Antoine
03/12/2010
Ceci dit, c’est étonnant que Wikileaks ait décidé d’héberger son site aux États-Unis, au coeur du système, chez une entreprise commerciale forcément exposée à de multiples pressions. Naïveté ?
Alain Vité
03/12/2010
@Antoine
D’autant que Amazon est typique des entreprises transnationales d’aujourd’hui, totalement acquises au système US dont elles sont autant un fruit qu’un moteur.
M Assange a apparemment choisi une croisade bien difficile pour ses moyens, car d’après sa biographie il est aussi brillant en informatique qu’affectivement immature.
PSYCHOLOGIE DE BAZAR ET RÉVOLUTION
Il semble que la puissance logique de M Assange, si bénéfique avec les machines, le handicape pour comprendre les réalités politiques, autant que ses propres contradictions humaines. A sa manière, il est un représentant fractal(*) de sa civilisation tout entière : son technologisme débridé lui déglingue la clarté de vue, et sa lecture du monde en perd de son humaine lucidité.
Donc il est possible que le choix d’Amazon lui tombât sous le sens, que ce fut pour des raisons techniques ou de copain de promo, sans qu’il envisageât la flagrante contradiction entre un projet informatique libre tel que Wikileaks et un prédateur économique tel qu’Amazon
(encore que la notion de “projet informatique libre” soit discutable à propos des “wikis”. Le fonctionnement interne de Wikipedia et ses dérivés est un large théâtre des mêmes petitesses humaines qu’on retrouve partout ailleurs, avec en pire, cette impunité du monde virtuel qui ne vous répondra jamais avec une bonne baffe bien sentie. Les projet GNU ou Linux sont de bien meilleurs exemple, mais c’est un autre débat, du même ordre que “l’essor par les pionniers et le déclin par leurs petits enfants”)
M Assange est un pur fruit de ce système, tout en étant probablement persuadé du contraire, et même qu’une telle horreur n’est pas possible.
C’est à mon sens le point faible premier des révolutionnaires (M Assange étant un révolutionnaire de l’époque, comme MM Baquiast et Grasset nous l’expliquent dans leur /dialogue/) se croire différent de ceux qu’ils combattent. Ils en perdent la lucidité pour comprendre et décider.
LA RÉVOLUTION, C’EST PAS CE QU’ON CROIT
Car aussi délirant et inhumain soit-il dans ses manifestations, le système est le résultat d’un fonctionnement humain collectif, et toute action individuelle contribue à ce collectif qu’on appelle système ; l’action de M. Assange, comme celle d’un député votant aux ordres, comme celle de n’importe qui à n’importe quel moment de sa journée, que ce soit celui qui travaille, celui qui se retourne sur une fille, ou encore celui qui mange bio ou industriel.
Le meilleur moyen pour chacun de nous d’améliorer ce monde, c’est de nous souvenir que nous sommes humains, nous ne sommes que ça mais nous sommes tout ça (**) sans chercher à nous en affranchir, mais au contraire à le percevoir et le ressentir.
Tout le contraire de ce que nous enseigne notre civilisation réduite à son système, donc. Voir les choses depuis qui nous sommes, au rythme de chacun (un des plus importants méfaits du système est de briser l’humanité de nos rythmes et de vouloir tuer le temps) faire les choses en fonction de ce que nous ressentons et percevons.
En ne cherchant pas à être différents de ce que nous sommes, nous nous découvrons très différents de ce que nous croyions être, puisque majoritairement, ce que nous croyons être est d’abord ce que nous renvoient les autres.
En vivant tel que nous sommes, les héros et modèles disparaissent, et avec eux les échelles de valeur collectives que les sociétés veulebnt imposer aux individus : mêmes quand ils sont réels, ils sont des individus dont on ne sait que ce qu’on nous montre, et qu’on ne peut connaître par nous-mêmes, ni à notre façon forgée par notre propre expérience. Héros ou vilain, M. Assange n’est qu’un épouvantail de plus de notre système qui nous éloigne de soi, et M. Assange lui-même s’est bien éloigné de lui en laissant à d’autres le soin de décider où il aura le droit de vivre libre, et s’il y parviendra (quelle étrange liberté que celle-là) Les échelles de valeur ne sont pas toutes mauvaises, tout dépend de leur adéquation avec la nature humaine et la culture du peuple qui s’y conforment. La soupe mondiale nivellante actuelle ne vaut pour personne, même pas pour ceux qui en profitent.
En nous rapprochant de nous-mêmes et en vivant “humainement notre humanité”, chacun à sa façon, nous faisons plus de mal au système qu’en nous opposant à lui. S’opposer à lui est faire de lui la référence, bonne ou mauvaise, et partant de là, nous conformer à une ligne définie par lui, avec la force que nous lui avons donnée (en plus) Vivre sa vie avec chacun ses perceptions et ses façons, c’est devenir sa propre référence. Contrairement à ce qu’on croit aussi, à moins de s’ôter les yeux de la tête ou de s’aliéner, nous ne pouvons pas voir le monde depuis un autre point que celui où on se trouve. On peut comprendre la situation des autres de là où on se trouve, uniquement, et même en se plaçant dans les chaussures de l’autre, on s’y place avec notre propre histoire vécue, pas la sienne. En acceptant cette limite, on accepte aussi fatalement celle de l’autre, qui ne peut pas nous comprendre parfaitement. On trace sa place, ainsi, d’après soi-même, sans s’aliéner et se diluer à un système.
Le système est bien plus vulnérable à ce genre d’évolution de notre part qu’à toute attaque, car sa première force n’est que celle que nous lui donnons, et sa deuxième de nous le faire oublier.
Et là, en théorie, devrait se dérouler une belle conclusion avec une chute et tout, mais j’ai faim.
Bon appétit et bonne fin de semaine.
(*) Quand je dis que c’est ma marotte…
(**) et nous ignorons une bonne partie de ce tout, d’ailleur. Cette observation est tellement vraie qu’elle est même techno-compatible : c’est une base des mathématiques modernes, mais aussi des sciences quantiques et relativistes (Gödel, Heisenberg, Einstein et les autres) Avec elles deviennent possible les micro-processeurs, les écrans plats, les radiothérapies, les observations spatiales…
Laurent Demaret
06/12/2010
@Stephane Eybert
Il n’est pas impossible que le drap bleu recouvrant le célèbre tableau n’ait eu pour autre but que de satisfaire les cameramen qui aiment ce genre de fond uni plutôt qu’un amas de formes comme un tableau de Picasso.
Villepin, gauchiste notoire aux normes de là bas aurait il d’ailleurs laissé faire ?
http://www.weeklystandard.com/Content/Public/Articles/000/000/002/556paocc.asp
Personnellement je ne connaissais pas l’histoire et c’est en voulant en apprendre plus que je suis tombé sur cette explication plausible. Mais celle des aides de camp qui demanderait cette faveur n’est pas si ridicule que l’article voudrait nous le faire croire, je vous l’accorde. Au pire “Se non è vero, è ben trovato” comme je l’ai lu ici déjà.
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