jc
21/07/2020
(Le prétendu/prétentieux thomien que je suis ne peut que réagir à un article ainsi intitulé.)
Thom appelle catastrophe tout processus de création ou destruction de formes, toute morphogénèse. Et de tels processus peuvent être décrits par la disparition des attracteurs (centres organisateurs) représentant les formes initiales et leur remplacement par capture par les attracteurs représentant les formes finales. (Inutile de dire que selon cette définition la catastrophe est permanente!)
.
1. Certaines catastrophes sont formalisables, en particulier le processus à quatre temps décrit dans un précédent commentaire (associé à la catastrophe "fronce"). D'autres ne le sont pas, et c'est le cas des catastrophes généralisées, sans doute en cause dans la présente crise ("Quel exemple de catastrophe généralisée que la décomposition d'un grand empire, comme celui d'Alexandre.", SSM, p.323), catastrophes à propos desquelles Thom écrit (SSM, p.326):
"Il n'est pas impossible, après tout, que la science approche d'ores et déjà de ses ultimes possibilités de description finie; l'in-descriptible, l'in-formalisable sont maintenant à nos portes.",
ce qui pourrait conforter la position d'inconnaissance de PhG. Mais Thom continue:
"Il nous faut relever le défi. Il nous faudra trouver les meilleures manières d'approcher le hasard, de décrire les catastrophes généralisées qui brisent les symétries, de formaliser l'informalisable. Dans cette tâche, la cervelle humaine, avec son vieux passé biologique, ses approximations habiles, sa subtile sensibilité esthétique, reste et restera longtemps encore irremplaçable. (...) Nos méthodes, trop indéterminées en elles-mêmes, conduiront à un art des modèles et non à une technique standard explicitée une fois pour toutes." (Je rappelle que SSM est sous-titré "Essai d'une théorie générale des modèles".)
2. Les lecteurs de ce site savent l'importance que PhG accorde à la psychologie. En reparcourant le paragraphe concernant "l'art, le délire et le jeu (trois grands types d'activité humaine)", je tombe sur (SSM, p.319):
"De plus, le mélange des substrats a pour effet de détruire les chréodes les plus raffinées à centre organisateur de grande codimension, au profit de champs plus primitifs qui sont plus stables et plus contagieux. Ainsi s'installe une dynamique mentale syncrétiste à structures relativement simplistes qui constitue ce que l'on appelle habituellement la pensée délirante."
L'actualité politique foisonne visiblement d'exemples de mélanges de substrats engendrant des pensées collectives délirantes obtenues par destructions d'organisations plus raffinées. Pour moi ces destructions sont typiquement des catastrophes psychiques généralisées.
Nicolas Prenant
21/07/2020
Monsieur Philippe Grasset. Je vous cite régulièrement sur mon blog, et tant pis si ce que je vais écrire est perçu comme une vile flatterie.
Je viens très régulièrement vous lire, quels que soient les sujets que vous abordez. Oh, parfois je survole un peu, mais en tout cas j'admire votre capacité à conserver hauteur, recul, et parfois humour en toute circonstance, même si je comprends bien que vous ne vous excluez pas de cette situation présente que nous vivons tous, par la force des choses.
Je ne parviens pas, quant à moi, à ne pas me laisser emporter, parfois, par le vent puissant de l'agitation mentale, brindille que je suis dans crise d'effondrement du système et de notre psychologie, sans toutefois sombrer dans l'affectivisme envahissant comme une jungle vietcong dans laquelle nous serions tous un peu perdus.
J'ai pu lire ici et là des gens flancher, cela était patent dans leurs publications, dont certains sonnent même comme une sorte d'appel à l'aide… Le moment que nous vivons m'agite assez profondément, bien que ce ne soit pas mon genre de céder à ce genre d'élan malheureux, mais quand on est poussé dans le dos…
C'est pourquoi il est fort appréciable de trouver si souvent ici un phare de raison et d'analyse distanciée et souvent originale… et je ne m'étends pas plus sur mes épanchements du jour, seulement pour dire que vos articles peuvent être une véritable mesure barrière contre certains emportements improductifs de la psyché.
jc
22/07/2020
Thom: "Il serait tentant d'envisager l'histoire des nations comme une suite de catastrophes entre formes métaboliques; quel exemple de catastrophe généralisée que la décomposition d'un grand empire comme celui d'Alexandre." (SSM, p.323).
En relisant les quelques pages consacrées aux catastrophes généralisées (SSM pp.101 à 107) (qui en tentent une première classification), Thom distingue les catastrophes cataboliques ("quand un attracteur pluridimensionnel se désagrège au profit d'attracteurs de dimension plus petites, on a alors affaire à une catastrophe catabolique" (...) les catastrophes anaboliques conduisant à la formation d'attracteurs de dimension plus grande; (...) A priori, les seuls exemples plausibles de catastrophes anaboliques ne se rencontrent qu'en biologie (télophase de la mitose)."
La décomposition en cours de notre civilisation et les exemples de pensée délirante sont pour moi des catastrophes cataboliques (PhG les qualifierait peut-être d'entropiques). La civilisation qui lui succédera sera-t-elle dirigée par une cause finale (telos=but)?
Bernanos: "Une société meurt si elle substitue les moyens aux fins." (la technique¹ et le fric comme causes finales, le pouvoir temporel qui se substitue à l'autorité spirituelle…)
Thom: "Dans les sociétés c'est la fonction qui crée l'organe, ça ne fait aucun doute; et je pense aussi en biologie." (Court métrage de JL Godard sur Thom (40') )
¹: Jacques Ellul (cité de mémoire): "Toutes les civilisations ont sacralisé la nature. Sauf la nôtre, qui a choisi de sacraliser ce qui la désacralise, à savoir la technique".
patrice sanchez
23/07/2020
Nous sommes arrivés à la fin d’un cycle, le cycle du matérialisme avec les découvertes des territoires inaugurées par les grands navigateurs et les scientifiques alchimistes par la suite avec les grandes inventions, un cycle où l’homme voulut se prendre pour dieu ou satan sous l’effet de son hubris sans limite !
Cette idéologie moderne délirante où une petite partie de la population mondiale a vécu aux dépens d’un tiers et d’un quart monde spolié, bafoué et génocidé par des razzias sans cesse accrue a fait son temps semble t’il ! Dans peu de temps nous pourrons dire que nous sommes tous des Palestiniens !
Nicolas de Cues nous a parlé de la docte inconnaissance, ce savoir/mode de pensée secret connu des initiés et des prophètes, un savoir qui nous vient du coeur et de l’esprit, ou l’esprit chevaleresque des chevaliers termpliers avec ce deuxième chevalier allant chevauchant sur le destrier qui n’était autre que l’âme soeur inspiratrice et protectrice, ou bien l'inconnaissance poétique de ce cher Mr Grasset qui lui délivre l’intuition venue des profondeurs de son être le plus intime !
Ce que nous vivons présentement n’est rien d’autre que l’entropie terminale du principe du mal qui n’a que trop régné, un reset cyclique ( pendant que les zélites zombis nous préparent un reset foireux du doigt et de la lune ) et cosmique prophétisé par toutes les religions et les prolégomènes au retour de la spiritualité innée de la pensée volontaire du bien et de l’amour inconditionnel … j’ai d'ailleurs découvert que Nietzsche, le dernier alchimiste de la libre pensée, nous avait laissé la prophétie du retour des âmes soeurs éternelles par la grâce des cycles cosmologiques de l'univers,
J’étais athée avant mon AVC en 1995, petit à petit je me suis spiritualisé en ayant une approche psychologique et holistique du monde et en m’intéressant au phénomène des synchronicités accompagné d’une vie morale et saine, je me suis rendu compte progressivement que je pouvais avoir prise sur ma destinée par delà bien et mal !
C’est à la portée de tout un chacun, il faudra en passer par un déconditionnement pour en arriver à la spiritualité de la libre pensée, il suffit d’aller voir les émissions en streaming “ nus et culottés ‘ où deux jeunes zigottos partent à l’aventure en se fixant à chaque fois un objectif bien improbable à atteindre, et ils y arrivent immanquablement à coups sûrs en créant des synchronicités incroyables avec la complicité de la bienveillance des gens qu’ils croisent sur leurs chemin !
Preuve que nous sommes tous interreliés par ce fascinant monde quantique créateur de réalités et que pour atteindre un tel état de lâcher prise, nous ne serons condamnés dans un avenir proche qu’à nous entraider et à nous aimer indéfectiblement comme tous les prophètes nous en auront laissés le témoignage !
DE LA ” DOCTE INCONNAISSANCE “
“
Je pense aux Alchimistes et à leurs figure tutélaire Messagère des dieux, Hermès
Trismégiste. J’emprunterais à Nicolas de Cues, le penseur allemand de la fin du
moyen âge, l’expression “ la Docte Ignorance “ ou inconnaissance pour parler de
nos univers intimes ” des profondeurs psychologiques quantiques “, cette
reconnaissance de l’ignorance, ce savoir de ne pas savoir qui permet d’accéder à
ces informations Universelles intuitives que Nicolas de Cues lie à la sagesse antique
de Pythagore, de Socrate, d'Aristote et à celle biblique de Salomon !
Jung et Pauli auraient-ils été les précurseurs d’une science universelle ?, ce que j’ai nommé le cap de l’espèrance retrouvée en la guidance et en la reliance quantiques ce qui .accréditerait la thèse que nous pouvons influer sur notre destinée en nous réappropriant nos univers intimes et par dessus tout, en ayant une autre approcheTemporelle, le temps et les saisons si bienveillants à notre égard à la condition de prendre le temps de vivre et de penser ... en nous reconnectant avec le Temps plutôt que de courir après lui ! cf les ouvrages de Paul Virilio le philosophe “ théoricien de la vitesse “..
Certains physiciens nous disent que les trous noirs sont distribués de l’échelle quantique à l’échelle cosmologique selon une loi fractale et un
modèle holographique. C’est ainsi que notre univers inclut des trous noirs plus petits, tout en étant lui-même inclus dans un trou noir plus grand. Il est structuré en couches de création qui communiquent de
manière quantique. Ses propriétés holographiques impliquent qu’il y a autant d’informations dans tout l’univers que dans chaque point qui le compose.
Ce dédale de pensée pour en arriver au très jeune pianiste de jazz Joey Alexander
que je viens de découvrir ! A huit ans, il donnait des concerts au cours desquels il reprenait des morceaux des plus illustres disparus, à faire pâlir un pianiste
professionnel, tant déjà, il avait une maîtrise exceptionnelle de son instrument ! Je
me plais à penser que cette “ inconnaissance quantique innée “ rendue possible
grâce à la pureté de l’âme de l’enfance qui permet d’accéder à la profondeur insondable de notre intériorité avec ce champs akashique dédoublé, en miroir, ce « Tout ce qui est en bas, est comme tout ce qui est en haut, et tout ce qui est en haut
est comme tout ce qui est en bas, afin d'accomplir les miracles de la Chose Une », ce Mystère qui dépasse tout entendement de pensée matérialiste nous permettrait d’accéder à cette quasi divinité qui se trouve en chacun de nous par la magie du
Principe Holographique Fractal ?!
Dernièrement je regardais le beau film : L’homme qui défiait l’infini “ , SYNOPSIS :
“La vie de Srinivasa Ramanujan, un des plus grands mathématiciens de notre temps. Élevé à Madras en Inde, il intègre la prestigieuse université de Cambridge en Angleterre pendant la Première Guerre mondiale et y développe de nombreuses théories mathématiques sous l'égide de son professeur G.H. Hardy.”
A la fin du biopic, il révèle au prof Hardy que dans ses rêves, sa déesse hindoue lui murmure les formules mathématiques ! Un principe de l’inspiration que Nietzsche:Zarathoustra nomme Ariane,” il y a un poème, un seul, mais décisif poème chargé de symbolisme dionysiaque : la « Plainte d’Ariane ».”
Et je re-citerais Alexandre Grothendieck dans son chapître : ” Liberté créatrice et
œuvre intérieure. Son sens est que la création se distingue d'une simple production
par le fait qu'en plus de l'oeuvre extérieure, elle s'accompagne d'une « oeuvre
intérieure » qui en constitue l'aspect essentiel. L'acte créateur, ou le processus ou le
travail créateur, est celui qui transforme l'être qui l'accomplit ou en lequel il
s'accomplit. Pour apprécier la qualité créatrice d'un acte ou d'une activité, la nature
de l'oeuvre extérieure est accessoire. Une telle oeuvre peut même être absente,
comme dans le cas de l'activité créatrice du très jeune enfant. Ainsi, non
seulement tout acte créateur dépend de notre état intérieur mais son effet est
principalement une transformation intérieure. Pour Grothendieck, l'essentiel est
l'intériorité. (§46) Il précise que, dans son aspect « intérieur » qui est l'aspect
essentiel, la création est un acte ou un processus par quoi se forme ou se
transforme une connaissance. La création vaut ce que vaut la connaissance qu'elle
fait apparaître ou qu'elle approfondit ou renouvelle. Une connaissance au sens que
Grothendieck donne à ce mot n'est pas une information ni un savoir. Une
connaissance est chose intimement personnelle, elle diffère de la connaissance que
peut avoir tout autre être, fût-ce au sujet de la même réalité « objective » du monde
extérieur. Elle fait partie de l'être comme sa chair même, elle fait corps avec lui. Il y a
trois types de connaissances - charnel, mental (c'est-à-dire intellectuel ou artistique)
et spirituel - et donc trois types de créations. (§47 et note 48) Puisque son aspect le
plus essentiel est une transformation intérieure, tout travail créateur est une
maturation de l'être qui l'accomplit ou en lequel il s'accomplit. La maturité d'un être
est la somme des connaissances qui se sont créées en lui au cours de son passé.
Chaque acte créateur crée aussi de la connaissance dans l'être, telle une sève
subtile imprégnant le fruit et le faisant mûrir. La maturation est un processus créateur
et toute création s'accompagne d'une oeuvre intérieure de maturation. (note 48)
Dans la mesure où la maturation est un processus créateur, elle est une oeuvre
poursuivie en commun avec Dieu dans une sorte de dialogue créateur entre Dieu et
l'âme. Le caractère « créateur » de ce dialogue réside surtout en Dieu car l'âme est
réticente à se transformer. La maturation progressive de l'âme a pour effet de lui
donner des moyens toujours plus délicats et multiples pour participer plus
pleinement, de façon véritablement créatrice, à ce dialogue. Mais l'âme a toute
liberté pour récuser à tout moment ces moyens, les bloquer et les refouler en
refusant le dialogue créateur avec Dieu. Au contraire, en acceptant librement les
moyens spirituels qui lui sont impartis dans son état de maturité présent, elle est
fidèle à elle-même ou, ce qui revient au même, fidèle à sa mission, si humble
soit-elle. Ainsi seulement elle entre dans la liberté créatrice. Alors notre existence,
dans la mesure où elle est créatrice, c'est-à-dire où elle est bel et bien une « oeuvre
», est oeuvre commune de Dieu et de nous. (note 24 et note 49) ”
Friedrich Nietzsche qui avait écrit en Mars 1885 dans le Tome 5 de sa correspondance : “ Il est difficile de savoir qui je suis : Attendons 100 ans : Peut-être y aura t’il d’ici là un connaisseur génial des âmes qui exhumera Monsieur F.N ? … Des oeuvres de cette nature ont de grandes ambitions, elles ont besoin de temps, Il faut d’abord que l’autorité de plusieurs siècles intervienne pour qu’on lise quelque chose correctement… “
« Je reviendrai, avec ce soleil et cette terre, avec
cet aigle et ce serpent, — non pour une vie
nouvelle, ou une meilleure vie, ou une vie
ressemblante ;
— à jamais je reviendrai pour cette même et
identique vie, dans le plus grand et aussi bien le
plus petit, pour à nouveau de toutes choses
enseigner le retour éternel, — »
... Les temps sont plus que mûrs pour enseigner le
retour des âmes soeurs éternelles ... Ayons foi en la providence, ce principe du bien et de l'amour qui n'aura pas fini de nous émerveiller et qui fera prendre prendre conscience à l'humanité qu'elle est inter reliée et connectée à tout ce qui existe et à ce champs akashique de la mémoire universelle !
patrice sanchez
23/07/2020
Qui, en dehors de moi, sait ce qu’est Ariane!...
De toutes les énigmes de cette sorte, nul, jusqu’ici, n’avait la solution, et je doute même que personne y ait seulement vu une énigme ? »
Où Nietzsche fait parler Ariane, son énigmatique âme soeur éternelle, ce principe labyrinthique par delà bien et mal permettant d’accéder à la transcendance divine ...
Extrait de "Nietzsche et sa plainte d’Ariane " du philologue allemand Karl Reinhardt, (1886 - 1956) : ” Mais il y a une exception, et une exception qui, de toute évidence, suffit à imprimer à tout le recueil sa marque, il y a un poème, un seul, mais décisif poème chargé de symbolisme dionysiaque : la « Plainte d’Ariane ». En fait, l’énigme ne fait ici que s’ajouter à l’énigme ! Car le symbolisme de Dionysos, dans
ce poème, ne survient qu’après coup, on serait presque tenté de dire qu’il lui est imposé artificiellement ! En effet, cette « Plainte » se lit déjà sous une première forme dans la quatrième partie de Zarathoustra — mais ce n’est alors que l’un des
chants de l’ « Enchanteur » nietzschéen, et non point la plainte d’une femme; de plus, il n’y est question ni de Dionysos, ni d’Ariane… Si l’on compare les deux textes, ce qui frappe avant tout dans le deuxième est le remplacement du masculin par le féminin “ lien pdf joint ci-dessous.
PLAINTE D’ARIANE :
Qui me réchauffera, qui m’aimera encore? Donnez-moi vos chaudes mains! un brasero pour dégeler mon cœur! Frissonnante, étendue de tout mon long, telle un moribond dont on réchaufferait les pieds, et secouée, hélas! de fièvres inconnues, frémissant sous les traits glacés et acérés du gel, traquée par toi, pensée!
Innommable! Dissimulée! Atroce! Toi qui chasses voilée de nuées! Clouée au sol par tes éclairs, œil narquois qui du fond des ténèbres m’épie! Ainsi, je gis, je me plie et me tords, torturée de tous les éternels tourments, frappée par toi, le plus cruel des
chasseurs, toi inconnu — dieu… Frappe plus profond! Frappe une fois encore! Transperce et broie ce cœur! Pourquoi me tourmenter ainsi avec tes flèches
émoussées? Que regardes-tu de nouveau, sans te lasser du tourment des humains, avec des yeux divins pleins d’éclairs méchants? Ce n’est pas tuer que tu veux, mais torturer — torturer seulement? A quoi bon me tourmenter, moi, dieu moqueur et
mauvais que je ne connais pas? Ah, ah! voici qu’à la mi-nuit tu t’approches en tapinois?... Que cherches-tu? Dis! Tu me presses! Tu m’étouffes! Ah! Tu me serres
de trop près! Tu m’écoutes respirer, tu guettes les battements de mon cœur, Jalousement! — et de quoi donc jaloux? Va-t’en! Va-t’en! Cette échelle, pourquoi?
veux-tu pénétrer dans mon cœur, te glisser dans mes pensées les plus cachées?
Effronté! Inconnu! Voleur! Que veux-tu gagner par ce vol? Que veux-tu apprendre en espionnant? que veux-tu extorquer par la torture, ô tortionnaire! toi —
Dieu-bourreau! Ou bien, me faudrait-il, comme un chien, me rouler à tes pieds? Offerte, emportée, hors de moi, et d’amour pour toi — frétiller? Tu perds ton temps! Transperce-moi encore! Trop cruel aiguillon! Je ne suis pas un chien — mais ton gibier seulement, ô trop cruel chasseur! Mais la plus fière de tes prises, ô voleur dissimulé dans les nuées!... Parle enfin! O toi, voilé d’éclairs! Inconnu! Dis! Que
veux-tu donc, voleur de grands chemins — de moi? Comment? Une rançon? Quelle rançon veux-tu? Sois exigeant — c’est le conseil de ma fierté! Et sois bref — conseil de mon autre fierté! Ah ah! c’est moi que tu veux? Moi? Moi — tout entière?.... Ah ah! Et tu me tourmentes, fou que tu es, tu brises ma fierté par tes tourments?
Donne-moi de l’amour — qui me réchauffera encore? qui encor, m’aimera? donne-moi tes chaudes mains, un brasero pour dégeler mon cœur! Donne-moi à
moi, la plus seule, à qui les glaces, hélas! sept épaisseurs de glaces ont appris à languir après des ennemis même, oui, de vrais ennemis, donne-moi, oui livre, ô plus cruel des ennemis… à moi — toi-même!... Parti! Il s’est enfui, mon seul compagnon,
mon grand ennemi, mon inconnu, mon dieu-bourreau!... Non! Reviens! Avec tous tes
tourments! Toutes mes larmes en torrent s’élancent vers toi et l’ultime flamme de mon cœur brûle pour toi. Oh, reviens, mon dieu inconnu! Ma douleur\ Mon ultime bonheur!... (Un éclair. Dionysos apparaît, dévoilant sa beauté.) smaragdine Dionysos : Sois raisonnable, Ariane!... Tu as de petites oreilles, tu as mes oreilles : accueilles-y parole sensée! — ne faut-il pas commencer par se haïr, lorsque l’on doit
s’aimer?... Je suis ton labyrinthe… traduction Jean-Claude Hémery
Karl Reinhardt, Nietzsche et sa « Plainte d’Ariane »
https://po-et-sie.fr/wp-content/uploads/2018/08/21_1982_p93_117.pdf
patrice sanchez
23/07/2020
Je me permets de vous joindre le lien du livre de Gaston Bachelard, L'intuition de l'instant.
http://classiques.uqac.ca/classiques/bachelard_gaston/intuition_de_instant/intuition_de_instant.html
La durée intime, c'est toujours la sagesse. Ce qui coordonne le monde, ce ne sont pas les forces du passé, c'est l'harmonie tout en tension que le monde va réaliser. On peut parler d'une harmonie préétablie dans les choses, il n'y a d'action que par une harmonie préétablie dans la raison. Toute la force du temps se condense dans l'instant novateur où la vue se dessille, près de la fontaine de Siloë, sous le toucher d'un divin rédempteur qui nous donne d'un même geste la joie et la raison, et le moyen d'être éternel par la vérité et la bonté.
Gaston Bachelard.
Qu'est-ce que le temps ? Que faut-il entendre par « durée », « instant », « moment » ? Y a-t-il un fondement à la réalité ? Pour Gaston Bachelard, la vérité est avant tout une histoire, une perception du vrai, admise aujourd'hui, niée demain ; le monde est imaginé avant d'être vu et remémoré.Un essai limpide, qui est aussi une excellente introduction à une philosophie originale où le poème et le théorème ne s'excluent pas. Un hommage de la pensée à la pensée.
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