Alex Kara
16/08/2019
Lorsque je lis le texte d'Alastair Crooke, je vois partout la question de l'épuisement des ressources (surtout énergétiques) et ce n'est cité nulle part. Les champs de bataille cités ici tournent autour des réserves d'hydrocarbures.
Si elles sont, comme on l'anticipe depuis un certain temps déjà (1970…) sur le point de s'épuiser, ou au moins de devenir chères, alors les Etats-Unis n'ont en effet plus rien à chercher dans le coin, hormis bien sûr semer la zizanie pour pas cher (ils sont toujours Anglo-Saxons après tout ;) ) et il font alors la bonne chose : ils se retirent.
Ce que je propose ici c'est une grille de lecture basée sur cette hypothèse d'épuisement des ressources, en reprenant aussi des concepts que j'ai découverts sur dde.
Le “choix du feu” se base sur la consommation de réserves fossiles, et non sur une gestion raisonnable des énergies renouvellables. (la première permet la conquête, la seconde beaucoup moins). Toute la civilisation occidentale depuis le XVIIIème sicèle et depuis les années 80 la civilisation mondiale globalisée dépend de ce schéma économique.
Les élites que ce schéma a crée ne vont pas survivre à l'épuisement des ressources, l'inertie technologique et intellectuelle est tout simplement trop forte. Comme pour toute élite, le désir de perpétuer leur status de dominant mène à une fossilisation sociale qui fait que l'élite ne consiste bientôt que d'Héritiers. Les Etats-Unis aujourd'hui sont dirigés par ce qu'il faudrait appeler une “fin de race”, qui empêche toute évolution réelle, utilise le Pentagone pour s'enrichir et placer les fistons (et fistonnes) incapables à des postes qui rappellent les charges à acheter dans l'Ancien Régime. (même chose chez Enron, GE apparemment, etc.)
La puissance des Etats-Unis reposant sur les hydrocarbures (un général francais m'avait dit il y a vingt ans “l'OTAN ce n'est qu'une logistique du carburant”), leur épuisement mène invariablement à leur destruction/remodelage. Tant qu'il y a des hydrocarbures, les Etats-Unis continuent à ne pas s'effondrer, malgré la multiplication des signes avant-coureurs que dde suit méticuleusement.
Trump a-t-il véritablement essayé de refonder le Pentagone ? Non, aucun intérêt. Le F-35 se porte bien-mal comme toujours, les porte-avions de moins en moins mobiles engloutissent toujours des fortunes, l'appareil militaire est perclu de sclérose comme toujours. Tout cela n'a aucun avenir, c'est basé sur les hydrocarbures.
J'avais écrit ici il y a quelque temps que Trump représentait la faction “Souveraine” dont l'effort principal est la “dé-globalisation” et qu'il avait à lutter contre la faction “Impériale” (Démocrates, Républicains et Deep State tous unis) qui au contraire ne sait rien faire d'autre que de globaliser encore et toujours plus. la dé-globalisation est l'anticipation logique de l'épuisement des ressources énérgétiques (et d'autres, les métaux par exemple).
Trump a certainement connu des revers fin 2017 – début 2018 qui ont fait craindre que la faction “Souveraine” avait perdu le bras de fer, et l'on vit par exemple Bolton revenir pour semer la guerre (si possible). La faction "Impériale" peut pavoisier autant qu'elle le veut, si les hydrocarbures s'épuisent elle est tout de même condamnée.
Comme l'est le reste de l'économie mondiale, même là où elle est peu globalisée. On parle ici d'un effondrement majeur. J'aime beaucoup cette présentation imagée de l'effondrement de l'Âge du Bronze Tardif (il y a des sous-titres en français) où on explique entre autres que les armées de l'époque étaient très technicisées mais de ce fait étaient fragiles, et inadaptées à des missions découlant de l'effondrement, comme le maintien de l'ordre :https://www.youtube.com/watch?v=QMBM1qazAXE&t=170s
La fin de l'énérgie fossile bon marché c'est la fin des engrais bon marché et de l'agriculture mécanisée, et de ce fait c'est la famine et la mort pour des milliards d'humains (ben oui). Du coup on voit mal si à terme on pourra vraiment utiliser des armes hypersoniques pour rétablir la situation dans les faubourgs des petites villes confrontées aux pillards et à des criminels-seigneurs-de-guerre (disons, un peu comme la Chine dans l'entre-deux guerres).
Dans cette hypothèse, les Russes peuvent être fiers de leurs armes avancées, elles risquent de ne pas vraiment servir. Notons que pendant ce temps-là les Etats-Unis ont perfectionnés les conflits hybrides, utilisant Facebook (TM) et George Soros (TM) pour créer le désordre à diverses échelles.
patrice sanchez
17/08/2019
n'était destinée au final à nous faire redécouvrir notre part spirituelle sommeillant en chacun de nous !
Une manière de leçon d'humanité pour l'animal homme qui voulut être dieu ou satan, un chaos libérateur pour nos consciences ... ce à quoi nous assistons impuissants, n'est rien de moins que la séparation du bon grain de l'ivraie, la mort du principe du mal qui n'a que trop régné sur notre humanité !
jc
17/08/2019
PhG: "une balance qui bascule sans savoir ce que contient l’autre plateau"
On peut adopter une attitude inconnaissante mais on peut également spéculer.
Il ne fait aucun doute pour moi que les innovations humaines faites depuis -disons- la Renaissance, sont de plus en plus artificielles, et il ne fait guère de doute que la nature finira par reprendre ses droits.
Thom a jadis (début des années 1980?) écrit un article sur l'innovation qui figure dans les anciennes version de l'EU (et peut-être encore dans l'actuelle). Il se termine par un paragraphe intitulé "Décourager l'innovation" dont voici d'abord la dernière phrase:
"Sinon, si nous continuons à priser par-dessus tout l'efficacité technologique, les inévitables corrections à l'équilibre entre l'homme et la Terre ne pourront être -au sens strict et usuel du terme- que catastrophiques."
puis le texte complet:
"Les sociologues et les politologues modernes ont beaucoup insisté sur l'importance de l'innovation dans nos sociétés. On y voit l'indispensable moteur du progrès et -actuellement [années 1980]- le remède quasi-magique à la crise économique présente; les "élites novatrices" seraient le coeur même des nations, leur plus sûr garant d'efficacité dans le monde compétitif où nous vivons. Nous nous permettrons de soulever ici une question. Il est maintenant pratiquement admis que la croissance (de la population et de la production) ne peut être continuée car les ressources du globe terrestre approchent de la saturation. Une humanité consciente d'elle-même s'efforcerait d'atteindre au plus vite le régime stationnaire (croissance zéro) où la population maintenue constante en nombre trouverait, dans la production des biens issus des énergies renouvelables, exactement de quoi satisfaire ses besoins: l'humanité reviendrait ainsi, à l'échelle globale, au principe de maintes sociétés primitives qui ont pu -grâce, par exemple, à un système matrimonial contraignant- vivre en équilibre avec les ressources écologiques de leur territoire (les sociétés froides de Lévi-Strauss). Or toute innovation, dans la mesure où elle a un impact social, est par essence déstabilisatrice. En pareil cas, progrès équivaut à déséquilibre. Dans une société en croissance, un tel déséquilibre peut facilement être compensé par une innovation meilleure qui supplante l'ancienne. On voit donc que notre société, si elle avait la lucidité qu'exige sa propre situation, devrait décourager l'innovation. Au lieu d'offrir aux innovateurs une "rente" que justifierait le progrès apporté par la découverte, notre économie devrait tendre à décourager l'innovation ou, en tout cas, ne la tolérer que si elle peut à long terme être sans impact sur la société (disons, par exemple, comme une création artistique qui n'apporterait qu'une satisfaction esthétique éphémère -à l'inverse des innovations technologiques, qui, elles, accroissent durablement l'emprise de l'homme sur l'environnement). Peut-être une nouvelle forme de sensibilité apparaîtra-t-elle qui favorisera cette nouvelle direction. Sinon, si nous continuons à priser par-dessus tout l'efficacité technologique, les inévitables corrections à l'équilibre entre l'homme et la Terre ne pourront être -au sens strict et usuel du terme- que catastrophiques."
PS: J'ai terminé mon précédent commentaire (article "Réenchanter le monde / Ars magna" de PHP) par "Quelle est notre fonction ici-bas? Imiter des robots conçus par "notre" raison humaine?". Je pense que "Obéir aux robots conçus par "notre" raison humaine?" est plus adéquat car c'est ainsi que je vois les choses rapidement évoluer.
Pour paraphraser PhG ("La sagesse, aujourd'hui, c'est l'audace de la pensée") je pense que la sagesse, aujourd'hui, c'est de s'opposer à "notre" (dé)raison humaine (au moins occidentale).
EricRobertMarcel Basillais
17/08/2019
Je ne suis pas d'accord avec le concept de basculement DE civilisation. Il n'y a qu'une civilisation et un basculement en son sein : les usines sont parties en Chine, en Inde, Au bengladesh et au Vietnam. Principalement.
Il se profile plutôt un basculement de LA civilisation technosphérique dans le quitte ou double technologique : à contrepied de Castoriadis et du premier gauchisme, le choix semble être un slogan un peu différent : Transhumanisme ou Barbarie
Le transhumanisme étant surtout une chimère religieuse élitiste, le gros de la farce capitaliste mondiale en cours est un effondrement dans la Barbarie.
Croire que c'est le Libéralisme ( Poutine) ou bien l'Occident (Xi doit le penser) est une grossière erreur occidentaliste un peu masochiste ! et pour les nouveaux oligarques du monde, c'est leur moment d'hubris : ils ont besoin de revanche, mais leur psyché est étrangère à la marche vers la désintégration.
Les signes de déstabilisation peuvent être ici ou là des montages G4G OK. Mais quiconque a lu Korybko par exemple, sait qu'une G4G ne s'improvise jamais sur un tissu sain, mais toujours tire parti d'un clivage préexistant et réel : une cicatrice de l'Histoire sur laquelle elle vient gratter et démanger.
C'est le cas de la Chine, de l'Inde, du Japon, des Empires Ottoman ou Perse, du messianisme Talmudique etc…Dans une mesure moins spectaculaire, mais plus facile à observer, c'est aussi le cas en Amérique latine et en Afrique.
Pour reprendre la question des hydrocarbures, il semble que seule la réduction du périmètre puisse laisser espérer une intensification ponctuelle de la technologie.
C'est donc la rupture de contrat social partout. Avant tout.
Dans cette débâcle, on peut assister aussi à des tentatives de restauration des ordres anciens.
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