanche-comme-neige et comme l’on clame “Un homme à la mer !” après l’avoir discrètement poussé.)
Je l’ai dit, je n’ai pas beaucoup suivi les news depuis l’insupportable fiesta de La Rotonde. (Quelle hargne m’habite donc contre cette gentille sortie, style bizutage, de notre éternelle jeunesse-pipole ! Sans doute parce que, quelque persifleur d’esprit mauvais vous le dirait alors je le dis, – et cette hargne, c’est peut-être parce que je n’ai pas été invité, moi le pipole, – grave faute de communication.)
Cette brève entrée en matière pour vous dire combien ce texte est à prendre au sérieux avec le moins de sérieux possible à l’esprit ; ce serait plutôt un exercice de divination, de transmission de pensées indociles, ou insoumises après tout, rien que de l’hypothétique pur sucre, avec ma boule de cristal un peu enfumée et qui roule, qui roule, like a rolling stone, comme sur une piste de bowling pleine d’ornières et de virages serrés. Bref, je ne suis sûr de rien mais je n’hésite pas à parler comme si j’étais sûr de cela (de n’être sûr de rien)... Eh bien alors venons-en au fait qui est que mon propos ainsi prudemment balisé concerne le comportement de Mélenchon depuis les résultats du premier tour, – qui ont été une épouvantable déception pour lui ces résultats, puis qui ont dû le faire réfléchir, notamment devant le spectacle du Micron déchaîné dans son slalom des impairs et des maladresses considérables. (A agir aussi sottement qu’il fait ici et là, d’une façon où même si son acte n’est pas tout à fait sot il le paraît tout à fait, on croirait, ma foi, qu’il est d’ores et déjà, notre-Micron, véritablement notre-Président ; alors, c’est que La Rotonde était plus que justifiée, remake absolument légitime du célinesque “agité du Fouquet’s”...)
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Fidèle à mes habitudes qui tournent dans les moments extrêmes à l’obsession et à la répulsion, je n’ai quasiment pas consulté à ce propos la TV-News et la presseSystème depuis l’élection, – oups, pardon, la qualification, – de Micron. (Oups ! Ce “a” qui continue à sauter de mon clavier [*].) Tout de même, j’ai trempé le bout du doigt de pied dans l’eau hurlante, notamment et principalement par le biais de la consultation des ordures-traîtres de la presse russe, RT et Sputnik les deux cornes du diable, ainsi que l’un ou l’autre site français antiSystème. (Il est important que je passe par les Russes en cette occurrence, pour que l’on puisse établir la passionnante narrative des lignes brisées des complicités, car l’antirussisme a besoin de ces circonstances obscures pour se justifier d’exister et il faut veiller à son entretien.)
Bref, je n’ai vu que très peu de choses sur les événements depuis le premier tour mais figurez-vous que cela me suffit pour me faire l’une ou l’autre idée qui me satisfait dans la compréhension de l’essentiel de cette affaire de si grande importance. Je vais même jusqu’à me permettre d’offrir, ci-dessous et entre autres, des extraits d’un texte français, qui m’est parvenu par le biais de RT-français, qui est de Pierre Lévy, du site de gauche antieuropéen Rupture sur lequel on retrouve le texte.
Là-dessus et avant d’enchaîner, je vous dirais que, concernant Fillon, j’ai eu vent par Radio-Moscou de son adhésion hyper-rapide à Micron, suivi de son annonce de son entrée en modestie comme on entre au couvent (il ne sera pas candidat aux législatives, il deviendra un « modeste militant »). Pauvre vieux-jeune homme, liquidé comme un linge sale qui pue, ou disons plus-tendance : comme “un fromage-qui-pue”. Je n’en reviens pas d’avoir écrit ce que j’ai écrit sur Fillon in illo tempore et, en même temps, je vous l’assure, je suis moi-même assuré de ne pas avoir été trompé une seule seconde par la main qui guide ma plume sur la réflexion de ce moment-là. Pour quelques jours, pour quelques heures, Fillon a connu la grâce authentique ; ensuite, inconscient de la charge qui lui était échue, pfutt, dissolution du personnage qui ne sut même pas montrer quelque habileté lorsque Hollande fit en sorte que la presse absolument-libre, bien huilée et coordonnée, mît à nu ses petites cochonneries. (Comme les choses vont vite, et les occasions, aussi rapides que fondamentales, et ratées jusqu’à l’effondrement si on ne les saisit pas, comme la grâce elle-même qui est une chose essentielle jusqu’à l’illumination mais aussi fugace qu’une plume dans le vent.)
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J’ai laissé s’écouler quelques heures avant d’y revenir, pour m’assurer de mon sentiment dans cet instant-là... Un instant, juste un instant, cela ne dure pas longtemps. Qu’il soit d’ailleurs bien compris que cela ne présuppose rien, ni des prévisions de ma part, ni de la supposition d’une probabilité concernant la personne qu’on trouvera à l’Elysée dans un peu moins d’un mois, ni même d’une certitude quelconque sur tel ou tel personnage, ni enfin, encore moins, de mes goûts et choix en la matière qui sont d’ailleurs proches d’être inexistants pour ce qui tient à l’essentiel de mes préoccupations.
(Après tout, Micron [*], puisqu’on va très vite comprendre que c’est de lui principalement qu’il s’agit, pourrait se révéler comme ce tigre caché tout au fond de son moteur de la globalisation et prêt à se brandir lui-même hors des sentiers battus et dans le vent de la vitesse, et nous serions alors tous à nous exclamer, considérant le funambulesque personnage qui se serait dissimulé derrière la non-essence du moteur en question : “E miracoloso sporgersi”.)
J’ai connu cet instant exactement lorsque j’ai fait une incursion sur l’une ou l’autre chaîne TV de type-News aux alentours des 20H00 fatidiques, pour avoir une rapide idée des résultats, avec Micron en tête, puis j’ai changé de chaîne pour retomber je ne sais comment sur un téléfilm enregistré par une main citoyenne et situé à Verdun, où il y avait, hors d’une intrigue sans joie ni grandeur d’aucune sorte, au moins des images qui sont faites pour m’émouvoir, celle du grand champ de bataille sous la lune dont j’ai souvent parlé. La cohue citoyenne des commentateurs à propos des résultats, l’hystérie à peine contenue des commentaires-Système à propos de la position de leur champion, leur certitude absolue dissimulée derrière leur exultation contenue qu’il serait président, tout cela qui faisait brouhaha démentiel autour des résultats entrevus un instant était un peu trop pour ma fragile constitution psychologique. “Un instant de honte” ai-je d’abord pensé à écrire comme titre sans rien savoir de mon texte, puis passant à “un instant de dégoût”, puis après tout additionnant les deux ; la honte était celle d’être un Français alors qu’il y avait ce spectacle en-France [je ne dirais pas “de la France”], le dégoût concerne ce spectacle lui-même, France ou pas France.
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La France vaut-elle une crise, c’est-à-dire pour ce Journal-dde.crisis une “humeur de crise” ? Le seul fait de poser une telle question montre justement dans quel état de dévastation, et donc état crisique bien entendu, se trouve la France : qu’il soit concevable qu’une réflexion s’impose pour déterminer si la France est en elle-même assez importante pour encore prétendre que sa crise évidente puisse prétendre elle-même être reflet, miroir et symbole à la fois de la crise du monde... Car, évidemment, s’interroger pour savoir si “la France vaut bien une crise”, c’est s’interroger pour savoir si la France est encore assez signifiante pour que la crise où elle se trouve évidemment, – réponse de forme à la question, – ait une dimension d’universalité dans la lutte du Système contre l’antiSystème.
Il se trouve que la réponse tend à être positive. On le voit, on le sent, à l’intérêt peu ordinaire qui est porté à la France pour ce premier tour, y compris et surtout dans la presse anglo-saxonne, et particulièrement la presse antiSystème anglophone, des USA et des sites anglophones “internationalistes”, de cette sorte d’“élite” antiSystème qui a fleuri ces quatre-cinq dernières années. (TheDuran.com, Russia Insider, ZeroHedge.com, jusqu’aux plus exotiques comme Infowars.com). Les élections françaises et les événements français y sont suivis avec un réel intérêt, et la sensation qu’ils comptent sans le moindre doute pour l’évolution de l’antiSystème. De ce point de vue, il semble que la France puisse envisager d’à nouveau “tenir son rang”.
Je ne dirais pas une seconde quels sont mes sentiments ni même mes préférences sur le résultat du scrutin, ni sur l’évolution après le scrutin selon son issue. Je n’en ai aucun de véritablement structuré, fidèle à mon habitude de ne rien prétendre prévoir de formel dans les événements qui ont désormais l’habitude d’agir d’eux-mêmes, et encore moins dans les conséquences des tendances et des dynamiques. Tout juste ai-je un espoir : c’est que la France, qui fut admirable dans l’Histoire pour sa capacité ontologique et souveraine à subir et à repousser toutes les tensions sans connaître de crise structurelle à cet égard, donc en évitant le désordre pour sa propre structure, que la France, enfin, entre dans le désordre régénérateur, celui-là qui ne peut être que régénérateur pour elle. J’aimerais qu’elle cesse de s’abriter derrière une direction prodigieusement inculte, grossière et imposteuse, qui elle-même se donnait à bon compte une espèce de vertu à l’ombre salvatrice de ses “institutions” ; que la pute subventionnée qui lui servait de direction ne puisse plus se maquiller en marquise pour nous faire croire que l’Elysée est devenu autre chose que le bordel de ses inconséquences et de ses incohérences.
Bien entendu, on l’a compris, ce désordre ne signifie pas nécessairement insurrection, élection folle, trouble des foules et des rues, – bien que cela puisse aider, je le reconnais. Le désordre-en-France, d’abord, c’est la continuation de l’espèce de vertige piqué de panique, d’incertitude et d’angoisse de ceux qui ont l’habitude de susciter panique, incertitude et angoisse chez leurs administrés. Cette psychologie radicale est apparue durant la campagne, et il faut que cela se poursuive : une France en désordre aujourd’hui, c’est une France qui découvre enfin l’antiSystème... Que le désordre soit.
Les événements qui sont annoncés représentent une très grande défaite pour la démocratie et, pour mon compte, une immense déception par rapport à ce que j’attendais de cet indiscutable homme de non-État qu’est le président Hollande. S’il avait été un véritable homme de devoir, un irréfragable homo democraticus, c’est-à-dire effectivement homme de non-État dans ce cas, il aurait, en supprimant cette élection présidentielle (et la suite), décrété non pas l’état d’urgence mais l’état de dispense qui eût été une forme subtilement cachée mais destinée à devenir éclatante au-delà des siècles de la proclamation de l’immobilité éternelle.
Cela n’aurait nullement été un “coup d’État” mais bien une proclamation démocratique, d’une sorte de fixation dite “en l’état”, autrement dit un “coup de non-État”. Il aurait ainsi signifié que la situation que nous connaissons qui est perçue comme celle du déséquilibre catastrophique est en réalité celle de l’équilibre-parfait-dans-le-déséquilibre-catastrophique constituant l’achèvement décisif et figé dans l’éternité du projet postmoderne. Au lieu de quoi, nous avons cet événement stupide en soi, d’une stupidité marquée par la confusion, le désarroi et la fureur que nous observons, qui vient contrecarrer cette grandiose ambition. C’est ce que Hollande n’a pas accompli, il a manqué à ses devoirs... Effectivement et vertueusement homme “normal“ et “dernier homme” nietzschéen à la fois, il porte la lourde responsabilité de n’avoir pas distingué cette vertu qui était sienne, combien il avait lui-même porté l’état de médiocrité à un sommet tel qu’il n’y en a pas de plus haut, et qui méritait donc d’être démocratiquement protégé et conservé. La démocratie en eût été fortifié à jamais.
J’avais attendu, sinon espéré, que sa décision de ne pas se représenter était l’amorce de cette proclamation de “l’état de dispense”, avec la suppression de l’élection présidentielle qui aurait suivi après quelques semaines laissés aux “Insupportables” pour se gavrocher dans leurs simulacres de “primaires” et autres agitations. Ensuite, il aurait lui-même abandonné sa charge à l’heure prévue, et peut-être même ordonné la suppression du gouvernement, libérant du coup Jean-Marc Ayrault de ses devoirs pour lui permettre d’écrire ses mémoires sous le titre de “Comment j’ai fait oublier Vergennes”. J’éprouve devant tout ce gâchis des occasions perdues une profonde déception et une grande peine. Le “dernier homme” n’a pas osé assumer cette vertueuse fonction d’être effectivement le dernier en toutes choses, y compris les choses historiques qui devaient se clore après lui. L’Histoire lui en demandera raison.
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