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Article : De l’État-civilisation(nel)

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jc

  07/10/2022

PhG :
- " Ce que nous dit Guénon et ce que nous disent les doctrines métaphysiques de la Tradition, c’est que l’humanité aussi obéit à des cycles (...) et qu’actuellement nous sommes à la fin d’un cycle… »

- "Il est évident que cette idée de “civilisation” accolé à une nation contient le concept de souveraineté qui est depuis longtemps le cri de ralliement des adversaires du globalisme, car c’est bien également de l’affrontement contre le globalisme et l’hyperlibéralisme dont il est question avec l’ État-civilisationnel. Mais la souveraineté est un concept assez vague dans son extension pour s’appliquer à nombre de matières ; dans certains cas, il peut même se retourner ceux qui envisagent de l’employer contre le globalisme. L’idée de “civilisation” est beaucoup plus strictement définie, structurée, multidimensionnels nécessairement ; elle doit inclure la dimension culturelle, la dimension traditionnelle, la dimension spirituelle, toutes choses qui sont pas ensemble incluses dans le concept de souveraineté, dont on dirait volontiers qu’il est plus un outil alors que la “civilisation“ est une fin en soi, une essence.".

Pour moi nous sommes à la fin d'un hémicycle d'action nécessitant de l'énergie agissante (ἐνέργεια) et nous rentrons dans un hémicycle de réaction/passion nécessitant cette fois de l'énergie potentielle (δύναμις) : opposition puissance/acte. L'acte fondateur étant une séparation (positions d'Aristote et de mon gourou Thom), l'acte refondateur sera donc une réunion (une fois que la séparation a été jusqu'à l'ultime diversité composée d'atomes insécables, comme c'est le cas de notre société occidentale où l'atome familial -insécable -même pour Auguste Comte!- a été scissionné pour laisser l'individu seul face à lui-même vivre "comme un porc" -pour reprendre le titre du livre de Gilles Châtelet-).

Séparation, analyse, déduction, catalogie, diversification à partir de l'unité  d'une part; réunion, synthèse, induction, analogie, unification à partir de la diversité d'autre part. Nous sommes à la croisée des chemins et ce qui précède éclaire complètement ce qu'écrit sporadiquement PhG en citant un certain Daniel Vouga, à propos de Maistre et Baudelaire:

«Progresser, pour eux, ce n’est pas avancer, ni conquérir, mais revenir et retrouver… [...] Le progrès donc, le seul progrès possible, consiste à vouloir retrouver l’Unité perdue… ».

Pour moi la pensée occidentale est essentiellement déductive, catalogique; alors que c'est exactement l'inverse pour la pensée traditionnelle chinoise (1) essentiellement inductive et analogique.

Thom parle de ces choses dans "Thèmes de Holton et apories fondatrices" (que l'on trouve dans "Apologie du logos" (1990). Extraits :

"Il n'est pas déraisonnable de voir dans le schéma "unité dans la diversité" la démarche essentielle de la théorisation scientifique, qui vise comme l'on dit maints philosophes de Parménide à Meyerson, à imposer une certaine unité au divers empirique. (...) Au contraire, le schéma "diversité dans l'unité décrit l'analyse descrpitive des phénomènes, l'exploration expérimentale d'un tout empirique. L'opposition synthèse/analyse caractérise aussi cette dyade.".

Mais il omet de parler de la façon de diversifier à partir de l'unité et d'unifier à partir de la diversité ; il omet de mentionner l'harmonie, pour moi essentielle dans l'affaire. J'ai jadis proposé comme nouvelle devise pour la France : Unité - Harmonie - Diversité.

Mais ceux qui prêtent attention à mes commentaires connaissent ma citation thomienne à venir (l'une de mes préférées) qui indique où nous en sommes et le travail à dorénavant faire pour se remettre en position d'un nouvel "acte fondateur" :

"L'image de l'arbre de Porphyre me suggère une échappée en "Métaphysique extrême" que le lecteur me pardonnera peut-être. Il ressort de tous les exemples considérés dans ce livre qu'aux étages inférieurs, proches des individus, le graphe de Porphyre est susceptible -au moins partiellement- d'être déterminé par l'expérience. En revanche, lorsqu'on veut atteindre les étages supérieurs, on est conduit à la notion d' "hypergenre", dont on a vu qu'elle n'était guère susceptible d'une définition opératoire (hormis les considérations tirées de la régulation biologique). Plus haut on aboutit, au voisinage du sommet, à l'Être en soi. Le métaphysicien est précisément l'esprit capable de remonter cet arbre de Porphyre jusqu'au contact avec l'Être. De même que les cellules sexuées peuvent reconstituer le centre organisateur de l'espèce, le point germinal α (pour en redescendre ensuite les bifurcations somatiques au cours de l'ontogénèse), de même le métaphysicien doit en principe parvenir à ce point originel de l'ontologie, d'où il pourra redescendre par paliers jusqu'à nous, individus d'en bas. Son programme, fort immodeste, est de réitérer le geste du Créateur). Mais très fréquemment, épuisé par l'effort de son ascension dans ces régions arides de l'Être, le métaphysicien s'arrête à mi-hauteur à un centre organisateur partiel, à vocation fonctionnelle. Il produira alors une "idéologie", prégnance efficace, laquelle, en déployant cette fonction, va se multiplier dans les esprits. Dans notre métaphore biologique ce sera précisément cette prolifération incontrôlée qu'est le cancer.
"Aristote a dit du germe, à la naissance, qu'il est inachevé. On peut dès lors se demander si tout en haut du graphe on n'a pas quelque chose comme un fluide homogène indistinct, ce premier mouvant indifférencié décrit dans sa Métaphysique; que serait la rencontre de l'esprit avec ce matériau informe dont sortira le monde? Une nuit mystique, une parfaite plénitude, le pur néant? Mais la formule d'Aristote "Premier selon l'être, dernier selon la génération" suggère une autre réponse, théologiquement étrange: peut-être Dieu n'existera-t-il pleinement qu'une fois sa création achevée.".

(1) Pensée qui s'est peut-être depuis assez largement occidentalisée…



 

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jc

  07/10/2022

PhG  (1): "Lorsqu’un officiel chinois, représentant de l’ambassade, lui fit remarquer que la Chine et de nombreux pays d’Asie ne partageaient pas cet enthousiasme [des élites occidentales] pour bien des raisons, et que les partisans du système occidentaliste pourraient “avoir des surprises, dans quelques années, lorsqu’ils verraient l’évolution de cette région”, – entendant par là que cette évolution ne serait pas celle du “système TINA”, – le silence pour toute réponse… (...)

Nous avons cité l’intervention de l’officiel chinois avec une intention à l’esprit, ne doutant pas un instant de la sincérité de son propos, et de la véracité de sa propre conviction, dans l’exposé qu’il fit des intentions de la Chine, de l’Asie, et de l’antique sagesse de cette partie du monde. Nous reconnaissons d’autant plus tout cela que nous pouvons dire notre conviction que l’intervenant se trompait, qu’il se trompe en croyant qu’un modèle de civilisation asiatique rénové s’imposera rapidement, à côté du modèle occidentaliste, éventuellement pour le concurrencer et le remplacer.

Ce n’est nullement que ses arguments de fond ne soient pas justifiés et excellents; ils le sont, ceci et cela, et plus qu’à leur tour. Mais l’intervenant ignore deux choses: combien le modèle occidentaliste est, à la fois, plus puissant qu’il ne croit et plus proche de l’effondrement catastrophique qu’il ne croit.".

Un rapport avec la note de fin de mon .0  : "Mais depuis il est vraisemblable que la pensée chinoise moderne s'est occidentalisée." ?

1 : https://www.dedefensa.org/article/glossairedde-crisis-la-crise-de-la-raison-subvertie